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Cour fédérale

 

Federal Court

Date : 20110224

Dossier : IMM-1573-10

Référence : 2011 CF 221

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 24 février 2011

En présence de monsieur le juge O’Keefe

 

ENTRE :

 

MOHAMMAD AHSAN ULLAH

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION ET LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeurs

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire présentée au titre du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001 ch. 27 (la Loi), qui vise la décision du 18 février 2010, dans laquelle une agente d’examen des risques avant renvoi (l’agente) a statué que le demandeur n’était pas exposé au risque d’être soumis à la torture, à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités s’il devait retourner au Pakistan.

 

[2]               Le demandeur sollicite une ordonnance annulant la décision de l’agente et renvoyant l’affaire à un autre agent pour nouvelle décision.

 

Le contexte

 

[3]               Mohammad Ahsan Ullah (le demandeur) est un citoyen pakistanais né le 24 novembre 1975.

 

[4]               Le demandeur avait joint l’aile politique du Mouvement national unifié (MQM-A) alors qu’il était au collège. Il travaillait pendant des campagnes électorales et organisait des collectes de fonds. En raison de ces activités, il avait fait l’objet de menaces de la part de membres d’une faction terroriste connue sous le nom de MQM Haqiqi (MQM-H). Il demeurait chez des amis et ne revenait pas fréquemment à son domicile.

 

[5]               Le 28 juin 2001, le demandeur est retourné chez lui. Un certain nombre de personnes, qui étaient des membres du MQM-H, selon le demandeur, se sont introduites chez lui. Alors qu’il tentait de fuir, le demandeur s’est fait tirer dessus et a été blessé. À la suite de cet incident, il a été diagnostiqué totalement paraplégique.  

 

[6]               Le demandeur est entré au Canada le 11 octobre 2001. Il a présenté une demande d’asile, mais a été déclaré interdit de territoire, en application du paragraphe 34(1) de la Loi. En 2006, il a demandé l’exemption ministérielle prévue au paragraphe 34(2) au cours d’une enquête de la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Le demandeur n’a jamais reçu de décision concernant l’exemption demandée en application du paragraphe 34(2) de la Loi.

 

[7]               Le demandeur a présenté une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR) en janvier 2010. Sa demande d’ERAR a été rejetée en mars 2010.

 

La décision de l’agente

 

[8]               La question déterminante pour l’agente était l’insuffisance de la preuve objective.

 

[9]               L’agente a conclu que le demandeur était une personne visée au paragraphe 112(3) de la Loi, parce que son interdiction de territoire reposait sur le fait qu’il est membre d’une organisation se livrant au terrorisme au sens du paragraphe 34(1) de la Loi.

 

[10]           L’agente a conclu que la preuve fournie par le demandeur n’était pas suffisante pour étayer sa prétention que l’agression dont il avait fait l’objet était attribuable à son statut de membre du MQM-A, ou que les agresseurs étaient des membres du MQM-H. Le demandeur n’a pas fourni de preuve relatant comment il avait appris que les agresseurs étaient liés au MQM-H, comment ceux-ci avaient pu apprendre qu’il était présent à son domicile à ce moment-là et pourquoi il serait ciblé. Le demandeur a fourni un article de journal, qui énonçait que l’agression était gratuite et qui ne mentionnait rien quant à des motivations politiques, ou quant au fait qu’elle aurait été perpétrée par des membres du MQM‑H. L’agente a conclu que les déclarations du demandeur étaient vagues et générales.

 

[11]           L’agente a conclu que le demandeur n’avait pas fourni suffisamment d’informations sur son rôle au sein du MQM-A. La déclaration du demandeur quant à ses activités était très générale, et il n’a pas donné de détails relatifs à la période au cours de laquelle il avait travaillé pour le MQM-A, à la fréquence de ses activités ainsi qu’à son poste au sein du mouvement. La lettre provenant du chef du MQM-A ne fait que mentionner que le demandeur était un partisan. L’agente a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve étayant l’allégation que le demandeur correspondait au profil d’une personne pouvant attirer l’intérêt de qui que ce soit au Pakistan.

