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Date : 20090116

Dossier : T-93-08

Référence : 2009 CF 36

Ottawa (Ontario), le 16 janvier 2009

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O’REILLY

 

 

ENTRE :

KENNETH BARTKUS

demandeur

et

 

SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

défenderesse

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               M. Kenneth Bartkus travaillait à la Société canadienne des postes depuis plus de 23 ans. En 2004, Postes Canada l’a congédié. M. Bartkus allègue que la décision de Postes Canada a été provoquée par sa demande de congé de maladie. Postes Canada soutient que le congédiement de M. Bartkus découle du fait qu’il a refusé de se conformer à l’exigence d’une lettre d’offre d’emploi, soit d’y répondre à l’intérieur d’un délai particulier.

 

[2]               M. Bartkus a déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne, alléguant une discrimination fondée sur la déficience. En 2007, après une enquête, la Commission a conclu qu’un examen de la plainte n’était pas justifié et elle a rejeté la plainte.

 

[3]               M. Bartkus allègue que la Commission a commis une erreur en omettant de renvoyer la plainte devant un tribunal pour qu’elle soit entendue. Essentiellement, il soutient que la preuve a clairement démontré qu’il a été congédié juste après que Postes Canada a appris qu’il éprouvait des problèmes de santé qui l’empêchaient de retourner au travail. De plus, M. Bartkus affirme que l’enquête relative à sa plainte manquait de rigueur et d’impartialité. Enfin, M. Bartkus allègue que la Commission l’a traité injustement en omettant d’examiner l’ensemble de ses observations et de sa preuve à l’appui.

 

[4]               M. Bartkus m’a demandé d’ordonner à la Commission de réexaminer sa plainte. Toutefois, je ne vois aucune raison d'annuler la décision de la Commission et je dois, par conséquent, rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[5]               Les deux principales questions en litige en l’espèce sont les suivantes : (1) la Commission a-t-elle traitée injustement M. Bartkus en se fondant sur une enquête inadéquate ou en omettant d’examiner la preuve et les observations de M. Bartkus? (2) la décision de la Commission était‑elle déraisonnable?

 

 

I.              Contexte factuel

 

[6]               M. Bartkus a commencé à travailler à Postes Canada en 1981. En 1986, son poste à titre d’analyste au service à la clientèle a été déclassé et, en 1989, il a été désigné excédentaire. M. Bartkus a occupé divers postes temporaires en attendant l’ouverture d’un poste permanent.

 

[7]               À partir de l’automne 2000 jusqu’au printemps 2004, M. Bartkus a travaillé à un projet de remaniement des activités, un projet spécial lui demandant de travailler de longues heures et de supporter un stress important. En 2003, Postes Canada a modifié rétroactivement à la hausse la classification de M. Bartkus, la faisant passer de « A3 » à « A4 », même s’il était toujours désigné excédentaire. Lorsque ce projet a été terminé, il a pris un congé autorisé de 63 jours en fonction des heures supplémentaires qu’il avait accumulées à ce jour.

 

[8]               Le 12 mai 2004, juste avant son congé autorisé, Postes Canada lui a offert un poste permanent à titre de commis au courrier repérable, un poste de niveau A4, commençant en août 2004. Aux termes de la convention collective, Postes Canada était tenu de garder ce poste ouvert pendant 24 heures.

 

[9]               Le 19 mai 2004, M. Bartkus a pris connaissance de l’offre, mais il craignait que son acceptation ne compromette un grief non réglé relatif à sa classification. On lui a donné jusqu’au 28 mai 2004 pour décider d’accepter l’offre ou non. M. Bartkus a été irrité de se sentir bousculé, mais il a affirmé qu’il était prêt à signer l’offre « sous toute réserve ». Toutefois, il ne l’a pas fait. Dans une lettre datée du 9 juin 2004, Postes Canada a donné une nouvelle échéance à M. Bartkus, soit le 14 juin 2004. M. Bartkus a également été informé qu’il pouvait accepter le poste et poursuivre son grief non réglé. Cependant, s’il n’acceptait pas l’offre, il serait congédié.

 

[10]           Le 10 juin 2004, M. Bartkus a envoyé une lettre à Postes Canada l’informant qu’il n’accepterait aucun poste permanent tant qu’il n’aurait pas réglé de façon appropriée la conduite contraire à l’éthique relative à l’évaluation de son poste PM1. Il a poursuivi en disant qu’il était [traduction] « en congé pour surtemps » mais que des problèmes de santé incommodants l’avaient rendu inapte à travailler. Il a demandé un congé de maladie et il a demandé que son congé pour surtemps lui soit crédité pour la durée de sa maladie. C’était la première fois que M. Bartkus disait qu’il avait des problèmes de santé dans sa correspondance avec Postes Canada.

