Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20121218

Dossier : T‑1658‑11

Référence : 2012 CF 1499

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 18 décembre 2012

En présence de monsieur le juge Manson

 

 

ENTRE :

 

HAROLD COOMBS et JOAN COOMBS

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

L’AGENCE DU REVENU DU CANADA

 

 

 

défenderesse

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Aperçu général

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire, présentée conformément à l’article 18.1 de la Loi sur les cours fédérales, LRC 1985, c F‑7, de la décision discrétionnaire de l’Agence du revenu du Canada (ARC) de présenter une demande formelle de paiement (DFP) aux demandeurs.

 

[2]               Les demandeurs sollicitent une ordonnance annulant ou invalidant la DFP et une ordonnance de mandamus visant à interdire à l’ARC de prendre d’autres mesures de recouvrement tant qu’un avis de confirmation ou de modification des cotisations n’aura pas été transmis aux demandeurs.

 

II.        Contexte

[3]               Les demandeurs, Harold Coombs et Joan Coombs, sont les administrateurs et les actionnaires contrôlants de Select Travel Inc [Select Travel].

 

[4]               Harold Coombs est également le président de Select Travel, société constituée selon les lois de l’Ontario.

 

[5]               Le 23 mars 2010, l’ARC a établi, pour les années d’imposition 2004 et 2008 de Select Travel, une nouvelle cotisation selon laquelle cette société devait 6 651,84 $ et 597,28 $, respectivement, pour ces années. Le 24 mars 2010, l’ARC a envoyé un avis de nouvelle cotisation pour ces deux années et a informé M. Coombs d’un solde impayé de 8 094,61 $. Le 24 juin 2011, M. Coombs a déposé auprès du chef du service des appels un avis d’opposition à la nouvelle cotisation.

 

[6]               Le 24 mars 2011, Select Travel a fait l’objet, pour les années d’imposition 2009 et 2010, d’une nouvelle cotisation selon laquelle elle devait 1 612,45 $ et 1 349,78 $, respectivement, pour ces années. Le 11 août 2011, l’ARC a envoyé à Select Travel un relevé de compte qui indiquait un impôt à payer de 12 692,84 $. Au 2 septembre 2011, ce montant s’élevait à 12 729,40 $.

 

[7]               La défenderesse affirme, et les demandeurs ne le contestent pas, que la somme de 12 729,40 $ représente uniquement la dette fiscale de Select Travel liée aux retenues à la source.

 

[8]               Le 2 septembre 2011, l’ARC a envoyé la DFP à TD Canada Trust, l’institution financière de Select Travel, pour obtenir le montant dû, à savoir 12 729,70 $. Le 8 septembre 2011, TD Canada Trust a exécuté la DFP et a versé le montant total, soit 12 729,70 $. Le 28 septembre 2011, Harold Coombs a déposé une demande de contrôle judiciaire pour le compte de Select Travel Direct Inc. (dossier T‑1597‑11).

 

[9]               Le 7 octobre 2011, Harold Coombs a déposé une autre demande de contrôle judiciaire, cette fois‑ci pour son propre compte et celui de sa femme, Joan Coombs (dossier T‑1658‑11). Le 24 novembre 2011, la défenderesse a présenté une requête en radiation d’un des deux avis de demande pour le motif qu’ils étaient pour l’essentiel identiques et visaient la même réparation.

 

[10]           Le 19 décembre 2011, le juge Roger Hughes a rendu une ordonnance portant que les deux demandes seraient instruites ensemble. Il y a eu toutefois désistement dans le dossier T‑1597‑11 le 7 décembre 2011. La présente demande de contrôle judiciaire vise donc l’autre dossier, T‑1658‑11.

[10]

[11]           Il convient de noter que les demandeurs se représentent eux‑mêmes et n’ont pas présenté de mémoire des arguments. L’avocate de la défenderesse a présenté une contestation préliminaire au motif que les Coombs n’avaient pas la qualité pour agir au nom de la personne morale, Select Travel, à l’égard de laquelle la plainte concernant la présentation de la DFP et le recouvrement de l’impôt avait été soulevée. Dans l’intérêt de la justice, et compte tenu du fait qu’ils sont les seuls administrateurs et actionnaires de cette société, j’ai autorisé les Coombs à présenter des observations pour le compte de Select Travel.

 

[12]           Les demandeurs sollicitent ce qui suit :

A.    une ordonnance annulant la DFP;

B.     un jugement déclarant que la DFP est illégale et contraire à l’alinéa 225.1d) et au paragraphe 225.1(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu, RSBC 1996, c 215 [LIR];

C.     une ordonnance interdisant à l’ARC de prendre d’autres mesures de recouvrement tant qu’elle n’aura pas envoyé aux demandeurs un avis de confirmation ou de modification;

D.    une ordonnance déclarant que l’ARC est tenue de respecter les alinéas 225.1a) à g) de la LIR;

E.     une ordonnance obligeant l’ARC à respecter les obligations que lui imposent l’article 225.1 et le paragraphe 225.1(2) de la LIR.

