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Cour fédérale

 

Federal Court


 

 


Date : 20110216

Dossier : IMM-3668-10

Référence : 2011 CF 187

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 16 février 2011

En présence de monsieur le juge Zinn

 

 

ENTRE :

 

 

JIAN DONG CHEN

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La seule question à trancher dans la présente demande est de savoir si la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a commis une erreur dans son appréciation de l’authenticité d’une assignation que la police chinoise, selon le demandeur, aurait délivrée à son nom.

 

[2]               M. Chen a revendiqué le statut de réfugié en raison de la persécution qu’il allègue subir en tant que chrétien en Chine. Dans le cadre de sa demande, il a déposé une assignation que la police aurait laissée à son épouse après une descente effectuée dans l’église qu’il fréquentait. La Commission a cité des éléments de preuve documentaire selon lesquels les assignations sont presque toujours délivrées à la personne visée plutôt qu’à un membre du ménage ou de la famille, puis a précisé :

 

Toutefois, il est également indiqué que, en Chine, les policiers laissent très souvent les assignations auprès de membres de la famille en les avisant de remettre l’assignation à la personne dont le nom est inscrit sur cette dernière. La personne acceptant l’assignation doit signer un accusé de réception. Il ne s’agit pas de la procédure adéquate, mais cela se produit tout le temps, surtout lorsque la personne visée par l’assignation est difficile à trouver. 

 

 

[3]               La Commission a relevé que deux éléments, dans l’assignation présentée par le demandeur, ne concordaient pas avec la preuve documentaire : la section réservée à l’accusé de réception de l’assignation ne portait pas de signature, et le numéro du Code de procédure pénale de la République populaire de Chine n’était pas indiqué sur l’assignation. La Commission a examiné les divergences entre l’assignation et la preuve documentaire à la lumière de sa conclusion selon laquelle il est facile de se procurer des documents frauduleux, et notamment des assignations, en Chine; elle a conclu, selon la prépondérance des probabilités, que l’assignation fournie par le demandeur n’était pas authentique.

 

[4]               Le demandeur soutient que la Commission a tenu un raisonnement défectueux dans son analyse de l’assignation. À son avis, [traduction] « il semble illogique de se fonder sur l’absence d’une signature ou d’un accusé de réception pour rejeter l’assignation, alors que les motifs indiquent notamment que la signature de l’accusé de réception par une personne autre que celle désignée dans l’assignation n’est pas conforme à la procédure établie ». Le problème, avec cet argument, est que selon la preuve, même si la signification d’une assignation à une personne autre que celle nommée dans le document ne respecte pas la procédure établie, les policiers le font régulièrement et, le cas échéant, la personne à qui est remise l’assignation est censée signer l’accusé de réception.

 

[5]               Le défendeur reconnaît que si la Commission avait conclu à l’authenticité de l’assignation, cette conclusion aurait pu avoir une incidence directe sur la décision, puisque l’assignation aurait fourni à la Commission une corroboration des prétentions du demandeur. 

 

[6]               Malgré les habiles observations de l’avocat du demandeur, je ne saurais conclure que l’évaluation de l’assignation par la Commission et sa conclusion tranchante que ce document n’est pas authentique sont déraisonnables. 

 

[7]               La Commission s’est appuyée sur une réponse à une demande d’information qui traite des assignations délivrées en Chine. Celle‑ci révèle que bien qu’une assignation doive être signifiée à son destinataire même, certaines dispositions du Code de procédure pénale permettent qu’elle soit remise une autre personne pour le compte du destinataire. 

 

[8]               Le Code de procédure pénale précise ensuite que si le destinataire lui‑même ou la personne qui reçoit l’assignation en son nom [traduction] « refuse d’accepter un document ou refuse de signer son nom ou d’apposer son sceau sur un document », la personne qui signifie le document peut demander à une autre personne présente de constater que le document a été laissé et consigner ce fait sur le certificat de signification. Cette procédure est réputée constituer une signification valable. La réponse à la demande d’information cite ensuite un représentant des droits de la personne en Chine, qui, en 2004, a déclaré :

[traduction]

Très souvent, en Chine, les policiers remettent une assignation ou un subpoena à un membre de la famille (ou parfois à un ami proche, quoique ce scénario soit probablement moins courant), en lui donnant instruction de remettre l’assignation à la personne nommée dans le document. La personne qui accepte l’assignation est censée signer un accusé de réception. Cette façon de faire ne correspond pas à la procédure établie, mais elle est continuellement pratiquée, particulièrement dans les cas où la personne visée par l’assignation est difficile à trouver […] Certains policiers eux‑mêmes ne sont pas très au fait de la procédure appropriée et pensent probablement qu’il s’agit là d’une pratique parfaitement acceptable (alors que d’autres sont peut‑être tout simplement trop indolents pour pourchasser la personne visée et comptent sur le sentiment public d’intimidation pour faire leur travail à leur place).

 

 

[9]               La Commission a aussi souligné que selon la réponse à la demande d’information, les assignations en Chine devraient contenir le numéro approprié du Code de procédure pénale de la République populaire de Chine. Par conséquent, l’assignation fournie par le demandeur comporte deux irrégularités : elle ne mentionne pas le numéro du Code de procédure pénale et elle ne porte pas la signature de l’épouse du demandeur accusant réception de l’assignation. Compte tenu de ces deux irrégularités et de la possibilité d’obtenir des documents frauduleux en Chine, la Commission a estimé « selon la prépondérance des probabilités, que l’assignation présentée par le demandeur d’asile n’est pas un document authentique ».

 

[10]           Le demandeur reproche principalement à la Commission son évaluation de la preuve. S’il peut être possible qu’une assignation chinoise authentique ne contienne pas la signature de la personne qui l’a reçue ou ne comporte pas le numéro du Code de procédure pénale, la preuve dont disposait la Commission indique que ces deux éléments sont censés figurer sur une assignation authentique. L’absence de ceux‑ci et la disponibilité de documents frauduleux en Chine ont conduit la Commission à conclure que l’assignation n’était pas authentique. On ne peut pas dire que cette décision est déraisonnable. Elle est fondée sur la preuve dont était saisie la Commission. 

 

[11]           En conséquence, la demande est rejetée. Les avocats des parties n’ont proposé aucune question à certifier.

 


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la demande est rejetée. Aucune question n’est certifiée.

 

« Russel W. Zinn »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3668-10

 

INTITULÉ :                                       JIAN DONG CHEN c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 15 février 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE ZINN

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 16 février 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Leonard H. Borenstein

 

                           POUR LE DEMANDEUR

Laoura Christodoulides

 

                           POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Leonard H. Borenstein

Avocat

Toronto (Ontario)

 

                           POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

                           POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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