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Cour fédérale

 

Federal Court

 

 

Date: 20110705

Dossier : IMM-5518-10

Référence : 2011 CF 803

Montréal (Québec), le 5 juillet 2011

En présence de monsieur le juge Shore

 

ENTRE :

 

EMMANUEL CASTOR RUIZ

et

FRANC CASTOR LINARES

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

Procédure judiciaire

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire en application du paragraphe 72(1) de la LIPR, déposée par messieurs Emmanuel Castor Ruiz et Franc Castor Linares à l’encontre de la décision de la Deuxième Secrétaire, Section de l’Immigration de l’Ambassade du Canada à Port-au-Prince (Deuxième Secrétaire), en date du 30 novembre 2010, rejetant la demande de résidence permanente au Canada pour fins humanitaires présentée par monsieur Emmanuel Castor Ruiz, enfant de monsieur Franc Castor Linares, au motif que les circonstances d’ordre humanitaire invoquées dans son cas ne justifieraient pas la demande de dispense demandée en vertu de l’article 25 de la LIPR.

 

Faits

 

[2]               Le 7 avril 1993, le répondant, monsieur Linares, né le 13 janvier 1965, a déposé une demande de résidence permanente au Canada à titre de personne à charge de sa mère, elle-même parrainée par un autre de ses fils.

 

[3]               Le demandeur principal, monsieur Ruiz, né en République dominicaine le 12 juin 1994, est le fils de monsieur Linares; ce dernier a reconnu sa paternité.

 

[4]               Le 12 décembre 1995, monsieur Linares est arrivé à Montréal et sa belle-sœur, soit l’épouse de son frère, a complété la fiche relative au droit d’établissement, sur laquelle il est inscrit que le demandeur n’avait aucune personne à charge (Dossier du défendeur et affidavit, p. 9). À ce sujet, monsieur Linares allègue qu’il a tenté de déclarer l’existence de son fils, Emmanuel, à l’agent d’immigration au point d’entrée; cependant, l’agent ne parlait pas espagnol. Monsieur Linares s’est vu accordé le droit d’établissement; il affirme avoir, en vain, tenté d’obtenir l’aide d’un interprète.

 

[5]               Le 17 juillet 1998, monsieur Linares a rempli un formulaire de demande de parrainage d’un parent en faveur de son fils, monsieur Ruiz (Dossier du défendeur et affidavit, p. 11).

 

[6]               Le 26 mai 2003, la demande de résidence permanente du demandeur appuyée par le parrainage du répondant a été refusée par la Section d’Immigration de l’ambassade du Canada à Port-au-Prince au motif qu’il ne faisait pas partie de la catégorie du regroupement  familial en vertu de l’alinéa 117(9)d) du RIPR. Monsieur Linares fut alors avisé de la décision et de son droit de déposer un appel de la décision auprès de la Section d’appel de l’immigration (SAI) (Décision du 26 mai 2003, dossier des demandeurs, p. 141-142).

 

[7]               Le 23 janvier 2007, monsieur Linares a interjeté appel de la décision du 26 mai 2003 devant la SAI. L’appel fut rejeté et monsieur Linares a déposé une demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour fédérale à l’encontre de la décision de la SAI.

 

[8]               Le 26 novembre 2007, le juge Pierre Blais a rejeté la demande de contrôle judiciaire en précisant qu’une demande de dispense pour motifs humanitaires serait un remède plus approprié (Décision de la Cour fédérale dans le dossier IMM-1896-07, dossier des demandeurs, p. 144 et suiv, à la page 154).

 

[9]               Le 11 novembre 2008, monsieur Ruiz a présenté une demande de résidence permanente au Canada dans la catégorie du regroupement familial pour des raisons humanitaires, et a interjeté appel de la décision du 26 mai 2003. Cette demande était parrainée par monsieur Linares.

 

[10]           En mai 2009, les deux demandeurs auraient été informés que la Deuxième Secrétaire souhaitait rencontrer monsieur Ruiz en entrevue avec sa mère.

 

[11]           Le 6 août 2009, monsieur Ruiz a été rencontré à Santo Domingo en présence de sa tante paternelle par la Deuxième Secrétaire (Dossier des demandeurs, p. 20 à 23).

