Date : 20031120
Dossier : A-688-02
Référence : 2003 CAF 436
CORAM : LE JUGE NOËL
LE JUGE EVANS
LE JUGE PELLETIER
ENTRE :
KEVIN MARCHESSAULT
appelant
et
SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
intimée
Audience tenue par vidéoconférence à Ottawa, Saskatoon et Regina, le 18 novembre 2003.
Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 20 novembre 2003.
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE EVANS
Y ONT SOUSCRIT LE JUGE NOËL
LE JUGE PELLETIER
Date : 20031120
Dossier : A-688-02
Référence : 2003 CAF 436
CORAM : LE JUGE NOËL
LE JUGE EVANS
LE JUGE PELLETIER
ENTRE :
KEVIN MARCHESSAULT
appelant
et
SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
intimée
MOTIFS DU JUGEMENT
[1] Il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que le public puisse recevoir ses services dans l'une ou l'autre des langues officielles à tous leurs bureaux, « là où [...] l'emploi de cette langue fait l'objet d'une demande importante » : Loi sur les langues officielles, L.R.C. 1985, ch. 31 (4e suppl.), article 22 (LLO). La question en litige dans la présente affaire concerne le fondement qui sert à établir l'existence d'une « demande importante » pour des services dans la langue officielle de la minorité dans une région donnée.
[2] Kevin Marchessault a fait une demande à la Cour fédérale pour contester la décision de la Société canadienne des postes de classifier « poste bilingue à nomination impérative » le poste de maître de poste à Coderre, en Saskatchewan. Les candidats pouvaient postuler au concours du 1e au 18 décembre 1992. À l'époque, M. Marchessault exerçait les fonctions de maître de poste de façon temporaire. Cependant, parce qu'il ne parlait pas le français, il ne remplissait pas les conditions pour exercer ces fonctions de façon permanente.
[3] M. Marchessault a porté plainte auprès du Commissaire aux langues officielles en 1993 concernant cette classification. Le Commissaire a conclu que la proportion des résidents pour qui le français était la langue maternelle était suffisante pour constituer une « demande importante » au sens de la LLO et du Règlement sur les langues officielles - communications avec le public et prestation des services, C.P. 1991-2541 (le Règlement). Par conséquent, il a rejeté la plainte. En 1999, M. Marchessault a encore une fois déposé une plainte concernant la classification et, dans une lettre datée du 28 juin 2000, le Commissaire a encore rejeté la plainte.
[4] M. Marchessault, qui a agi pour son propre compte depuis le début de la présente affaire, a fait une demande à la Section de première instance de la Cour fédérale en vertu du paragraphe 77(1) de la LLO, au motif qu'il n'y avait pas de « demande importante » pour des services en français à Coderre qui puisse justifier la classification bilingue du poste de maître de poste. Le juge des requêtes a rejeté la demande : Marchessault c. Société canadienne des postes, 2002 CFPI 1202. M. Marchessault en appelle maintenant à la Cour de cette décision; l'appel a été entendu par vidéoconférence.
[5] M. Marchessault a prétendu que le juge des requêtes avait commis une erreur en rendant une décision sur l'affaire sur le fondement que le Règlement qui établit les exigences pour décider s'il existe une « demande importante » pour des services dans la langue de la minorité ne s'appliquait pas à la classification du poste de maître de poste établie par Postes Canada. M. Marchessault a dit que, dans toute la correspondance qu'il avait échangée avec Postes Canada et le Commissaire aux langues officielles, il avait été présumé que le Règlement s'appliquait et que la décision de Postes Canada de classifier bilingue le poste avait été prise en vertu du Règlement.
[6] À mon avis, le juge des requêtes a eu raison de décider que le Règlement ne s'appliquait pas, puisqu'il n'est entré en vigueur que le 16 décembre 1992. Le poste de maître de poste a été affiché le 1er décembre 1992, et donc, la décision de le classifier « poste bilingue à nomination impérative » doit avoir été prise au plus tard le 1er décembre, soit, évidemment, avant le 16 décembre, date de l'entrée en vigueur du Règlement.