 

[11]           Postes Canada affirme avoir reçu la lettre de M. Bartkus le 16 juin 2004, soit deux jours après l’échéance prolongée. Étant donné que M. Bartkus avait affirmé qu’il n’accepterait pas le poste offert, Postes Canada l’a informé, par lettre datée du 17 juin 2004, que son emploi prendrait fin à la date de réception de la lettre (le 21 juin 2004).

 

II.                 La décision de la Commission

 

[12]           Le 22 novembre 2005, M. Bartkus a déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne, alléguant une discrimination fondée sur la déficience. Des allégations de discrimination remontant à 1993 étaient incluses dans la plainte. M. Bartkus avait développé une dépendance envers l’alcool au début des années 1990 et des documents liés à ce problème étaient toujours dans son dossier.

 

[13]           En 2006, la Commission a restreint la plainte de M. Bartkus aux événements survenus au cours du printemps 2004. Il s’agissait donc d’examiner si Postes Canada avait fait preuve de discrimination à l’égard de M. Bartkus en mettant fin à son emploi [traduction] « en raison d’une déficience connue de la défenderesse ».

 

[14]           La partie de la plainte de M. Bartkus relative à sa cessation d’emploi en 2004 indique qu’il croyait que l’offre de Postes Canada était une [traduction] « rétrogradation permanente » découlant de sa déficience, soit sa dépendance envers l’alcool. Il a allégué que Postes Canada avait invoqué ses problèmes d’alcool passés afin de le rétrograder, un désir qu’elle souhaitait combler depuis longtemps.

 

[15]           La Commission a désigné un enquêteur, lequel a préparé un rapport en date du 11 septembre 2007. L’enquêteur a résumé l’affaire comme suit :

 

[traduction] « La question en litige dans la présente plainte consiste à déterminer si le défaut du plaignant de se conformer aux exigences administratives de la défenderesse (c.‑à-d. de retourner la lettre d’offre d’emploi signée) et la cessation d’emploi subséquente de M. Bartkus, soit le 17 juin 2004, étaient fondés sur une déficience (dépendance envers l’alcool) ».

 

 

 

[16]           Il a conclu ceci :

 

•           M. Bartkus a eu 32 jours au total pour étudier l’offre d’un poste permanent, soit [traduction] « une période beaucoup plus longue que la période de 24 heures prévue dans la convention collective ».

•           Postes Canada a informé M. Bartkus des conséquences liées au refus de l’offre d’emploi;

•           Postes Canada n’était au courant d’aucune déficience avant la lettre de M. Bartkus datée du 10 juin 2004, lettre qu’elle a reçue le 16 juin 2004.

•           Il n’existait aucun lien entre la déficience de M. Bartkus et sa cessation d’emploi;

•           Postes Canada a mis fin à l’emploi de M. Bartkus en raison de son défaut d’accepter l’offre dans le délai prescrit et ceci n’avait rien à voir avec ses problèmes de dépendance envers l’alcool antérieurs.

 

[17]           M. Bartkus a répondu au rapport de l’enquêteur. Il a mis en doute le fait que l’enquêteur a effectué un examen complet de la question de savoir si Postes Canada savait que M. Bartkus était un ancien alcoolique au moment de son congédiement. Il a également critiqué l’omission de l’enquêteur de vérifier si Postes Canada était au courant de toute autre déficience qu’il avait à ce moment. Même si l’enquêteur a noté que M. Bartkus était fatigué et stressé lorsqu’il a terminé le projet de remaniement des activités, il n’a pas complètement exploré ceci comme étant une « déficience » possible portée à la connaissance de Postes Canada du fait que M. Bartkus avait fait référence à ses [traduction] « problèmes de santé incommodants » dans sa lettre du 10 juin 2004. En dernier lieu, M. Bartkus a mis en doute la conclusion de l’enquêteur selon laquelle la preuve était insuffisante pour entraîner une obligation de l’accommoder dans son milieu de travail. Il a prétendu que cette obligation découlait du fait que Postes Canada était au courant du stress qu’il avait subi et du fait qu’il avait parlé expressément de ses [traduction] « problèmes de santé incommodants ».

 

[18]           Dans cette réponse, M. Bartkus a affirmé qu’il était [traduction] « complètement incapable de se conformer aux exigences administratives de Postes Canada » en raison de sa déficience.

