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Date : 20011213

Dossier : A-601-00

Référence neutre : 2001 CAF 393

CORAM :       LE JUGE STONE

LE JUGE EVANS

LE JUGE SEXTON

ENTRE :

                                                               C.W. AGENCIES INC.

                                                                                                                                                         appelante

- et -

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

                               Audience tenue à Toronto (Ontario), le mardi 11 décembre 2001

                                                    Jugement rendu à Toronto (Ontario),

                                                             le mardi 11 décembre 2001

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                         LE JUGE SEXTON


Date : 20011213

Dossier : A-601-00

Référence neutre : 2001 CAF 393

CORAM :       LE JUGE STONE

LE JUGE EVANS

LE JUGE SEXTON                                                                                   

ENTRE :

                                                               C.W. AGENCIES INC.

                                                                                                                                                         appelante

- et -

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

                                                                                   

                                              MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

                                       (Motifs prononcés à l'audience, à Toronto (Ontario),

                                                             le mardi 11 décembre 2001)

LE JUGE SEXTON


[1]                 Il s'agit d'un appel d'une décision de la Cour canadienne de l'impôt dans laquelle le juge Bonner a rejeté l'appel que l'appelante a interjeté à l'encontre de ses cotisations d'impôt sur le revenu pour les années 1991 à 1995. Par ces cotisations, le ministre du Revenu national avait refusé les déductions que l'appelante avaient demandées au titre de dépenses courantes et de dépenses en capital engagées, ces années-là, pour des activités de recherche scientifique et de développement expérimental (RS & DE).

[2]                 Pendant la période pertinente, l'appelante exploitait une entreprise de vente de billets de loteries commanditées par le gouvernement à des clients de nombreuses parties du monde. L'appelante exerçait ses activités de commercialisation par téléphone et par ordinateur et fournissait ses services dans un grand nombre de langues.

[3]                 L'appelante avait deux à trois millions de clients et recevait jusqu'à 25 000 commandes par jour, enregistrées dans le système informatique de l'entreprise. Celui-ci devait pouvoir recevoir toutes les commandes et, de plus, gérer des opérations se rapportant aux modes de paiement, aux confirmations de paiement aux clients, aux renseignements donnés à ces derniers concernant les billets de loterie achetés, à la communication des numéros de loterie gagnants aux clients et à la recherche dans la base de données de l'appelante pour retrouver les clients gagnants et prendre les dispositions pour les paiements.

[4]                 Les besoins de l'entreprise de l'appelante étaient tels qu'il lui était impossible de se procurer sur le marché un logiciel qui soit adapté à ses besoins informatiques. L'appelante a donc entrepris de développer son propre logiciel. Les objectifs commerciaux du nouveau système exigeaient que celui-ci ait les caractéristiques suivantes : flexibilité, extensibilité, réponse immédiate, exactitude et fiabilité.

[5]                 L'appelante a réussi à développer un logiciel d'application sur mesure, l' « International Distributed Lottery System » ( l'IDLS).


[6]                 L'appelante a demandé des déductions pour le coût de la participation directe des développeurs et des consultants au processus de développement du logiciel car, selon elle, le développement de l'IDLS constituait une activité de recherche scientifique au sens de l'article 2900 du Règlement de l'impôt sur le revenu.

[7]                 Le juge de la Cour de l'impôt a conclu que le développement du logiciel par l'appelante ne constituait pas une activité de recherche scientifique et de développement expérimental au sens de l'article 2900 du règlement.

Dispositions législatives

[8]                              2900. (1) Pour l'application de la présente partie ainsi que des articles 37 et 37.1 de la Loi, « activités de recherche scientifique et de développement expérimental » s'entend d'une investigation ou recherche systématique d'ordre scientifique ou technologique, effectuée par voie d'expérimentation ou d'analyse, c'est-à-dire :

a)       la recherche pure, à savoir les travaux entrepris pour l'avancement de la science sans aucune application pratique en vue;

b)    la recherche appliquée, à savoir les travaux entrepris pour l'avancement de la science avec application pratique en vue;

c)     le développement expérimental, à savoir les travaux entrepris dans l'intérêt du progrès technologique en vue de la création de nouveaux matériaux, dispositifs, produits ou procédés ou de l'amélioration, même légère, de ceux qui existent;

d)    les travaux relatifs à l'ingénierie, à la conception, à la recherche opérationnelle, à l'analyse mathématique, à la programmation informatique, à la collecte de données, aux essais et à la recherche psychologique, lorsque ces travaux sont proportionnels aux besoins des travaux visés aux aliénas a), b) ou c) et servent à les appuyer directement.

