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Cour fédérale

 

Federal Court


 

 

Date : 20110721


Dossiers : IMM-4383-11

IMM-4443-11

IMM-4503-11

 

Référence : 2011 CF 913

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

Toronto (Ontario), le 21 juillet 2011

En présence de monsieur le juge Hughes

 

ENTRE :

 

Dossier : IMM-4383-11

 

 

PAULO CESAR RAMOS ROJAS

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

défendeur

 

 

ET ENTRE :

Dossier : IMM-4443-11

 

 

PAULO CESAR RAMOS ROJAS

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeur

 

 

ET ENTRE :

Dossier : IMM-4503-11

 

 

PAULO CESAR RAMOS ROJAS

 

 

demandeur

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

défendeur

 

 

         MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Le demandeur a présenté trois demandes distinctes, qui comprennent toutes une requête en sursis de son renvoi imminent au Pérou. Je prononcerai un seul exposé des motifs et rendrai une seule ordonnance, dont copie sera versée dans chacun des dossiers. Je rejette la requête en sursis dans chaque cas. Le renvoi aura lieu comme prévu.

 

[2]               Voici les faits en bref. Le demandeur est né au Pérou et est arrivé au Canada à l’âge de neuf ans. Il a passé environ les vingt dernières années au Canada, mais n’est pas citoyen canadien. Le demandeur semble tirer un revenu modeste de son travail de cimentier-finisseur. Il y a quelques années, il est devenu membre d’une organisation que l’on peut appeler les Latin Kings. Il est demeuré membre de cette organisation au moins quelques mois et y a gravi au moins trois échelons. L’organisation des Latin Kings est considérée comme un gang criminel violent. Le demandeur affirme qu’il ignorait la véritable nature des Latin Kings, mais que, une fois au courant, il a quitté l’organisation et ne voulait plus y être mêlé.

 

[3]               Il semble également qu’il y a cinq ou six ans, le demandeur a eu une relation avec deux femmes, qui lui ont chacune donné un enfant. L’un de ces deux enfants est atteint du syndrome de Down. Le demandeur a épousé la mère de l’autre enfant, à une époque où son statut au Canada était précaire. Il ne vit avec ni l’une ni l’autre : il habite avec sa famille. Il donne un peu d’argent pour contribuer à l’entretien des enfants et de sa propre famille. Il s’acquitte à l’occasion de ses obligations parentales auprès des deux enfants.

 

[4]               En application de l’alinéa 37(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), le ministre a déterminé que le demandeur était interdit de territoire au Canada parce qu’il était membre des Latin Kings. M. Ramos Rojas a demandé une évaluation des risques, dont les résultats lui ont été défavorables. Il a également présenté sans succès une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire et attend à l’heure actuelle l’issue de la demande de dispense ministérielle au titre du paragraphe 37(2) de la LIPR qu’il a présentée il y a sept mois.

 

[5]               La Cour doit maintenant trancher trois demandes, à savoir une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire qui a été rejetée, une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de ne pas reporter le renvoi prise par l’agent de renvoi, et une demande d’ordonnance de mandamus pour enjoindre au ministre de rendre une décision aux termes du paragraphe 37(2) de la LIPR avant que le demandeur ne soit renvoyé du Canada.

 

[6]               L’avocat du demandeur a avancé de nombreux arguments pour appuyer le report du renvoi dans le contexte de chacune des trois requêtes. Bon nombre de ces arguments sont nouveaux, tandis que certains ont souvent été invoqués dans de pareils cas. Étant donné l’imminence du renvoi, il m’est impossible d’accorder tout le poids voulu à chacun de ces arguments. Je fonde donc essentiellement ma décision sur l’absence de préjudice irréparable et sur la prépondérance des inconvénients.

 

[7]               Dans le cas de la décision concernant la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, l’avocat du demandeur a avancé les arguments classiques se rapportant à la question grave, y compris le défaut d’avoir tenu compte de l’ensemble de la preuve et le défaut d’avoir tenu compte comme il se doit de l’intérêt supérieur de l’enfant touché. Bien que ces arguments puissent être soulevés, ils ne constituent pas des arguments sérieux. La décision ayant trait aux motifs d’ordre humanitaire est fondée à mon avis; il est improbable que le contrôle judiciaire de cette décision soit autorisé.

