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Date : 20081218

Dossier : IMM-5058-08

Référence : 2008 CF 1394

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 18 décembre 2008

En présence de monsieur le juge Zinn

 

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

JOTHIRAVI SITTAMPALAM

 

 

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

  • [1] La Cour est saisie d’une requête par laquelle le demandeur, à savoir le ministre, tend à obtenir un sursis d’exécution de l’ordonnance par laquelle une commissaire de la Section de l’immigration à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a prononcé la modification des conditions de mise en liberté du défendeur. Pour les motifs dont l’exposé suit, je suis d’avis qu’il doit être sursis à l’exécution de cette ordonnance.

 

 

RAPPEL DES FAITS

  • [2] M. Sittampalam est citoyen sri-lankais. Il a eu avec les responsables de l’immigration une longue série de démêlés dont on trouvera des exposés circonstanciés dans plusieurs décisions de notre Cour; voir Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Sittampalam, [2004] A.C.F. no2152; Sittampalam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2005] A.C.F. no1485; Sittampalam c. Canada (Solliciteur général), [2005] A.C.F. no1734; Sittampalam c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), [2006] A.C.F. no1412; et Sittampalam c. Canada (Citoyenneté et Immigration), [2007] A.C.F. no932. Le bref rappel qui suit des faits les plus pertinents à cet égard est tiré de ces décisions antérieures et du dossier produit devant notre Cour dans la présente requête.

 

Les faits concernant le statut du défendeur au Canada

  • M. Sittampalam est arrivé au Canada en février 1990 et y a présenté une demande d’asile qui a été accueillie. Il y est devenu résident permanent le 17 juillet 1992.
  • Il a été déclaré coupable de trois infractions : (i) manquement à un engagement; (ii) trafic de stupéfiants; et (iii) entrave à l’action d’un agent de la paix.
  • La police a identifié M. Sittampalam comme l’un des chefs du gang A.K. Kannan, l’une des deux bandes tamoules rivales de Toronto. Il a été activement soupçonné, mais jamais déclaré coupable, de nombreuses autres infractions, notamment : tentative de meurtre, agression armée, voies de fait graves, possession d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique, braquage d’une arme à feu et usage d’une telle arme dans la perpétration d’une infraction, menaces, extorsion et traite de personnes.
  • M. Sittampalam a fait l’objet d’un rapport au titre de l’alinéa 27(1)d) de la Loi sur l’immigration, L.R.C. 1985, c. I-2 (l’ancienne Loi), pour avoir été déclaré coupable de trafic de stupéfiants.
  • Il a aussi fait l’objet d’un rapport sous le régime de l’ancienne Loi en tant que personne exerçant des activités de criminalité organisée, au motif de sa participation à la bande A.K. Kannan.
  • Par décision en date du 4 octobre 2004, un tribunal de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié l’a déclaré interdit de territoire canadien pour grande criminalité, au titre de l’alinéa 36(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, c. 27 (la Loi), ainsi que pour criminalité organisée, au titre de l’alinéa 37(1)a) de la Loi. Une mesure d’expulsion a en conséquence été prononcée contre lui.
  • Notre Cour a confirmé la décision de la Commission déclarant le défendeur interdit de territoire canadien; voir Sittampalam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2005] A.C.F. no1485; conf. par Sittampalam c. Canada (Citoyenneté et Immigration), [2006] A.C.F. no1512 (C.A.F.).
  • Le 6 juillet 2006, M. Sittampalam a fait l’objet, au titre des alinéas 115(2)a) et b) de la Loi, d’un avis de danger qui autorisait son refoulement vers le Sri Lanka. Son renvoi ayant d’abord été prévu pour le 24 août 2006, notre Cour a ordonné qu’il soit sursis à l’exécution de cette mesure en attendant l’issue de la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire visant l’avis de danger.
  • Le 28 juin 2007, notre Cour a confirmé la décision selon laquelle le défendeur constitue un danger pour le public au Canada, mais a ordonné le renvoi de cette décision devant le délégué du ministre à seule fin de réévaluation des risques auxquels il serait exposé s’il retournait au Sri Lanka; voir Sittampalam c. Canada (Citoyenneté et Immigration), [2007] A.C.F. no932.
  • Le délégué du ministre a achevé cette réévaluation le 11 janvier 2008, et conclu que le défendeur ne courrait pas de risques s’il rentrait au Sri Lanka. Cette décision a été contestée par une demande de contrôle judiciaire, dont l’audience s’est tenue le 5 juin 2008 et qui n’est toujours pas tranchée. Notre Cour a accordé au défendeur un sursis d’exécution de la mesure de renvoi en attendant l’issue de cette demande de contrôle judiciaire.

