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Date : 20090204

Dossier : A-168-08

Référence : 2009 CAF 31

 

CORAM :      LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE BLAIS                  

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

RALPH PROPHÈTE

appelant

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION DU CANADA

intimé

 

 

 

Audience tenue à Montréal (Québec) le 4 février 2009

Jugement prononcé à l’audience à Montréal (Québec) le 4 février 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                         LA JUGE TRUDEL

 


Date : 20090204

Dossier : A-168-08

Référence : 2009 CAF 31

 

CORAM :      LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE BLAIS                  

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

RALPH PROPHÈTE

appelant

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION DU CANADA

intimé

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(prononcés à l’audience à Montréal (Québec) le 4 février 2009)

LA JUGE TRUDEL

[1]               La Cour statue sur l’appel d’une demande visant à obtenir une réponse à la question suivante :

[traduction]

Dans les cas où la population d’un pays est exposée à un risque généralisé d’être victime d’actes criminels, la restriction prévue à l’alinéa 97(1)b)(ii) de la LIPR s’applique-t-elle à un sous-groupe de personnes exposées à un risque nettement plus élevé d’être victimes de tels actes criminels?

 

 

[2]               La Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et de la protection des réfugiés (la Commission) a refusé de reconnaître à l’appelant la qualité de réfugié au sens de la Convention au sens de l’article 96 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi) ou celle de « personne à protéger » au sens de l’article 97 de la Loi. 

 

[3]               Pour se voir reconnaître la qualité de personne à protéger, l’appelant devait démontrer à la Commission, selon la prépondérance des probabilités, que son renvoi à Haïti l’exposerait personnellement à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas (italiques ajoutés) (les dispositions législatives applicables sont annexées aux présents motifs).

 

[4]               La question certifiée et la thèse de l’appelant sont reliées. M. Prophète, un citoyen d’Haïti, a demandé l’asile au Canada en alléguant qu’il avait été victime de persécution sous forme de vandalisme, d’extorsion et de menaces d’enlèvement. Bien que l’appelant ait reconnu les troubles auxquels les citoyens haïtiens sont généralement confrontés, il a fait valoir que sa situation d’homme d’affaires l’exposait, ainsi que d’autres gens d’affaires, à certains risques parce que les personnes fortunées ou qui sont perçues comme étant fortunées sont exposées à des risques plus grands que la population en général qui, pour la plus grande partie, vit dans la pauvreté. Selon l’appelant, dès lors que le reste de la population n’est pas exposé à un risque nettement plus élevé, ce risque ne tombe pas sous le coup de l’exclusion du sous-alinéa 97(1)b)(ii) de la Loi, parce que ce risque ne constitue plus un risque auquel sont généralement exposées d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent (mémoire de l’appelant au paragraphe 90).

 

[5]               Pour les motifs qui suivent, l’appel sera rejeté.

 

[6]               Contrairement à l’article 96, l’article 97 de la Loi vise à accorder une protection sans obliger l’intéressé à « établir qu'il [est exposé à un risque] pour l'un des motifs énumérés à l'article 96 » (Li c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CAF 1, [2005] 3 R.C.F. 239, au paragraphe 33). 

 

[7]               Pour décider si un demandeur d’asile a qualité de personne à protéger au sens du paragraphe 97(1) de la Loi, il faut procéder à un examen personnalisé en se fondant sur les preuves présentées par le demandeur d’asile « dans le contexte des risques actuels ou prospectifs » auxquels il serait exposé (Sanchez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CAF 99, au paragraphe 15) (en italique dans l’original). Dans sa rédaction actuelle, la question certifiée a une portée trop large.

 

[8]               Compte tenu du régime fédéral global dans lequel s’inscrit l’article 97, répondre à la question certifiée dans un vide factuel aurait pour effet, selon les circonstances de chaque espèce, de restreindre ou d’élargir indûment la portée du sous-alinéa 97(1)b)(ii) de la Loi.

 

[9]               Pour ces motifs, nous refusons de répondre à la question certifiée.

 

[10]           Dans le cas qui nous occupe (Prophète c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 331), le juge de première instance disposait d’éléments de preuve qui lui permettaient de conclure que :

[23]      …le demandeur n’est pas personnellement exposé à un risque auquel ne sont pas exposés généralement les autres individus qui sont à Haïti ou qui viennent d’Haïti. Le risque d’être visé par quelque forme de criminalité est général et est ressenti par tous les Haïtiens. Bien qu’un nombre précis d’individus puissent être visés plus fréquemment en raison de leur richesse, tous les Haïtiens risquent de devenir des victimes de violence.

 

 

[11]           Le présent appel sera donc rejeté, le tout sans frais.

 

« Johanne Trudel »

j.c.a.

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 


ANNEXE

 

 

Voici le paragraphe 97(1) et le sous-alinéa 97(1)b)(ii) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 :

 

 

97(1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

[Non souligné dans l’original.]

 

 

97(1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

[Emphasis added.]

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-168-08

 

 

INTITULÉ :                                                                           Ralph Prophète c. MCI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Montréal (Québec)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   4 février 2009

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                       LES JUGES LÉTOURNEAU,

                                                                                                BLAIS

                                                                                                et TRUDEL

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :                               LA JUGE TRUDEL

 

 

COMPARUTIONS :

 

PETER SHAMS

POUR L’APPELANT

 

 

MICHÈLE JOUBERT

POUR L’INTIMÉ

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

SAINT-PIERRE, GRENIER

Montréal (Québec)

POUR L’APPELANT

 

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉ

 

 

 

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