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Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20110504

Dossiers : T-2189-09

T-2192-09

 

Référence : 2011 CF 517

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 4 mai 2011

En présence de monsieur le juge Kelen

 

ENTRE :

Dossier : T-2189-09

 

THE CANADIAN TRANSIT COMPANY

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

LE MINISTRE DES TRANSPORTS, LE MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS, LE MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT, L’ADMINISTRATION PORTUAIRE DE WINDSOR et SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DE L’ONTARIO

 

 

défendeurs

 

Dossier : T-2192-09

 

SIERRA CLUB DU CANADA

 

 

et

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

et LE MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS, LE MINISTRE DES TRANSPORTS, LE MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT, L’ADMINISTRATION PORTUAIRE DE WINDSOR et SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DE L’ONTARIO

 

demandeur

 

   MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

(Concernant trois requêtes instruites durant l’audition de la demande de contrôle judiciaire)

 

  • [1] Les présents motifs concernent trois requêtes, soit deux requêtes des défendeurs visant la radiation d’éléments de preuve présentés par les demandeurs à l’appui de leurs demandes, ainsi qu’une requête du demandeur Sierra Club visant à interjeter appel d’une ordonnance rendue le 31 décembre 2010 par un protonotaire qui a refusé d’autoriser la modification de son avis de demande et le dépôt d’un témoignage par affidavit supplémentaire. Les deux requêtes en radiation – la requête du défendeur provincial, Sa Majesté la Reine du chef de l’Ontario, et celle des défendeurs fédéraux, le procureur général du Canada, le ministre des Transports, le ministre des Pêches et des Océans et l’Administration portuaire de Windsor – se recoupent dans une large mesure.

 

LES FAITS

  • [2] Dans deux instances distinctes instruites simultanément, les demandeurs demandent le contrôle judiciaire d’une décision rendue le 3 décembre 2009 par le ministre des Transports, le ministre des Pêches et des Océans et l’Administration portuaire de Windsor (les autorités responsables), selon laquelle il est peu probable que le nouveau pont proposé et l’infrastructure connexe reliant Windsor, en Ontario, à Detroit, dans l’État du Michigan, auront des effets environnementaux négatifs importants. Par cette décision, les autorités indiquaient essentiellement que le plan du nouveau pont proposé répondait aux exigences de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, LC 1993, c 37.

 

  • [3] À l’appui de cette demande de contrôle judiciaire, le demandeur Sierra Club du Canada a déposé les affidavits de Dan McDermott, de Ronald J. Brooks, Ph. D., de Robert Murphy, Ph. D. et d’Atif Kubursi. La demanderesse, The Canadian Transit Company (CTC), a déposé l’affidavit de Paula Lombardi. Les demandeurs ont aussi déposé la transcription et les pièces d’accompagnement du contre-interrogatoire de la seule personne ayant souscrit un affidavit pour les défendeurs fédéraux, Kaarina Stiff.

 

  • [4] Après le dépôt de sa demande, le demandeur Sierra Club du Canada a demandé l’autorisation de présenter une modification de son avis de demande, ainsi qu’un affidavit supplémentaire de Dan McDermott.

 

  • [5] Dans les deux requêtes en radiation, les défendeurs contestent l’admissibilité de la majeure partie de la preuve présentée par les demandeurs. Ils contestent plus précisément les éléments de preuve suivants :

    1. L’affidavit de Ronald J. Brooks, fait sous serment le 27 septembre 2010 (l’affidavit Brooks);

    2. L’affidavit de Robert Murphy, fait sous serment le 31 août 2010 (l’affidavit Murphy);

    3. L’affidavit d’Atif Kubursi, fait sous serment le 28 septembre 2010 (l’affidavit Kubursi).

 

  • [6] Le défendeur provincial conteste en outre un certain nombre de paragraphes de l’affidavit de Dan McDermott, fait sous serment le 27 septembre 2010.

