Date : 20030605
Dossier : A-720-01
Référence : 2003 CAF 255
CORAM : LE JUGE EN CHEF RICHARD
ENTRE :
LA PROCUREURE GÉNÉRALE DU CANADA
demanderesse
et
PATRICK LAVALLÉE
défendeur
Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 3 juin 2003.
Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 5 juin 2003.
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE NOËL
Y ONT SOUSCRIT : LE JUGE EN CHEF RICHARD
LE JUGE PELLETIER
Date : 20030605
Dossier : A-720-01
Référence : 2003 CAF 255
CORAM : LE JUGE EN CHEF RICHARD
LE JUGE NOËL
LE JUGE PELLETIER
ENTRE :
LA PROCUREURE GÉNÉRALE DU CANADA
demanderesse
et
PATRICK LAVALLÉE
défendeur
MOTIFS DU JUGEMENT
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire dirigée à l'encontre d'une décision rendue par un juge-arbitre (CUB 52574), lequel a rejeté l'appel de la Commission de l'assurance-emploi (la « Commission » ) et a maintenu la décision du conseil arbitral à l'effet que le prestataire n'avait pas quitté volontairement son emploi sans justification ou perdu son emploi en raison de son inconduite au sens des articles 29 et 30 de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi » ).
[2] La preuve a révélé qu'en février 2000, le prestataire a avisé son employeur qu'il devait s'absenter de son travail parce qu'il devait purger une peine en détention à défaut d'avoir payé des amendes pour des contraventions au Code de la sécurité routière. Le total des amendes était d'environ 9 000 $. Puisqu'il ne pouvait de ce fait remplir les fonctions de son emploi, l'employeur l'a remercié.
[3] Le prestataire a expliqué qu'il devait reprendre son emploi à sa sortie de prison mais qu'il n'a pu le faire puisque les termes de sa libération conditionnelle l'empêchait de travailler en Ontario où était situé l'entreprise de son employeur.
[4] Le prestataire présenta une demande de prestations indiquant qu'il avait quitté son emploi parce qu'il avait été détenu en prison. Après qu'une période de prestations initiale fut établie, la Commission imposa une exclusion au motif que le prestataire avait perdu son emploi en raison de son inconduite. Suite aux représentations faites par le procureur du prestataire, cette décision fut modifiée en ajoutant comme motif d'exclusion le fait que le prestataire aurait abandonné volontairement son emploi sans justification.
[5] L'appel du prestataire à l'encontre de cette décision fut accueilli par le conseil arbitral. Selon le conseil arbitral, le prestataire n'avait pas exercé un choix personnel en quittant son emploi mais avait été contraint à le faire puisqu'il n'avait pas les moyens de payer les contraventions qui s'élevaient à 9 000 $. Au surplus, il avait pris des mesures raisonnables pour que son employeur le reprenne suite à son emprisonnement. Le conseil arbitral a également conclu qu'il n'y avait pas eu inconduite.
[6] Le 31 août 2001, le juge-arbitre rejetait l'appel de la Commission à l'encontre de la décision du conseil arbitral. Selon le juge-arbitre, la décision du conseil arbitral était fonction des faits particuliers de l'affaire et il ne lui appartenait pas substituer son appréciation à celle du conseil arbitral.
Analyse et décision
[7] À mon avis, le conseil arbitral a commis une erreur de droit en concluant à l'absence d'inconduite au sens de l'article 30 de la Loi et le juge-arbitre se devait d'intervenir quant à cet aspect de la décision.
[8] Le juge-arbitre a décidé de ne pas intervenir sur ce point en disant ce qui suit :
Dans le cas devant moi, ce n'est guère la sanction imposée mais les conditions de la libération qui ont empêché le prestataire de reprendre son travail.
[...]
Sur ces faits, le conseil a conclu que le prestataire n'avait pas perdu son emploi par inconduite et qu'il n'avait pas volontairement perdu cet emploi. Je conclus donc que le conseil n'a pas erré mais a, en effet, fondé sa décision sur une analyse sérieuse et fondée de tous les éléments de preuve portés à sa connaissance.
[9] Or, la preuve révèle que suite à une série d'infractions au Code de la sécurité routière le prestataire a accumulé des amendes qu'il n'était plus en mesure de payer. Sa perte de liberté lui est donc imputable tout comme la perte de son emploi. Il ne peut non plus s'en remettre aux termes de sa libération conditionnelle puisque les conditions imposées relèvent aussi de ses propres actes.
[10] Comme l'expliquait le juge Létourneau dans l'affaire Canada (PGC) c. Brisette, [1994] 1 C.F. 684 (C.A.), la prestation de service est une condition essentielle du contrat de travail. L'employé qui par ses propres gestes fait en sorte qu'il n'est plus en mesure de remplir cette condition, et qui de ce fait perd son emploi, ne peut faire assumer par d'autres le risque de son chômage, pas plus que celui qui quitte son emploi volontairement (Tanguay c. Canada (Commission d'assurance-chômage (1985), 10 C.C.E.L. (C.A.F.) à la page 244).
[11] Le juge-arbitre se devait donc d'intervenir et annuler la décision du conseil arbitral à l'effet que le prestataire n'avait pas perdu son emploi en vertu de son inconduite.
[12] Pour ces motifs, j'accueillerais la demande de contrôle judiciaire, j'infirmerais la décision du juge-arbitre et je renverrais l'affaire au juge-arbitre en chef ou à un juge-arbitre désigné par lui pour qu'il rende une nouvelle décision en tenant pour acquis que le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite.
"Marc Noël"
j.c.a.
"Je suis d'accord.
J. Richard, j.c."
"Je suis d'accord.
J.D.Denis Pelletier, j.c.a."
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION D'APPEL
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-720-01
INTITULÉ : LA PROCUREURE GÉNÉRALE DU CANADA
c. PATRICK LAVALLÉE
LIEU DE L'AUDIENCE : Ottawa, Ontario
DATE DE L'AUDIENCE : le 3 juin 2003
MOTIFS DU JUGEMENT : Le juge Noël
Y ONT SOUSCRIT : Le juge en Chef Richard
Le juge Pelletier
DATE DES MOTIFS : le 5 juin 2003
COMPARUTIONS :
Me Pauline Leroux POUR LA DEMANDERESSE
POUR LUI-MÊME
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
M. Morris Rosenberg POUR LA DEMANDERESSE
Sous-procureur général du Canada
Ottawa, Ontario
M. Patrick Lavallée
Hull, Québec POUR LUI-MÊME