 

III.       Questions en litige

[13]           Les questions en litige, après reformulation, sont les suivantes :

A.    La Cour fédérale a‑t‑elle compétence pour trancher la présente demande au sujet de la validité de la cotisation d’impôt établie à l’égard de Select Travel?

B.     L’ARC était‑elle légalement autorisée, aux termes de la LIR, à présenter une DFP le 2 septembre 2011 en vue de recouvrer l’impôt impayé?

C.     L’ARC était‑elle tenue, aux termes de la Charte des droits du contribuable ou pour toute autre raison, de motiver ses cotisations et ses mesures de recouvrement et, dans l’affirmative, a‑t‑elle respecté ces obligations?

 

IV. Norme de contrôle

[14]           Aucune des parties n’a présenté d’argument au sujet de la norme de contrôle applicable, mais la norme de contrôle applicable aux décisions discrétionnaires de l’ARC est la raisonnabilité (Dingman c Canada (Ministre du Revenu national ‑ MRN), 2009 CF 395).

 

V.        Analyse

[15]           La Cour fédérale n’a pas compétence pour entendre les contestations des cotisations à l’impôt qui relèvent exclusivement de la Cour canadienne de l’impôt (Walker c Canada, 2005 CAF 393 au paragraphe 13). Par conséquent, dans la mesure où les demandeurs souhaitent contester la validité des nouvelles cotisations, la demande doit être rejetée. En outre, les mesures de recouvrement prises à l’égard d’une cotisation valide sont légales (Krahn c Canada (Agence des douanes et du revenu), 2005 CF 471 aux paragraphes 9 et 10).

 

[16]           Dans la mesure où les demandeurs contestent la décision qu’a prise l’ARC de présenter une DFP le 2 septembre 2011, la Cour a compétence pour entendre l’affaire.

 

[17]           Les demandeurs soutiennent que l’ARC a commis une erreur lorsqu’elle a présenté la DFP parce qu’elle n’a pas tenu compte de leur avis de contestation déposé le 2 juin 2010 et qu’elle a pris des mesures de recouvrement avant le jour du début du recouvrement, ce qu’interdit le paragraphe 225.1(1) de la LIR.

 

[18]           Toutefois, étant donné que l’impôt impayé des demandeurs vise des retenues à la source sur les salaires, qui doivent être retenues et versées, les articles 225.1(1) à 225.1(4) ne s’appliquent pas et l’ARC était justifiée de présenter la DFP pour recouvrer cette créance fiscale. L’avis d’opposition n’est pas pertinent en l’espèce (Gagne c Ministre du Revenu, 2003 CFPI 18 aux paragraphes 17 et 28, et alinéas 225.1(6)b), d) et e) de la LIR).

 

[19]           Lorsqu’il n’y a pas suspension d’une telle mesure de recouvrement, l’ARC peut prendre immédiatement des mesures de recouvrement pourvu que la cotisation soit valide (Canada (Ministre du Revenu national ‑ MRN) c Vu, 2004 CF 1783 au paragraphe 3; conf. par 2005 CF 788).

 

[20]           Enfin, l’ARC n’était pas tenue de motiver ses cotisations et ses mesures de recouvrement, aux termes de l’article 152 de la LIR, mais la preuve démontre néanmoins, notamment les affidavits de Lynn Watson et de Nancy Arnold, souscrits respectivement le 6 février 2012 et le 23 novembre 2011, qu’on a fourni aux demandeurs des motifs suffisants pour expliquer la nouvelle cotisation et les mesures de recouvrement prises par l’ARC (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62). Après examen de cette preuve, je n’ai accordé que peu ou pas de poids aux références à des conversations avec des tiers contenues dans l’affidavit de Lynn Watson; par contre, j’ai accordé du poids aux pièces jointes à son affidavit, en particulier aux pièces A, B et C visant les documents commerciaux liés au Système automatisé pour les recouvrements et les retenues à la source, qui indiquent qu’il y a eu des communications avec Select Travel et Harold Coombs.

 

[21]           Pour les motifs susmentionnés, la présente demande est rejetée.

 

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée avec dépens.

 

 

« Michael D. Manson »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    T‑1658‑11

 

INTITULÉ :                                                  Harold COOMBS et al. c.
ARC

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 18 décembre 2012

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                        LE JUGE MANSON

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 18 décembre 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Harold Coombs

 

POUR LES DEMANDEURS

(pour leur propre compte)

 

Natalie Hamam

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Harold Coombs

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

(pour leur propre compte)

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.