 

[12]           Le 18 novembre 2009, la Deuxième Secrétaire a refusé la demande après avoir examiné le dossier de monsieur Ruiz et a jugé que ce cas ne justifiait pas la dispense demandée (Dossier des demandeurs, p. 23).

 

[13]           Le 30 novembre 2009, la Deuxième Secrétaire a envoyé une décision à monsieur Ruiz, refusant sa demande de résidence permanente pour fins humanitaires (Lettre de refus au demandeur, dossier des demandeurs, p. 8).

 

[14]           Le 2 décembre 2009, la Deuxième Secrétaire a envoyé une lettre à monsieur Linares, concernant l’engagement d’aide présentée à l’appui de la demande de visa de résidence permanente soumise par son fils (Lettre de refus au répondant, dossier des demandeurs, p. 10-11).

 

[15]           Le 21 janvier 2010, le répondant a signé la renonciation à son droit d’appel afin d’obtenir le remboursement des droits (Dossier des demandeurs, p. 10).

 

[16]           Le 29 janvier 2010, le répondant a déposé un avis d’appel à l’encontre de la décision de la Deuxième Secrétaire (Dossier du défendeur, p. 28-29).

 

[17]           Le 9 avril 2010, la conseillère aux audiences de l’Agence des services frontaliers a déposé une « Demande de rejet d’appel pour défaut de compétence ».

 

[18]           Le 28 avril 2010, le répondant a répondu à la requête pour rejet d’appel en déposant une argumentation et des pièces au soutien de son argumentation et en demandant à la SAI d’accueillir l’appel du répondant.

 

[19]           Le 15 juin 2010, la SAI a rejeté l’appel du demandeur du 29 janvier 2010.

 

[20]           Le 22 septembre 2010, le demandeur principal et le répondant ont déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision de la Deuxième Secrétaire en date du 30 novembre 2009 devant la Cour fédérale, le tout assorti d’une demande de prorogation de délai.

 

Décision faisant l’objet du présent contrôle

 

[21]           La Deuxième Secrétaire a rendu une décision portant sur la demande pour des circonstances d’ordre humanitaire déposée par le demandeur principal. Selon elle, les circonstances d’ordre humanitaires évoquées par le demandeur ne justifiaient pas la dispense de tout ou en partie des critères et obligations applicables de la Loi :

Je suis arrivée à cette conclusion parce qu’à la lumière des documents déposés et également suite à une entrevue avec vous et votre tante, faite à Santo Domingo le 6 août 2009, je ne suis pas convaincue que vous et votre répondant soyez en contact constant depuis que ce dernier a immigré au Canada en 1995.

 

En effet, votre répondant est revenu en République Dominicaine seulement à cinq reprises depuis son départ pour le Canada et les quelques photos prises avec lui datent de votre enfance. Une seule a été prise en 2006. Les preuves de communication entre vous sont faibles. Votre répondant a délibérémment (sic) quitté la République Dominicaine en vous laissant. Au total, vous n’avez vecu (sic) avec votre répondant qu’un an.

 

Question en litige

 

[22]           La décision de la Deuxième secrétaire à l’effet que les circonstances humanitaires évoquées dans le cas de monsieur Ruiz ne justifiaient pas la dispense de tout ou en partie des critères et obligations applicables de la Loi était-elle raisonnable?

 

Dispositions législatives pertinentes

 

[23]           L’article 25 de la LIPR dispose de ce qui suit :

 

Séjour pour motif d’ordre humanitaire à la demande de l’étranger

 

25. (1) Le ministre doit, sur demande d’un étranger se trouvant au Canada qui est interdit de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente loi, et peut, sur demande d’un étranger se trouvant hors du Canada, étudier le cas de cet étranger; il peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s’il estime que des considérations d’ordre humanitaire relatives à l’étranger le justifient, compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché.

 

 

 

 

 

Paiement des frais

 

(1.1) Le ministre n’est saisi de la demande que si les frais afférents ont été payés au préalable.

 

 

Exceptions

 

(1.2) Le ministre ne peut étudier la demande de l’étranger si celui-ci a déjà présenté une telle demande et celle-ci est toujours pendante.

 

Non-application de certains facteurs

 

(1.3) Le ministre, dans l’étude de la demande d’un étranger se trouvant au Canada, ne tient compte d’aucun des facteurs servant à établir la qualité de réfugié — au sens de la Convention — aux termes de l’article 96 ou de personne à protéger au titre du paragraphe 97(1); il tient compte, toutefois, des difficultés auxquelles l’étranger fait face.