Ne constituent pas des activités de recherche scientifique et de développement expérimental les travaux relatifs aux activités suivantes :

[...]

f) le contrôle de la qualité ou la mise à l'essai normale des matériaux, dispositifs, produits ou procédés;

[...]

k) la collecte normale de données.


[9]                 L'appelante a prétendu que le juge du procès s'est erronément appuyé sur un critère énoncé par le témoin expert de l'intimée et que, de toute façon, il n'aurait pas dû accorder plus de poids à ce témoignage qu'à celui de l'expert de l'appelante.

[10]            Il doit être mentionné que l'appelante n'a ni conservé les documents qui auraient pu l'aider à s'acquitter de l'obligation qui lui incombait de réfuter les affirmations du ministre ni appelé à témoigner des personnes ayant participé directement ou personnellement au processus de développement. L'appelante a plutôt appelé un expert qui était en plus désavantagé par l'absence de documents fiables. Comme il n'y avait pas de plan de gestion détaillé du projet, cet expert a été obligé d'examiner les résultats du travail de l'appelante pour tirer des conclusions sur les problèmes auxquels il pensait qu'elle avait dû se heurter et les mesures qu'elle avait dû prendre pour les résoudre.

[11]            Le juge de la Cour de l'impôt a noté que l'appelante n'a jamais expliqué pourquoi elle n'avait pas demandé au chef de projet, ou à toute autre personne se trouvant dans un poste semblable, de venir témoigner. Il est certainement possible de soutenir qu'on peut en déduire qu'un tel témoignage n'aurait pas aidé l'appelante.

[12]            Dans ces circonstances, le juge de la Cour de l'impôt n'avait d'autre choix que d'examiner le témoignage de l'expert de l'appelante et de le peser en regard du témoignage de l'expert de l'intimée.

[13]            Le juge de la Cour de l'impôt a fait un examen complet tant de la preuve relative au processus de développement que des témoignages des deux experts. Il a préféré le témoignage de l'expert de l'intimée et a fourni des motifs détaillés pour expliquer ce choix. Nous ne pouvons conclure que le juge de la Cour de l'impôt a commis une erreur dans sa conclusion.


[14]            L'appelante a prétendu que l'expert de Sa Majesté s'est erronément fondé sur la motivation commerciale qui a poussé l'appelante à entreprendre le développement du logiciel. Le juge de la Cour de l'impôt a toutefois déclaré que la conclusion de l'expert de Sa Majesté ne reposait pas sur cette prémisse erronée. Il a dit :

Quand on considère le témoignage de M. Takagaki dans son contexte, il est clair que M. Takagaki a évalué l'activité de l'appelante en vue de déterminer si cette activité avait été entreprise dans l'intérêt du progrès technologique. Il n'a pas été distrait par le but commercial prédominant de l'appelante.

Quoi qu'il en soit, le juge a expressément rejeté l'idée selon laquelle il est possible d'exclure de l'application de l'article 2900 du règlement toute activité entreprise dans un but commercial.

[15]            En fait, le juge de la Cour de l'impôt a également conclu que l'expert de Sa majesté n'avait pas commis d'erreur en rendant une décision qualitative basée sur le degré de progrès technique requis pour que le travail soit assimilé à une activité visée par l'article 2900 du règlement.

[16]            Il était loisible au juge de la Cour de l'impôt de préférer un témoin à un autre. Nous ne voyons pas de fondement suffisant pour annuler sa conclusion.

[17]            Les deux parties se sont appuyées sur les critères énoncés dans Northwest Hydraulic Consultants Limited c. Sa Majesté la Reine, [1998] D.T.C. 1839. Dans cette décision, le juge Bowman de la Cour de l'impôt a énoncé cinq critères utiles pour déterminer si une activité donnée constitue de la RS & DE. Ces critères ont été approuvés par la Cour d'appel fédérale dans RIS-Christie c. Sa Majesté la Reine, [1999] D.T.C. 5087, à la page 5089. Les critères sont les suivants :


1.         Existait-il un risque ou une incertitude technologique qui ne pouvait être éliminé par les procédures habituelles ou les études techniques courantes?