Les faits relatifs à la détention du défendeur

  • M. Sittampalam a été arrêté et mis en détention le 18 octobre 2001. Les motifs justifiant son maintien en détention ont été régulièrement contrôlés comme l’exige la Loi. Il a fait l’objet en 2004 de deux ordonnances de mise en liberté, que notre Cour a toutes deux infirmées; voir Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Sittampalam, [2004] A.C.F. no2152. Notre Cour a aussi infirmé des décisions par lesquelles la Commission avait ordonné son maintien en détention; voir Sittampalam c. Canada (Solliciteur général), [2005] A.C.F. no1734; et Sittampalam c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), [2006] A.C.F. no1412.
  • Le défendeur a en fin de compte été mis en liberté le 22 mai 2007, sous des conditions fixées par le commissaire Gratton par ordonnance en date du 19 avril 2007.
  • Les conditions de mise en liberté du défendeur ont été modifiées deux fois avant la modification qui est à l’origine de la présente requête en sursis d’exécution : le 4 octobre 2007, la Section de l’immigration a autorisé une modification de l’ordonnance de mise en liberté de manière à permettre au défendeur de s’installer à Ajax (Ontario), et le 30 janvier 2008, le commissaire Willoughby a apporté une autre modification autorisant une sortie par semaine.

 

L’audience tenue devant la commissaire J. Harnum et la décision de celle-ci

  • [3] En août 2008, le défendeur a demandé de nouvelles modifications aux conditions de sa mise en liberté. Le demandeur s’est alors montré disposé à assouplir quelque peu les restrictions pesant sur M. Sittampalam. Plus précisément, il déclare dans un affidavit produit à la présente instance qu’il a alors consenti aux modifications suivantes :

  • (i) autoriser le défendeur à rester seul à l’intérieur de son domicile;

  • (ii) autoriser le défendeur à sortir seul dans son jardin, à la condition qu’une caution soit présente dans la maison;

  • (iii) permettre au défendeur de faire deux sorties par semaine (d’une durée maximale de quatre heures chacune), sous réserve qu’elles soient autorisées 72 heures à l’avance et qu’il soit accompagné d’une caution;

  • (iv) autoriser le défendeur à accompagner ses enfants à l’école le matin et à aller les chercher l’après-midi;

  • (v) obliger le défendeur à consulter un psychiatre ou un psychologue concernant son état mental et à présenter un rapport à ce sujet dans les six mois.

 

  • [4] M. Sittampalam souhaitait obtenir d’autres modifications, auxquelles le demandeur s’opposait. Le mercredi 8 octobre 2008, une audience a été tenue devant la commissaire Harnum. Le conseil du défendeur a déposé devant la commissaire un mémoire de six pages énumérant les modifications demandées. M. Sittampalam a témoigné, et les conseils des deux parties ont présenté à la commissaire de longs exposés sur les modifications que tendait à obtenir le défendeur. Ce dernier a abandonné ou redéfini certaines de ses exigences au cours de l’audience.

 

  • [5] Le 13 novembre 2008, la commissaire Harnum a déposé son ordonnance sous la forme d’un texte de quatre pages intitulé [traduction] « Ordonnance de mise en liberté », qui a été communiqué aux parties avec une page de couverture portant la mention [traduction] : « Les motifs suivront le 24 novembre 2008 ». Les motifs n’ont cependant pas suivi. Dans l’affidavit présenté à l’appui de sa requête, le demandeur déclare avoir fait de nombreuses démarches pour savoir où en étaient les motifs, mais sans obtenir de réponse utile. Cette absence de réponse et la non-communication de motifs peuvent s’expliquer par le fait que la commissaire Harnum a quitté ses fonctions à la Section de l’immigration peu après avoir déposé l’ordonnance modifiant les conditions de mise en liberté du défendeur.