 

[19]           La Commission a examiné le rapport de l’enquêteur et les réponses des parties s’y rapportant. Elle a conclu que les renseignements mis à la disposition de Postes Canada à ce moment n’ont pas donné lieu à une obligation d’accommoder M. Bartkus en raison de sa déficience. De plus, la preuve n’appuyait pas la prétention de M. Bartkus selon laquelle il a été congédié en raison de sa déficience (c.-à-d. la dépendance envers l’alcool). Par conséquent, la Commission a décidé que l’examen de la plainte n’était pas justifié.

 

III.               Les normes de contrôle

[20]           M. Bartkus soutient que la question que devait trancher la Commission était une pure question de droit – à savoir s’il avait établi une preuve prima facie de discrimination. Par conséquent, il conviendrait d’annuler la décision de la Commission si j’estime qu’elle est incorrecte.

 

[21]           À mon avis, toutefois, la jurisprudence n’appuie pas la position de M. Bartkus. En général, la décision de la Commission de soumettre une plainte à un examen plus poussé suppose une analyse des faits à l’appui et l’application d’une norme juridique. Elle mérite une certaine déférence. Je peux annuler la décision de la Commission seulement si j’estime qu’elle était déraisonnable : Sketchley c. Canada (Procureur général) (2006), 263 D.L.R. (4th) 113 (C.A.F.); Bastide c. Société canadienne des postes, 2005 CF 1410, aux paragraphes 34‑35; Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 51; Bateman c. Canada (Procureur général), [2008] A.C.F. no 510 (C.F.).

 

[22]           J’estime toutefois que la question de ce qu’il faut entendre par « preuve suffisante prima facie » est, en effet, une question de droit. M. Bartkus soutient que la Commission a appliqué la mauvaise définition. Si c’est le cas, je devrai alors annuler la décision de la Commission.

 

[23]           Cependant, M. Bartkus soutient également que la preuve démontrait prima facie l’existence d’une discrimination de la part de Postes Canada. Le fait qu’il a été congédié immédiatement après avoir révélé une déficience équivalait à une discrimination directe, tandis que le fait que sa cessation d’emploi a eu lieu durant une période où il était incapable de répondre à la lettre d’offre d’emploi équivalait à une discrimination indirecte. Puisqu’il s'agit de questions mixtes de fait et de droit, je peux annuler la décision de la Commission seulement si elle était déraisonnable.

 

[24]           Enfin, je peux annuler la décision de la Commission si M. Bartkus a été traité injustement au cours du processus menant à cette décision.

 

IV.              Une preuve prima facie

 

[25]           La question qui se posait devant la Commission était de savoir si la preuve fournissait une justification raisonnable à l’appui de la plainte de M. Bartkus pour en faire un examen plus poussé : Clark c. Canada (Procureur général), [2007] A.C.F. no 20 (QL), au paragraphe 76 (C.F.). M. Bartkus soutient qu’une preuve prima facie est « celle qui porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la plaignante, en l'absence de réplique de l'employeur intimé » (où l’on cite Ontario (Commission ontarienne des droits de la personne) c. Simpsons Sears Ltd., [1985] A.C.S. no 74, au paragraphe 28).

 

[26]           M. Bartkus interprète cette définition comme signifiant que lorsque la Commission décide si un plaignant a présenté une preuve prima facie, elle doit considérer toutes les allégations faites par celui-ci comme étant vraies et ne pas prendre en compte toute preuve ou observation de la défenderesse. Selon moi, la définition ne doit pas être interprétée ainsi.

 

[27]           Le passage dans l’arrêt Simpsons Sears décrit le seuil à partir duquel le fardeau de la preuve passe au défendeur. C’est une règle relative au fardeau de la preuve lors d’une audience devant un tribunal. Elle n’établit pas le critère ni la méthode que doit appliquer la Commission au moment de décider si une plainte mérite un examen plus poussé. Il est clair qu’en prenant cette décision, la Commission doit prendre en considération le bien-fondé global de la plainte en soupesant, quoique de façon limitée, la preuve présentée par les parties : Clark, précité, aux paragraphes 76-81.

 

V.                 La Commission a-t-elle traité injustement M. Bartkus?

 

[28]           M. Bartkus a soulevé certaines préoccupations au sujet du processus d’enquête et de l’examen préliminaire de sa plainte par la Commission.