2.         La personne qui prétend faire de la RS & DE a-t-elle formulé des hypothèses visant expressément à réduire ou à éliminer cette incertitude technologique?

3.         La procédure adoptée était-elle complètement conforme à la discipline de la méthode scientifique, notamment dans la formulation, la vérification et la modification des hypothèses?

4.         Le processus a-t-il abouti à un progrès technologique?

5.         Un compte rendu détaillé des hypothèses vérifiées et des résultats a-t-il été fait au fur et à mesure de l'avancement des travaux?

[18]            Le juge de la Cour de l'impôt a fait référence à ces critères et, à notre avis, en a tenu compte de façon appropriée pour tirer ses conclusions. L'avocat de l'appelante a souligné que le juge de la Cour de l'impôt a omis, dans ses motifs, d'une part, de mentionner l'existence d'une incertitude dans le système à laquelle l'appelante a apporté une solution en développant l'IDLS et, d'autre part, de dire si le logiciel constituait un progrès technologique. Nous estimons que l'expert de Sa Majesté a expressément abordé ces questions quand il a témoigné qu'il n'existait pas d'incertitude qui ne pouvait pas être résolue à l'aide des procédures habituelles ou des études techniques courantes et, partant, que le logiciel ne pouvait constituer un progrès technologique. Il était loisible au juge de la Cour de l'impôt de se fonder sur ce témoignage pour étayer la conclusion selon laquelle les activités de l'appelante ne constituaient pas de la RS & DE.


[19]            À notre avis, rien ne nous permet de conclure que le juge de la Cour de l'impôt n'a pas considéré tous les éléments de preuve et leur crédibilité pour déterminer si le travail, qualifié par l'appelante de RS & DE, satisfaisait aux critères de l'article 2900 du règlement conformément à ce qui a été établi dans la jurisprudence.

[20]            Le présent appel sera donc rejeté avec dépens.

« J.E. SEXTON »

Juge

Traduction certifiée conforme

Sandra Douyon-de Azevedo, LL.B.


             COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION D'APPEL

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                            A-601-00

INTITULÉ :                                           C.W. AGENCIES INC.

                                                                                                     appelante

                                                         

- et -                              

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

                                                                                                                   

DATE DE L'AUDIENCE :                 LE MARDI 11 DÉCEMBRE 2001

LIEU DE L'AUDIENCE :                   TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DU JUGEMENT

DE LA COUR :                                    LE JUGE SEXTON

MOTIFS PRONONCÉS À L'AUDIENCE À TORONTO (ONTARIO),

LE MARDI 11 DÉCEMBRE 2001

COMPARUTIONS :              M. Douglas H. Mathew

M. Paul Gibney

pour l'appelante

M. Ernest Wheeler

pour l'intimée

AVOCATS INSCRITS

AU DOSSIER :                                    Douglas H. Mathew, Paul Gibney, Thorsteinssons

Avocats

C.P. 49123

Centre Bentall

Vancouver (Colombie-Britannique)

V7X 1J2

pour l'appelante

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

pour l'intimée


COUR D'APPEL FÉDÉRALE

Date : 20011213

Dossier : A-601-00

ENTRE :

C.W. AGENCIES INC.

                                                                                                   appelante

                                                         

- et -                              

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

                                                                           

MOTIFS DU JUGEMENT

DE LA COUR

                                                                              


Date : 20011211

Dossier : A-601-00

Toronto (Ontario), le mardi 11 décembre 2001

CORAM :       LE JUGE STONE

LE JUGE SEXTON

LE JUGE EVANS

ENTRE :

                                                  

C.W. AGENCIES INC.

                                                                                                                                            appelante

                                                                            

                                                                         - et -                                  

                                                    SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

JUGEMENT

L'appel est rejeté avec dépens.

« A.J. STONE »

Juge

Traduction certifiée conforme

Sandra Douyon-de Azevedo, LL.B.

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