A-229-08
A-230-08
Dossier : A-228-08
ENTRE :
(représentée par son tuteur à l’instance, Swaran Singh Bains)
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Dossier : A-229-08
ENTRE :
SWARAN SINGH BAINS
appelant
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
intimé
Dossier : A-230-08
ENTRE :
BALWINDER KAUR BAINS
(représentée par son tuteur à l’instance, Swaran Singh Bains)
appelante
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
intimé
Audience tenue à Vancouver (Colombie-Britannique), le 2 avril 2009
Jugement prononcé à l’audience à Vancouver (Colombie-Britannique), le 2 avril 2009
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : LE JUGE EVANS
Dossiers : A-228-08
A-229-08
A-230-08
Référence : 2009 CAF 106
CORAM : LE JUGE BLAIS
LE JUGE EVANS
LE JUGE RYER
Dossier : A-228-08
ENTRE :
LAKHBINDER KAUR BAINS
(représentée par son tuteur à l’instance, Swaran Singh Bains)
appelante
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
intimé
Dossier : A-229-08
ENTRE :
SWARAN SINGH BAINS
appelant
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
intimé
Dossier : A-230-08
ENTRE :
BALWINDER KAUR BAINS
(représentée par son tuteur à l’instance, Swaran Singh Bains)
appelante
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
intimé
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR
(prononcés à l’audience à Vancouver (Colombie-Britannique), le 2 avril 2009)
[1] Les appelants interjettent appel de la décision (2008 CCI 179) du juge suppléant Rowe, de la Cour canadienne de l’impôt, faisant droit en partie à leurs appels visant la décision dans laquelle le ministre du Revenu national a déterminé leurs heures d’emploi assurables et leur revenu tiré d’un emploi assurable entre mai et septembre 1997 pour l’application de la Loi sur l’assurance-emploi, L.C. 1996, ch. 23.
[2] L’appelant Swaran Singh Bains, qui est maintenant âgé de presque 80 ans, est le père des appelantes Lakhbinder Kaur Bains et Balwinder Kaur Bains, qui ont une déficience cognitive et sont pratiquement illettrées. En 2007, ils travaillaient tous les trois comme cueilleurs de baies et accomplissaient des tâches connexes dans des fermes situées dans les basses-terres continentales de la Colombie-Britannique.
[3] Le juge de la Cour de l’impôt a instruit leurs appels, ainsi que ceux de 72 autres appelants, à la suite d’une enquête menée par l’Agence du revenu du Canada au sujet de stratagèmes frauduleux visant à permettre aux cueilleurs de baies d’augmenter le montant des prestations d’assurance‑emploi qu’ils réclamaient les mois d’hiver où ils ne travaillaient pas.
[4] Le juge a conclu que les appelants avaient effectué un plus grand nombre d’heures assurables que ce que le ministre avait calculé, mais moins que le nombre d’heures figurant dans les relevés d’emploi que l’employeur, S & S Harvesting Ltd. (SSH), avait remis à deux des appelants. Il a toutefois refusé d’augmenter le montant de la rémunération assurable des appelants pour tenir compte des heures de travail additionnelles en question.
[5] Le juge de la Cour de l’impôt a estimé que, pour obtenir des relevés d’emploi à la fin de la période de la cueillette, les appelants avaient dû endosser des chèques établis à leur ordre, qui étaient censés leur avoir été remis pour les rémunérer pour leur travail, et les rendre ensuite à l’employeur. Ces chèques, que les appelants ont endossés en blanc, ont par la suite été déposés dans un compte bancaire contrôlé par SSH ou son âme dirigeante. Le montant de ces chèques dépassait de beaucoup ce que les appelants auraient gagné, selon leur taux horaire de rémunération, pour les heures additionnelles d’emploi assurable accordées par le juge de la Cour de l’impôt.
[6] Le montant des prestations d’assurance-emploi payables à un prestataire est établi en fonction de la rémunération de celui‑ci. Les appelants soutiennent que le juge de la Cour de l’impôt a commis une erreur en refusant d’augmenter leur rémunération assurable pour tenir compte des heures additionnelles qu’ils avaient, selon sa conclusion, effectuées.
[7] Les dispositions législatives applicables se trouvent dans le Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations, DORS/97-33 (le Règlement).