 

[12]           L’agente a conclu que le demandeur serait exposé au même risque généralisé de violence que le reste de la population et qu’il ne serait vraisemblablement pas exposé au risque d’être soumis à la torture, à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités s’il était renvoyé au Pakistan.  

 

Les questions en litige

 

[13]           Le demandeur a soumis les questions suivantes à l’examen de la Cour :

            1.         L’agente a-t-elle commis une erreur en ne reportant pas la procédure de renvoi en attendant qu'une décision soit rendue sur la demande d’exemption ministérielle présentée par le demandeur au titre du paragraphe 34(2) de la Loi?

            2.         L’agente a-t-elle commis une erreur en ne convoquant pas une audience dans le cadre de la demande d’ERAR du demandeur?

            3.         L’agente a-t-elle commis une erreur de droit dans l’interprétation et l’application de la définition d’une personne à protéger au sens de l’article 97 de la Loi?

            4.         L’agente a-t-elle commis une erreur de droit en fondant sa décision sur une conclusion de fait erronée tirée d’une manière abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait?

            5.         L’agente a-t-elle rendu une décision qui est déraisonnable, compte tenu des éléments de preuve dont elle disposait, ce qui équivaudrait à une erreur de droit?

            6.         L’agente a-t-elle commis une erreur en faisant abstraction de certains éléments de la preuve et en interprétant celle-ci de manière erronée, y compris les témoignages sous serment, les éléments de preuve documentaire et les documents relatifs aux droits de la personne?

 

[14]           À mon avis, il convient de reformuler les questions en litige comme suit :

            1.         Quelle est la norme de contrôle applicable?

            2.         L’agente a-t-elle commis une erreur en ne reportant pas le renvoi du demandeur en attendant qu'une décision soit rendue sur sa demande d’exemption ministérielle présentée au titre du paragraphe 34(2) de la Loi. 

            3.         L’agente a-t-elle commis une erreur en ne tenant pas une audience, en vertu de l’alinéa 113b) de la Loi?

            4.         L’agente a-t-elle commis une erreur en faisant abstraction d’éléments de preuve probants?

 

Les observations écrites du demandeur

 

[15]           Le demandeur soutient que l’agente a commis une erreur en ne motivant pas son refus de reporter la procédure en attendant qu’une décision soit rendue sur sa demande d’exemption ministérielle présentée au titre du paragraphe 34(2) de la Loi. 

 

[16]           Le demandeur soutient que l’agente a commis une erreur en ne tenant pas d’audience. Une audience est nécessaire lorsque la crédibilité d’un demandeur est remise en question. Le demandeur soutient que la conclusion de l’agente, portant qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve objectifs relativement au rôle du demandeur au sein du MQM-A ou à l’identité de ses agresseurs, était essentiellement une conclusion quant à la crédibilité, et qu’une audience aurait donc dû être tenue.

 

[17]           Le demandeur prétend que l’agente a fait abstraction de la preuve probante dont elle était saisie. L’agente disposait de beaucoup d’éléments de preuve étayant que le demandeur, à titre de membre du MQM‑A, était exposé à un risque personnel, auquel la population entière du Pakistan n’était pas exposée. L’agente n’a pas fait mention de la preuve documentaire qui démontrait que les membres du MQM-A sont exposés à un risque personnel au Pakistan. L’agente a par conséquent commis une erreur en faisant abstraction de la preuve.

