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Date : 20110708

Dossier : IMM-6148-10

Référence : 2011 CF 858

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 8 juillet 2011

En présence de Monsieur le juge Mosley

 

 

ENTRE :

 

ASMA ELAHI

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire fondée sur l’article 72 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR), à l’égard de la décision qui a été rendue le 22 septembre 2010 et dans laquelle la Section d’appel de l’immigration (SAI) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié de Toronto (Ontario) a rejeté l’appel de la demanderesse relatif au refus par un agent des visas de délivrer un visa de résidence permanente au conjoint de celle-ci à titre de personne appartenant à la catégorie de la famille.

 

LES FAITS À L’ORIGINE DU LITIGE

[2]               À la date de l’audition de l’appel, la demanderesse était une femme d’origine paskitanaise âgée de 29 ans. Elle est arrivée au Canada en mai 2006 à titre de personne à charge figurant sur la demande de son père, lequel était parrainé par le frère de la demanderesse.

 

[3]               L’époux de la demanderesse est né en mai 1979 et a deux ans de plus qu’elle. Il est également citoyen du Pakistan et a obtenu un visa de visiteur pour des raisons d’ordre humanitaire à la fin de 2004 ou au début de 2005. Le visa a expiré en mars 2005, mais a été prolongé d’avril 2005 jusqu’au 31 décembre de la même année. Il a été prolongé une deuxième fois le 31 décembre 2005 et a finalement expiré le 30 mai 2006.

 

[4]               La demanderesse et son époux se sont rencontrés au moyen d’un site web de rendez-vous appelé shaadi.com. Les profils de chacun ont été affichés en ligne par les membres de leurs familles respectives. Le couple s’est marié au Canada en mars 2007. En juillet de la même année, la demanderesse a présenté une demande de parrainage pour son époux, laquelle demande a été refusée au moyen d’une lettre datée du 3 juin 2008, l’agent des visas n’étant pas convaincu que le mariage était authentique. La demanderesse a interjeté appel du refus devant la SAI, qui a conclu que le mariage de la demanderesse avec son époux n’était pas authentique et visait principalement à permettre à celui-ci d’obtenir le statut de résident permanent aux termes de la LIPR. C’est cette décision qui fait l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

 

LA DÉCISION SOUS EXAMEN

[5]               La SAI a conclu que la demanderesse n’avait pas prouvé selon la prépondérance des probabilités que le mariage était authentique et ne visait pas principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège aux termes de la LIPR. Plus précisément, la SAI a critiqué le fait que la demanderesse n’avait pas participé au choix de son époux ni n’avait été consultée à ce sujet, que les négociations entourant le mariage s’étaient déroulées à la hâte et que la demanderesse n’avait pas vraiment pris part aux arrangements. De l’avis de la SAI, il y avait confusion quant aux dates auxquelles les époux avaient fait connaissance et s’étaient rencontrés pour la première fois; de plus, les relevés téléphoniques présentés en preuve faisaient état d’un certain nombre d’appels entrants non identifiés.

 

[6]               La SAI a également jugé que les cartes que l’époux de la demanderesse avaient envoyées à celle‑ci ne prouvaient guère qu’il s’agissait d’un mariage authentique, que peu de documents montraient que la demanderesse et son époux avaient vécu ensemble à leur retour au Pakistan, que la demanderesse avait vécu principalement chez son frère lorsqu’elle est revenue au Canada en 2009 et que l’époux avait donné des réponses évasives à plusieurs occasions, notamment au sujet de l’endroit où se trouvait son frère ou du statut qu’il avait au Canada. Enfin, la SAI a conclu que l’époux souhaitait demeurer au Canada avec sa famille immédiate et qu’il avait précédemment tenté d’obtenir un statut ici, expliquant qu’il voulait, selon ce qu’il a expliqué, satisfaire aux désirs de son père.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[7]               La présente demande soulève les questions suivantes :

  1. La SAI a-t-elle commis une erreur en ignorant le contexte culturel du mariage arrangé?

 

  1. La SAI a-t-elle commis une erreur lors de son évaluation du mariage de la demanderesse?

 

  1. La SAI a-t-elle commis une erreur en ne tenant pas compte de l’ensemble des éléments de preuve?

 

ANALYSE

La norme de contrôle

[8]               La SAI étant un tribunal spécialisé, la Cour doit faire montre de retenue à l’endroit des décisions de celle-ci et ne peut les infirmer que si elles sont fondées sur une conclusion de fait erronée « tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont [elle] dispose », conformément à l’alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7 : Barm c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 893, au paragraphe 12; Rosa c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 117, au paragraphe 23. La décision quant à savoir si un mariage est authentique repose essentiellement sur les faits et la norme de contrôle qui s’y applique est celle de la décision raisonnable : Rosa c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 117, au paragraphe 23; Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe 53.

