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Dossier : 2010‑2830(IT)G

ENTRE :

DONALD ANDREW,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu les 21 et 22 janvier 2014, à Toronto (Ontario).

Devant : L’honorable juge B. Paris


Comparutions :

Avocate de l’appelant :

Me Leigh Somerville Taylor

Avocat de l’intimée :

Me Craig Maw

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, à l’égard des années d’imposition 2005 et 2006, est accueilli en partie, et la nouvelle cotisation est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, conformément aux motifs du jugement ci‑joints. L’intimée a droit à un seul mémoire de dépens entre parties dans le présent appel et dans l’appel no 2010‑2205(GST)G.

Signé à Vancouver, Canada, ce 2e jour de janvier 2015.

« B. Paris »

Juge Paris

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de juillet 2015.

Mario Lagacé, jurilinguiste


Dossier : 2010‑2205(GST)G

ENTRE :

DONALD ANDREW,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appels entendus les 21 et 22 janvier 2014, à Toronto (Ontario).

Devant : L’honorable juge B. Paris

Comparutions :

Avocate de l’appelant :

Me Leigh Somerville Taylor

Avocat de l’intimée :

Me Craig Maw

 

JUGEMENT

          Les appels interjetés à l’encontre des nouvelles cotisations établies en vertu de l’article 323 de la Loi sur la taxe d’accise, dont les avis sont datés du 23 avril 2008 et du 13 décembre 2007, sont accueillis en partie, et les nouvelles cotisations sont renvoyées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, conformément aux motifs du jugement ci‑joints. Les pénalités et les intérêts, s’il y en a, seront rajustés en conséquence. L’intimée a droit à un seul mémoire de dépens entre parties dans le présent appel et dans l’appel no 2010‑2830(IT)G.

Signé à Vancouver, Canada, ce 2e jour de janvier 2015.

« B. Paris »

Juge Paris

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de juillet 2015.

Mario Lagacé, jurilinguiste


Référence : 2015 CCI 1

Date : 20150102

Dossiers : 2010‑2830(IT)G,

2010‑2205(GST)G

ENTRE :

DONALD ANDREW,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Paris

[1]          Il s’agit d’appels interjetés à l’encontre de trois cotisations établies à l’égard de Donald Andrew, à titre d’administrateur d’Andrew Paving and Engineering Ltd. (« Andrew Paving ») et de 1555223 Ontario Inc. (« 155 »), deux sociétés dont M. Andrew était le président et le directeur général ainsi que l’unique administrateur.

[2]          Par un avis daté du 23 avril 2008, M. Andrew a été informé du fait qu’il avait fait l’objet d’une cotisation établie en vertu de l’article 323 de la Loi sur la taxe d’accise (la « LTA »), relativement à un montant de taxe sur les produits et services (« TPS ») qu’Andrew Paving a censément omis de verser pour ses périodes de déclaration prenant fin entre le 30 septembre 2000 et le 30 septembre 2006. La cotisation s’élève à 190 413,45 $, y compris les intérêts et les pénalités.

[3]          Par un avis daté du 13 décembre 2007, M. Andrew a été informé du fait qu’il avait fait l’objet d’une cotisation établie en vertu de l’article 323 de la LTA, relativement à un montant de TPS que 155 a censément omis de verser pour ses périodes de déclaration prenant fin le 30 juin 2003, le 30 septembre 2003 et le 31 décembre 2003. La cotisation s’élève à 112 807,03 $, y compris les intérêts et les pénalités.

[4]          Dans un avis daté du 23 avril 2008, M. Andrew a été informé du fait qu’il avait fait l’objet d’une cotisation établie en vertu de l’article 227.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR »), relativement à des retenues à la source qu’Andrew Paving a censément omis de verser pour les années 2005 et 2006. La cotisation s’élève à 166 591,81 $, y compris les intérêts et les pénalités.

[5]          Les questions en litige dans le présent appel sont les suivantes :

             i)      Les montants des dettes sous‑jacentes d’Andrew Paving et de 155 pour lesquelles le ministre tente de tenir M. Andrew responsable sont‑ils exacts?

          ii)      Incombe‑t‑il à l’intimée de prouver le montant des dettes sous‑jacentes des sociétés?

        iii)      M. Andrew a‑t‑il fait preuve de diligence raisonnable pour éviter qu’Andrew Paving et 155 omettent de verser les montants en litige?

