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Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20101116

Dossier : IMM-1846-10

Référence : 2010 CF 1151

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 16 novembre 2010

En présence de monsieur le juge Hughes

 

ENTRE :

 

RAM

 

 

demanderesse

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La demanderesse est une citoyenne adulte du Mexique. Elle a été victime d’inceste commis par son père et c’est pour cette raison qu’elle s’est enfuie au Canada aussitôt qu’il lui a été possible de la faire. Afin de protéger l’identité de la demanderesse, j’ai ordonné que la demanderesse soit désignée dans l’intitulée ou ailleurs sous le nom de RAM.

 

[2]               La question en litige dont la Cour est saisie est la décision rendue par un agent d’ERAR par laquelle il a rejeté la demande de la demanderesse de ne pas être renvoyée au Mexique. Le défendeur admet que la demanderesse a soumis de nombreux documents à l’appui de sa demande d’ERAR, mais ces documents ne figuraient pas dans le dossier examiné par l’agent d’ERAR. En outre, l’avocat du défendeur admet également que plusieurs de ces documents appartiennent à la catégorie des nouveaux documents et que l’agent aurait dû en tenir compte. L’avocat du défendeur mentionne dans le mémoire déposé à la Cour qu’il est [traduction] « regrettable » que ces documents aient été omis, mais il formule deux arguments pour s’opposer à la présente demande de contrôle judiciaire. Le premier argument est que même si ces documents avaient été pris en compte, ils n’auraient pas eu d’incidence sur la décision. Le deuxième est que la décision de la SPR et celle de l’agent d’ERAR relative à la possibilité de refuge intérieur ne sont pas traitées de manière suffisante par ces documents et, par conséquent, ils ne sont pas pertinents quant au résultat final.

 

[3]               Les arguments soulevés par l’avocat du défendeur obligeraient notre Cour à faire un examen approfondi de la vingtaine de documents en question, y compris un certain nombre d’affidavits comportant des avis juridiques, et à rendre une décision quant à leur pertinence et quant à leur incidence sur le résultat final. Ce n’est pas le rôle de la Cour que d’entreprendre ce type de démarche. Dès qu’il a été démontré que les documents n’ont pas été pris en compte et que certains de ces documents sont « nouveaux », sauf si à première vue, ces documents ne sont manifestement d’aucune pertinence, l’affaire doit être renvoyée à l’agent d’ERAR pour évaluation motivée. Je fais mien les justes propos tenus par la juge Mactavish, au paragraphe 13 de la décision Lee c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 782, 82 Imm L.R. (3d) 235 :

Au vu de l’exemple ci-dessus, je ne suis pas convaincu que la preuve qui n’a pas été prise en considération par l’agente d’ERAR ne revêtait clairement pas d’importance pour la demande, ou qu’elle n’en aurait pas influencé le résultat. Par conséquent, je suis d’avis que l’affaire doit être renvoyée pour nouvelle évaluation.

 

 

[4]               Je comprends que le ministère qui représente le défendeur a décidé de soulever cette question dans le cadre du présent appel. Toutefois, compte tenu de la façon évidente selon laquelle le dossier aurait dû être traité, à savoir le consentement à un nouvel examen, et compte tenu de l’important nombre de dossiers de même nature qui sont soumis aux Cours, le défendeur aurait dû accepter le renvoi du dossier pour nouvel examen. Pour cette raison, je vais adjuger les dépens à la demanderesse que j’établis à la modeste somme de 250 $, laquelle suffit à transmettre un message.

 

[5]               Je dois formuler des commentaires sur une autre question soulevée par la demanderesse dans ses documents écrits. La demanderesse prétend qu’il y a eu de l’inconduite de la part de son ancien avocat. Elle dit que certains documents portant sur l’état psychiatrique de son père avaient été remis à temps à son avocat afin que celui-ci les soumette à la SPR, mais qu’ils n’ont jamais été traduits de l’espagnol, contrairement à ce qui avait été demandé. Par conséquent, la SPR n’a accordé aucune attention à ces documents. Dans le dossier dont je dispose, je remarque qu’une plainte a été déposée au Barreau, mais rien d’autre à cet égard n’est mentionné dans le dossier. L’avocate de la demanderesse mentionne que l’ancien avocat a soumis une réponse écrite au Barreau, mais il n’y a rien à cet effet dans le dossier dont je dispose. Je suis préoccupé par une pratique, heureusement peu répandue, dont on est témoin de temps à autre à la Cour, qui consiste à jeter le blâme sur un ancien avocat. Habituellement, il n’y a aucune preuve de plainte au Barreau. En l’espèce, il y a une telle preuve, mais la réponse ne figure pas au dossier. Si un sérieux argument fondé sur une prétendue inconduite ou de négligence de la part d’un ancien avocat est soulevé, le dossier soumis à la Cour devrait comprendre tous les éléments de preuve pertinents aux allégations. Je soulève la possibilité, sans trancher la question, que, dans un dossier comme celui en l’espèce, on devrait communiquer avec l’ancien avocat, lui fournir les documents et lui donner la possibilité de répondre. En l’espèce, ma décision ne repose pas sur ce motif.

 

[6]               Aucune des parties n’a demandé la certification d’une question.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JUGEMENT

            Pour les motifs qui précèdent :

 

LA COUR ORDONNE :

1.                          l’intitulé est modifié afin de désigner la demanderesse du nom de RAM et, dans la mesure du possible, les dossiers actuels de la Cour, y compris les dossiers électroniques, devraient être modifiés en conséquence;

2.                          la demande est accueillie;

3.                          la demande d’ERAR de la demanderesse est renvoyée à un autre agent afin d’être examinée à nouveau à la lumière d’un dossier complet;

4.                          des dépens de 250 $ sont adjugés à la demanderesse.

 

« Roger T. Hughes »

Juge

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1846-10

 

INTITULÉ :                                       RAM c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE

L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 16 novembre 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE HUGHES

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 16 novembre 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Shannon Black

POUR LA DEMANDERESSE

 

Ada Mok

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Shannon Black

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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