 

a)                   Une enquête étroite et inadéquate

 

[29]           M. Bartkus soutient que l’enquêteur s’est concentré exclusivement sur la partie de sa plainte traitant de la dépendance envers l’alcool et qu’il n’a pas analysé son allégation concernant son incapacité à répondre à l’offre d’emploi de Postes Canada. Il prétend également que l’enquêteur a commis des erreurs de fait dans son rapport.

 

[30]           Comme il a été mentionné, l’enquêteur a admis l’état de stress et de fatigue de M. Bartkus. Toutefois, il a conclu que les renseignements mis à la disposition de Postes Canada étaient insuffisants pour entraîner une obligation d’accommoder M. Bartkus. J’interprète cette conclusion comme englobant l’allégation faite par M. Bartkus selon laquelle Postes Canada savait qu’il était fatigué et stressé et avait reçu la confirmation de sa situation dans la lettre du 10 juin 2004. À mon avis, l’enquêteur n’a pas omis d’aborder cette question. Il a simplement conclu que la preuve n’appuyait pas l’allégation de M. Bartkus.

 

[31]           Quant aux erreurs de fait, M. Bartkus souligne l’énoncé de l’enquêteur selon lequel Postes Canada a reçu la lettre de M. Bartkus le 16 juin 2004, soit [traduction] « deux jours après la cessation d’emploi du plaignant ». En réalité, la cessation d’emploi n’a pris effet que le 21 juin 2004, date à laquelle M. Barktus a reçu la lettre de congédiement qui était datée du 17 juin 2004. L’enquêteur faisait référence à l’échéance du 14 juin 2004 pour l’envoi d’une réponse et non à la date réelle de la cessation d’emploi. Il a affirmé que les renseignements mis à la disposition de Postes Canada étaient insuffisants pour entraîner une obligation d’accommoder M. Bartkus et qu’il n’existait aucun lien entre sa déficience et sa cessation d’emploi.

 

[32]           Je ne considère pas ceci comme étant une erreur de fait importante. Les conclusions de l’enquêteur étaient justifiables quoi qu’il en soit.

 

b)                       Une analyse limitée de la preuve et des observations

 

[33]           M. Bartkus soutient que l’enquêteur n’a pas insisté pour que Postes Canada réponde à ses questions durant l’enquête. De plus, l’enquêteur a omis d’interroger certains témoins et d’étudier le dossier personnel de M. Bartkus. Enfin, la Commission n’a pas pris connaissance de toutes les observations déposées par M. Bartkus, mais seulement de celles qui avaient été déposées dans le cadre de l’enquête.

 

[34]           En février 2007, l’enquêteur a posé un certain nombre de questions à Postes Canada au sujet de la plainte de M. Bartkus. Postes Canada a répondu au moyen d’une longue observation écrite. Il est vrai que Postes Canada n’a pas répondu à la demande de l’enquêteur question par question, mais elle a fourni une réponse exhaustive traitant des principales préoccupations de l’enquêteur.

 

[35]           En général, les enquêteurs jouissent d’une grande latitude pour décider qui interroger ou quels documents examiner : Slattery c. Canada (Commission des droits de la personne), [1994] 2 C.F. 574, au paragraphe 69 (1re inst.). La question ultime consiste à savoir si l’enquête était impartiale et suffisamment rigoureuse.

 

[36]           La Commission avait dans son dossier les observations faites par les parties en réponse au rapport de l’enquêteur. Elle n’avait pas les observations qui ont été faites par les parties au cours des instances antérieures devant la Commission relativement à la restriction de la plainte de M. Bartkus. Je n’y vois aucune injustice. La Commission a examiné les observations qui étaient les plus pertinentes pour sa décision. Elle n’avait pas l’obligation d’examiner les observations relatives à d’autres questions soulevées antérieurement.

 

[37]           Je ne vois aucune injustice dans la manière dont M. Bartkus a été traité par l’enquêteur ou par la Commission.

 

VI.              La décision de la Commission était-elle déraisonnable?

 

a)                       La décision de Postes Canada de mettre fin à l’emploi de M. Bartkus

 

[38]           M. Bartkus soutient que Postes Canada l’a congédié en raison de la déficience qu’il a révélée dans sa lettre du 10 juin 2004. Il note que Postes Canada aurait eu droit de le congédier le 15 juin 2004 après son défaut de respecter l’échéance du 14 juin 2004. Le fait que Postes Canada ait attendu jusqu’au 17 juin 2004 démontre que le facteur décisif doit avoir été la révélation de sa déficience dans sa lettre du 10 juin 2004, lettre que Postes Canada a reçue le 16 juin 2004. Il affirme que la Commission a été déraisonnable en omettant de reconnaître ceci.

