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Cour fédérale

 

Federal Court

Date : 20110616

Dossier : IMM-6869-10

Référence : 2011 CF 711

[Traduction française certifiée, non révisée]

Toronto (Ontario), le 16 juin 2011

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE CAMPBELL

 

ENTRE :

 

AKANBI NOAH OTAPO

 

 

 

Demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

 

 

Défendeur

 

 

 

 

 

   MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La Cour est saisie de la présente demande d’asile présentée par un citoyen du Nigeria qui se dit victime de persécution de la part des policiers nigérians parce qu'il ne leur a pas versé des pots-de-vin. La demande d’asile du demandeur a été rejetée par la Section de la protection des réfugiés (SPR) parce qu’elle a tirée une conclusion d’ensemble défavorable quant à la crédibilité, laquelle est tributaire de deux conclusions principales d’invraisemblance.

 

[2]               S’agissant des conclusions d’invraisemblance, je conclus que la SPR a raisonnablement appliqué la bonne approche qu’avait énoncée le juge Muldoon dans Istvan Vodics c. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, 2005 CF 783 :

Le tribunal a fait allusion au principe posé dans l'arrêt Maldonado c. M.E.I., [1980] 2 C.F. 302 (C.A.), à la page 305, suivant lequel lorsqu'un revendicateur du statut de réfugié affirme la véracité de certaines allégations, ces allégations sont présumées véridiques sauf s'il existe des raisons de douter de leur véracité. Le tribunal n'a cependant pas appliqué le principe dégagé dans l'arrêt Maldonado au demandeur et a écarté son témoignage à plusieurs reprises en répétant qu'il lui apparaissait en grande partie invraisemblable. Qui plus est, le tribunal a substitué à plusieurs reprises sa propre version des faits à celle du demandeur sans invoquer d'éléments de preuve pour justifier ses conclusions

 

Un tribunal administratif peut tirer des conclusions défavorables au sujet de la vraisemblance de la version des faits relatée par le revendicateur, à condition que les inférences qu'il tire soient raisonnables. Le tribunal administratif ne peut cependant conclure à l'invraisemblance que dans les cas les plus évidents, c'est-à-dire que si les faits articulés débordent le cadre de ce à quoi on peut logiquement s'attendre ou si la preuve documentaire démontre que les événements ne pouvaient pas se produire comme le demandeur d'asile le prétend. Le tribunal doit être prudent lorsqu'il fonde sa décision sur le manque de vraisemblance, car les demandeurs d'asile proviennent de cultures diverses et que des actes qui semblent peu plausibles lorsqu'on les juge en fonction des normes canadiennes peuvent être plausibles lorsqu'on les considère en fonction du milieu dont provient le revendicateur [voir L. Waldman, Immigration Law and Practice (Markham, ON, Butterworths, 1992) à la page 8.22].

 

 

[3]               La SPR, en se fondant sur une preuve documentaire vérifiable, a eu raison de croire que normalement si le demandeur n’avait pas payé de pots-de-vin, il aurait été arrêté et torturé en cours de détention, et sa famille aurait été arrêtée et détenue s'il s'était enfui. Se fondant sur de telles attentes, la SPR a tiré des conclusions de fait portant que « [le demandeur] n’a laissé entendre ni dans sa preuve orale ni dans sa preuve écrite qu’il avait été battu ou maltraité pendant sa détention » (paragraphe 5 de la décision), et « qu’aucun membre de la famille du demandeur d’asile, y compris sa fille de 14 ans, n’a été arrêté ou détenu par la police depuis qu’il s’est enfui » (paragraphe 10 de la décision). Les conclusions d’invraisemblance sont fondées sur les conclusions de fait.

 

[4]               S’agissant de la première conclusion de fait, le demandeur déclare dans son Formulaire de renseignements personnels (FRP) qu'il [traduction] « a été intimidé et battu par la police et par deux criminels » alors qu'il était détenu (page 36 du dossier de la demande). S’agissant de la deuxième, rien dans le dossier dont disposait la SPR n’établit directement que les policiers s’étaient mal conduits envers les membres de la famille du demandeur. Sur ce dernier point, je retiens l'argument du conseil du demandeur selon lequel la question d'une telle conduite n’a tout simplement pas été abordée dans le cadre du processus d’examen de la demande d’asile. En conséquence, je rejette l'argument du conseil du défendeur selon lequel on peut inférer l’absence d’inconduite du fait qu'il n'aucune preuve au dossier n’établi une telle inconduite. En conséquence, j’estime que les conclusions de fait sont sans fondement.

 

[5]               Par conséquent, je conclus que la décision visée par le présent contrôle est déraisonnable parce qu’elle n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

 


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que :

 

La décision visée par le présent contrôle judiciaire est annulée et l’affaire renvoyée à un tribunal différemment constitué afin que celui-ci statue à nouveau.

 

Il n’y a aucune question à certifier.

 

« Douglas R. Campbell »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6869-10

 

INTITULÉ :                                       AKANBI NOAH OTAPO c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L'AUDIENCE :               LE 16 JUIN 2011

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE CAMPBELL

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 16 JUIN 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

RICHARD ODELEYE

POUR LE DEMANDEUR

 

MONMI GOSWAMI

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

 

RICHARD ODELEYE

AVOCAT &PROCUREUR

TORONTO (ONTARIO)

 

POUR LE DEMANDEUR

MYLES J. KIRVAN

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

TORONTO (ONTARIO)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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