Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20110627

Dssier : IMM-6234-10

Référence : 2011 CF 774

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 27 juin 2011

En présence de monsieur le juge Near

 

 

ENTRE :

 

BABURAM SINGH

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue le 1er octobre 2010 par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) par laquelle le demandeur a été jugé ne pas avoir la qualité de réfugié au sens de la Convention ni de personne à protéger en application des articles 96 et 97 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 [la LIPR]. La Commission a conclu que le demandeur n’avait pas réussi à réfuter la présomption de l'existence d'une protection de l'État.

 

[2]               Pour les motifs suivants, la présente demande sera rejetée.

 

I.          Le contexte

 

A.        Le contexte factuel

 

[3]               Le demandeur, Baburam Singh, est un citoyen guyanien. Il a travaillé en tant que technicien en réparation auprès de la garde côtière guyanaise.

 

[4]               Le 19 septembre 2008, le demandeur travaillait sur un navire de la garde côtière lorsque celui‑ci a intercepté un autre navire. Les membres du personnel de la garde côtière ont abordé le navire et ont procédé à une fouille. À bord, une grande quantité de cocaïne a été trouvée. Au cours de la fouille, les hommes à bord du navire ont menacé le demandeur et les autres membres du personnel de la garde côtière en leur disant qu’ils étaient « finis ». Les six hommes à bord du navire ont été arrêtés et transportés ainsi que leur navire à la base de la garde côtière. La police a alors placé les hommes en détention.

 

[5]               Environ deux semaines plus tard, le demandeur a reconnu quelques individus du navire intercepté flânant dans un véhicule stationné près de la base de la garde côtière. Le demandeur affirme qu’ils mimaient faire feu en sa direction.

 

[6]               Peu de temps après, le demandeur allègue avoir reçu chez lui des appels téléphoniques menaçants. L’appelant voulait savoir où était entreposée la drogue saisie. Le demandeur a été menacé de mort s’il refusait de coopérer. Il prétend avoir reçu dix autres appels du genre entre octobre et novembre 2008 et chaque fois, il a informé son interlocuteur qu’en tant que technicien en réparation, il ne savait pas où était entreposées les drogues saisies.

 

[7]               Le demandeur a déposé des plaintes auprès commandant de la garde côtière et de la police de Georgetown lorsqu’il a réalisé que sa vie était en danger, la nuit où il a reçu le deuxième appel. Bien que la police ait rempli un rapport et ait affirmé qu’elle enquêterait sur la question, selon ce que le demandeur en sait, aucune mesure n’a été entreprise pour l’aider.

 

[8]               Le demandeur est arrivé au Canada en novembre 2008 pour assister aux funérailles de son frère cadet. Il est entré au pays avec un visa de visiteur. Après avoir fait part de ses inquiétudes aux membres de sa parenté, il lui a été conseillé de demande l’asile. C’est ce qu’il a fait le 12 décembre 2008.

 

B.         La décision contestée

 

[9]               La Commission a estimé que le demandeur n’avait pas entrepris toutes les mesures raisonnables selon les circonstances pour obtenir la protection de l’État en Guyana. Il n’a contacté les autorités qu’une seule fois avant de demander l’asile au Canada. Le demandeur ne savait pas si sa plainte avait fait l’objet d’une enquête et il ignorait les résultats de la possible enquête, car il n’avait pas fait de suivi. Le demandeur ne savait pas si ses présumés agents persécuteurs avaient été poursuivis ou emprisonnés, parce qu’il ne s’en est pas enquis.

 

[10]           La Commission a constaté que la garde côtière et la police travaillaient efficacement le 19 septembre 2008 lorsque la garde côtière a intercepté le navire, a trouvé une grande quantité de drogues illicites, et a appréhendé et arrêté les suspects à bord du navire. La Commission croyait que ces actions laissaient penser que la protection de l’État serait disponible au demandeur, puisqu’aucun élément de preuve convaincant n'a été produit indiquant que la protection de l’État ne serait pas offerte.