 

La SAI a-t-elle commis une erreur en ignorant le contexte culturel du mariage arrangé?

[9]               Il est bien reconnu qu’au moment d’évaluer, notamment, l’authenticité des mariages arrangés, la SAI doit éviter d’appliquer les concepts occidentaux du mariage dans les cas portés à son attention. L’authenticité doit plutôt être évaluée dans le contexte culturel dans lequel le mariage a eu lieu : Gill c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 122, 362 F.T.R. 281, au paragraphe 7; Abebe c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 341, aux paragraphes 34 à 36. Il en est ainsi parce que, « [d]e par sa nature, un mariage arrangé, quand il est perçu à travers une lentille culturelle nord‑américaine, semblera inauthentique » : décision Gill susmentionnée, au paragraphe 7.

 

[10]           Même si la SAI reconnaît que le sens du mariage peut varier d’une culture à l’autre, la perception qu’elle a de cette notion n’est pas très approfondie :

Je reconnais assurément que l’institution du mariage varie d’une culture à l’autre et que des mariages arrangés peuvent être authentiques. Toutefois, je ne crois pas que le mariage arrangé entre l’appelante et le demandeur soit authentique. J’en viens à cette conclusion en tenant compte du témoignage de l’appelante selon lequel elle n’a jamais été consultée au cours des négociations entourant le mariage et n’a jamais eu son mot à dire. De plus, l’appelante n’a même jamais parlé au demandeur et ne l’a pas rencontré avant que sa famille accepte la demande en mariage en son nom. Même en tenant compte du fait que l’appelante était à l’étranger, j’estime que, à tout le moins, il serait raisonnable de s’attendre à ce qu’elle ait pu parler au demandeur par téléphone pour déterminer s’ils étaient compatibles, ou la famille aurait pu attendre son retour afin que l’appelante puisse rencontrer le demandeur en personne avant d’accepter la demande en mariage.

 

[11]           Comme la demanderesse le souligne à juste titre, même s’il peut sembler raisonnable de s’attendre, en Occident ou selon la culture nord-américaine, à ce que des appels téléphoniques visant à évaluer la compatibilité entre les époux aient été faits, cette pratique ne faisait pas partie de la coutume relative aux mariages arrangés pour les musulmans du Pakistan. La demanderesse a déclaré à l’audience et dans son affidavit qu’elle avait consenti au mariage et savait que son frère avait affiché son profil sur un site Web en ligne afin de lui trouver un mari acceptable. Aux yeux de la demanderesse, le fait d’arranger un mariage était une affaire de famille, une démarche à laquelle les deux familles participaient de très près. La SAI ne semble pas avoir compris ce fait, puisqu’elle a souligné qu’il n’était pas raisonnable qu’aucun contact personnel n’ait eu lieu entre la demanderesse et son époux en vue d’évaluer la compatibilité entre les deux et conclu que l’absence de contact de cette nature prouvait que le mariage n’était pas authentique.

 

La SAI a-t-elle commis une erreur lors de son évaluation du mariage de la demanderesse?

[12]           Il convient de souligner que l’article 4 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, a été modifié après que la SAI eut rendu sa décision en l’espèce. Selon la version précédente de cette disposition, le mariage était considéré comme un mariage fait de mauvaise foi lorsque le décideur estimait qu’il visait principalement l’acquisition d’un statut ou privilège sous le régime de la LIPR et n’était pas authentique. Le critère était conjonctif : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Tirer, 2010 CF 414, au paragraphe 12. La version modifiée actuellement applique un critère disjonctif et exige seulement l’une ou l’autre possibilité, soit que le mariage n’est pas authentique ou visait principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège sous le régime de la LIPR : Wiesenhahan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 656, au paragraphe 3.