 

 

Critères provinciaux

 

(2) Le statut de résident permanent ne peut toutefois être octroyé à l’étranger visé au paragraphe 9(1) qui ne répond pas aux critères de sélection de la province en cause qui lui sont applicables.

Humanitarian and compassionate considerations — request of foreign national

 

25. (1) The Minister must, on request of a foreign national in Canada who is inadmissible or who does not meet the requirements of this Act, and may, on request of a foreign national outside Canada, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligations of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to the foreign national, taking into account the best interests of a child directly affected.

 

Payment of fees

 

(1.1) The Minister is seized of a request referred to in subsection (1) only if the applicable fees in respect of that request have been paid.

 

Exceptions

 

(1.2) The Minister may not examine the request if the foreign national has already made such a request and the request is pending.

 

Non-application of certain factors

 

(1.3) In examining the request of a foreign national in Canada, the Minister may not consider the factors that are taken into account in the determination of whether a person is a Convention refugee under section 96 or a person in need of protection under subsection 97(1) but must consider elements related to the hardships that affect the foreign national.

 

Provincial criteria

 

(2) The Minister may not grant permanent resident status to a foreign national referred to in subsection 9(1) if the foreign national does not meet the province’s selection criteria applicable to that foreign national.

 

[24]           L’alinéa 117(9)d) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (RIPR) est également pertinent à la présente affaire :

 

117. (1) Appartiennent à la catégorie du regroupement familial du fait de la relation qu’ils ont avec le répondant les étrangers suivants :

 

[…]

 

Restrictions

 

(9) Ne sont pas considérées comme appartenant à la catégorie du regroupement familial du fait de leur relation avec le répondant les personnes suivantes :

 

[…]

 

d) sous réserve du paragraphe (10), dans le cas où le répondant est devenu résident permanent à la suite d’une demande à cet effet, l’étranger qui, à l’époque où cette demande a été faite, était un membre de la famille du répondant n’accompagnant pas ce dernier et n’a pas fait l’objet d’un contrôle.

 

 

117. (1) A foreign national is a member of the family class if, with respect to a sponsor, the foreign national is

 

 

 

Excluded relationships

 

(9) A foreign national shall not be considered a member of the family class by virtue of their relationship to a sponsor if

 

 

 

 

(d) subject to subsection (10), the sponsor previously made an application for permanent residence and became a permanent resident and, at the time of that application, the foreign national was a non-accompanying family member of the sponsor and was not examined.

 

Position des parties

 

[25]           Le demandeur affirme que la Deuxième Secrétaire a induit les demandeurs en erreur en écrivant dans sa lettre de refus que la LIPR leur permettait d’interjeter appel de la décision de la Commission d’appel de l’immigration, d’autant plus que la Deuxième secrétaire a inclus dans sa lettre un « Avis d’appel » et un document intitulé « Instructions importantes ». Les demandeurs ont suivi cette suggestion et ont fait appel de la décision de l’ambassade à la Section d’appel de l’immigration, qui a rejeté l’appel des demandeurs parce qu’elle n’avait pas juridiction pour entendre l’appel.

 

[26]           Les demandeurs plaident que la Deuxième Secrétaire a erré en évaluant le comportement du répondant ayant mené à l’exclusion en vertu du paragraphe 117(9)d). Les demandeurs soumettent également que la Deuxième Secrétaire a erré en droit en négligeant de considérer l’intérêt supérieur de l’enfant et en négligeant d’appuyer sa décision par des raisons suffisantes. En outre, les demandeurs ont aussi soumis que la Deuxième Secrétaire a erré en droit en négligeant de considérer l’intérêt supérieur de l’enfant, et en négligeant d’appuyer sa décision par des raisons suffisantes.

 

[27]           En réplique, les demandeurs ont ajouté à leurs arguments principaux que la jurisprudence et le Guide opérationnel reconnaissent le besoin de procéder à une deuxième évaluation de « tous les éléments de preuve et de toutes les observations présentées par le client ainsi que de tous les facteurs pertinents à l’évaluation CH y compris l’intérêt supérieur de l’enfant.

 

[28]           Le défendeur soutient que le répondant n’a pas l’intérêt pour agir et que son nom devrait par conséquent être rayé de l’intitulé de la cause. Le défendeur soumet également que les demandeurs n’ont pas adéquatement justifié leur retard à déposer leur demande d’autorisation et de contrôle judiciaire. De plus, le défendeur soutient que la Deuxième Secrétaire n’avait pas à examiner la décision de la Section d’arbitrage du 11 juillet 2000, ni celle du juge Blais du 28 juillet 2007 pour décider de la demande de dispense pour considérations humanitaires présentées par le demandeur principal. Le défendeur a également mentionné que si le répondant avait déclaré son enfant, il n’aurait pas pu obtenir la résidence permanente comme personne à charge de sa mère. Selon le défendeur, la Deuxième Secrétaire a examiné les considérations humanitaires que lui a fait valoir les demandeurs et il n’appartient pas à cette Cour de pondérer les facteurs pertinents. Le défendeur soutient en outre que l’agente s’est acquittée de sa tâche d’examiner les intérêts de l’enfant conformément aux principes jurisprudentiels selon lesquels ce facteur n’est pas, en droit de l’immigration, déterminant.

 

Norme de contrôle

 

[29]           Dans la décision Kisana c Canada (Ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 189, 179 ACWS (3d) 181, le juge Marc Nadon de la Cour d’appel fédérale confirme que la jurisprudence a établi de manière satisfaisante que la norme applicable dans le cadre de décisions relatives à des raisons d’ordre humanitaires est celle de la raisonnabilité (au para 18, aussi voir Dunsmuir c Nouveau- Brunswick, [2008] 1 RCS 190, 2008 CSC 9). Il appartient à la Deuxième Secrétaire de pondérer les facteurs et non à la Cour responsable du contrôle judiciaire de la décision de considérations humanitaires.

 

Analyse

 

[30]           Au préalable, la Cour doit examiner deux questions préliminaires posées par le défendeur, soit la question de l’intérêt direct pour agir et la question de la prorogation du délai à la Cour fédérale.

 

L’intitulé de la cause

 

[31]           Le défendeur demande à la Cour que soit retiré de l’intitulé de la cause le nom de monsieur Franc Castor Linares, père du demandeur principal et répondant, à l’effet que celui-ci n’a pas l’intérêt requis pour agir dans la présente cause en vertu du paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales, LRC, 1985, ch F-7. Les demandeurs s’objectent à cette demande (Mémoire en réplique, aux para 3 à 5). Le défendeur cite entre autres la décision Apotex inc. c Canada (Gouverneur en conseil), 2007 CF 232, 155 ACWS (3d) 1080 :

[19]      Nul ne peut introduire une demande de contrôle judiciaire devant notre Cour s’il n’est « directement touché par l’objet de la demande » (paragraphe 18.(1), Loi sur les Cours fédérales, précité). Il n’y a exception à ce principe que lorsque le demandeur a la qualité pour agir dans l’intérêt public. Nous y reviendrons plus loin. De toute évidence, cette exigence vise un double objectif : s’assurer que les bonnes personnes sont constituées parties à l’instance et s’assurer que le litige porté devant la Cour comporte un objet que la Cour peut effectivement examiner.

 

[20]      Pour pouvoir considérer que le demandeur est « directement touché », il faut que la question en litige ait un effet préjudiciable sur les droits qui lui sont reconnus par la loi, qu’elle lui impose des obligations juridiques ou qu’elle lui porte directement préjudice (voir l’arrêt Rothmans of Pall Mall Canada Ltd. c. Canada (Ministère du Revenu national – M.R.N.), [1976] 2 C.F. 500 (C.A.); Kwicksutaineuk/Ah-kwa-mish Tribes c. Canada (Ministre des Pêches et Océans), 2003 CFPI 30 (C.F. 1re inst.), [2003] A.C.F. no 98 (QL), au paragraphe 8, conf. pour d’autres motifs par 2003 CAF 484, [2003] A.C.F. no 1893 (C.A.) (QL), autorisation de pourvoi à la C.S.C. refusée à [2004] C.S.C.R. no 55).

 

[32]           Le répondant est le père du demandeur. À titre de répondant, il a reçu une lettre de la part de la Deuxième Secrétaire, suite à la décision qui a été prise. Il est directement touché par l’objet de la demande.