 

  • [7] Les défendeurs fédéraux contestent aussi les éléments de preuve suivants présentés par la demanderesse CTC :

    1. l’étude Wilbur Smith – pièces 165(A) et (B) jointes à l’affidavit de Paula Lombardi fait sous serment le 24 septembre 2010;

    2. la mise à jour de 2010 de l’étude Wilbur Smith – pièce 165(C) jointe à l’affidavit de Paula Lombardi fait sous serment le 24 septembre 2010;

    3. le rapport Halcrow – pièce 159 jointe à l’affidavit de Paula Lombardi fait sous serment le 24 septembre 2010;

    4. le rapport d’étude sur le plan directeur de l’aire du pont Ambassador (« Ambassador Bridge Plaza Master Plan Study Report ») – pièce G jointe à la transcription du contre-interrogatoire de Kaarina Stiff, présentée aux fins d’identification seulement.

 

  • [8] Enfin, les défendeurs fédéraux demandent l’autorisation de présenter des éléments de preuve supplémentaires sous la forme d’un affidavit de Rebecca Coleman.

 

  • [9] Le 1er novembre 2010, les défendeurs fédéraux ont informé le demandeur Sierra Club du Canada qu’ils avaient omis, par erreur, d’inclure un rapport d’expert sur les espèces en péril lors de leur communication initiale du dossier aux décideurs fédéraux. Le 3 novembre 2010, le demandeur Sierra Club du Canada a signifié aux défendeurs un affidavit supplémentaire de Dan McDermott, ainsi qu’un avis modifié de demande de contrôle judiciaire en réponse à la modification des renseignements versés au dossier.

 

  • [10] Lors de l’audience, le Sierra Club du Canada a abandonné bon nombre des modifications qu’il proposait et a demandé l’autorisation de modifier son avis de demande afin d’y ajouter les paragraphes 21 et les alinéas 23 g), k) et v) :

[traduction]
¶21.  Le 9 avril 2010, le gouvernement de l’Ontario a annoncé qu’il avait conclu une entente avec la ville de Windsor pour l’achat de terrains supplémentaires en vue de l’aménagement d’espaces verts supplémentaires entre l’accotement de la nouvelle autoroute et les maisons situées le long de certaines portions de la route. Le demandeur se demande dans quelle mesure cela modifiera la superficie au sol de la promenade Windsor-Essex.

¶23.  Les défendeurs ont commis une erreur de droit ou de compétence en ne se conformant pas à la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, notamment aux articles 2, 4, 16, 17 et 20 de cette Loi, dans la préparation du rapport. Sans restreindre la portée générale de ce qui précède, les défendeurs ont commis une erreur, en :

[...]

g) omettant de tenir compte du rapport de l’économiste du ministère des Richesses naturelles de l’Ontario sur les scénarios probables relatifs aux futures demandes de déplacements;

[...]

k) se fiant à des renseignements inexacts disant que des experts indépendants, nommément Ron Brooks et John Ambrose, Ph. D., engagés pour formuler des opinions en application du paragraphe 17(2) de la Loi sur les espèces en voie de disparition concernant la mise en péril de la survie ou du rétablissement de la couleuvre à petite tête et de l’atétris farineux en Ontario, avaient « appuyé » les plans d’atténuation proposés par cette Loi pour ces espèces;

[...]

v) omettant de tenir compte des répercussions du changement de la superficie au sol du projet sur les espèces en péril qui seront touchées, ou d’examiner si d’autres espèces pourraient être touchées par la nouvelle superficie au sol du projet, à la suite des modifications substantielles apportées à la promenade Windsor-Essex après l’examen environnemental préalable.

 

  • [11] Dans son appel, le Sierra Club du Canada demande également l’autorisation de déposer l’affidavit supplémentaire de Dan McDermott qui comprend deux pièces portant sur les faits qui sous-tendent le paragraphe modifié.

 

Éléments de preuve visés par les requêtes en radiation

1. L’affidavit Brooks

  • [12] M. Ronald Brooks, Ph. D., est l’un des deux experts retenus par le ministère des Richesses naturelles de l’Ontario, en application de la Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition de l’Ontario, L.O. 2007, chap. 6 (LEVD), pour formuler une opinion et déterminer si l’autoroute prévue dans le projet proposé de nouveau pont mettrait en danger la couleuvre à petite tête – une espèce menacée. Dans son rapport, M. Brooks mettait en garde contre les dangers potentiels du projet pour la couleuvre à petite tête. Contrairement à M. Brooks, le deuxième expert retenu par le ministère n’a pas formulé de mise en garde quant aux dangers potentiels pour cette espèce.

