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Cour fédérale

 

Federal Court


 

 


Date : 20110720

Dossier : IMM-474-11

Référence : 2011 CF 907

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 20 juillet 2011

En présence de monsieur le juge Hughes

 

ENTRE :

 

LUIS ALFREDO OLIVERA LECHUGA

MARIA DEL ROSARIO GOMEZ HERNANDEZ

MICHELLE AYLIN OLIVERA GOMEZ

 

demandeurs

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire concernant une décision datée du 13 décembre 2010 par laquelle une commissaire de la Section de la protection des réfugiés a rejeté la demande d’asile des demandeurs. Pour les motifs qui suivent, je rejetterai cette demande.

 

[2]               Le demandeur principal est citoyen du Mexique; les autres demandeurs sont son épouse et sa fille d’âge mineur. En bref, ils craignent d’être persécutés et de subir un risque de préjudice de la part d’une personne appelée « Alma » et d’un groupe connu sous le nom de « La Familia ». Le demandeur principal avait emprunté de l’argent à Alma, vraisemblablement pour aider à conserver sa petite entreprise. Il n’a pas pu le rembourser. Alma était un usurier, et il a pourchassé le demandeur principal et sa famille. À un moment, dit le demandeur principal, il a été roué de coups. À un autre, allègue-t-il, il y a eu une tentative d’enlèvement de sa fille. Le demandeur principal et sa famille ont déménagé à des droits différents au Mexique et ont déposé un certain nombre de plaintes auprès de la police. Ils ont pris la fuite au Canada et ont demandé l’asile.

 

[3]               La décision de la commissaire s’articule autour de deux questions : le caractère adéquat de la protection de l’État au Mexique et les efforts faits par les demandeurs pour se réclamer de cette protection. Au sujet des éléments de preuve présentés en rapport avec la protection de l’État, la commissaire a conclu ce qui suit :

[…] le Mexique fait des efforts considérables pour régler le problème de la criminalité et que la police est apte et disposée à protéger les victimes. La Commission a reconnu qu’il existait de la corruption et des lacunes au sein des services de police, mais que le problème n’est pas généralisé. Je pense, compte tenu de l’analyse de la preuve documentaire, que, dans l’ensemble, les autorités mexicaines tentent de régler les problèmes de corruption et de corriger les lacunes.

 

 

[4]               Quant aux efforts faits pour solliciter la protection de la police, la commissaire a conclu ceci :

[…] En l’espèce, aucune information ne laisse entendre que la police n’a pas déployé d’efforts sérieux et véritables pour enquêter sur les allégations du demandeur d’asile et appréhender les agresseurs. La décision du demandeur d’asile de quitter le Mexique peut avoir retardé l’enquête ou y avoir mis fin étant donné qu’il était, en tant que victime, un témoin clé.

 

[…]

 

[…] Je rejette l’allégation selon laquelle l’État ne fournit aucune protection, étant donné que Maria a bien appelé la police, mais qu’elle n’est pas restée sur les lieux pour faire un signalement et qu’elle n’a fait aucune autre tentative pour effectuer un suivi auprès des policiers. Par conséquent, je conclus que Maria n’a fait que le minimum pour se prévaloir de la protection de la police. La police n’a pu fournir un appui étant donné que personne n’a communiqué de nouveau avec elle. Les actes de Maria n’appuient pas l’argument selon lequel il y a absence de protection étatique.

 

 

[5]               En résumant ces conclusions, la commissaire a écrit :

Par conséquent, à la lumière de l’ensemble de la preuve, j’estime que le demandeur d’asile a omis, compte tenu des circonstances en l’espèce, de réfuter la présomption de la protection de l’État au moyen d’éléments de preuve clairs et convaincants et qu’il n’a pas pris toutes les mesures raisonnables dans les circonstances pour se prévaloir de cette protection avant de présenter une demande d’asile. Je ne suis donc pas convaincue que l’État du Mexique n’offrirait pas raisonnablement une protection au demandeur d’asile s’il en faisait la demande.

 

 

[6]               L’avocate des demandeurs a soulevé quatre questions dans son mémoire et à l’audience; les trois premières sont axées sur le caractère adéquat de la protection de l’État, et la quatrième sur la question de savoir si les demandeurs ont fait des efforts appropriés pour solliciter cette protection :

[traduction

15.      La commissaire a commis au moins quatre erreurs :

Question no 1 : Elle a qualifié par erreur le critère de la protection de l’État d’« adéquat » plutôt que d’« efficace », comme le prescrit la Cour suprême dans l’arrêt Ward;

Question no 2 : Elle n’a pas reconnu que, pour le Mexique, la présomption de protection de l’État est moindre car il s’agit simplement d’une démocratie en développement;

Question no 3 : Elle a fait abstraction d’éléments de preuve pertinents et directement contradictoires au sujet de la disponibilité d’une protection de l’État;

Question no 4 : Son évaluation des efforts faits par les demandeurs pour obtenir une protection de l’État était déraisonnable.

 

 

[7]               En ce qui concerne le caractère adéquat de la protection de l’État, les demandeurs ont le fardeau de réfuter la présomption de cette protection en en fournissant une preuve claire et convaincante selon la prépondérance des probabilités (Le Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration c. Flores Carillo, 2008 CAF 94, au paragraphe 30). Chaque affaire concernant le caractère adéquat de la protection de l’État doit être examinée individuellement et en fonction de son bien-fondé (Soto c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1183, au paragraphe 30).

 

[8]               En l’espèce, la commissaire a conclu qu’au Mexique les demandeurs disposaient d’une protection de l’État adéquate. Cette conclusion est différente de celle tirée dans d’autres décisions de la Commission où un commissaire a conclu seulement que le Mexique s’améliorait ou faisait des efforts. Dans la présente affaire, il a été conclu qu’il existait une protection adéquate. L’avocate des demandeurs a souligné des éléments de la preuve qui mèneraient à une conclusion contraire. L’avocat du défendeur a souligné des éléments de preuve qui étayaient cette conclusion. La commissaire a reconnu qu’il y avait, sur la question, des éléments de preuve tant favorables que défavorables. Je ne suis pas disposé à réévaluer cette preuve. On ne m’a pas convaincu que la commissaire a commis une erreur manifeste et dominante en concluant qu’il existait une protection de l’État adéquate.

 

[9]               Quant à la question de savoir si les demandeurs ont fait des efforts suffisants pour se prévaloir de la protection de l’État, les conclusions que la commissaire a tirées ne sont pas déraisonnables (voir, p. ex., Le Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration c. Flores Carillo, 2008 CAF 94, aux paragraphes 31 à 36). La Cour ne modifiera pas ces conclusions.

 

[10]           Aucune partie n’a proposé une question à certifier.


JUGEMENT

 

POUR LES MOTIFS INDIQUÉS,

 

LA COUR ORDONNE :

1.                  la demande est rejetée;

2.                  il n’y a pas de question à certifier;

3.                  aucune ordonnance n’est rendue quant aux dépens.

 

« Roger T. Hughes »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice‑conseil

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-474-11

 

INTITULÉ :                                       LUIS ALFREDO OLIVERA LECHUGA, MARIA DEL ROSARIO GOMEZ HERNANDEZ, MICHELLE AYLIN OLIVERA GOMEZ c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 19 JUILLET 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE HUGHES

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 20 JUILLET 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Patricia Wells

 

POUR LES DEMANDEURS

Tamrat Gebeyehu

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Patricia Wells

Avocate

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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