 

 

Les observations écrites des défendeurs

 

[18]           Les défendeurs prétendent que le demandeur ne s’est pas acquitté de son fardeau de fournir une preuve suffisante pour étayer sa prétention que son renvoi au Pakistan l’exposerait personnellement à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités auxquels d’autres individus ne sont pas exposés généralement. Le demandeur n’a pas présenté suffisamment d’éléments de preuve objectifs pour démontrer comment il avait su que ses agresseurs étaient des membres du MQM-H, comment ceux-ci avaient eu connaissance de son retour chez lui ou pourquoi il serait pris pour cible. Des éléments de preuve additionnels étayaient l’allégation que l’agression était gratuite. L’agente pouvait conclure que le demandeur n’avait pas établi un lien entre les circonstances qui lui étaient propres et le risque auquel renvoie l’article 97 de la Loi. 

 

Analyse et décision

 

[19]           Première question

      Quelle est la norme de contrôle applicable?

            Règle générale, la norme de contrôle applicable à une décision d’ERAR est la raisonnabilité (voir Wang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 799, au paragraphe 11).

 

[20]           Les questions d’équité procédurale découlant d’une décision relative à une demande d’ERAR seront tranchées selon la norme de la décision correcte, laquelle comprend habituellement le droit à une audience (voir Wang, précité, au paragraphe 11).

 

[21]           Il doit être mentionné que les questions relatives au droit d’être entendu découlant de l’application du paragraphe 113b) de la Loi ne sont pas nécessairement contrôlées selon la norme de la décision correcte. Comme l’a énoncé le juge Yves de Montigny dans la décision Iboude c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1316, au paragraphe 12, l’alinéa 113b) de la Loi établit clairement que le ministre n’est pas tenu d’accorder une audience. Lorsqu’il décide s’il tient ou non une audience, l’agent d’ERAR applique aux faits de l’affaire dont il est saisi les facteurs énumérés à l’article 167 du Règlement sur l’immigration et le statut de réfugié, DORS/2002-227 (le Règlement). Il s’agit d’une question mixte de fait et de droit, susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable (voir Karimi c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 1010, au paragraphe 17). Cependant, si rien ne nous laisse croire que l’agent a porté attention aux facteurs de l’article 167 ou à la question de savoir s’il devait tenir ou non une audience, cela soulève effectivement des questions d’équité procédurale. Il s’ensuit que, dans l’affaire dont je suis saisi, l’absence d’audience devrait être contrôlée selon la norme de la décision correcte (voir Karimi, précitée, au paragraphe 17). 

 

[22]           Les autres questions soulevées seront contrôlées selon la norme de la décision raisonnable.

 

[23]           Deuxième question

            L’agente a-t-elle commis une erreur en ne reportant pas le renvoi du demandeur en attendant qu'une décision soit rendue sur sa demande d’exemption ministérielle présentée au titre du paragraphe 34(2) de la Loi?

            L’agente ayant tranché la demande était une agente d’ERAR de Citoyenneté et Immigration Canada. Si le demandeur désirait présenter une demande visant à reporter son renvoi, celle-ci aurait dû être envoyée à l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC), pour qu’elle soit appréciée par un agent d’application de la loi à l’intérieur du pays. J’ai examiné les observations d’ERAR du demandeur, datées du 1er février 2010, et je remarque que celles-ci ne font pas mention de la demande de report du renvoi. J’ai aussi examiné le dossier certifié du tribunal et je n’ai pas trouvé de copie de la lettre demandant de reporter le renvoi. Il est aussi important de mentionner que la date du renvoi n’avait pas été arrêtée au moment de l’audience. Il serait absurde d’ordonner de reporter un renvoi dont la date n’est pas encore fixée. Par conséquent, l’agente n’a pas commis d’erreur susceptible de contrôle judiciaire en ne reportant pas le renvoi du demandeur en attendant qu’une décision soit rendue quant à sa demande d’exemption ministérielle présentée au titre du paragraphe 34(2) de la Loi.


 

[24]           Troisième question

            L’agente a-t-elle commis une erreur en ne tenant pas une audience, en vertu de l’alinéa 113b) de la Loi?