 

  • [13] Comme les deux rapports d’experts présentaient des conclusions divergentes, le ministère des Richesses naturelles de l’Ontario a convoqué une rencontre avec les deux experts afin qu’ils clarifient leur position. Une note décrivant en détail les résultats de cette rencontre mentionne que M. Brooks a « appuyé » une série de mesures d’atténuation révisées. Les experts semblaient donc s’entendre pour dire que la survie ou le rétablissement de la couleuvre à petite tête n’était pas en péril en Ontario. Le rapport initial de M. Brooks présenté au ministère des Richesses naturelles et la note complémentaire sont des éléments irréfutés de la preuve présentée à la Cour.

  • [14] Dans son affidavit, M. Brooks conteste le contenu de la note, ainsi que l’accord apparent survenu entre les experts. Il déclare sous serment qu’il n’a jamais appuyé les plans d’atténuation révisés pour la couleuvre à petite tête et il explique les circonstances dans lesquelles s’est déroulée la rencontre durant laquelle il aurait été consulté.

 

2. L’affidavit Murphy

  • [15] En juillet 2010, le Sierra Club a retenu les services de M. Robert Murphy, Ph. D., afin qu’il présente un témoignage d’expert sur les répercussions du nouveau pont sur les espèces en péril. Dans son affidavit, M. Murphy mentionne qu’il a été engagé pour évaluer « en qualité de pair » les rapports d’experts reçus par le ministère des Richesses naturelles de l’Ontario au sujet des demandes de permis pour la couleuvre à petite tête et la couleuvre fauve de l’Est (qui figure sur la liste des espèces menacées de la LEVD de l’Ontario et qui, à ce titre, requiert également un permis du ministère). M. Murphy présente également sa propre évaluation quant aux risques que présente le projet proposé de nouveau pont pour ces deux espèces.

 

  • [16] Dans son affidavit et le rapport joint, M. Murphy juge que les mesures d’atténuation proposées par le ministère des Richesses naturelles sont inadéquates et que toute conclusion selon laquelle le projet de nouveau pont ne mettrait pas en danger les espèces de couleuvre « manque de vue à long terme » et est « sans fondement scientifique ».

 

3. L’étude Wilbur Smith

  • [17] L’« étude Wilbur Smith » renvoie aux deux documents produits par le cabinet Wilbur Smith Associates pour le compte de Transports Canada, en réponse à une demande de propositions visant à évaluer les recettes susceptibles d’être générées par la perception de péages au nouveau pont proposé. Les deux documents en question sont le rapport de septembre 2008 intitulé « Windsor Gateway Study – Corridor Growth Comparison » et celui de janvier 2009 « Comprehensive Traffic and Toll Revenue Study ».

 

  • [18] Transports Canada a commandé l’étude Wilbur Smith en sa qualité de copromoteur du nouveau pont. Cette étude présente des prévisions sur la circulation afin de prévoir l’utilisation des différentes options de transport dans la zone frontalière entre Windsor et Detroit.

 

4. Mise à jour de 2010 de l’étude Wilbur Smith

  • [19] Il s’agit d’une mise à jour faite en 2010 de l’étude Wilbur Smith, qui a été commandée par le Department of Transportation du Michigan, un autre copromoteur du projet de nouveau pont. Cette mise à jour a été terminée en février 2010.

 

  • [20] L’étude Wilbur Smith et sa mise à jour en 2010 sont incluses dans le dossier de la demande, comme pièces jointes à la transcription du contre-interrogatoire de la souscriptrice d’affidavit pour les défendeurs fédéraux, Kaarina Stiff, et elles ne sont cotées qu’à des fins d’identification.