 

  • [6] Le demandeur soutient que l’ordonnance de la commissaire Harnum compromet la capacité de l’Agence des services frontaliers du Canada à surveiller adéquatement le défendeur; c’est pourquoi il a formé la présente requête tendant à obtenir un sursis d’exécution de cette ordonnance en attendant l’issue de la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire y afférente.

 

ANALYSE

  • [7] Le critère applicable au point de savoir si le demandeur a droit à une injonction provisoire différant l’exécution de l’ordonnance de la commissaire Harnum est celui qu’ont exposé la Cour suprême du Canada dans RJR-MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311, et la Cour d’appel fédérale dans Toth c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1988), 86 N.R. 302 (C.A.F.). Le demandeur doit établir :

  • (i) qu’il existe une question sérieuse à juger;

  • (ii) qu’il subirait un préjudice irréparable si on lui refusait l’injonction;

  • (iii) que la prépondérance des inconvénients milite pour l’octroi de l’injonction.

Ce critère est conjonctif : le demandeur doit satisfaire à ses trois volets pour avoir droit à la réparation qu’il tend à obtenir.

 

  • [8] Le demandeur affirme que constituent des questions sérieuses mises en litige par la demande sous-jacente les points de savoir :

  • (i) si les motifs exposés par la commissaire sont suffisants;

  • (ii) si la commissaire a fait une erreur en s’écartant des ordonnances antérieures de ses collègues sans y avoir été amenée par des raisons claires et convaincantes;

  • (iii) si la commissaire a porté atteinte au droit du demandeur à l’équité procédurale en prononçant des mesures de modification ou de suppression des conditions de mise en liberté que le défendeur n’avait pas demandées et qui n’avaient pas été en question dans le contrôle de détention du 8 octobre 2008;

  • (iv) si la commissaire a fait une erreur, et ainsi attenté au droit du demandeur à l’équité procédurale, en apportant aux conditions de mise en liberté des modifications autres, et moins restrictives, que celles sollicitées par le défendeur.

 

  • [9] Une question sérieuse est une question qui n’est ni frivole ni vexatoire. J’estime que chacun des quatre points soulevés par le demandeur est une question sérieuse mise en litige par la demande sous-jacente. Je constate notamment que l’allégation reprochant à la commissaire d’avoir modifié dans son ordonnance des conditions antérieures de mise en liberté qui n’étaient pas en cause devant elle et sans avoir prévenu aucune des parties de son intention de ce faire tend à établir un grave manquement à l’équité procédurale. En outre, le fait que l’ordonnance considérée reste jusqu’à maintenant dépourvue de motifs soulève une autre question sérieuse au regard de l’article 169 de la Loi, qui dispose que les décisions de cette nature doivent être motivées.

 

  • [10] Le demandeur a avancé plusieurs allégations de préjudice irréparable, qui se répartissent pour l’essentiel entre les catégories suivantes :

  • (i) Le relâchement des conditions de mise en liberté mettra en péril la sécurité du public au Canada, étant donné que le défendeur a été déclaré constituer un danger pour cette sécurité.

  • (ii) Ce relâchement pourrait aggraver les risques auxquels le défendeur est exposé, étant donné qu’il a déjà fait l’objet de menaces et d’agressions, et que son équilibre psychologique paraît avoir récemment souffert, comme en témoignent les deux surdoses qu’il a prises et ses menaces de suicide.

  • (iii) Ce relâchement augmente la probabilité que le défendeur ne soit pas constamment surveillé, de sorte qu’il risque de disparaître ou d’omettre de se présenter pour son renvoi dans le cas où serait rejetée sa demande de contrôle judiciaire en instance.

