Date : 20010604
Dossier : A-372-99
Référence neutre : 2001 CAF 182
CORAM : LE JUGE EN CHEF RICHARD
ENTRE :
LYMAN KEEPING
appelant
- et -
SA MAJESTÉ LA REINE
intimée
AUDIENCE TENUE à St. John's (Terre-Neuve), le mardi 29 mai 2001
JUGEMENT rendu le lundi 4 juin 2001
MOTIFS DU JUGEMENT PAR : LE JUGE ROTHSTEIN
Y ONT SOUSCRIT : LE JUGE EN CHEF RICHARD
LE JUGE SEXTON
Date : 20010604
Dossier : A-372-99
Référence neutre : 2001 CAF 182
CORAM : LE JUGE EN CHEF RICHARD
LE JUGE ROTHSTEIN
LE JUGE SEXTON
ENTRE :
LYMAN KEEPING
appelant
- et -
SA MAJESTÉ LA REINE
intimée
[1] Il s'agit d'un appel d'une décision de la Cour de l'impôt rendue le 14 mai 1999 par laquelle l'appel de l'appelant a été rejeté. La question en litige est de savoir si l'appelant avait une expectative raisonnable de profits à l'égard de son occupation de distributeur de produits Amway en 1993 et 1994.
[2] Bien que l'appelant ait souligné des erreurs de fait commises par le juge de la Cour de l'impôt, et l'intimé admet qu'il existe au moins une erreur de fait importante, l'appel doit être décidé selon l'application appropriée du critère de l'expectative raisonnable de profit énoncé dans l'arrêt Moldowan c. La Reine, [1978] 1 R.C.S. 480, et explicité dans des jugements ultérieurs.
[3] L'intimée a précisé que la Cour n'avait pas à fonder sa décision sur l'appréciation de quelque avantage personnel que l'appelant avait pu retirer de son occupation de distributeur de produits Amway. L'intimée a admis que l'appelant avait continué à exploiter son entreprise de distribution de produits Amway dans l'espoir de faire du profit. En effet, le juge de la Cour de l'impôt, bien qu'il ait noté que l'appelant achetait 80 pour 100 de ses produits ménagers d'Amway au prix de gros et qu'il avait fait quelques voyages pour des congrès à Niagara Falls et à Atlanta, n'a pas fondé sa décision sur un avantage personnel pour l'appelant. Dans son plaidoyer, le ministre n'a pas présumé quoi ce soit quant à un avantage personnel pour l'appelant et la preuve est beaucoup trop mince pour qu'une décision défavorable à l'appelant soit fondée sur le bénéfice personnel.
[4] La conclusion du juge de la Cour de l'impôt selon laquelle l'appelant n'avait pas une expectative raisonnable de profit pendant les années d'imposition 1993 et 1994 est fondée sur ce qui suit :
1. Le faible pourcentage de marge bénéficiaire qu'Amway lui permettait d'obtenir.
2. La péninsule Burin dans les environs de Garnish était peu peuplée et l'appelant devait conduire pendant quatre heures et dépenser beaucoup de temps et d'argent pour trouver des débouchés.
3. Il était un professeur et ne pouvait consacrer qu'un nombre d'heures limité à l'occupation.
4. L'attitude qu'il a conservée jusqu'à aujourd'hui selon laquelle il croit qu'un groupe de distributeurs établi qu'il laisse se débrouiller tout seul et à qui il ne fournit pas de services pourra se maintenir.
Ensemble, ces facteurs ont empêché l'appelant d'avoir une expectative raisonnable de profit en 1993 et 1994.
[5] Avec respect, je suis d'avis que l'analyse du juge de la Cour de l'impôt équivalait à faire une appréciation rétrospective de la perspicacité commerciale de l'appelant, ce que les cours ne devraient pas faire. Comme la Cour l'a déclaré dans l'arrêt Mastri c. Canada (Procureur général), [1998] 1 C.F. 66 (C.A.), au paragraphe 12 :
Bref, la décision de la Cour dans l'arrêt Tonn n'a pas pour but de modifier le droit établi dans l'arrêt Moldowan. L'arrêt Tonn confirme simplement l'interprétation fondée sur le bon sens selon laquelle ce n'est pas aux tribunaux de faire une appréciation rétrospective de la perspicacité commerciale d'un contribuable dont l'entreprise se révèle moins rentable que prévue.
En fondant sa décision sur les marges de profit, sur les débouchés et les coûts potentiels, ainsi que sur les méthodes de l'appelant quant à l'exploitation de son entreprise de distribution de produits Amway, le juge de la Cour de l'impôt a fait une appréciation rétrospective de la perspicacité commerciale de l'appelant. Ce faisant, le juge de la Cour de l'impôt a commis une erreur de droit.
[6] Bien qu'il ne me soit pas nécessaire d'examiner la preuve en détail, je remarque que malgré les marges de profit peu élevées, il existe des éléments de preuve quant à d'autres entreprises de distribution de produits Amway qui sont exploitées avec succès par des individus qui, comme l'appelant, suivent le plan d'affaires établi par Amway. En outre, il a été établi qu'il faut cinq ou six ans ou plus pour qu'une entreprise devienne rentable. Dans la présente affaire, l'appelant, pour les années en cause, exploitait son entreprise depuis moins de cinq ans. Rien n'indique que l'entreprise de distribution de produits Amway était exploitée dans un but autre celui de faire des profits. Dans ces circonstances, le critère d'expectative raisonnable de profit aurait dû être appliqué avec modération et non pas pour mettre en doute le sens des affaires de l'appelant. Voir dans l'affaire Mastri, précitée, au paragraphe 10, le renvoi à l'arrêt Tonn c. Canada, [1996] 2 C.F. 73 (C.A.).
[7] L'appel devrait être accueilli avec dépens et l'affaire devrait être renvoyée au ministre du Revenu national pour qu'il établisse une nouvelle cotisation conforme aux présents motifs.
« Marshall Rothstein »
J.C.A.
« Je souscris aux présents motifs
J. Richard, J.C. »
« Je souscris aux présents motifs
J. Edgar Sexton, J.C.A. »
Traduction certifiée conforme
Danièle Laberge, LL.L.
Dossier : A-372-99
OTTAWA (ONTARIO), LE 4 JUIN 2001
CORAM : LE JUGE EN CHEF RICHARD
LE JUGE ROTHSTEIN
LE JUGE SEXTON
ENTRE :
LYMAN KEEPING
appelant
- et -
SA MAJESTÉ LA REINE
intimée
JUGEMENT
L'appel est accueilli avec dépens et l'affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour qu'il établisse une nouvelle cotisation conforme aux motifs du jugement.
« J. Richard »
Juge en chef
Traduction certifiée conforme
Danièle Laberge, LL.L.
COUR D'APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
NUMÉRO DU GREFFE : A-372-99
INTITULÉ DE LA CAUSE : Lyman Keeping
- et -
Sa Majesté la reine
LIEU DE L'AUDIENCE : St. John's (Terre-Neuve)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 29 mai 2001
MOTIFS DU JUGEMENT PAR : Monsieur le juge Rothstein
Y ONT SOUSCRIT : Le juge en chef Richard, le juge Sexton
EN DATE DU : 4 juin 2001
ONT COMPARU :
Neil F. Pittman POUR L'APPELANT
Lynn Gillis et POUR L'INTIMÉE
Dany Leduc
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
White, Ottenheimer & Baker POUR L'APPELANT
St. John's (Terre-Neuve)
Morris Rosenberg POUR L'INTIMÉE
Sous-procureur général du Canada