[7] Le fait qu'il ait pu y avoir eu de la confusion de la part de Postes Canada et du Commissaire concernant l'applicabilité du Règlement n'a pas d'importance. La question de savoir si les conditions prévues par la loi pour déterminer la « demande importante » s'appliquaient à une décision prise le 1er décembre 1992 ou avant cette date, n'est pas une question qui concerne la perception que des fonctionnaires peuvent avoir de la loi, mais bien une question d'interprétation de la loi qui doit être tranchée sur le fondement de la loi.
[8] Avant l'entrée en vigueur du Règlement, les institutions fédérales, y compris Postes Canada, ont établi leurs propres critères pour déterminer s'il existait une « demande importante » pour des services dans la langue de la minorité. Une lettre de Postes Canada adressée à M. Marchessault, datée du 29 décembre 1999, disait que ces critères comprenaient ce qui suit : [traduction] « une population constituant une minorité composée de 500 personnes ou 10 p. 100 de la population totale » . M Marchessault a reconnu que la population francophone de Coderre en 1992 dépassait 10 p. 100 et que, si l'on pouvait établir la « demande importante » en se fondant sur ce critère, on avait correctement classifié poste bilingue le poste de maître de poste.
[9] Cela est suffisant pour statuer sur l'appel. Puisque le Règlement ne s'appliquait pas, il n'est pas nécessaire d'examiner l'argument de M. Marchessault selon lequel la question de savoir si la population francophone était de 30 p. 100 ou plus (le critère de la « demande importante » dans le Règlement), devrait être tranchée sur le fondement du recensement de 1986 et non du recensement de 1991.
[10] J'ajouterais, cependant, que les motifs du juge des requêtes et le mémoire des faits et du droit déposé au nom de Postes Canada dans le présent appel, traitent de la présente affaire comme s'il s'agissait d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision du Commissaire aux langues officielles. À mon avis, une demande pour former un recours aux termes de l'article 77 de la LLO est une procédure sui generis par laquelle on demande à la Cour de déterminer si la conduite qui a fait l'objet d'une plainte au Commissaire (dans la présente affaire, la classification bilingue par Postes Canada du poste de maître de poste à Coderre) constitue une infraction à la LLO. Par conséquent, dans le contexte de la présente affaire, l'objet de la demande est la classification par Postes Canada, et non le rejet de la plainte par le Commissaire.
[11] Je ne suis pas d'accord non plus avec l'affirmation du juge des requêtes selon laquelle, lorsque le Commissaire a examiné la deuxième plainte de M. Marchessault, identique à la première, à l'encontre de Postes Canada, il a, par la même occasion, fait en sorte que le délai prévu au paragraphe 77(2), dans lequel une personne peut former un recours en vertu du paragraphe 77(1), recommence à courir.
[12] Pour ces motifs, je rejetterais l'appel sans frais.
« John M. Evans »
Juge
« Je souscris aux présents motifs
Marc Noël, juge »
« Je souscris aux présents motifs
J.D. Denis Pelletier, juge »
Traduction certifiée conforme
Caroline Raymond, LL.L
COUR D'APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-688-02
(EN APPEL DE L'ORDONNANCE DE LA SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE DATÉE DU 22 NOVEMBRE 2002 ( NO T-1463-00)
INTITULÉ : KEVIN MARCHESSAULT
c.
SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
LIEU DE L'AUDIENCE : OTTAWA, REGINA ET SASKATOON
(PAR VIDÉOCONFÉRENCE)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 18 NOVEMBRE 2003
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE EVANS
LE JUGE PELLETIER
DATE DES MOTIFS : LE 20 NOVEMBRE 2003
COMPARUTIONS :
Kevin Marchessault |
POUR SON PROPRE COMPTE |
|
POUR L'INTIMÉE |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Coderre (Saskatchewan) |
POUR SON PROPRE COMPTE |
McKercher McKercher & Whitmore Saskatoon (Saskatchewan)
|
POUR L'INTIMÉE |