            En vertu des paragraphes 161(1) et (2) du Règlement, un demandeur d’asile peut présenter des observations écrites pour étayer sa demande. Dans le cours normal d’une décision relative à une demande d’ERAR, il n’est pas obligatoire qu’une audience soit tenue.

 

[25]           Selon l’alinéa 113b) de la Loi, une audience peut être tenue si le ministre l’estime requis, compte tenu des facteurs énumérés à l’article 167 du Règlement. Le libellé du paragraphe 113b) signifie que la tenue d’une audience est toujours de nature discrétionnaire, eu égard aux facteurs répertoriés à l’article 167 du Règlement (voir Begashaw c. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), 2009 FC 1167, aux paragraphes 15 et 19). Les facteurs qui doivent être considérés et qui sont énumérés aux alinéas a), b) et c) de l’article 167 du Règlement sont cumulatifs. Dans Cosgun c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 400, le juge Paul Crampton a énoncé ce qui suit au paragraphe 32 :

Étant donné la présence, en anglais, de la conjonction « and » entre les alinéas b) et c) ci‑dessus, il est clair que les facteurs énoncés aux alinéas 167a), b) et c) sont cumulatifs. […] Les parties conviennent que si les trois facteurs énoncés à l’article 167 ont été remplis, un agent ERAR est tenu de tenir une audience et que si l’un des facteurs énoncés aux alinéas b) ou c) n’est pas rempli, une audience ne serait pas obligatoire.

 

 

[26]           Donc, compte tenu des alinéas a), b) et c) de l’article 167 du Règlement, un demandeur doit établir la présence d’éléments de preuve qui soulèvent des doutes quant sa crédibilité et qui sont liés à l’article 97 de la Loi, que ces éléments de preuve sont au cœur de la décision relative à la demande d’asile et que ces éléments de preuve, à supposer qu’ils soient admis, justifieraient l’accueil de la demande d’asile.

 

[27]           Une conclusion de preuve insuffisante peut révéler que l’agent avait, en réalité, des doutes quant à la crédibilité du demandeur ou de la preuve. Cela est relativement fréquent dans la jurisprudence de la Cour fédérale. Dans Zokai c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2005 CF 1103, au paragraphe 12, le juge Kelen a statué que :

[…] En refusant d’accorder toute force probante au récit du demandeur en l’absence de preuve le corroborant, l’agent ERAR a en fait conclu que le demandeur n’était pas digne de foi. J’estime que, compte tenu de ses doutes en matière de crédibilité, il incombait à l’agent d’examiner la demande d’audience et de motiver le refus d’en accorder une. […]

 

 

[28]           Il y a d’autres exemples d’agents ayant censément rejeté des demandes en raison d’éléments de preuve insuffisants, alors que leur décision reposait en fait sur des motifs relatifs à la crédibilité : voir Begashaw, précitée, au paragraphe 20; Liban c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1252, au paragraphe 14, et Haji c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 889, aux paragraphes 14 à 16).

 

[29]           Selon le paragraphe 10(1) du Règlement, un demandeur doit présenter l’ensemble des renseignements, documents et pièces justificatives exigés par le Règlement et la Loi. Un agent peut donc rejeter une demande au motif que le demandeur n’a pas présenté suffisamment d’éléments de preuve. Je souscris à l’analyse du juge Crampton dans Herman c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 629, au paragraphe 17, lorsqu’il déclare que les affaires susmentionnées portant sur les conclusions d’insuffisance de preuve :

[…] ne militent pas en faveur de la thèse qu’un agent d’ERAR tire essentiellement une conclusion défavorable quant à la crédibilité chaque fois qu’il conclut que la preuve produite par un demandeur n’est pas suffisante pour s’acquitter de son fardeau de présentation. Dans chacune de ces affaires, il était évident pour la Cour que l’agent d’ERAR avait tiré des conclusions défavorables quant à la crédibilité ou qu’il ne prêtait simplement pas foi à la preuve que lui avait présentée la partie demanderesse. Cela diffère sensiblement du fait de ne pas être convaincu qu’un demandeur s’est acquitté de son fardeau de la preuve selon la prépondérance des probabilités […]

 

 

[30]           Le fait que l’agente a conclu, dans la présente affaire, que le demandeur n’avait pas présenté suffisamment d’éléments de preuve ne signifie pas nécessairement qu’elle a tiré une conclusion défavorable quant à la crédibilité.