 

[39]           À mon avis, la conclusion de la Commission selon laquelle M. Bartkus a présenté une preuve insuffisante à l’égard de son allégation de discrimination était raisonnable. Dans toutes les communications entre M. Bartkus et Postes Canada, on ne trouve aucune mention de problèmes de santé avant la lettre de 2004 dans laquelle M. Bartkus refuse l’offre d’emploi. Le fait que Postes Canada aurait eu le droit de le congédier plus tôt, et qu’elle ne l’a pas fait, démontre simplement qu’elle s’efforçait de travailler avec une personne qu’elle considérait probablement comme un employé précieux. Cela ne démontre pas que la décision de Postes Canada était fondée, même en partie, sur la mention de problèmes de santé non définis dans la lettre du 10 juin 2004.

 

[40]           Il n’existe non plus aucune preuve que les personnes associées à la décision de mettre fin à l’emploi de M. Bartkus avaient connaissance de ses problèmes d’alcool remontant à plus d’une décennie. Je ne peux conclure, par conséquent, que la conclusion de la Commission portant que la preuve était insuffisante pour justifier un examen plus poussé de cet aspect de la plainte était déraisonnable.

 

b)                       L’incapacité de M. Bartkus à répondre à la lettre d’offre d’emploi

 

[41]           Cette question n’a pas été mentionnée dans la plainte initiale de M. Bartkus, mais elle l’a été dans les observations écrites présentées par la suite. M. Bartkus soutient que la Commission a commis une erreur en omettant expressément d’analyser cette question.

 

[42]           Dans sa décision, la Commission a examiné la question de savoir si les renseignements mis à la disposition de Postes Canada ont entraîné une obligation d’accommoder M. Bartkus en raison de sa déficience. Selon moi, cette question comprend l’allégation que Postes Canada était au courant de l’incapacité de M. Bartkus à se conformer à l’exigence de répondre à son offre d’emploi à l’intérieur du délai imposé. L’enquêteur a mentionné le fait que M. Bartkus souffrait de stress et de fatigue au cours de la période en question. Les observations que M. Bartkus a présentées à l’enquêteur et à la Commission traitaient très clairement de cet aspect de la plainte. À son tour, la Commission a traité cette question en concluant que [traduction] « la preuve démontre que les renseignements mis à la disposition de la défenderesse étaient insuffisants pour entraîner une obligation d’accommodement ».

 

[43]           De  plus, cette conclusion était raisonnable compte tenu de la preuve. La seule fois où les problèmes de santé qu’éprouvait M. Bartkus ont été mentionnés provient de sa lettre du 10 juin 2004 dans laquelle il a expressément refusé l’offre d’emploi de Postes Canada. Selon moi, M. Bartkus n’était pas incapable de répondre à l’offre d’emploi – il y a répondu par un refus. De plus, le passage concernant les [traduction] « problèmes de santé incommodants » était trop vague pour aviser Postes Canada que M. Bartkus éprouvait un problème qui avait altéré sa capacité d’étudier l’offre d’emploi. Postes Canada ne pouvait pas savoir si M. Bartkus avait une maladie bénigne de passage (p. ex. une grippe) ou une maladie plus grave. De surcroît, si l’on examine la lettre du 10 juin 2004, l’objectif que visait apparemment M. Bartkus en révélant ces problèmes de santé était de s’assurer qu’il ne perdrait pas son congé compensatoire pendant sa maladie, ce qui ne semblait nullement lié à l’offre d’emploi.

 

VII.            Conclusion et dispositif

 

[44]           Je ne vois aucune raison d’annuler la décision de la Commission de ne pas soumettre la plainte de M. Bartkus à un examen plus poussé. L’enquêteur et la Commission ont traité M. Bartkus de façon juste et ont répondu à l’essentiel de sa plainte. Les conclusions de la Commission étaient raisonnables compte tenu de la preuve dont elle disposait. Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire, avec dépens.

 

JUGEMENT

PAR LE PRÉSENT JUGEMENT, LA COUR

 

1.         rejette la demande de contrôle judiciaire, avec dépens.

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Mélanie Lefebvre, trad. a., LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCAT ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-93-08

                                                           

 

INTITULÉ :                                       BARTKUS c. SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 9 septembre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 16 janvier 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lisa Corrente

POUR LE DEMANDEUR

 

Sharon Chilcott

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

TORKIN MANES COHEN ARBUS LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

FILION WAKELY THORUP ANGELETTI LLP

Toronto (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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