 

[8]               En ce qui concerne la décision de l’agent de renvoi, l’avocat du demandeur a voulu s’appuyer sur la Charte et soutenir que, compte tenu de l’arrêt rendu par la Cour suprême du Canada dans Conway, 2010 CSC 22, l’agent de renvoi devait tenir compte des arguments fondés sur la Charte. À mon avis, cet argument nouveau a peu de valeur.

 

[9]               Selon l’argument le plus longuement exposé par l’avocat du demandeur, les paragraphes 37(1) et 37(2) de la LIPR sont liés de telle sorte qu’un renvoi prononcé en application du paragraphe 37(1) ne peut être mis à exécution tant que le ministre n’a pas décidé s’il exerçait ou non le pouvoir discrétionnaire prévu au paragraphe 37(2). Le demandeur se fonde à cet égard sur l’arrêt de la Cour suprême Suresh, [2002] 1 R.C.S. 3, aux paragraphes 100 à 110.

 

[10]           Si je comprends bien ces paragraphes de l’arrêt Suresh, la Cour suprême déclare que le paragraphe 107 de la Charte ne protège pas les formes d’expression ou d’association violentes.

 

[11]           Le ministre a le pouvoir, mais non l’obligation, de renoncer au renvoi en cas d’association avec un gang terroriste, notamment si la personne ignorait les activités du gang ou si elle n’y a pas participé. Ni l’ignorance ni l’innocence ne suffit en soi pour déclencher l’exercice du pouvoir discrétionnaire. En l’espèce, bien que le demandeur proteste de son ignorance, des conclusions contraires ont déjà été tirées au cours de la précédente instance, qui s’est soldée par une décision en sa défaveur.

 

[12]           Je fonde essentiellement ma décision sur l’absence de préjudice irréparable et sur la prépondérance des inconvénients. En ce qui concerne le préjudice irréparable, le demandeur subirait, s’il devait être renvoyé au Pérou, les bouleversements habituels d’une telle rupture. Ses enfants seraient affectés dans une certaine mesure, mais le demandeur ne vit pas avec eux, et fournit un soutien financier et parental limité. Sa demande d’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministre aux termes du paragraphe 37(2) suivra son cours. À l’heure actuelle, le traitement de sa demande n’accuse pas de retard excessif. Si le délai devient démesuré, le demandeur pourra alors demander une ordonnance de mandamus. L’avocat du demandeur a voulu soutenir que même si le ministre exerçait son pouvoir discrétionnaire en faveur du demandeur, de nombreux obstacles compliqueraient le retour de ce dernier. Si le ministre devait rendre une décision favorable, je m’attends à ce que les obstacles soient minimisés, à défaut de quoi, le demandeur pourra s’adresser aux tribunaux pour demander réparation.

 

[13]           Reste la question de la prépondérance des inconvénients. Le ministre a le devoir de donner effet au renvoi le plus tôt possible. Il a été déterminé que le demandeur était membre d’un gang violent, même s’il affirme maintenant avoir pris ses distances. Il s’est déjà détaché lui‑même de la vie quotidienne de ses enfants et de leurs mères. La prépondérance des inconvénients penche en faveur du défendeur.

 


ORDONNANCE

 

POUR LES MOTIFS EXPOSÉS CI‑DESSUS,

 

 

LA COUR ORDONNE :

1.                  Les requêtes en sursis présentées dans les dossiers IMM-4383-11, IMM-4443-11 et IMM-4503-11 sont rejetées.

2.                  Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Roger T. Hughes »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Johanne Brassard, trad. a.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIERS :                                        IMM-4383-11; IMM 4443-11; IMM-4503-11

 

 

INTITULÉ :                                        PAULO CESAR RAMOS ROJAS c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

                                      ET ENTRE : PAULO CESAR RAMOS ROJAS c. LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

                                      ET ENTRE : PAULO CESAR RAMOS ROJAS c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                Le 20 juillet 2011

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE HUGHES

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 21 juillet 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Aadil Mangalji

 

POUR LE DEMANDEUR

Margherita Braccio

Martin Anderson

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

LONG MANGALJI s.r.l.

Immigration Law Group

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

                                                                                                                     

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