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Cour fédérale

 

Federal Court


 

 


Date : 20110311

Dossier : IMM-4345-10

Référence : 2011 CF 296

Ottawa (Ontario), le 11 mars 2011

En présence de monsieur le juge Phelan

 

 

ENTRE :

 

THEONEST KATO

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          INTRODUCTION

[1]               Le présent contrôle judiciaire concerne un ressortissant rwandais d’origine ethnique tutsie à qui la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a refusé de reconnaître la qualité de réfugié ou celle de personne à protéger malgré le rôle de témoin qu’il a joué lors de procès pour génocide qui s’est déroulé devant des juridictions gacaca.

 


II.         GENÈSE DE L’INSTANCE

[2]               M. Kato, le demandeur, a soutenu qu’au cours de la guerre civile qui a eu lieu au Rwanda en 1994, son père, sa mère et deux de ses frères et sœurs ont été tués par des Hutus. Seuls lui et une de ses sœurs ont survécu.

 

[3]               En 2006, le demandeur a témoigné lors de procès se déroulant devant des juridictions gacaca. Il a exposé son point de vue et, en tant que membre de la collectivité, il a interrogé divers témoins.

 

[4]               Le demandeur a soutenu qu’alors qu’il participait à ces procès, sa maison a été attaquée et qu’il a reçu des menaces de mort. Après avoir déménagé et avoir été rappelé pour témoigner aux procès, il a été agressé à son nouveau domicile. La police n’a pas réussi à retrouver les agresseurs.

 

[5]               Le demandeur est demeuré au Rwanda pendant 16 mois entre la fin de son témoignage et le moment où il a obtenu un visa de visiteur des États-Unis. Il est ensuite arrivé au Canada et il a demandé l’asile.

 

[6]               La Commission a estimé que le demandeur était crédible malgré le fait que l’ASFC avait saisi une liasse de documents qui avaient été envoyés par messager à son adresse et qui contenaient des sommations en blanc déjà signées et déjà estampillées en vue de la comparution devant les gacaca, des certificats de décès et des certificats de survivant au génocide, ainsi que des documents remplis devant servir en preuve devant la Commission.

 

[7]               Malgré le fait qu’elle a conclu que le demandeur avait rempli les documents en vue de les utiliser au cours de ses instances et malgré le fait qu’elle n’a de toute évidence pas accepté les dires du demandeur, qui affirmait qu’il n’était pas au courant de l’existence des documents en blanc, la Commission a estimé que ces faits n’étaient pas déterminants quant à la question de la crédibilité.

 

[8]               La Commission a toutefois rejeté la demande parce que le demandeur était demeuré au Rwanda pendant 16 mois après la dernière agression et qu’au cours de ces 16 mois, il ne lui était rien arrivé.

 

[9]               La Commission a fait remarquer que les procès devant les gacaca arrivaient à leur terme, relevant que le demandeur avait continué à se rendre au travail mais qu’il restait au travail après 18 h. La Commission a également mentionné des documents qui montraient que les tensions qui existaient sur le territoire rwandais avaient diminué tout en signalant que la situation demeurait difficile dans des régions où la police avait réussi à appréhender les auteurs de meurtres ou d’agressions.

 

III.       ANALYSE

[10]           Le demandeur affirme que la Commission a commis une erreur en ne tenant pas compte de certains éléments de preuve pertinents et qu’elle n’a pas motivé suffisamment sa décision.

 

[11]           La norme de contrôle qui s’applique à ces deux questions est celle de la décision correcte parce que la première est une question de droit et que la seconde a trait à l’équité procédurale. Toutefois, l’appréciation du risque personnalisé est d’abord et avant tout une décision factuelle qui commande la déférence (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12).

 

[12]           Le véritable débat, en ce qui concerne la preuve, ne porte pas sur l’omission de tenir compte de certains éléments de preuve mais sur le poids à accorder à la preuve. La Commission a tenu compte des documents pertinents et de la preuve et a pesé le pour et le contre en ce qui concerne la stabilité au Rwanda et les risques auxquels le demandeur serait exposé.

 

[13]           Il était loisible à la Commission de conclure, vu l’ensemble de la preuve documentaire et compte tenu des 16 mois pendant lesquels le demandeur était demeuré sans incident au Rwanda, qu’elle ne disposait pas de suffisamment d’éléments de preuve pour faire droit à la demande d’asile ou pour conclure à l’existence d’un risque personnalisé.

 

[14]           Le demandeur a eu la chance que la Commission juge sa version des faits crédible mais on ne saurait reprocher à la Commission d’avoir de ce fait commis une erreur en ne tenant pas compte de certains éléments de preuve.

 

[15]           Les motifs de la Commission étaient plus que suffisants pour expliquer son raisonnement et pour informer le demandeur des motifs du rejet de sa demande. Aucun manquement à l’équité procédurale n’a été commis.

 

IV.       CONCLUSION

[16]           La demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée. Il n’y a pas de question à certifier.

 

 

 


JUGEMENT

LA COUR REJETTE la demande de contrôle judiciaire.

 

 

 

« Michael L. Phelan »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.                                           


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4345-10

 

INTITULÉ :                                       THEONEST KATO

 

                                                            et

 

                                                            MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Edmonton (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 24 février 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              le juge Phelan

 

DATE DES MOTIFS :                      le 11 mars 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Kevin E. Moore

Me Carl H. Swenson

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Me Jamie Freitag

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

MOORE & ASSOCIATES

Avocats

Edmonton (Alberta)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

MYLES J. KIRVAN

Sous-procureur général du Canada

Edmonton (Alberta)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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