 

[31]           L’agente a mentionné que le demandeur avait contribué à des campagnes électorales et à des collectes de fonds pour le MQM-A, mais a conclu que la lettre du chef de l’organisation énonçait que le demandeur n’était seulement qu’un partisan. L’agente a aussi conclu que l’article de journal présenté par le demandeur, qui relatait l’incident où il s’était fait tirer dessus, décrivait cet incident comme étant un geste gratuit.   

 

[32]           L’agente a conclu que le demandeur n’avait présenté aucun élément de preuve quant à :

            1.         la période où il avait travaillé pour le MQM-A et la fréquence de ses activités;

            2.         la nature des menaces antérieures du MQM-H dont il avait fait l’objet, la fréquence de ces menaces, l’époque où elles avaient été faites et les circonstances dans lesquelles elles l’avaient été;

            3.         la façon dont il avait eu connaissance du fait que les individus qui avaient fait feu sur lui étaient des membres du MQM-H;

            4.         la raison pour laquelle il croyait que l’agression dont il avait été victime s’expliquait par son statut de membre du MQM-A;

            5.         la manière dont les membres du MQM-H avaient su qu’il était présent chez lui.

 

[33]           J’ai examiné les pièces présentées par le demandeur dans sa demande d’ERAR. Il n’a pas fourni de renseignements sur aucun des points qui préoccupaient l’agente. Les seuls renseignements que le demandeur a présentés au sujet du rôle qu’il avait occupé au sein du MQM-A et des menaces dont il avait fait l’objet de la part du MQM-H étaient les suivants :  

[traduction]

Je me suis impliqué pour la première fois au sein du MQM-A par l’intermédiaire de l’APMSO, son aile étudiante, lorsque j’ai commencé à fréquenter le collège en 1992 ou 1993. J’ai travaillé pour le parti lors de campagnes électorales ainsi que dans d’autres activités, telles que des collectes de fonds. Mon implication au sein du MQM-A a atteint une telle ampleur que rester chez moi devenait un danger. Mon frère (qui participe aussi à des activités du MQM-A) et moi avons fait l’objet de menaces de la part de membres du MQM-H pour que l’on cesse nos activités politiques ; en raison de ces menaces, nous avons commencé à demeurer chez divers amis, et ne retournions à la maison qu’à de rares occasions.

 

[34]           Je reprends de la conclusion que le juge Paul Crampton a énoncée au paragraphe 18 de Herman, précitée :

[…] l’agente d’ERAR pouvait raisonnablement conclure, sans tirer d’inférence défavorable quant à la crédibilité, que la preuve produite n’était pas suffisante pour établir, selon la prépondérance des probabilités, les prétentions de la demanderesse.

 

 

[35]           Plus particulièrement, il était raisonnable pour l’agente de conclure que le demandeur ne s’était pas acquitté de son fardeau d’établir qu’il était membre du MQM-A ou qu’il était personnellement exposé à une menace à sa vie résultant directement de cette appartenance.

 

 

[36]           Quatrième question

            L’agente a-t-elle commis une erreur en faisant abstraction d’éléments de preuve probants?

            Le demandeur prétend que l’agente n’a fait mention d’aucun des éléments de preuve documentaire qui démontrent que les membres du MQM-A sont exposés à un risque personnel au Pakistan et que, par conséquent, l’agente a commis une erreur en faisant abstraction d’éléments de preuve.

