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Date : 20120320


Dossier : IMM-4595-11

Référence : 2012 CF 330

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

Ottawa (Ontario), le 20 mars 2012

En présence de monsieur le juge O’Reilly

 

 

ENTRE :

 

[AB], [CD], [EF] et [GH]

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Aperçu général

 

[1]               AB, son épouse CD, leur fille de 17 ans EF et leur fils de 12 ans GH sont des citoyens du Burundi. Les deux parents sont séropositifs pour le VIH et GH l’est également.

 

[2]               La famille est arrivée au Canada en 2006 et a demandé l’asile. Leur demande a été rejetée. Ils ont ensuite présenté une demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire, mais un agent d’immigration l’a rejetée également.

 

[3]               Les demandeurs allèguent que l’agent a commis une erreur en ne tenant pas compte de l’intérêt supérieur des enfants, de la discrimination dont ils risquaient d’être victimes à leur retour au Burundi du fait qu’ils sont séropositifs pour le VIH et des difficultés auxquelles ils seraient confrontés au Burundi pour se procurer les médicaments dont ils ont besoin. Ils me demandent d’annuler la décision et d’ordonner à un autre agent de procéder à un nouvel examen de leur demande.

 

[4]               Je suis convaincu que l’agent a erré relativement à l’intérêt supérieur des enfants et que la décision devrait être annulée pour ce motif. Il n’est pas nécessaire d’examiner les autres motifs.

 

II.         La décision de l’agent

 

[5]               L’agent a souligné que les demandeurs ont fait valoir qu’ils seraient confrontés à des difficultés inhabituelles, injustifiées et excessives s’ils étaient obligés de retourner au Burundi en raison de l’absence de soins médicaux de base pour les personnes vivant avec le VIH. Les documents soumis par les demandeurs révélaient que la guerre interethnique, qui a duré 13 ans, a ravagé le système de soins de santé du pays.

 

[6]               Toutefois, la preuve documentaire démontrait également que la lutte contre le VIH/SIDA est une priorité nationale au Burundi. Le Burundi fait beaucoup d’efforts pour offrir l’accès universel à des services de prévention, à des soins et à du soutien relativement au VIH/SIDA. De plus, le Burundi a formé des centaines de médecins, d’infirmières et de [traduction] « médiateurs de santé » sur la prescription des médicaments antirétroviraux. L’agent a conclu que le traitement prescrit aux personnes infectées par le VIH/SIDA était disponible au Burundi et que les demandeurs pourraient y avoir accès.

 

[7]               En ce qui a trait à leur établissement au Canada, AB et son épouse travaillent pour un conseil scolaire comme enseignants suppléants et comme surveillants le midi depuis 2008. Ils sont toutefois bénéficiaires de l’aide sociale.

 

[8]               L’agent a reconnu que les enfants avaient d’excellents résultats scolaires au Canada. Il a également souligné que AB était inscrit à l’université et suivait des cours d’anglais et qu’il était un membre actif de son église. CD suivait également des cours de formation et faisait du bénévolat dans la communauté. L’agent n’a néanmoins pas considéré que leur degré d’établissement était exceptionnel.

 

[9]               Les demandeurs n’ont aucune famille au Canada. Toutefois, ils ont de nombreux parents au Burundi. AB et son épouse sont tous les deux des diplômés universitaires qui avaient de bons emplois au Burundi. L’agent a conclu qu’ils seraient en mesure d’y trouver du travail avec l’aide de leurs proches.

 

[10]           L’agent a conclu que les demandeurs n’éprouveraient pas de difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives s’ils retournaient au Burundi et présentaient une demande de résidence permanente à partir de ce pays. Il a donc rejeté la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire.

 

III.       L’agent a‑t‑il tenu compte de l’intérêt supérieur des enfants?

 

[11]           Les demandeurs ont fait valoir devant l’agent que leurs enfants seraient stigmatisés et victimes de discrimination au Burundi, particulièrement à l’école. Leurs observations étaient étayées par une preuve documentaire objective.

 

[12]           Or, la seule fois où l’agent a parlé des enfants a été pour souligner leur succès à l’école au Canada. À mon avis, il ne s’est montré ni réceptif, ni attentif, ni sensible à l’intérêt supérieur des enfants dans son analyse des conséquences qu’auraient sur la famille leur renvoi au Burundi. Il n’a pas tenu compte des conséquences du renvoi pour les enfants ni de la preuve pertinente à cet égard. Ce manquement m’oblige à accueillir la présente demande de contrôle judiciaire.

IV.       Conclusion et dispositif

 

[13]           Le défaut de l’agent de tenir compte de l’intérêt supérieur des enfants m’oblige à annuler sa décision et à ordonner le renvoi de l’affaire à un autre agent pour qu’il procède à un nouvel examen de la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Dans les circonstances, aucune question de portée générale n’est soulevée.


JUGEMENT

LA COUR STATUE :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

2.                  L’affaire est renvoyée à un autre agent pour qu’il effectue un nouvel examen.

3.                  Aucune question de portée générale n’est soulevée.

4.                  À la demande des demandeurs et avec le consentement du défendeur, l’intitulé de la cause est modifié afin de protéger l’identité des demandeurs, qui sont ainsi désignés : AB, CD, EF et GH.

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4595-11

 

INTITULÉ :                                       AB, CD, EF et GH

c

                                                            MCI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 14 février 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 20 mars 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

John Norquay

 

POUR LES DEMANDEURS

Jamie Todd

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

HIV & AIDS Legal Clinic

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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