 

[13]           Dans Khan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1490, 59 Imm. L.R. (3d) 251, aux paragraphes 4 et 5, le juge Roger Hughes, citant Donkor c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1089, aux paragraphes 18 et 19, a réitéré le critère à deux volets à utiliser pour interpréter l’article 4 du Règlement alors en vigueur. Tel qu’il est mentionné au paragraphe 4 de la décision Khan :

    1. Il faut tenir compte de la relation telle qu’elle existe à l’heure actuelle, de sorte qu’une relation qui n’était peut-être pas « authentique » au départ l’est peut-être devenue.
    2. Il faut se demander si la relation visait principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège aux termes de la Loi.

 

[14]           Au paragraphe 5, le juge Hughes poursuit en ces termes : « Pour qu’une personne ne puisse pas être considérée comme étant l’époux, le conjoint de fait ou le partenaire conjugal, il doit être satisfait aux deux volets du critère » et « si le demandeur n’a gain de cause qu’à l’égard de l’un de ces deux volets, il est loisible à la Cour de conclure qu’une erreur susceptible de contrôle a été commise ».

 

[15]           Dans la présente affaire, la demanderesse soutient que la SAI a accordé trop d’importance aux antécédents d’immigration de son époux, qui pourraient concerner, dans une certaine mesure, le deuxième volet du critère. Cet argument a du poids. Même si l’époux de la demanderesse avait des antécédents d’immigration du fait qu’il avait tenté à plusieurs reprises de rester au Canada, le couple n’a pas cherché à dissimuler ces tentatives dans la demande. Les antécédents d’immigration de l’époux de la demanderesse peuvent être attribués en grande partie au fait que la famille immédiate de celui-ci se trouvait déjà ici. Il appert du dossier qu’à la fin de 2004 ou au début de 2005, l’époux de la demanderesse et son frère ont obtenu un visa de séjour pour des raisons d’ordre humanitaire, ce qui leur a permis de rester avec leur mère, qui était atteinte d’une maladie en phase terminale. Le visa de séjour initial a expiré en mars 2005. Leur mère est décédée en mai 2005 et le visa de séjour de l’époux a été prolongé d’avril 2005 jusqu’en décembre 2005. Il a été prolongé une deuxième fois du 31 décembre 2005 jusqu’au 30 mai 2006, parce que le père de l’époux de la demanderesse a eu besoin de soins personnels par suite de l’arthroplastie du genou qu’il avait subie en décembre 2005. Bien que sa demande visant à obtenir une troisième prorogation de son visa de séjour ait été refusée en juillet 2006, l’époux n’a quitté le Canada que le 9 mai 2008. Il est retourné au Pakistan uniquement parce qu’il devait se rendre à une entrevue relative à sa demande de visa.

 

[16]           En mai 2008, l’époux de la demanderesse a même souligné, lors de son entrevue au bureau des visas, qu’il avait épousé la demanderesse en partie afin de pouvoir rester au Canada.

 

[17]           La demanderesse elle-même semble avoir reconnu ce fait et ne le conteste pas, comme le montre l’extrait de la transcription d’audience figurant dans le dossier certifié du tribunal, à la page 304 :

[traduction]

Q : Pourquoi a-t-il commencé à se chercher [une épouse] au Canada?

 

R : Son père voulait rester au Canada, parce qu’il avait des parents ici aussi, et la tombe de sa mère se trouve également ici.


Q : D’accord. Quels parents a-t-il au Canada?

 

R : Son père et la soeur de son père.

 

Q : Qui d’autre?

 

R : Sa soeur et sa mère, qui est décédée.

 

Q : D’accord. Alors, je vais vous poser la question suivante : vous aurait-il épousée si vous aviez vécu au Pakistan et que vous aviez été une citoyenne du Pakistan n’ayant aucun lien avec le Canada?

 

R : Nos deux familles désiraient ce lien découlant d’un mariage au Canada, alors il n’était pas question d’un mariage au Pakistan. (Non souligné dans l’original.)

 

[18]           Une lecture de cet extrait et des profils de la demanderesse et de son époux qui ont été affichés en ligne montre clairement que chacun d’eux recherchait la même chose : une personne qui est issue d’un milieu culturel, religieux et linguistique similaire et qui serait disposée à vivre au Canada et en mesure de le faire. Le fait que l’époux de la demanderesse voulait s’établir au Canada ne signifie pas à lui seul que le mariage du couple n’était pas authentique. La SAI a donc commis une erreur en se fondant sur les antécédents d’immigration de l’époux pour conclure que le mariage n’était pas authentique. Ce faisant, elle a mal compris la distinction entre ce qui peut constituer traditionnellement un « mariage authentique » au Canada et ce qui peut constituer un mariage authentique selon d’autres cultures.

 

[19]           L’authenticité du mariage du couple est renforcée par les photographies de leur réception de mariage, lesquelles illustrent les membres de la famille qui sont assis, mangent et festoient ensemble. Le dossier renferme également des photographies de la demanderesse et de son époux alors qu’ils se trouvaient ensemble au Pakistan. De plus, tous les deux ont déclaré au cours de leur témoignage qu’ils avaient vécu ensemble au Canada et au Pakistan. Ils communiquaient également une heure par jour l’un avec l’autre et voulaient tous les deux avoir des enfants et vivre ensemble à l’avenir.

 

La SAI a-t-elle commis une erreur en ne tenant pas compte de l’ensemble des éléments de preuve?

 

[20]           Même si la SAI a manifestement tenu compte de la majorité des éléments de preuve dont elle était saisie, la demanderesse a raison de relever des éléments pertinents qui n’ont pas été mentionnés dans la décision sous examen. Ces éléments omis comprennent le témoignage sous serment selon lequel le couple vivait ensemble au Canada et au Pakistan, les raisons pour lesquelles les membres de la famille croyaient dès le départ que la demanderesse et son époux seraient compatibles, soit l’âge, l’éducation, la religion, la langue, le milieu familial et la géographie, le témoignage de la demanderesse au sujet de l’éducation de chacun d’eux, lequel témoignage concordait avec les renseignements qu’avait l’époux à cet égard, de même que les éléments faisant état des communications, les photographies et les timbres apposés sur les passeports qui montraient que la demanderesse et son époux étaient retournés ensemble au Pakistan. Ces éléments de preuve appuient la position de la demanderesse et pourraient être considérés comme des éléments de preuve contradictoires. Il est donc équitable que la Cour en arrive à la conclusion que ces éléments ont été négligés ou ignorés : Prekaj c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 1047, 85 Imm. L.R. (3d) 124, au paragraphe 29; Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) [1998] A.C.F. no 1425 (QL), 157 F.T.R. 35. 

 

[21]           Pour les motifs exposés ci-dessus, la présente demande sera accueillie et renvoyée à une formation différente de la SAI.

 

[22]           Au cours des plaidoiries, l’avocat de la demanderesse a demandé qu’en cas de renvoi de l’affaire à la SAI, je demande à celle-ci, dans mon jugement et mes motifs, d’appliquer le critère conjonctif qui était en vigueur avant les modifications apportées au Règlement le 30 septembre 2010. Selon la demanderesse, l’équité exige l’application de la loi qui était en vigueur lorsque la décision initiale a été rendue. Le défendeur a souligné qu’en cas de renvoi de l’affaire, l’audience tenue devant la SAI serait une nouvelle audience, de sorte que le nouveau critère disjonctif s’appliquerait, comme l’exige le Règlement actuellement en vigueur. Le Règlement ne comporte aucune disposition transitoire.

 

[23]           Je suis d’accord avec la demanderesse. Pour en arriver à cette conclusion, j’ai tenu compte de l’article 43 de la Loi d’interprétation, L.R.C. 1985, ch. I-21, selon lequel l’abrogation d’un texte, en tout ou en partie, ne porte pas atteinte aux droits ou avantages acquis :

43. L’abrogation, en tout ou en partie, n’a pas pour conséquence :

 

a) de rétablir des textes ou autres règles de droit non en vigueur lors de sa prise d’effet;

 

b) de porter atteinte à l’application antérieure du texte abrogé ou aux mesures régulièrement prises sous son régime;

 

c) de porter atteinte aux droits ou avantages acquis, aux obligations contractées ou aux responsabilités encourues sous le régime du texte abrogé;

 

d) d’empêcher la poursuite des infractions au texte abrogé ou l’application des sanctions — peines, pénalités ou confiscations — encourues aux termes de celui-ci;

 

 

e) d’influer sur les enquêtes, procédures judiciaires ou recours relatifs aux droits, obligations, avantages, responsabilités ou sanctions mentionnés aux alinéas c) et d).  Les enquêtes, procédures ou recours visés à l’alinéa e) peuvent être engagés et se poursuivre, et les sanctions infligées, comme si le texte n’avait pas été abrogé.