[8] Malgré l’absence d’éléments de preuve se rapportant directement aux présents appelants, le juge de la Cour de l’impôt a conclu que les appelants (ou, pour être plus exact, l’appelant qui agissait en son nom et au nom de ses filles) avaient dû comprendre qu’ils devaient endosser les chèques et les remettre à l’employeur pour obtenir le relevé d’emploi dont ils avaient besoin pour pouvoir réclamer des prestations d’assurance-emploi. Le juge de la Cour de l’impôt a également conclu que les appelants avaient endossé les chèques en blanc et qu’ils les avaient remis à un représentant de SSH. Les appelants ne contestent plus ces conclusions de fait.
[9] Se fondant sur ces conclusions, le juge de la Cour de l’impôt a estimé que les appelants ne s’étaient pas acquittés du fardeau qui leur incombait de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’ils avaient « reçu » les chèques ou en avait « bénéficié » au sens du paragraphe 2(1) du Règlement. En conséquence, le montant des chèques ne pouvait être inclus dans la rémunération assurable des appelants. Les relevés d’emploi remis aux appelants renfermaient des déclarations inexactes tant en ce qui concernait le nombre d’heures qu’ils avaient effectuées qu’en ce qui avait trait aux sommes qui leur avaient été payées à titre de rémunération.
[10] Les appelants soutiennent que le juge a commis une erreur de droit en estimant qu’ils n’avaient pas « reçu » les sommes indiquées sur les chèques, étant donné qu’ils avaient eu la possession physique de ces chèques, bien que temporairement, et ce, indépendamment de la question de savoir s’ils avaient aussi « bénéficié » du produit de ces chèques.
[11] Nous ne sommes pas de cet avis. La question de savoir si les faits constatés par le juge de la Cour de l’impôt tombent sous le coup du paragraphe 2(1) du Règlement est une question mixte de fait et de droit. Le juge de la Cour de l’impôt a décidé que les appelants n’avaient pas « reçu » les sommes indiquées sur les chèques lorsqu’ils ont eu la possession physique de ces chèques dans le seul but de les endosser et de les remettre à un représentant de l’employeur. En l’absence d’une question de droit que l’on peut facilement isoler, la décision du juge ne peut être annulée que si elle est entachée d’une erreur manifeste et dominante (Housen c. Nikolaisen, [2002] 2 R.C.S. 235, 2002 CSC 33).
[12] On ne nous a pas convaincus que le juge de la Cour de l’impôt a commis une telle erreur dans la façon dont il a appliqué le libellé de la loi aux faits de l’espèce, de sorte qu’on peut penser que les appelants n’exerçaient pas de véritable contrôle sur les chèques en question.
[13] On ne nous a pas convaincus non plus qu’une question générale de droit avait été soulevée au sujet de l’interprétation des mots « [qu’il] reçoit ou dont il bénéficie », mots auxquels on doit, à notre avis, donner leur sens courant. Les appelants soutiennent que le juge de la Cour de l’impôt a commis une erreur de droit en ne considérant pas comme des opérations distinctes l’attribution des chèques aux appelants, leur endossement en blanc par les appelants et leur remise subséquente à l’employeur.
[14] Nous ne partageons pas leur avis. Le juge de la Cour de l’impôt s’est fondé sur les faits portés à sa connaissance pour tirer ses conclusions au sujet de ce qui s’était passé et décider de la façon d’en traiter. À notre avis, il lui était entièrement loisible de considérer ce qui s’était passé comme une seule et même opération.
[15] Nous tenons seulement à signaler que le paragraphe 2(2) du Règlement prévoit que la partie impayée de la rémunération provenant d’un emploi assurable peut être incluse dans la rémunération assurable de l’assuré qui a déposé une plainte auprès de l’organisme de main‑d’œuvre compétent. Il s’agit là d’un recours que les appelants auraient vraisemblablement pu exercer. Nous ignorons évidemment s’ils peuvent toujours s’en prévaloir.
[16] Pour ces motifs, les appels seront rejetés avec dépens.
Traduction certifiée conforme
Sandra de Azevedo, LL.B.
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIERS : A-228-08, A-229-08, A-230-08
APPEL D’UN JUGEMENT RENDU LE 16 AVRIL 2008 PAR LA COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT DANS LE DOSSIER 2002-177 (EI) (2008 CCI 179).
INTITULÉ : Lakhbinder Kaur Bains, Swaran Singh Bains, Balwinder Kaur Bains c. Ministre du Revenu national
LIEU DE L’AUDIENCE : Vancouver (Colombie-Britannique)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 2 avril 2009
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR (LES JUGES BLAIS, EVANS, et RYER)
PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR : LE JUGE EVANS
COMPARUTIONS :
Pawanjit Joshi James Sayre
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POUR LES APPELANTS
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Stacey Michael Repas |
POUR L’INTIMÉ
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :