Date : 20011115
Dossier : A-516-99
OTTAWA (ONTARIO), LE JEUDI 15 NOVEMBRE 2001
C O R A M : LE JUGE STRAYER
LE JUGE SEXTON
LE JUGE EVANS
E N T R E :
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
demandeur
-- et --
TAM-HUU NGUYEN
défendeur
J U G E M E N T
La demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision du juge-arbitre est annulée, et l'affaire est renvoyée au juge-arbitre en chef pour être soumise à un juge-arbitre qui confirmera la décision du conseil arbitral en conformité avec les motifs annexés.
« B.L. Strayer »
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.
Date : 20011115
Dossier : A-516-99
Référence neutre : 2001 CAF 348
CORAM : LE JUGE STRAYER
LE JUGE SEXTON
LE JUGE EVANS
E N T R E :
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
demandeur
-- et --
TAM-HUU NGUYEN
défendeur
Audience tenue à Toronto (Ontario), le jeudi 8 novembre 2001
JUGEMENT rendu à Ottawa (Ontario), le jeudi 15 novembre 2001
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE STRAYER
Y SOUSCRIVENT : LE JUGE SEXTON
LE JUGE EVANS
Date : 20011115
Dossier : A-516-99
Référence neutre : 2001 CAF 348
C O R A M : LE JUGE STRAYER
LE JUGE SEXTON
LE JUGE EVANS
E N T R E :
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
demandeur
-- et --
TAM-HUU NGUYEN
défendeur
MOTIFS DU JUGEMENT
LE JUGE STRAYER
[1] Le procureur général du Canada demande le contrôle judiciaire d'une décision rendue par un juge-arbitre en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi.
[2] Le défendeur a été démis de ses fonctions d' « associé » au Casino Niagara le 22 août 1997. Il s'est vu par la suite refuser des prestations en vertu du paragraphe 30(1) de la Loi sur l'assurance-emploi, au motif qu'il avait perdu son travail en raison de sa propre inconduite. Il a fait appel de cette décision à un conseil arbitral, mais le conseil arbitral a rendu une décision majoritaire confirmant la décision de la Commission. Un membre dissident a jugé que l'inconduite en question n'était pas assez grave pour justifier un congédiement, que l'intimé aurait dû avoir la possibilité de s'expliquer et que tout au plus il aurait dû être réprimandé et se voir offrir des séances de conseils en vue de se corriger. En appel, un juge-arbitre a annulé la décision majoritaire du conseil arbitral au motif qu'elle était déraisonnable eu égard à la preuve dont disposait le conseil.
[3] Le juge-arbitre a semblé accepter la preuve présentée au conseil, preuve qui était la suivante. Le défendeur avait avec insistance demandé le numéro de téléphone d'une compagne de travail « associée » , qui lui avait répondu qu'elle était mariée. Le 21 août 1997, il lui remit un message écrit contenant des symboles et des dessins, qu'il traduisit pour elle ainsi : « Garçon aime fille, je t'aime, fille n'aime pas garçon... le garçon tue la fille » . Un autre « associé » avait assisté à la scène et en avait semble-t-il parlé à l'employeur. Le défendeur continua d'intimider la femme en question en lui disant qu'il la rencontrerait sur le terrain de stationnement, ce que, lui a-t-elle dit, elle ne voulait pas qu'il fasse.
[4] Il a aussi été établi que tous les employés du Casino avaient reçu un livret qui semble-t-il contenait non seulement un énoncé de la Politique concernant le harcèlement (pièce 12-3,4), mais également les règles de conduites à l'usage des associés du Casino (pièce 12-5). Le juge-arbitre semble s'être focalisé uniquement sur la Politique concernant le harcèlement et l'avoir considérée comme un document faisant autorité sur ce qui est une « inconduite » selon le paragraphe 30(1) de la Loi. Selon lui, cette Politique exigeait le dépôt d'une plainte par la victime avant que des approches répétées et non sollicitées à connotation sexuelle puissent donner lieu à un congédiement.
[5] Je suis d'avis que le juge-arbitre a commis une erreur lorsqu'il a annulé la décision du conseil en la qualifiant de « déraisonnable au vu de la preuve » . Dans la mesure où il a décidé en droit que le comportement du défendeur ici ne pouvait équivaloir à une inconduite parce que ce comportement n'entrait pas dans une définition figurant dans la Politique du Casino sur le harcèlement, il a commis une erreur de droit. D'abord, c'est l' « inconduite » au sens du paragraphe 30(1) de la Loi sur l'assurance-emploi qu'il convient de retenir, pas nécessairement celle qui est définie par la politique officielle de l'employeur. De façon générale, il a été jugé que l'inconduite selon la Loi requiert un comportement qui est incompatible avec des rapports de travail continus. (Voir p. ex. PGC c. Brissette, [1994] 1 C.F. 684). Deuxièmement, le juge-arbitre a adopté à mon avis une vue trop étroite des règles de l'employeur sur le harcèlement. Il n'a fait état que du paragraphe 3.1 de la Politique concernant le harcèlement, qui compte parmi les formes de harcèlement une parole ou un acte « non souhaité ou non sollicité, et de nature sexuelle » . Pour lui, cela signifie qu'il n'y a pas de harcèlement à moins que la victime ne se plaigne à l'employeur. C'est là une interprétation qui ne s'accorde pas avec le texte de cette disposition. Il a aussi ignoré la définition plus générale du harcèlement qui est adoptée dans la section 3.0 et dont le paragraphe 3.1 n'est qu'un exemple. Cette définition, tirée du Code des droits de la personne de l'Ontario, définit le harcèlement comme
le fait pour une personne de faire des remarques ou des gestes vexatoires lorsqu'elle sait ou devrait raisonnablement savoir que ces remarques ou ces gestes sont importuns.
Cette Politique, communiquée à tous les employés, n'imposait certainement pas une opposition ou plainte explicite si l'auteur des gestes doit raisonnablement savoir qu'ils sont importuns. De plus, les règles de conduite distribuées par le Casino Niagara à ses employés considèrent comme une conduite inacceptable [TRADUCTION] « tout comportement impoli, incorrect ou grossier d'un associé envers... d'autres associés » , ainsi que « le fait d'intimider ou d'importuner d'autres associés » .
[6] Le fondement juridique était donc amplement suffisant pour autoriser le conseil arbitral à conclure que le comportement en question était proscrit par l'employeur. Les règles de conduite disent qu'une telle inconduite peut [TRADUCTION] « entraîner l'imposition de séances destinées à corriger les écarts de son auteur, voire mener à un renvoi » . À mon avis, cela n'empêchait pas juridiquement l'employeur de décider tout bonnement le renvoi, vu les circonstances.
[7] Dans la mesure où le juge-arbitre affirmait, en totalité ou en partie, que le conseil avait commis une erreur de fait sujette à révision, je dois également exprimer mon désaccord. Un juge-arbitre ne peut qu'annuler une décision qui est fondée sur une conclusion de fait erronée tirée par un Conseil
de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. (Loi sur l'assurance-emploi, art. 115).
Ici, le conseil avait devant lui des éléments de preuve qui lui permettaient raisonnablement de rendre la décision qu'il a rendue. Il n'y avait rien de « déraisonnable » dans ses conclusions de fait, et elles ne pouvaient être annulées, quand bien même le juge-arbitre ou la Cour aurait pu, avec les mêmes éléments de preuve, arriver à une conclusion différente.
[8] La demande de contrôle judiciaire devrait donc être accueillie, la décision du juge-arbitre annulée et l'affaire renvoyée au juge-arbitre en chef pour être soumise à un juge-arbitre qui confirmera la décision du conseil arbitral en conformité avec les présents motifs.
« B.L. Strayer »
Juge
J'y souscris
J. Edgar Sexton
J'y souscris
John M. Evans
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.
COUR D'APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-516-99
INTITULÉ : Procureur général du Canada
et
Tam-Huu Nguyen
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE : le 8 novembre 2001
MOTIFS DU JUGEMENT : le juge Strayer
(selon ce qu'indiquent les motifs)
Y ONT SOUSCRIT : le juge Sexton
le juge Evans
DATE DES MOTIFS : le 15 novembre 2001
ONT COMPARU
Derek Edwards POUR LE DEMANDEUR
Paul Di Paul POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
Paul V. Di Paul, LL.B. POUR LE DEMANDEUR
Niagara Falls (Ontario)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Toronto (Ontario)