43. Where an enactment is repealed in whole or in part, the repeal does not

 

(a) revive any enactment or anything not in force or existing at the time when the repeal takes effect,

 

(b) affect the previous operation of the enactment so repealed or anything duly done or suffered thereunder,

 

 

(c) affect any right, privilege, obligation or liability acquired, accrued, accruing or incurred under the enactment so repealed,

 

 

(d) affect any offence committed against or contravention of the provisions of the enactment so repealed, or any punishment, penalty or forfeiture incurred under the enactment so repealed, or

 

(e) affect any investigation, legal proceeding or remedy in respect of any right, privilege, obligation or liability referred to in paragraph (c) or in respect of any punishment, penalty or forfeiture referred to in paragraph (d), and an investigation, legal proceeding or remedy as described in paragraph (e) may be instituted, continued or enforced, and the punishment, penalty or forfeiture may be imposed as if the enactment had not been so repealed.

 

[24]           J’ai également tenu compte des décisions rendues dans McDoom c. Canada (Ministre de la Main-d’oeuvre et de l’Immigration), [1978] 1 C.F. 323; [1977] A.C.F. no 148 (QL) et Vijayasegar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 3 Imm. L.R. (3d) 67, [1999] I.A.D.D. no 2170, selon lesquelles l’application rétroactive de nouvelles exigences énoncées dans un règlement ne saurait avoir pour effet de léser qui que ce soit. À mon avis, telle serait la conséquence qui découlerait du renvoi de la présente affaire pour nouvel examen si le nouveau critère disjonctif était appliqué.

 

[25]           La demanderesse a présenté sa demande lorsque l’ancien Règlement était en vigueur. Elle avait le droit de s’attendre à ce que l’authenticité de son mariage soit évaluée d’une façon qui tiendrait compte des différences culturelles entre les unions occidentales et celles qui caractérisent les autres parties du globe. Appliquer le nouveau Règlement et le critère plus strict lors de la nouvelle audience aurait pour effet de priver le couple de l’avantage découlant de ce droit.

 

[26]           Dans Rafuse c. Canada (Commission d’appel des pensions), 2002 CAF 31, 286 N.R. 385, aux paragraphes 13 et 14, la Cour d’appel fédérale a souligné en toutes lettres que, lors du renvoi d’une décision pour nouvel examen, la Cour fédérale ne devrait pas ordonner au tribunal d’en arriver à une décision précise, sauf dans les cas les plus clairs : voir Xie c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1994), 75 F.T.R. 125, 46 A.C.W.S. (3d) 708. Tout en reconnaissant les limites inhérentes à l’exercice de mon pouvoir discrétionnaire en faveur de la demanderesse, j’estime que la Cour a compétence pour ordonner à la SAI d’appliquer les règles de droit qui étaient en vigueur lorsque la demanderesse a déposé son appel et lorsque celui-ci a d’abord été tranché par la SAI. L’omission d’exercer cette compétence rendrait inopérante la réparation que la demanderesse a obtenue dans la présente demande et la priverait du droit d’être traitée conformément aux principes de justice naturelle.

 

[27]           Comme il n’y en a pas eu de proposée, aucune question ne sera certifiée.


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE QUE :

1.      la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est renvoyée à une formation différente de la Section d’appel de l’immigration pour nouvel examen;

2.      la nouvelle formation appliquera le règlement qui était en vigueur avant le 20 septembre 2010;

3.      aucune question n’est certifiée.

 

 

« Richard G. Mosley »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-6148-10

 

INTITULÉ :                                                   ASMA ELAHI

 

                                                                        c.

 

                                                                        LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                        ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 4 mai 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LE JUGE MOSLEY

 

DATE DU JUGEMENT :                             Le 8 juillet 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Ravi Jain

Bahman Motamedi

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

David Cranton

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Ravi Jain

Bahman Motamedi

Avocats

Green and Spiegel LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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