 

5. L’affidavit Kubursi

  • [21] Atif Kubursi est président d’Econometric Research Limited. Le Sierra Club a retenu ses services après la publication de la mise à jour de l’étude Wilbur Smith en 2010. M. Kubursi précise que son entreprise a été retenue pour formuler une « opinion d’expert » sur l’étude Wilbur Smith et sa mise en jour en 2010. Il joint un rapport daté de septembre 2010, intitulé « Wilbur Smith Associates Report on Comprehensive Traffic and Toll Revenue Study – A Critical Evaluation ». Son affidavit résume ce rapport, dans lequel il conteste les variables et la méthodologie utilisées par Wilbur Smith pour établir ses prévisions sur la circulation future dans la zone du projet proposé de nouveau pont.

 

6. Le rapport Halcrow

  • [22] Le rapport Halcrow est un rapport daté de juin 2009, intitulé « Ambassador Bridge – Traffic and Revenue Study », commandé par la CTC au groupe Halcrow Group Limited. Tout comme l’affidavit Kubursi, le rapport Halcrow critique sévèrement les variables et la méthodologie utilisées par les promoteurs du projet de nouveau pont pour établir les prévisions relatives à la circulation future dans la zone du projet proposé. Le rapport Halcrow présente des prévisions sur la circulation future qui sont nettement inférieures à celles utilisées par les promoteurs du projet de nouveau pont.

 

7. Le rapport « Ambassador Bridge Plaza – Master Plan Study Report »

  • [23] Le rapport « Ambassador Bridge Plaza – Master Plan Study Report », daté de février 2010, a été produit par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC); ce rapport énonce les exigences de l’ASFC relativement à l’aménagement de l’aire de douanes du côté canadien à l’emplacement du pont Ambassador actuel, advenant l’élargissement du pont.

 

  • [24] Mme Stiff a pris connaissance de ce rapport pour la première fois lors de son contre-interrogatoire. Elle ne l’avait jamais vu auparavant. Par conséquent, il est inclus dans la documentation de la demande comme pièce jointe à la transcription du contre-interrogatoire de Kaarina Stiff et n’est coté qu’aux fins d’identification.

 

8. Paragraphes de l’affidavit McDermott

  • [25] Dan McDermott travaille pour le demandeur Sierra Club depuis 1998; au moment de la présentation de la demande en l’espèce, il était directeur de la section de l’Ontario du Sierra Club du Canada. L’affidavit de M. McDermott compte 62 pages et 250 pièces. Le défendeur provincial conteste 47 paragraphes de l’affidavit de M. McDermott qui portent sur les rapports mis en doute dans les affidavits Murphy et Brooks, des renseignements contenus dans l’affidavit Kubursi et des renseignements relatifs au projet de prolongement de la promenade Windsor-Essex.

 

Demande d’ajout d’un élément de preuve à l’appui des requêtes en radiation des défendeurs fédéraux : affidavit supplémentaire de Rebecca Coleman

  • [26] Dans le mémoire des faits et du droit présenté à l’appui de sa demande, la CTC fait valoir que les défendeurs fédéraux ont omis de communiquer au public l’information utilisée dans le rapport d’examen préalable pour déterminer la taille de l’aire de douanes requise pour le projet de nouveau pont, notamment une lettre de l’ASFC à Transports Canada datée du 29 novembre 2005. La CTC a présenté cette lettre lors du contre-interrogatoire de la souscriptrice d’affidavit des défendeurs fédéraux, en décembre 2010.

 

  • [27] L’affidavit de Rebecca Coleman énonce les éléments de preuve présentés par les défendeurs pour réfuter les arguments de la CTC. Dans cet affidavit, Mme Coleman déclare que les renseignements contenus dans la lettre en question ont été présentés dans une note publiée sur un site Web public le 28 novembre 2005, et que la lettre proprement dite a été affichée en 2008. Durant l’audience, la CTC a consenti à l’admission de cet affidavit.