 

[37]           Cependant, l’agente n’a pas conclu que les membres du MQM-A ne sont exposés à aucun risque au Pakistan, ce qui est le cœur de la preuve documentaire fournie par le demandeur. Comme il a été mentionné précédemment, l’agente a plutôt conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve concernant la nature de l’implication du demandeur au sein du MQM-A ainsi que les menaces et la violence du MQM-H auxquelles il avait été personnellement exposé. Je ne peux conclure que l’agente a fait abstraction d’éléments de preuve pertinents.

 

[38]           Il s’ensuit que la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.

 

[39]           Le demandeur n’a pas souhaité proposer de question grave de portée générale pour que je l’examine à des fins de certification. En raison de mes conclusions quant à la question du report du renvoi du demandeur, les défendeurs n’ont pas souhaité présenter de question grave de portée générale aux fins de certification.

 


JUGEMENT

 

 

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée

 

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Maxime Deslippes, LL.B., B.A. Trad.


ANNEXE

 

Dispositions législatives pertinentes

 

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, 2001, ch. 27

 

34.(1) Emportent interdiction de territoire pour raison de sécurité les faits suivants :

 

 

a) être l’auteur d’actes d’espionnage ou se livrer à la subversion contre toute institution démocratique, au sens où cette expression s’entend au Canada;

 

b) être l’instigateur ou l’auteur d’actes visant au renversement d’un gouvernement par la force;

 

c) se livrer au terrorisme;

 

d) constituer un danger pour la sécurité du Canada;

 

e) être l’auteur de tout acte de violence susceptible de mettre en danger la vie ou la sécurité d’autrui au Canada;

 

f) être membre d’une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu’elle est, a été ou sera l’auteur d’un acte visé aux alinéas a), b) ou c).

 

34(2) Ces faits n’emportent pas interdiction de territoire pour le résident permanent ou l’étranger qui convainc le ministre que sa présence au Canada ne serait nullement préjudiciable à l’intérêt national.

 

 

72.(1) Le contrôle judiciaire par la Cour fédérale de toute mesure — décision, ordonnance, question ou affaire — prise dans le cadre de la présente loi est subordonné au dépôt d’une demande d’autorisation.

 

 

97.(1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

112 (3) L’asile ne peut être conféré au demandeur dans les cas suivants :

 

a) il est interdit de territoire pour raison de sécurité ou pour atteinte aux droits humains ou internationaux ou criminalité organisée;

 

b) il est interdit de territoire pour grande criminalité pour déclaration de culpabilité au Canada punie par un emprisonnement d’au moins deux ans ou pour toute déclaration de culpabilité à l’extérieur du Canada pour une infraction qui, commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans;

 

 

c) il a été débouté de sa demande d’asile au titre de la section F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés;

 

d) il est nommé au certificat visé au paragraphe 77(1).

 

113. Il est disposé de la demande comme il suit :

 

 

[. . .]

 

b) une audience peut être tenue si le ministre l’estime requis compte tenu des facteurs réglementaires;

 

34.(1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on security grounds for

 

(a) engaging in an act of espionage or an act of subversion against a democratic government, institution or process as they are understood in Canada;

 

(b) engaging in or instigating the subversion by force of any government;

 

(c) engaging in terrorism;

 

(d) being a danger to the security of Canada;

 

(e) engaging in acts of violence that would or might endanger the lives or safety of persons in Canada; or

 

(f) being a member of an organization that there are reasonable grounds to believe engages, has engaged or will engage in acts referred to in paragraph (a), (b) or (c).

 

34(2) The matters referred to in subsection (1) do not constitute inadmissibility in respect of a permanent resident or a foreign national who satisfies the Minister that their presence in Canada would not be detrimental to the national interest.

 

72.(1) Judicial review by the Federal Court with respect to any matter — a decision, determination or order made, a measure taken or a question raised — under this Act is commenced by making an application for leave to the Court.