 

La demande de prorogation de délai

 

[33]           Les demandeurs ont demandé à la Cour d’accorder une prorogation de délai. Les demandeurs affirment que la Deuxième Secrétaire les a induits en erreur en écrivant dans la lettre de refus que la LIPR leur permettait d’interjeter appel de la décision auprès de la Commission d’appel de l’immigration. Le demandeur cite l’affaire Huot c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 973 dans lequel sont réitérés les critères pour que soit accordée une prorogation de délai :

[14]      En effet, la demanderesse devait satisfaire la Cour a) qu’elle a toujours eu l’intention de poursuivre sa demande de contrôle judiciaire; b) que la demande de contrôle judiciaire mérite d’être considérée; c) qu’il existe une explication raisonnable pour le retard; et d) que la prorogation de délai ne causera pas préjudice au défendeur.

 

[34]           Comme dans l’affaire Huot, précitée, la Cour ne voit pas en quoi le fait d’accorder une prorogation de délai aux demandeurs pour entendre la présente affaire puisse causer préjudice au défendeur. Les circonstances du présent cas sont particulières et les intérêts de la justice seront mieux servis si la prorogation de délai est accordée.

 

Analyse

 

[35]           Tout d’abord, le fardeau de preuve appartient à la personne qui présente une demande pour considérations humanitaires (Owusu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 38, 128 ACWS (3d) 1175) au para 5; Akinbowale c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2007 CF 1221, au para 14) La jurisprudence a également établi que l’intérêt supérieure de l’enfant est certes un facteur important, mais non déterminant (Hawthorne c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (CA), 2002 CAF 475, au para 2; Legault c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CAF 125; Kisana, précité, au para 37). En l’espèce, la Deuxième Secrétaire n’a pas été assez réceptive, attentive et sensible à l’intérêt de l’enfant; d’ailleurs, dans ses notes, elle n’a pas mentionné expressément l’intérêt supérieur de l’enfant, elle a considéré la situation de l’enfant :

Quand à mère du requérant, elle a délibérément quitte la RD pour aller en Espagne en laissant son fils derrière elle. Raisons évoquées par requérant et la tante pour qu’il aille rejoindre son père au CDA sont plus des raisons d’ordre économique et d’éducation. Enfant n’est pas à l’abandon puisque sa tante s’occupe de lui ainsi que sa grand-mère et d’autres membres de la famille. Demande refusée.

 

(Notes du STIDI, Dossiers des demandeurs, p. 23)

 

[36]           Compte tenu de la paternité en question, les arguments concernant l’intérêt de l’enfant n’ont pas été évalués d’une façon raisonnablement adéquate.

 

[37]           La Cour donne raison aux arguments écrits et plaidés oralement qui émanent du mémoire des faits et du droit de deux avocats des demandeurs.

 

[38]           Finalement, la Cour adhère à la position du demandeur soutenant qu’il appartenait à la Deuxième Secrétaire de juger la preuve selon l’intérêt de l’enfant compte tenu de la situation exceptionnelle; cela st exprimé par la Cour suite aux éléments en preuve démontrant que le père aurait voulu souligner l’existence de son fils, depuis plusieurs années; ceci est compris par ses déclarations initiales et continuelles qui n’ont pas été considérées comme fausses ou frauduleuses suite à la preuve démontrée à cet égard. En plus, la preuve ne semble pas avoir été envisagée, ni évaluée dans la décision à l’égard de l’enfant d’une façon raisonnable.

 

Conclusion

 

[39]           La Deuxième Secrétaire aurait dû accorder plus de poids à certains éléments essentiels à l’égard de l’intérêt de l’enfant pour que la décision soit considérée comme raisonnable. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accordée.

 


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

 

1.      La demande de contrôle judiciaire soit acceptée et le dossier soit retourné pour détermination à nouveau par un autre décideur.

 

2.      Aucune question certifiée ne soit soumise.

 

 

 

 

«Michel M.J. Shore»

Juge

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-5518-10

 

INTITULÉ :                                       EMMANUEL CASTOR RUIZ ET AL. et MCI

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 28 juin 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 5 juillet 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

David Berger

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Mitchell Goldberg

POUR LES DEMANDEURS

 

Michèle Joubert

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

David Berger

Montréal (Québec)

POUR LES DEMANDEURS

 

 

Mitchell Goldberg

Montréal (Québec)

POUR LES DEMANDEURS

 

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

POUR LE DEMANDEUR

 

 

 

 

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