 

  • [11] Le préjudice invoqué à l’alinéa (ii) ci-dessus, c’est-à-dire le préjudice pour le défendeur, ne me paraît pas remplir le critère établi par la jurisprudence, puisqu’il n’est pas évident qu’il représenterait également un préjudice pour le demandeur. On pourrait faire valoir, il est vrai, que le demandeur a l’obligation de protéger toute personne soumise à sa surveillance, de sorte qu’un préjudice pour le défendeur serait aussi, indirectement, un préjudice pour le demandeur. Cependant, l’opposition du demandeur aux modifications que le défendeur tendait à obtenir n’était pas motivée par son souci du bien-être de ce dernier.

 

  • [12] Le demandeur ne m’a pas convaincu non plus que la possibilité que le défendeur disparaisse ou omette de se présenter pour son renvoi soit plus qu’une conjecture. Il n’a pas été produit devant la Cour d’éléments de preuve clairs et convaincants qui établiraient la probabilité de ce préjudice. Je rappelle à ce propos les observations suivantes formulées par la Cour dans Ramratran c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2006 CF 377, [2006] A.C.F. no472 (QL) :

Étant donné qu’il est statué sur un sursis d’exécution ou une injonction interlocutoire avant que soient décidés les points soulevés dans la procédure de contrôle judiciaire, la preuve de l’existence d’un préjudice irréparable doit être claire et dépasser les conjectures; la Cour doit être persuadée que, si le redressement demandé n’est pas accordé, il en résultera un préjudice irréparable.

 

(Non souligné dans l’original.)

 

  • [13] Cependant, malgré mes conclusions sur les allégations (i) et (ii), les faits exposés devant la Cour me convainquent de l’existence d’une preuve claire et convaincante que le relâchement, tel qu’ordonné par la commissaire, des conditions de la mise en liberté du défendeur entraînerait un préjudice irréparable. La preuve claire et convaincante qui étaye cette conclusion consiste, premièrement, dans la conclusion du délégué du ministre, confirmée par notre Cour, que M. Sittampalam constitue un danger pour la sécurité publique; et deuxièmement, dans le fait que le défendeur s’est vu privé de la possibilité de présenter des observations à la commissaire concernant certaines des conditions dont elle a ordonné la modification, comme en témoigne l’exemple suivant.

 

  • [14] L’ordonnance de mise en liberté précédente portait que M. Sittampalam devait rester à l’intérieur de son domicile, sauf disposition contraire des conditions y fixées. Il lui était permis de faire une sortie par semaine, de durée limitée, sous réserve d’un préavis de 72 heures et d’une surveillance ininterrompue par un accompagnateur. L’ordonnance d’origine énumérait les personnes autorisées à agir comme surveillants. M. Sittampalam demandait une modification qui lui permît de s’absenter de son domicile pour accompagner ses enfants à l’école et de l’école à la maison, ainsi que pour chercher un emploi et pour travailler. Au cours de l’audience, le conseil de M. Sittampalam a abandonné la demande relative à l’emploi, ajoutant que le défendeur se présenterait de nouveau devant la Section dans le cas où il souhaiterait chercher un emploi à l’extérieur de chez lui (voir la page 143 de la transcription de l’audience tenue devant la commissaire). Cependant, le défendeur n’a pas demandé la modification des conditions relatives au préavis nécessaire pour les sorties ou à l’exigence d’accompagnement par un surveillant. On ne s’étonnera donc pas qu’il n’ait pas présenté d’observations sur ces points : ils n’étaient tout simplement pas en litige devant la commissaire. Celle-ci, néanmoins, a réduit à 24 heures la durée du préavis à donner au demandeur des sorties du domicile, supprimé entièrement la nécessité de la surveillance, et autorisé le défendeur à quitter son domicile n’importe quand entre 6 et 23 heures, sous réserve du préavis à la durée modifiée.