 

97.(1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

112(3) Refugee protection may not result from an application for protection if the person

 

(a) is determined to be inadmissible on grounds of security, violating human or international rights or organized criminality;

 

(b) is determined to be inadmissible on grounds of serious criminality with respect to a conviction in Canada punished by a term of imprisonment of at least two years or with respect to a conviction outside Canada for an offence that, if committed in Canada, would constitute an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years;

 

(c) made a claim to refugee protection that was rejected on the basis of section F of Article 1 of the Refugee Convention; or

 

(d) is named in a certificate referred to in subsection 77(1).

 

113. Consideration of an application for protection shall be as follows:

 

. . .

 

(b) a hearing may be held if the Minister, on the basis of prescribed factors, is of the opinion that a hearing is required;

 

 

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227

 

10.(1) Sous réserve des alinéas 28b) à d), toute demande au titre du présent règlement :

 

a) est faite par écrit sur le formulaire fourni par le ministère, le cas échéant;

 

b) est signée par le demandeur;

 

c) comporte les renseignements et documents exigés par le présent règlement et est accompagnée des autres pièces justificatives exigées par la Loi;

 

d) est accompagnée d’un récépissé de paiement des droits applicables prévus par le présent règlement;

 

e) dans le cas où le demandeur est accompagné d’un époux ou d’un conjoint de fait, indique celui d’entre eux qui agit à titre de demandeur principal et celui qui agit à titre d’époux ou de conjoint de fait accompagnant le demandeur principal.

 

 

161.(1) Le demandeur peut présenter des observations écrites pour étayer sa demande de protection et peut, à cette fin, être assisté, à ses frais, par un avocat ou un autre conseil.

 

 

(2) Il désigne, dans ses observations écrites, les éléments de preuve qui satisfont aux exigences prévues à l’alinéa 113a) de la Loi et indique dans quelle mesure ils s’appliquent dans son cas.

 

167. Pour l’application de l’alinéa 113b) de la Loi, les facteurs ci-après servent à décider si la tenue d’une audience est requise :

 

a) l’existence d’éléments de preuve relatifs aux éléments mentionnés aux articles 96 et 97 de la Loi qui soulèvent une question importante en ce qui concerne la crédibilité du demandeur;

 

b) l’importance de ces éléments de preuve pour la prise de la décision relative à la demande de protection;

 

c) la question de savoir si ces éléments de preuve, à supposer qu’ils soient admis, justifieraient que soit accordée la protection.

 

10.(1) Subject to paragraphs 28(b) to (d), an application under these Regulations shall

 

(a) be made in writing using the form provided by the Department, if any;

 

(b) be signed by the applicant;

 

(c) include all information and documents required by these Regulations, as well as any other evidence required by the Act;

 

(d) be accompanied by evidence of payment of the applicable fee, if any, set out in these Regulations; and

 

(e) if there is an accompanying spouse or common-law partner, identify who is the principal applicant and who is the accompanying spouse or common-law partner.

 

 

 

 

161.(1) A person applying for protection may make written submissions in support of their application and for that purpose may be assisted, at their own expense, by a barrister or solicitor or other counsel.

 

(2) A person who makes written submissions must identify the evidence presented that meets the requirements of paragraph 113(a) of the Act and indicate how that evidence relates to them.

 

167. For the purpose of determining whether a hearing is required under paragraph 113(b) of the Act, the factors are the following:

 

(a) whether there is evidence that raises a serious issue of the applicant’s credibility and is related to the factors set out in sections 96 and 97 of the Act;

 

 

 

(b) whether the evidence is central to the decision with respect to the application for protection; and

 

(c) whether the evidence, if accepted, would justify allowing the application for protection.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1573-10

 

INTITULÉ :                                       MOHAMMAD AHSAN ULLAH      

 

                                                            - et -

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 23 septembre 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 24 février 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jack Davis

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Kareena Wilding

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Davis & Grice

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

 

 

 

 

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