 

Demande d’ajout d’un élément de preuve par le Sierra Club du Canada concernant l’appel interjeté à l’égard de l’ordonnance du protonotaire : affidavit supplémentaire de Dan McDermott

  • [28] L’affidavit supplémentaire de Dan McDermott comporte deux pièces :

    1. Un courriel de John Ambrose, Ph. D., au ministère des Richesses naturelles de l’Ontario, sur les stratégies proposées pour répondre aux préoccupations que M. Ambrose a soulevées dans son rapport au Ministère au sujet d’une espèce en péril;

    2. Un affidavit supplémentaire de Ronald Brooks, Ph. D., fait sous serment le 12 octobre 2010, dans lequel M. Brooks décrit une rencontre durant laquelle il a discuté des stratégies proposées pour répondre aux préoccupations qu’il a soulevées dans son rapport au ministère des Richesses naturelles de l’Ontario concernant une espèce en péril.

 

  • [29] Les parties reconnaissent qu’aucun de ces documents n’a été présenté aux décideurs.

 

DISCUSSION

  • [30] Les présentes requêtes soulèvent les questions suivantes :

    1. Les éléments de preuve précités devraient-ils être radiés?

    2. Faudrait-il accorder au Sierra Club du Canada l’autorisation de modifier son avis de demande?

    3. Faudrait-il accorder au Sierra Club du Canada l’autorisation de déposer l’affidavit supplémentaire de Dan McDermott?

 

  • [31] Durant l’audience, la Cour a instruit les requêtes et les demandes. Après avoir examiné tous les éléments de preuve, la Cour conclut qu’aucun élément de preuve visé par ces trois requêtes n’a d’influence déterminante sur l’issue de l’affaire. La Cour a donc dû examiner en détail tous ces éléments de preuve, que ce soit pour l’examen des requêtes ou dans le cadre des motifs formulés à l’égard de la demande.

 

  • [32] La Cour souligne la nature sommaire des demandes, qui devrait normalement dissuader les parties de présenter des requêtes préliminaires en radiation (voir, par exemple, Mayne Pharma (Canada) Inc. c Aventis Pharma Inc., 2005 CAF 50, au paragraphe 13).

  • [33] La Cour note également que, dans l’arrêt Rosenstein c Atlantic Engraving Ltd., 2002 CAF 503, aux paragraphes 8 et 9, la Cour d’appel décrit les quatre exigences qui doivent être satisfaites pour que la Cour autorise le dépôt d’affidavits supplémentaires :

    1. Les éléments de preuve proposés vont dans le sens des intérêts de la justice;

    2. Les éléments de preuve proposés aideront la Cour;

    3. Les éléments de preuve proposés ne causeront pas de préjudice grave à la partie adverse;

    4. Les éléments de preuve proposés n’étaient pas disponibles, ou n’avaient pas été jugés pertinents, auparavant.

 

  • [34] Dans la décision Janssen-Ortho Inc. c Apotex Inc., 2010 CF 81, au paragraphe 33, le juge Zinn a énoncé une cinquième exigence : la preuve ne doit pas retarder indûment l’instance.

 

  • [35] Après avoir examiné tous les éléments de preuve présentés à l’audience, la Cour conclut que les intérêts de la justice ont été mieux servis, en l’espèce, en se concentrant d’abord sur les principales questions en litige, avant de statuer sur ces requêtes préliminaires.

 

  • [36] Au moment de statuer sur la présente affaire, la Cour a rédigé ainsi ses motifs du jugement :

    1. Paragraphes 118 à 125 : les renseignements de la CTC sur la mise à jour de la circulation, qui n’ont pas été présentés aux décideurs, ne sont pas admissibles. Parallèlement, la Cour a conclu que les décideurs disposaient d’autres renseignements à jour sur les volumes de circulation, qui avaient été fournis par les deux demandeurs et qui indiquaient une baisse considérable de la circulation sur le pont Ambassador et les deux autres passages dans la région de Windsor-Detroit. Il s’ensuit donc que la Cour accueillera la requête présentée par les défendeurs fédéraux visant à radier ce nouvel élément de preuve de la CTC;