 

  • [15] Les conditions précédentes de la mise en liberté de M. Sittampalam se rapprochaient de celles d’une assignation à résidence. Son conseil les a qualifiées de pénibles et d’attentatoires à la vie privée. Peut-être l’étaient-elles, mais un commissaire de la Section les avait fixées après avoir donné aux deux parties la possibilité de présenter des observations sur leur caractère justifié ou non. Dans la présente espèce, la commissaire a assoupli ces conditions de sa propre initiative, sans qu’aucune des parties ne le lui ait demandé ni ne lui ait présenté d’observations. À mon sens, la commissaire a ici porté atteinte au droit absolu de chaque partie de présenter des observations sur les conditions particulières de mise en liberté qu’elle examinait. Chacune des parties a subi un préjudice irréparable par suite directe de la manière dont la commissaire a agi. Rien ne peut compenser la privation du droit de présenter des observations avant la mise en liberté du défendeur sous ces conditions assouplies. La Cour doit donc accorder le sursis d’exécution demandé afin de prévenir ce préjudice irréparable pour les parties.

 

  • [16] Il s’agit là d’un préjudice différent du préjudice pour le public invoqué par le demandeur dans les conclusions écrites qu’il a présentées à la Cour. Le défendeur soutient à ce propos qu’il n’existe aucune preuve récente tendant à établir que les conditions assouplies de sa mise en liberté causeraient un quelconque préjudice au public. Je ne puis souscrire à cet argument. S’il est vrai que le risque de préjudice peut s’être atténué avec le temps, le fait incontournable est que le défendeur a constitué et continue de constituer un danger pour la sécurité publique, comme le ministre l’a établi. Le défendeur s’appuie dans une large mesure sur le passage suivant du paragraphe 17 de la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Sittampalam, 2004 CF 1756, [2004] A.C.F. no2152 (QL), rendue par le juge Blais, alors membre de notre Cour :

Si l’un des motifs de la détention du défendeur est qu’il constitue un danger pour la sécurité publique, il se peut que le danger pour la sécurité publique se dissipe en raison de la durée de la détention ou que la preuve qui appuie l’ordonnance de détention devienne désuète. La durée de la détention est correctement prise en compte à l’égard de la menace qui se dissipe ou de la preuve qui est désuète indépendamment de la question de savoir si la longue détention résultait d’un retard causé par le défendeur lui-même en l’espèce. La responsabilité de la Commission, si elle conclut effectivement que la preuve est désuète compte tenu du temps qui s’est écoulé, est une question différente et elle sera traitée ci-après.

 

Dans ce passage, le juge Blais analysait la situation du défendeur en tant que détenu avant que le ministre n’eût émis à son égard un avis de danger au titre de l’article 155. Or cet avis portait que M. Sittampalam constituait [traduction] « un danger à la fois présent et futur pour le public sous le régime de l’alinéa 115(2)a) de la LIPR […] » (non souligné dans l’original). Notre Cour a rejeté la contestation de cette conclusion par M. Sittampalam. Étant donné, donc, l’avis du ministre et la conclusion de notre Cour, on peut dire que la mise en liberté du défendeur sous des conditions qui n’ont pas été pleinement débattues devant la commissaire entraînerait un préjudice irréparable pour la sécurité publique.

 

  • [17] J’estime enfin que la prépondérance des inconvénients favorise le demandeur. La bonne application des dispositions de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés est d’intérêt public, intérêt qui, à mon sens, l’emporte dans la présente espèce sur celui du défendeur.

 

  • [18] Pour tous ces motifs, le demandeur est déclaré avoir rempli le critère à trois volets, et il sera sursis à l’exécution de l’ordonnance de la commissaire.


ORDONNANCE

 

  LA COUR ORDONNE qu’il soit sursis à l’exécution de la décision en date du 13 novembre 2008 par laquelle la commissaire J. Harnum, de la Section de l’immigration à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, a modifié les conditions de la mise en liberté du défendeur, en attendant l’issue de la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire formée contre cette décision.

 

 

« Russel W. Zinn »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :  IMM-5058-08

 

INTITULÉ :  LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE c.

  JOTHIRAVI SITTAMPALAM

 

LIEU DE L’AUDIENCE :  Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :  Le 12 décembre 2008

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :  LE JUGE ZINN

 

DATE DES MOTIFS :  Le 18 décembre 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Judy Michaely

POUR LE DEMANDEUIR

 

Barbara Jackman

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

JOHN H. SIMS, C.R.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

JACKMAN & ASSOCIATES

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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