[TRADUCTION FRANÇAISE]
En présence du juge Pelletier
ENTRE :
L’INSTITUT PROFESSIONNEL DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA
et
Requête jugée sur dossier sans comparution en personne des parties.
Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 28 octobre 2009.
MOTIFS DE L’ORDONNANCE PAR : LE JUGE PELLETIER
Dossier : A-337-09
Référence : 2009 CAF 312
En présence du juge Pelletier
ENTRE :
L’INSTITUT PROFESSIONNEL DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA
demandeur
et
IRENE BREMSAK
intimée
MOTIFS DE L’ORDONNANCE
[1] Le demandeur, l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (l’Institut), a déposé deux requêtes visant à obtenir le sursis des ordonnances de la Commission des relations de travail dans la fonction publique relativement à l’intimée, Mme Irene Bremsak, dans une cause jusqu’à ce que la demande de contrôle judiciaire de l’Institut ait été entendue et réglée et, dans l’autre cause, jusqu’à ce qu’une cause parallèle, Institut professionnel de la fonction publique du Canada c. Veillette (dossier no A-266-09) soit entendue et réglée. Puisque les deux requêtes soulèvent les mêmes questions, elles seront traitées en un seul ensemble de motifs, avec une copie placée à chaque dossier.
[2] Mme Bremsak a été suspendue de certains postes qu’elle occupait au sein de l’Institut auxquels elle avait été élue ou nommée, parce qu’elle avait intenté une action contre l’Institut devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la Commission) entraînant un conflit d’intérêts entre son devoir de loyauté envers l’Institut et son intérêt à poursuivre sa plainte contre l’Institut. Pour procéder comme il l’a fait, l’Institut s’est appuyé sur une politique intitulée « Politique relative aux membres et aux plaintes à des organismes extérieurs » (la Politique).
[3] La Commission a conclu que la politique était trop large et dépourvue de proportionnalité. Elle a conclu qu’il s’agissait d’une « sanction quelconque » au sens de l’article 188 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, S.C. 2003, ch. 22, art. 2, plus précisément le paragraphe 18c) et le sous-alinéa 18e) (ii). C’est pourquoi la Commission a ordonné à l’Institut :
(a) d’annuler la politique telle qu’elle s’applique à Mme Bremsak et de la modifier pour se conformer aux exigences de la Loi;
(b) de révoquer la suspension de Mme Bremsak des postes auxquels elle avait été élue et nommée;
(c) d’informer les membres et les fonctionnaires de l’Institut que les suspensions ont été révoquées. À cette fin, la Commission a ordonné à l’Institut de publier un avis qu’il a préparé « dans la prochaine édition d’une des publications régulières et importantes [de l’Institut] ».
[4] Selon la déclaration sous serment de Mme Bremsak, l’Institut ne s’est pas encore conformé à l’ordonnance de la Commission, malgré le fait que cette ordonnance ait été rendue le 26 août 2009. La première demande de suspension de l’Institut a été déposée le 3 septembre 2009, alors que la seconde a été déposée le 21 septembre 2009.
[5] Les conditions pour qu’un sursis à l’exécution soit accordé sont bien connues :
(a) la question à instruire doit être sérieuse;
(b) le requérant doit établir qu’il subira un préjudice irréparable en cas de refus du redressement;
(c) la prépondérance des inconvénients doit pencher en faveur du demandeur.
Voir RJR-MacDonald inc. c. Canada (Procureur général) [1994] 1 R.C.S. 311
[6] À mon avis, il y a manifestement une question sérieuse à trancher en ce sens que l’application de l’article 188 de la Loi aux processus internes de l’Institut est une question qui n’est ni triviale ni conclue à l’avance. La question cruciale est de savoir si l’Institut subira un préjudice irréparable s’il est tenu de se conformer à l’ordonnance de la Commission et, en particulier, s’il est tenu de réintégrer Mme Bremsak dans les fonctions où elle a été élue ou nommée.