    2. Paragraphes 177 à 182 : les rapports présentés au ministère des Richesses naturelles de l’Ontario, ainsi que les nouveaux éléments de preuve qui critiquent ces rapports et que le Sierra Club souhaite présenter, n’ont pas été présentés aux décideurs en l’espèce ni n’ont été pris en compte dans le rapport d’examen préalable. Le demandeur a soutenu qu’ils auraient dû l’être, mais qu’ils ne l’ont pas été à cause d’une erreur de jugement de la part de fonctionnaires fédéraux. La Cour a conclu que ces éléments de preuve sont liés aux mesures d’atténuation envisagées par la province en application de la Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition de l’Ontario et que leur substance est adéquatement pondérée et prise en considération dans ce contexte, sous réserve d’un examen par la Cour divisionnaire de l’Ontario en mai 2011. Les autorités fédérales responsables sont en droit de se fier au ministère des Richesses naturelles de l’Ontario pour l’élaboration de mesures d’atténuation détaillées, comme le prévoit le paragraphe 20(1) de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale et comme l’a reconnu à maintes reprises la jurisprudence citée dans les motifs du jugement.

 

  • [37] La Cour est convaincue qu’il aurait été impossible de statuer adéquatement sur ces trois requêtes avant l’audience, sans entendre tous les arguments des parties. Il est préférable de laisser au juge chargé de l’audience le soin de statuer sur la pertinence de tous ces documents, et cette question ne peut être déterminée de façon préliminaire. Pour cette raison, la Cour est convaincue que le protonotaire ne pouvait convenablement statuer sur l’admissibilité des nouveaux éléments de preuve que le demandeur Sierra Club souhaitait présenter, mais il l’a fait; la Cour a néanmoins estimé, dans son jugement, que l’opinion du protonotaire quant à la pertinence de la preuve était juste. Par conséquent, la Cour rejetterait l’appel si elle avait à se prononcer sur la requête en appel de l’ordonnance du protonotaire.

 

  • [38] En ce qui concerne les deux requêtes présentées par les défendeurs fédéraux et le défendeur de l’Ontario en vue de radier certains éléments de preuve, la pertinence de cette preuve ne pouvait être établie avant une instruction approfondie. Après avoir mené une instruction approfondie de l’affaire, la Cour est convaincue que ces nouveaux éléments de preuve ne sont pas pertinents pour les raisons précitées, énoncées dans les motifs de son jugement (aux paragraphes 175 à 183).

 


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE ce qui suit :

  Concernant les trois requêtes instruites durant l’audition de la demande de contrôle judiciaire :

  1. Les deux requêtes des défendeurs visant la radiation des nouveaux éléments de preuve présentés par les demandeurs sont accueillies; les dépens suivront l’issue de la cause;

  2. La requête du Sierra Club visant à interjeter appel de l’ordonnance du protonotaire datée du 31 décembre 2010 est rejetée; les dépens suivront l’issue de la cause.

 

 

 

« Michael A. Kelen. »

Juge

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIERS :  T-2189-09 et T-2192-09

 

INTITULÉ :  T-2189-09, The Canadian Transit Company c Ministre des Transports et al.

 

T-2192-09, Sierra Club Canada c Le procureur général du Canada et al.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :  Toronto (Ontario)

 

DATES DE L’AUDIENCE :  T-2189-09 -- Les 1er et 2 mars 2011

  T-2192-09 -- Les 6 et 7 avril 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :  LE JUGE KELEN

 

DATE DES MOTIFS :  Le 4 mai 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Larry P. Lowenstein, Laura Fric et Kevin O’Brien

 

Paula Boutis, Karen Dawson

POUR LA DEMANDERESSE

(THE CANADIAN TRANSIT COMPANY)

 

POUR LE DEMANDEUR

(SIERRA CLUB DU CANADA)

 

Peter M. Southey, Jon Bricker et Karen Lovell

 

William J. Manuel, William MacLarkey et Lise Favreau

 

POUR LE DÉFENDEUR

(SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

(SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DE L’ONTARIO)

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Osler, Hoskin & Harcourt S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Toronto (Ontario)

 

 

Iler Campbell, s.r.l.

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

(THE CANADIAN TRANSIT COMPANY)

 

 

POUR LE DEMANDEUR

(SIERRA CLUB DU CANADA)

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

(SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA)

 

 

Ministère du Procureur général

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

(SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DE L’ONTARIO)

 

 

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