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Cour fédérale

 

Federal Court

 

Date : 20110524

Dossier : IMM-5024-10

Référence : 2011 CF 578

Ottawa (Ontario), ce 24e jour de mai 2011

En présence de l’honorable juge Pinard

ENTRE :

Diego Enrique CASILLAS GOMEZ

 

Partie demanderesse

 

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

Partie défenderesse

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]          Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision d’un membre de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (le tribunal) présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001), ch. 27 (la Loi) par Diego Enrique Casillas Gomez (le demandeur). Le tribunal a conclu que le demandeur n’avait pas la qualité de réfugié ni celle de personne à protéger et a donc rejeté sa demande d’asile.

[2]          Le demandeur est un citoyen du Mexique, né le 6 mars 1985. Il vivait dans l’État de Querétaro.

 

[3]          En octobre 2008, il travaillait en tant que valet de stationnement. Le 25 octobre 2008, lors d’un mariage à son lieu de travail, il aurait obtenu les clés du véhicule de Federico Ruiz Lomeli, une personnalité connue et influente, fils d’un des dirigeants de la compagnie Coca-Cola dans l’État de Querétaro.

 

[4]          Le 28 octobre 2008, le demandeur aurait reçu une visite des gardes du corps de M. Lomeli à son lieu de travail. Les gardes du corps l’auraient accusé d’avoir volé une mallette appartenant à M. Lomeli lorsqu’il avait stationné la voiture. La mallette contenait des papiers importants et de l’argent. Le demandeur a nié l’avoir prise.

 

[5]          Au cours des jours suivants, les gardes du corps seraient revenus plusieurs fois. Ils auraient menacé le demandeur de représailles s’il ne remettait pas la mallette. Le demandeur aurait fui chez sa sœur et ses amis. Le 11 novembre, il aurait décidé de venir au Canada et aurait obtenu un passeport. Le 15 novembre, il aurait été agressé de nouveau par les gardes du corps de M. Lomeli. Le 19 novembre, il s’est rendu à Toronto.

 

[6]          Le tribunal a noté qu’il n’y avait aucune preuve reliée à l’un des cinq motifs de l’article 96 de la Loi et a donc conclu que cet article ne s’appliquait pas. Comme il n’y avait aucune preuve, par ailleurs, que l’État mexicain était l’agresseur du demandeur, le tribunal a en outre conclu que l’alinéa 97(1)a) ne s’appliquait pas et que seul l’alinéa 97(1)b) pouvait être considéré. Le tribunal a finalement trouvé que la crédibilité du demandeur n’avait pas été établie et donc qu’il ne s’était pas déchargé de son fardeau de démontrer une crainte raisonnable de persécution.

 

[7]          Le tribunal a trouvé que lors de son témoignage, le demandeur a eu beaucoup de difficultés à se remémorer des événements passés ainsi que des dates et des détails importants, et ce, bien que l’audience ait eu lieu dans les 24 mois suivant les incidents allégués. Les contradictions et omissions relevées par le tribunal sont reliées aux faits importants de la demande d’asile.

 

[8]          La seule question en litige est celle de savoir si la décision du tribunal est raisonnable.

 

[9]          En effet, la norme de contrôle applicable aux conclusions sur la crédibilité est celle de la décision raisonnable. Au paragraphe 47 de l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, la Cour suprême du Canada a souligné que « [l]e caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. »

 

[10]      Après révision de la preuve et audition des procureurs des parties, je suis d’avis que la décision est raisonnable en ce qui a trait à l’appréciation des contradictions et des omissions du demandeur, lesquelles apparaissent clairement à la lecture du Formulaire de renseignements personnels du demandeur, des transcriptions de ses entrevues avec les agents d’immigration, ainsi que de la transcription de l’audience. Je suis d’accord avec le tribunal que celles-ci portent sur les faits centraux du récit du demandeur, lequel n’a même pas pu offrir une chronologie cohérente des événements, quelques jours à peine après les incidents allégués. Je suis aussi d’accord avec le défendeur que l’arrêt Moscol et al. c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2008 CF 657, est pertinent. Dans sa décision, le juge Luc Martineau a écrit :

[21]     La jurisprudence indique que des divergences entre la déclaration au point d’entrée et le témoignage d’un demandeur sont suffisantes pour justifier une conclusion de non-crédibilité lorsque ces contradictions portent sur des éléments centraux d’une demande : Chen c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 767, [2005] A.C.F. no 959 (QL) au para. 23 et Neame c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] A.C.F. no 378 (QL). De plus, la SPR est en droit d’évaluer la crédibilité d’un demandeur en se fondant sur une seule contradiction, quand la preuve contestée est un aspect important de la demande : voir Nsombo c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 505, [2004] A.C.F. no 648 (QL).

 

 

 

[11]      Par ailleurs, le demandeur reproche au tribunal de ne pas avoir pris en considération le fait qu’il était nerveux et stressé pendant l’audience, alléguant qu’il est clair que la violence et le stress constituent des éléments ayant pu affecter sa stabilité émotionnelle. Il ajoute avoir mentionné clairement avoir rencontré plusieurs fois les gardes du corps de M. Lomeli et que le fait qu’il ne puisse se rappeler de ces rencontres de façon détaillée ne saurait miner sa crédibilité.

 

[12]      Or, d’après la transcription de l’audience, le demandeur n’a invoqué qu’une seule fois sa nervosité, et ce, pour tenter de justifier pourquoi il n’avait pas mentionné l’incident du 17 novembre 2008 lors de son entrevue avec l’agent d’immigration.

 

[13]      De plus, comme le note le défendeur, le demandeur n’a soumis aucune preuve médicale au sujet de son état psychologique lors de l’audience, ce qu’il aurait bien pu faire.

[14]      Prenant en compte le fait que le tribunal a eu la chance d’observer le comportement du demandeur comme témoin et que ce dernier n’a jamais indiqué lors de l’audience que celle-ci le rendait nerveux, je n’entends pas intervenir sur l’appréciation faite par le tribunal en regard du manque de crédibilité du demandeur.

 

[15]      Pour toutes ces raisons, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Je suis d’accord avec les procureurs des parties qu’il n’y a pas ici matière à certification.

 


 

JUGEMENT

 

            La demande de contrôle judiciaire d’une décision d’un membre de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié concluant que le demandeur n’avait pas la qualité de réfugié ni celle de personne à protéger selon les articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001), ch. 27, est rejetée.

 

 

« Yvon Pinard »

Juge

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-5024-10

 

INTITULÉ :                                       Diego Enrique CASILLAS GOMEZ c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 13 avril 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Pinard

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 24 mai 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Manuel Centurion                          POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

 

Me Gretchen Timmins                          POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Manuel Centurion                                                         POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

 

Myles J. Kirvan                                                            POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

 

 

 

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