 

[11]           La Commission a conclu que les propres actions du demandeur, notamment ne pas avoir fait de suivi, ont pu contrecarrer les tentatives de la police à investiguer de façon adéquate les allégations du demandeur.

 

II.         Les questions en litige

 

[12]           Le demandeur soulève les questions suivantes :

(a)        Est-ce que la Commission a erré en procédant à une analyse de la protection de l’État sans avoir auparavant évalué la crédibilité du demandeur?

(b)        Est‑ce que la conclusion de la Commission concernant la protection de l’État était déraisonnable?

 

III.       La norme de contrôle

 

[13]           La conclusion de la Commission concernant l’application du critère de la protection de l’État et l’importance accordée à la preuve permettant d’arriver à cette conclusion sont des questions mixtes de faits et de droit, et sont susceptibles de contrôle en fonction de la norme de la raisonnabilité (voir Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339; Barajas c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 21 (QL), au paragraphe 21 et Sanchez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 696, 170 ACWS (3d) 168, au paragraphe 11).

 

[14]           Telle qu’elle a été établie dans l’arrêt Dunsmuir, précité, la raisonnabilité demande la considération de l’existence de la justification, de la transparence et de l’intelligibilité du processus décisionnel. Il faut également s'assurer que la décision appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

 

IV.       Arguments et analyse

 

A.        Est-ce que la Commission a erré en procédant à une analyse de la protection de l’État sans avoir auparavant évalué la crédibilité du demandeur?

 

[15]           La décision de la Commission ne contient pas de conclusion explicite en matière de crédibilité. Le demandeur allègue que, sans une conclusion concernant la vraisemblance et la crédibilité du récit du demandeur, la Commission est incapable d’approcher adéquatement le contexte factuel qui éclaire l’analyse ayant trait à la protection de l’État. Le demandeur se fonde sur des décisions récentes de la Cour qui concernent des situations identiques à l’espèce : Flores c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 FC 503; Jimenez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 727; Moreno c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 993, 92 Imm LR (3d) 119; Pikulin c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 979, 92 Imm LR (3d) 133.

 

[16]           Le défendeur prétend que, quoiqu’il puisse être souhaitable pour la Commission d’évaluer premièrement la crédibilité de la demande, l’absence d’une telle conclusion ne constitue pas automatiquement une erreur susceptible de contrôle. Le défendeur soutient respectueusement que l’interprétation de la Cour du critère de persécution dans l’affaire Jimenez, précitée, ne relève pas de la compétence de celle‑ci et invite la Cour a adopter l’interprétation mise de l’avant par la Cour suprême dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 RCS 689, 103 DLR (4th) 1, et celui de la Cour d’appel fédérale, Rajudeen c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 55 NR 129, [1984] ACF no 601 (QL).

 

[17]           Je suis d’accord avec le demandeur et le défendeur qu’il aurait été préférable que la Commission ait évalué la crainte subjective du demandeur avant de procéder à l’analyse de l’élément objectif. Cependant, cette omission seule ne constitue pas une erreur susceptible de contrôle. Malgré la prétention du défendeur, je souscris largement aux motifs de la Cour et de sa décision subséquente dans la décision Flores, précitée, mais j’estime qu’elle est inapplicable à l’espèce en ce qui a trait aux faits. Telle que je la conçois, l’erreur de la Commission dans l’affaire Flores, précitée, était d’avoir procédé à une analyse de la protection de l’État en l’absence de faits sans égard aux circonstances personnelles du demandeur ni au contexte factuel particulier de la demande. Ce n’est pas le cas en l’espèce.

 

[18]           Comme l’allègue le demandeur, il n’y a pas de conclusion en matière de crédibilité facilement identifiable dans la décision de la Commission. Cependant, dans l’analyse de la protection de l’État, le récit du demandeur est accepté comme vrai de manière implicite. L’élément problématique dans la série de décisions citée par le demandeur est une « conclusion voilée en matière de crédibilité » qui influence l’analyse de la Commission sur la volonté et la capacité de l’État d’offrir une protection. Malgré le fait qu’elle ne se soit pas prononcée explicitement sur l’accueil ou le rejet du récit des demandeurs concernant leurs contacts avec les autorités de l’État, la Commission, dans ces affaires, avait préféré la preuve documentaire au témoignage des demandeurs pour conclure que l’État offrait une protection de façon adéquate et volontaire.