[7] Cette question a été posée à ma collègue la juge Trudel dans Institut professionnel de la fonction publique du Canada c. Veillette, 2009 CAF 256 [2009] A.C.F. 1004, dans lequel elle a été invitée à accorder le sursis d’une ordonnance de la Commission visant à réintégrer M. Veillette dans des circonstances semblables à celles de la présente affaire. L’Institut a fait valoir dans cette affaire qu’un préjudice irréparable découlait du fait que d’autres personnes avaient été élues ou nommées aux fonctions d’où M. Veillette avait été suspendu et devraient nécessairement être destituées pour que M. Veillette soit réintégré. Mon collègue a rejeté cet argument en disant qu’il s’agissait là simplement d’une conséquence normale d’une ordonnance de réintégration, un recours commun dans le cadre des relations de travail. De plus, il n’y avait aucune raison de préférer les droits démocratiques de ceux qui avaient élu les remplaçants de M. Veillette à ceux des personnes qui avaient élu M. Veillette en premier lieu.
[8] En l’espèce, le demandeur soulève un argument différent selon lequel le recours de Mme Bremsak à un tribunal externe pour exercer un recours contre son syndicat la met dans une situation où elle est incapable d’exercer ses fonctions en faisant preuve d’une loyauté non divisée. L’Institut dit qu’il ne devrait pas être placé dans une position où Mme Bremsak peut donner des conseils, influencer, et prendre des décisions dans son rôle dans les fonctions où elle a été nommée ou élue, alors qu’elle continue à avoir un conflit d’intérêts. En résumé, la principale préoccupation de l’Institut est d’éviter qu’un membre occupe un poste de direction tout en défiant l’Institut devant un tribunal externe.
[9] Bien que les circonstances actuelles créent une situation embarrassante pour l’Institut, elles n’entraînent pas, à mon avis, un préjudice irréparable. Mme Bremsak peut être opposée à son syndicat en ce qui concerne un différend particulier, mais il n’y a aucune raison de croire qu’elle n’appuie pas les buts et objectifs du syndicat dans leur ensemble et est incapable de distinguer entre ses intérêts et ceux des membres du syndicat. Si des événements montrent que Mme Bremsak a abusé de sa position, la procédure disciplinaire normale prévue dans les règlements s’appliquerait.
[10] Quoi qu’il en soit, la prépondérance des inconvénients favorise fortement Mme Bremak. Depuis qu’elle a été suspendue, le mandat d’un certain nombre de postes auxquels elle a été élue a expiré. Si l’ordonnance de la Commission est suspendue jusqu’à ce que l’affaire soit définitivement résolue, tous ses mandats pourraient expirer avant qu’elle ait l’occasion de les reprendre, en supposant qu’elle réussisse. À ce stade, la question serait sans objet du point de vue de Mme Bremsak.
[11] En ce qui concerne le sursis de l’ordonnance de la Commission jusqu’à l’affaire Veillette, il y a suffisamment de différences entre les deux affaires que la résolution de cette affaire ne serait pas déterminante pour la question ultime en l’espèce. Par conséquent, les questions de préjudice irréparable et de prépondérance des inconvénients doivent être réglées et, lorsqu’elles le seront, le résultat sera le même dans les deux requêtes.
[12] Je suis donc d’avis de rejeter chacune des demandes de sursis à l’ordonnance de la Commission, les dépens de la requête suivant l’issue de la cause.
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-337-09
INTITULÉ : L’INSTITUT PROFESSIONNEL DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA et IRENE BREMSAK
REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION EN PERSONNE DES PARTIES
MOTIFS DE L’ORDONNANCE PAR : LE JUGE PELLETIER
PRÉTENTIONS ÉCRITES FORMULÉES PAR :
POUR LE DEMANDEUR
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POUR L’INTIMÉE, EN SON PROPRE NOM
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
WELCHNER LAW OFFICE-PROFESSIONAL CORPORATION OTTAWA (ONTARIO)
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POUR LE DEMANDEUR
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NORTH VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE) |
POUR L’INTIMÉE, EN SON PROPRE NOM
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