 

[19]           Par exemple, dans l’affaire Flores, précitée, la Commission était arrivée à la conclusion que le Mexique était disposé à protéger le demandeur, malgré le témoignage de celui‑ci selon lequel la protection n’était pas disponible chaque fois qu’il était entré en contact avec les autorités. Le demandeur dans l’affaire Flores, précitée, avait témoigné : qu’il avait communiqué avec la police à Guadalajara, mais qu’elle avait refusé de prendre sa déposition; qu’il avait été abordé par des membres de la police judiciaire qui lui avaient ordonné de rester silencieux concernant son père et ses activités illicites; que sa mère avait essayé de retenir les services d’un avocat pour s’occuper de son dossier, mais qu’ils avaient tous refusé par crainte de représailles et lui avaient conseillé de quitter le Mexique; et finalement, que dans cette affaire, la police agissait elle‑même en tant qu’agent persécuteur. En dépit de tout ceci, la Commission avait conclu que le demandeur n’avait pas réfuté la présomption d’une protection de l’État, parce que la preuve documentaire démontrait qu’il aurait pu faire une demande à la commission des droits de la personne au Mexique ou appeler au numéro de téléphone mis en place pour dénoncer la corruption dans le service public. En somme, le demandeur avait présenté une preuve que l’État n’était pas disposé à le protéger et la Commission avait procédé à une analyse de la protection de l’État sans tenir compte de l’importance de cette preuve, si elle était considérée comme vraie.

 

[20]           Le juge Robert Mainville a bien résumé l’incohérence de l’approche de la Commission au paragraphe 47, avant de conclure que la décision était déraisonnable :

[47]      Dans ce cas-ci, l’absence d’analyse du tribunal au sujet de la crainte subjective du demandeur mène à la conclusion qu’une personne sévèrement tabassée par la police et poursuivie par un important narcotrafiquant (mêlé aussi au trafic des personnes), qui agit en collusion avec les services policiers dans plusieurs villes du Mexique, pourrait néanmoins bénéficier de la protection de l’État en dénonçant la corruption au moyen d’une ligne téléphonique établie à cette fin ou en déposant une plainte devant une commission des droits de la personne.

 

[21]           Comme le juge Mainville a clairement indiqué dans l’affaire Flores, précitée, chaque affaire est unique en son genre et une analyse du dossier particulier doit être réalisée avant que la Commission puisse conclure que la présomption de la protection de l’État n’a pas été réfutée (paragraphe 38).

 

[22]           En l’espèce, la Commission a estimé que le demandeur n’avait pas réfuté la présomption de la protection de l’État, parce que, compte tenu du critère utilisé dans l’arrêt Carillo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CAF 94, 69 Imm LR (3d) 309, il n’a pas présenté d’élément de preuve probant qui pouvait convaincre la Commission, selon la prépondérance de la preuve, que la protection de l’État n’était pas adéquate ou disponible. Je suis convaincu que la Commission a de fait procédé à une analyse de la protection de l’État tout en tenant pour acquis que les allégations du demandeur étaient vraies. Il n’y avait pas de conclusion voilée en matière de crédibilité et la Commission a procédé à l’examen du contexte factuel présenté au cours du témoignage du demandeur.

 

[23]           Quoiqu’une partie des motifs de la Commission semble tirés d’un modèle type de par leur examen complet de la jurisprudence de la protection de l’État et de par la revue des éléments de preuve de la condition du pays, la Commission a passé un temps considérable à étudier le témoignage du demandeur concernant ses efforts pour obtenir une protection de l’État. Le demandeur a déclaré une fois à la police les appels de menace au téléphone. Au paragraphe 16 de la décision, la Commission a écrit :

À la question de savoir si la police avait enquêté au sujet de ses allégations, le demandeur d’asile a répondu que, à sa connaissance, elle ne l’avait pas fait. Tenu d’expliquer comment il était au courant de cette information, le demandeur d’asile a affirmé que c’était parce que les appels de menace n’avaient pas cessé après qu’il avait porté plainte. Lorsqu’il s’est vu demander s’il avait assuré un suivi auprès de la police en ce qui a trait à ses allégations, le demandeur d’asile a répondu par la négative. Invité à expliquer la raison pour laquelle il n’avait effectué aucun suivi, le demandeur d’asile a déclaré que, étant donné qu’il avait porté plainte, il croyait que la police ferait son travail.

 

[24]           La Commission a alors conclu au paragraphe 17 :

J’estime que le demandeur d’asile n’a pas pris toutes les mesures raisonnables en l’espèce pour obtenir la protection de l’État en Guyana avant de demander la protection internationale au Canada. Le demandeur d’asile s’est adressé aux autorités en Guyana à une occasion. Il ne sait pas si la police a mené une enquête à la suite de ses allégations, ni ne connaît les résultats de l’enquête, le cas échéant, parce qu’il n’a effectué aucun suivi auprès de la police. Le demandeur d’asile ne sait pas si les six suspects arrêtés le 19 septembre 2008 ont été poursuivis pour les crimes qu’ils auraient commis ce jour là. Le demandeur d’asile n’a pas questionné la police ni la garde côtière au sujet du statut des personnes appréhendées. Il n’a pas vérifié si l’incident avait été relaté par les médias. Le demandeur d’asile ne sait pas si les personnes qui, selon lui, le pourchassaient sont en prison ou non.

 

[25]           La Commission a examiné la preuve documentaire et a conclu que la prépondérance de la preuve objective concernant les conditions actuelles du pays donnait à penser que quoiqu’elle ne fût pas parfaite, une protection adéquate de l’État était disponible en Guyana. Le demandeur n’a pas réfuté cette présomption non pas parce qu’il a présenté une histoire peu probable, mais parce que, selon sa propre admission, il pensait que la police aurait fait son travail et il est parti au Canada avant que cette opinion ne soit confirmée.

 

[26]           Étant donné les faits spécifiques à l’espèce, le défaut de la Commission de ne pas se pencher explicitement sur la crédibilité du demandeur ne constitue pas une erreur susceptible de contrôle.

 

B.         Est-ce que la conclusion de la Commission concernant la protection de l’État était déraisonnable?

 

[27]           Le demandeur soutient que, si l’absence d’une conclusion en matière de crédibilité n’est pas en soi une lacune fatale, la conclusion de la Commission concernant la protection de l’État est toutefois déraisonnable. Cet argument est fondé sur la prétention du demandeur selon laquelle la Commission a étudié des documents relatifs à la condition du pays qui avaient une faible pertinence quant au trafic de drogue, mais a ignoré la preuve documentaire traitant spécifiquement de la question du trafic de drogue et de l’incapacité des autorités à le contrer.

 

[28]           Le défendeur est d’avis que la Commission a examiné en profondeur la nature de l’allégation de risque du demandeur et a étudié la preuve documentaire concernant les conditions du pays dans ses motifs détaillés avant de conclure que le demandeur n’avait pas réfuté la présomption de la protection de l’État. Par conséquent, il n’existe pas d’erreur susceptible de contrôle.

 

[29]           Le demandeur a spécifiquement identifié ses agents de persécution en tant que trafiquants de drogue afro-guyaniens. La question à laquelle je dois répondre est de savoir si la Commission dans son analyse de la protection de l’État a ignoré la preuve documentaire qui laisse à penser que les autorités sont incapables d’offrir une protection aux victimes des trafiquants de drogue. Le demandeur se fonde sur l’affaire Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 157 FTR 35, 83 ACWS (3d) 264. Dans cette affaire, la Cour a maintenu que la Commission devait expliquer pourquoi elle n’accordait pas d’importance à la preuve documentaire qui étayait le récit du demandeur, mais qui contredisait sa propre conclusion. En l’espèce cependant, la question n’est pas que le demandeur avait présenté une preuve voulant que l’État ne fût pas disposé à protéger les victimes des trafiquants de drogue qui a été mise de côté par la Commission. Le demandeur a plutôt manqué de présenter une preuve convaincante démontrant que la protection n’était ni disponible ni adéquate.

 

[30]           Le demandeur cite spécifiquement trois documents se trouvant dans le Cartable national de documentation de la Commission. Le rapport sur la stratégie internationale de lutte aux narcotiques (International Narcotics Strategy Report) de février 2009 rédigé par le département d’État des États‑Unis notait que :

[traduction]

Les efforts de lutte aux narcotrafiquants du gouvernement continuent d’être infirmés par une mauvaise coordination des organismes chargés de faire respecter la loi et leur manque de ressources, un système judiciaire surchargé et inefficace, et un manque de stratégie nationale concertée et priorisée en matière de sécurité. Meurtres, enlèvements et autres crimes violents, généralement associés au trafic de drogue, sont souvent rapportés dans les médias guyaniens […]  Les analystes d’UGS croient que les organisations responsables du trafic de la drogue en Guyana continuent d’échapper aux organismes chargés de faire respecter la loi par l’emploi de pots‑de‑vin et de la force.

 

[31]           Le rapport sur l’état de la Guyana (Guyana Country Report) réalisé en mars 2010 par le département d’État des États‑Unis a conclu de manière similaire que les contraintes dans les ressources limitaient l’efficacité de la police guyanaise et que la confiance du public dans la police demeurait faible compte tenu de la corruption. Finalement, le demandeur présente un document ayant pour titre [traduction] « Information sur les crimes violents et la réponse de l’État, un regard sur la police, le trafic de la drogue et les activités criminelles qui en découlent » (Criminal Violence and State Response, touching on aspects of the police force, drug trafficking and related criminal activities). Cet article décrit [traduction] « un escadron de la mort fantôme » qui aurait présumément tué des centaines de personnes en Guyana et qui a été relié au narcotrafiquant Shaheed Roger Khan.

 

[32]           Tous ces documents ne font que couvrir ce qui se trouve déjà dans l’étude très exhaustive de la preuve documentaire réalisée par la Commission. La corruption, l’inefficacité et le soudoiement demeurent des préoccupations réelles en Guyana. La Commission l’a reconnu au paragraphe 21 de sa décision. La Commission a explicitement traité de deux articles présentés par l’avocat du demandeur. Quoique ces articles ne concernaient pas uniquement le trafic de drogue, les préoccupations qu’ils ont soulevées chez la Commission sont les mêmes qui ont été mises de l’avant par les documents présentés par l’avocat avec la demande de contrôle judiciaire. La preuve concernant la corruption et l’inefficacité semble être la même lorsqu’il s’agit du trafic de drogue spécifiquement et de la criminalité en général. La preuve documentaire illustre également des mesures mises en place par l’État pour pallier ces problèmes. La Cour ne se substituera pas à la Commission pour réaliser une réévaluation de la preuve afin de produire une issue plus favorable au demandeur.

 

[33]           De plus, les documents cités par le demandeur ne sont pas assez précis pour justifier l’intervention de la Cour dans la décision de la Commission. Ils ne contredisent pas directement la conclusion de la Commission voulant que « la Guyana a le contrôle efficient de son territoire et possède une force de sécurité efficace pour faire respecter les lois et la constitution du pays » et ils n’étayent pas clairement le récit du demandeur.

 

[34]           Le demandeur n’a pas réussi à soulever une erreur susceptible de contrôle. La conclusion de la Commission était raisonnable et ne devrait pas être modifiée.

 

V.        Conclusion

 

[35]           Aucune question aux fins de certification n’a été présentée et l’espèce n’en soulève aucune.

 

[36]           Compte tenu des conclusions précédentes, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.


JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE que la présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

 

 

« D. G. Near »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice‑conseil


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6234-10

 

INTITULÉ :                                       BABURAM SINGH c. MCI

 

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 17 MAI 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE NEAR

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 27 JUIN 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Narvin Radhamohan

 

POUR LE DEMANDEUR

Sybil Thompson

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Narvin Radhamohan

Radhamohan & Singh

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.