Les témoins

[6]          L’appelant a témoigné pour son propre compte, et trois agents de recouvrement de l’Agence du revenu du Canada (« ARC »), soit Jay Schafer, Ron Jarman et Rocco Locantore, ont témoigné pour le compte de l’intimée.

Les faits

Les sociétés en cause

[7]          Andrew Paving a été constituée en société au début des années 1960 et elle exploitait une entreprise de pavage et de construction de routes dans la région de Toronto. Elle exerçait ses activités de pair avec une société liée, Meld Development Inc. (« Meld »), laquelle a été constituée à la même époque environ qu’Andrew Paving.

[8]          M. Andrew a expliqué que Meld devait être propriétaire du matériel utilisé par Andrew Paving dans le cadre de l’entreprise, et que cette structure avait pour but de protéger le matériel contre une saisie de la part de créanciers dans le cas où Andrew Paving aurait des difficultés financières.

[9]          Selon M. Andrew, avant 2003, Andrew Paving et Meld se partageaient les revenus et les dépenses liés à l’exploitation de l’entreprise de pavage, et chacune d’elles déclarait une part de la TPS et demandait une part des crédits de taxe sur les intrants (« CTI ») relatifs à l’entreprise. Andrew Paving s’occupait de la majeure partie, sinon de la totalité, de la facturation, mais M. Andrew a déclaré que Meld avait peut‑être bien eu quelques contrats de pavage qu’elle avait exécutés en son propre nom.

[10]     Après le mois d’août 2003, Andrew Paving a commencé à déclarer la totalité des montants de TPS et à demander tous les CTI relatifs aux activités des deux sociétés, et Meld a cessé de déclarer ou de demander de tels montants. M. Andrew a déclaré que c’était Jay Schafer, un agent de recouvrement de l’ARC avec lequel il avait fait affaire en août 2003, qui lui avait conseillé de procéder de cette façon. M. Schafer a toutefois catégoriquement nié avoir conseillé à M. Andrew de consolider les déclarations de la TPS sous le nom d’Andrew Paving. Selon M. Andrew, Andrew Paving et Meld avaient continué de produire des déclarations de revenus distinctes après 2003.

[11]     La troisième société en cause, 155, a été constituée en décembre 2002, alors que M. Andrew prévoyait transférer l’entreprise de pavage à son fils. Il semble que le plan consistait à transférer à 155 le matériel et l’entreprise de pavage de Meld et d’Andrew Paving, ainsi qu’à transférer les actions de 155 au fils de M. Andrew. Les actions de 155 n’ont jamais été transférées, parce que, a dit M. Andrew, à un moment donné en 2003 il a pris conscience que son fils, qui travaillait pour Andrew Paving, s’était approprié irrégulièrement des centaines de milliers de dollars de paiements qui étaient dus à la société.

[12]     M. Andrew a déclaré qu’une autre raison pour laquelle le transfert n’avait pas eu lieu était que son comptable l’avait informé que, si l’entreprise de pavage était transférée à 155, Andrew Paving ne serait plus capable de se prévaloir des pertes fiscales qu’elle reportait prospectivement. Il a ajouté que, même si 155 exploitait déjà, semble‑t‑il, ses activités, son comptable lui avait dit qu’il fallait traiter ces activités comme celles d’Andrew Paving, plutôt que comme celles de 155. M. Andrew s’est souvenu que les retenues à la source des employés avaient déjà été versées sous le nom de 155 et que cette mesure ne pouvait pas être annulée, mais que tous les autres aspects du transfert avaient été annulés et qu’Andrew Paving avait déclaré tout le reste en ce qui concerne l’impôt sur le revenu.

[13]     Il ressort toutefois de la preuve que 155 a produit des déclarations de TPS pour les périodes de déclaration prenant fin le 30 juin 2003, le 30 septembre 2003 et le 31 décembre 2003 et qu’elle a déclaré un montant total de TPS nette à payer de 78 250,82 $. Aucun paiement n’a été versé avec ces déclarations, et aucun montant n’a été payé à l’égard de ce compte par la suite.

[14]     En contre‑interrogatoire, M. Andrew a admis que les déclarations de TPS avaient été produites par 155 et que cette dernière devait un montant de TPS qui avait été déterminé à partir de ces déclarations et que le montant que devait 155 n’était pas lié à des retenues à la source des employés.

Les difficultés financières

[15]     M. Andrew a déclaré que l’entreprise de pavage était de nature saisonnière. Au cours des mois d’hiver, il y avait peu de travaux de pavage à effectuer, mais il y avait quand même des dépenses à engager en raison du besoin de réparer et d’entretenir l’équipement ainsi que d’acheter des matériaux pour la saison suivante. Lors de la saison de construction, il arrivait souvent aussi que les liquidités posent un problème. Les clients tardaient à payer, et la situation s’est aggravée au fil du temps.

[16]     En 2003, l’entreprise est entrée dans une spirale descendante. Andrew Paving a eu de sérieuses difficultés à se faire payer pour les travaux qu’elle avait effectués sur la ligne de métro Sheppard. Il lui avait fallu plusieurs années pour recouvrer une somme de 800 000 $ qu’elle avait facturée en 2003. L’entreprise éprouvait également des difficultés financières à cause des détournements de fonds par le fils de M. Andrew.

[17]     De ce fait, et parce que son fils, un employé clé d’Andrew Paving, avait quitté l’entreprise, M. Andrew a décidé de mettre fin aux activités des entreprises. Il a commencé à réduire progressivement les activités d’Andrew Paving et de Meld en 2005, mais, a‑t‑il déclaré, les sociétés ont poursuivi leurs activités jusqu’en 2006 avec un effectif réduit en vue de recouvrer les sommes d’argent qui étaient exigibles. À la fin de 2006, les activités avaient presque cessé. En 2007, en 2008 et en 2009, M. Andrew a passé son temps à recouvrer des paiements auprès de divers clients et à négocier le paiement des factures de ses entreprises. Il s’est servi des montants qu’il avait obtenus de clients ainsi que des fonds qu’il avait reçus de la succession de sa mère et d’autres fonds personnels pour payer des créanciers autres que le ministre du Revenu national.

Les relations avec l’ARC

[18]     M. Andrew a déclaré qu’Andrew Paving et Meld ont eu des problèmes avec leurs déclarations de TPS peu après l’entrée en vigueur de la TPS en 1991. Il a ajouté que les sociétés avaient produit des déclarations de TPS indiquant qu’elles avaient droit à un remboursement parce que leurs CTI étaient supérieurs aux montants de TPS perçus, mais qu’elles n’avaient reçu aucun remboursement et l’ARC n’avait porté aucun crédit à leurs comptes, car, semble‑t‑il, l’ARC n’avait dans ses dossiers rien qui faisait état de la réception de ces déclarations. Il a indiqué que l’ARC avait demandé à plusieurs reprises des déclarations que ses entreprises avaient déjà produites, car l’ARC n’avait rien dans ses dossiers sur ces déclarations qui auraient été produites.

[19]     Plus tard, quand les sociétés ont produit des déclarations faisant état d’un montant de taxe nette à payer, elles n’ont envoyé aucun paiement avec ces déclarations, s’attendant à ce que les CTI découlant des déclarations antérieures s’appliquent en réduction des montants à payer. M. Andrew a toutefois déclaré que les crédits antérieurs n’ont pas été appliqués et que des pénalités et des intérêts ont été imputés sur le montant de taxe nette parce que l’ARC n’avait pas traité les déclarations de CTI produites par les sociétés.

[20]     M. Andrew a dit qu’il a commencé à s’occuper lui‑même des déclarations de TPS en 1995 environ, quand il s’est rendu compte que la situation était devenue trop compliquée pour le commis‑comptable qui s’occupait jusque‑là des déclarations. Il était convaincu que l’ARC imposait aux sociétés des montants d’intérêts et de pénalités excessifs et il a déclaré avoir passé un temps considérable à tenter de régler les problèmes de TPS. Il était également d’avis que ce problème était aggravé par l’imputation des paiements faits par les sociétés aux montants de pénalités et d’intérêts plutôt qu’aux montants de taxe nette qu’elles étaient tenues de verser. Cette situation occasionnait, par ricochet, l’accumulation d’autres pénalités et intérêts.

[21]     À l’automne de 1996, le ministre a établi à l’encontre de Meld des cotisations de TPS arbitraires d’un montant total de 144 861,82 $ parce que cette société avait omis de produire des déclarations de TPS pour neuf périodes de déclaration prenant fin entre le 30 juin 1994 et le 30 juin 1996.

[22]     M. Andrew a témoigné qu’en décembre 1996, il a rencontré un agent de recouvrement de l’ARC, du nom de C. Addorisio, et que les deux avaient conclu à ce moment‑là une entente au sujet des dettes de TPS impayées de Meld. Il a ajouté que M. Addorisio avait convenu que Meld ne devait que 21 150 $, et non pas 144 861,82 $. M. Andrew a produit une copie d’une lettre datée du 11 décembre 1996, adressée à Meld, et portant sa signature et celle de M. Addorisio. J’appellerai cette lettre la « lettre relative à Meld ».

[23]     La lettre relative à Meld fait référence à la [traduction« responsabilité des administrateurs aux termes de l’article 323 » et indique que le ministre convient de renoncer à une demande formelle de paiement qui a été signifiée à la banque de Meld à l’égard de la dette de TPS de cette entreprise et que, en contrepartie, M. Andrew s’engage à ne pas utiliser la renonciation comme moyen de défense dans le cadre de toute action découlant de l’application de l’article 323 de la LTA. La première phrase de cette lettre était libellée à l’origine comme suit :

[traduction] Attendu que je suis un administrateur de la société susmentionnée et que celle‑ci, à ce jour, doit à Sa Majesté pour un montant de taxe sur les produits et services non versée la somme de 144 861,82 $, laquelle a été établie sous le régime de la Loi sur la taxe d’accise.

[24]     La fin de cette phrase a été modifiée par l’insertion à la main des mots soulignés qui suivent, de sorte que la phrase est maintenant libellée comme suit :

[traduction] Attendu que je suis un administrateur de la société susmentionnée et que celle‑ci, à ce jour, doit à Sa Majesté pour un montant de taxe sur les produits et services non versée la somme de 144 861,82 $, laquelle a été établie arbitrairement sous le régime de la Loi sur la taxe d’accise et a été l’objet d’une nouvelle cotisation d’un montant de 21 150 $, plus les pénalités et les intérêts accumulés jusqu’à la période prenant fin le 96‑06‑30.

[25]     M. Andrew a déclaré que M. Addorisio et lui avaient examiné le compte de Meld ainsi que les déclarations que cette société avait produites peu avant la réunion pour les périodes visées par les cotisations arbitraires et que M. Addorisio avait convenu de réduire le montant exigé qui était indiqué dans la lettre relative à Meld. Cependant, M. Andrew a indiqué que la dette de Meld n’a jamais été réduite, malgré ses demandes répétées à cet effet. Il soutient que Meld avait droit à un crédit d’environ 123 000 $ par suite de l’entente conclue avec M. Addorisio, et il a ajouté qu’il tente depuis de nombreuses années de faire en sorte que l’ARC respecte cette entente.

[26]     M. Andrew a indiqué qu’après l’entente conclue avec M. Addorisio, chaque fois qu’un agent de recouvrement de l’ARC entrait en contact avec lui au sujet de sommes d’argent que Meld ou Andrew Paving avait à payer, il expliquait que l’ARC devait de l’argent à ces sociétés parce que le crédit de 123 000 $ n’avait pas été traité.

[27]     Il a fait référence à certaines lettres envoyées par divers agents de recouvrement de l’ARC à Andrew Paving entre les mois de juillet 2000 et d’octobre 2002, et il a déclaré qu’il téléphonait aux agents chargés du dossier et qu’il leur expliquait le crédit de Meld; après ces appels téléphoniques, les agents de recouvrement [traduction« s’effaçaient » tout simplement.

[28]     À une date indéterminée en 2000, l’ARC a entrepris de soumettre à la fois Meld et Andrew Paving à une vérification de TPS pour la période s’étendant du 1er avril 1996 au 30 juin 1999. La vérification s’est soldée par l’établissement, en septembre 2002, de nouvelles cotisations faisant état d’un montant de TPS additionnel de 65 362 $, d’une pénalité de 23 530,64 $ et d’intérêts de 17 402,34 $ pour Andrew Paving, ainsi que d’un montant de TPS additionnel de 48 005,00 $ pour Meld (le montant de la pénalité et des intérêts sur la cotisation établie à l’endroit de Meld n’est pas en litige). Une nouvelle cotisation distincte avait également été établie en juin 2002 à l’égard d’Andrew Paving en vue de refuser des CTI de 41 246 $ pour la période de déclaration prenant fin le 30 septembre 2001.

[29]     En janvier 2003, Andrew Paving et Meld ont déposé chacune un avis d’opposition aux nouvelles cotisations. L’opposition d’Andrew Paving était fondée sur le fait que la cotisation n’incluait pas de crédits portés à son compte pour des paiements versés et pour des crédits demandés dans ses déclarations de TPS, et qu’elle ne tenait pas compte des CTI (il s’agissait vraisemblablement du montant de 41 244 $ qui avait été refusé pour la période prenant fin le 30 septembre 2001).

[30]     En juillet 2003, M. Andrew a rencontré Jay Schafer (l’agent de recouvrement de l’ARC) qui avait pris contact avec lui au sujet des dettes de TPS d’Andrew Paving et de Meld. Il a dit avoir rencontré M. Schafer à deux reprises et avoir passé en revue avec lui les comptes de Meld et d’Andrew Paving. Ils ont conclu une entente sur le montant de TPS que devaient Meld et Andrew Paving, et M. Andrew a convenu de produire toutes les déclarations de TPS d’Andrew Paving qui étaient en retard et de remettre des chèques postdatés d’un montant suffisant pour régler les montants dus pour toutes les périodes de déclaration antérieures à ce moment‑là.

[31]     M. Andrew s’est également engagé à présenter une demande d’équité en vue de faire annuler les pénalités et les intérêts, et il a convenu d’écrire une lettre au directeur du Bureau des services fiscaux de Toronto‑Nord à propos de l’entente qui, disait‑il, était énoncée dans la lettre relative à Meld.

[32]     M. Andrew a écrit au directeur du Bureau des services fiscaux de Toronto‑Nord de l’ARC le 5 août 2003, pour demander le crédit de 123 000 $ qui, à son avis, était dû à Meld depuis 1996. Le 21 août 2003, le directeur adjoint de ce bureau a envoyé à M. Andrew un accusé de réception de cette lettre.

[33]     Le 18 août 2003, M. Andrew a remis à M. Schafer des chèques postdatés d’un montant de 342 000 $ pour les deux sociétés, de même que les déclarations de TPS et le montant de la taxe nette à payer pour les périodes de déclaration d’Andrew Paving prenant fin entre le mois de mars 2002 et le 30 juin 2003. Il a déclaré qu’il s’attendait à recevoir un allègement des pénalités et des intérêts pour Meld et pour Andrew Paving, ainsi qu’un crédit de 123 000 $ concernant la lettre relative à Meld et qu’il pensait donc que l’ARC n’aurait pas besoin d’encaisser la totalité des chèques postdatés.

[34]     Le 5 septembre 2003, M. Andrew a écrit à Lisa Kelly, l’agente des appels de l’ARC affectée au traitement des avis d’opposition antérieurs d’Andrew Paving et de Meld, et il l’a informée qu’après avoir examiné avec M. Schafer le compte de TPS d’Andrew Paving, il était convaincu que la totalité des crédits relatifs aux périodes de déclaration s’étendant du 1er avril 1996 au 30 juin 1999 avait été comptabilisée comme il faut. Le seul élément laissé en suspens à ce stade‑là avait trait aux CTI d’Andrew Paving qui avaient été refusés pour la période prenant fin le 30 septembre 2001. (Mme Kelly les a autorisés en fin de compte.)

[35]     Le 18 novembre 2003, M. Andrew a rédigé les demandes d’équité concernant chacune des sociétés et il les a envoyées à l’ARC.

[36]     Le 30 avril 2004, les demandes d’équité de Meld et d’Andrew Paving ont été acceptées en partie. Les pénalités et les intérêts ont été réduits d’environ 56 691 $ dans le cas de Meld et d’environ 14 910 $ dans le cas d’Andrew Paving. La lettre d’acceptation de l’allègement que la section du recouvrement de l’ARC a envoyée à Andrew Paving comportait les détails suivants sur les intérêts et les pénalités imposés à Andrew Paving pour toutes ses périodes de déclaration prenant fin à compter du 31 mars 1991 :

[traduction] Les frais de pénalités et d’intérêts accumulés dans votre compte totalisent environ 77 998,56 $. Sur cette somme, 14 910,19 $ se rapportent aux périodes vérifiées, et 3 540,26 $ se rapportent aux périodes à l’égard desquelles des cotisations arbitraires ont été établies et remplacées plus tard par vous en novembre 1996. Le solde de 59 548,11 $ se rapporte à des périodes à l’égard desquelles vous avez produit des déclarations en retard, ou payé en retard le solde dû.

[…]

Pour ce qui est des périodes vérifiées, l’allègement sera accordé en totalité, ce qui donnera lieu à l’annulation d’un montant d’environ 14 910,19 $. Il n’y aura aucun allègement pour les périodes à l’égard desquelles des cotisations arbitraires ont été établies, car le changement qui serait apporté aux frais de pénalités et d’intérêts serait minime. Sachez que le montant annulé est approximatif et que le montant total ne sera connu qu’après que les rajustements appropriés auront été faits.

[37]     Les pénalités et les intérêts annulés se rapportaient à la période vérifiée, à savoir du 1er avril 1996 au 30 juin 1999.

[38]     M. Andrew a déclaré qu’il a continué d’attendre des nouvelles du directeur du Bureau des services fiscaux de Toronto‑Nord au sujet de la lettre relative à Meld, mais qu’il n’a jamais reçu de réponse.

[39]     M. Andrew a déclaré qu’étant donné qu’il croyait que l’ARC devait des crédits à Meld et à Andrew Paving, y compris la somme de 123 000 $ dont il était question dans la lettre relative à Meld, et qu’il n’arrivait pas à obtenir une réponse de quiconque à l’ARC au sujet de ces crédits, il a décidé de ne plus payer les montants de taxe que devaient Andrew Paving ou 155 en attendant que l’on démêle l’affaire. À son avis, si l’on créditait les montants qui, croyait‑il, étaient dus à Meld et à Andrew Paving, il y aurait suffisamment de fonds disponibles pour compenser tout montant de taxe que devaient Andrew Paving et 155.

[40]     Aux dires de M. Andrew, la section du recouvrement de l’ARC a continué ses démarches pour qu’Andrew Paving et 155 paient les sommes dues, mais, chaque fois que les agents de recouvrement prenaient contact avec les entreprises, il leur adressait une lettre disant que ces sociétés ne devaient rien. Il a dit qu’il leur mentionnait la lettre relative à Meld ainsi que la demande qu’il avait soumise au directeur pour faire reconnaître le montant de crédit qui était dû à Meld et que, chaque fois qu’il faisait part de ces informations aux divers agents de recouvrement, il n’entendait plus parler d’eux. Il a déclaré aussi qu’il avait eu affaire au cours de cette période à un nombre de quinze à vingt agents de recouvrement, mais il ressort toutefois du journal des recouvrements que c’est un nombre nettement moindre d’agents qui se sont occupés du dossier après M. Schafer.

[41]     Le 9 juin 2005, le premier de ces agents de recouvrement de l’ARC a envoyé à Andrew Paving une demande de paiement d’arriérés de TPS, d’un montant de 167 957,90 $. M. Andrew y a répondu par une lettre datée du 7 juillet 2005, disant que le compte avait été intégralement payé jusqu’en juin 2003 et que les montants dus à Meld et à Andrew Paving élimineraient le solde exigible pour les périodes de déclaration ultérieures.

[42]     Dans cette lettre et dans une lettre ultérieure, il a déclaré qu’Andrew Paving et Meld avaient obtenu un allègement de pénalités et d’intérêts d’un montant de 9 810 $ et de 16 302,53 $, respectivement, en juin 2004 à la suite d’un examen de deuxième niveau de la demande d’équité, mais qu’aucune des deux sociétés n’avait reçu un crédit pour ces montants.

[43]     Aucune question n’a été posée à M. Andrew sur cette prétention à l’audience, et aucune des lettres ou aucun des documents de l’ARC ne faisait mention d’un examen de deuxième niveau de la demande d’équité.

[44]     Le contact suivant avec la section du recouvrement de l’ARC a eu lieu en mars 2006, quand l’agent de recouvrement Kevin Bailey a téléphoné à M. Andrew; ce dernier a fait suite à cet appel en envoyant une lettre faisant état de sa position selon laquelle Andrew Paving, Meld et 155 ne devaient aucun montant de taxe. M. Andrew a déclaré que M. Bailey lui avait suggéré de trouver un avocat pour l’aider à régler cette affaire. Il a témoigné qu’il avait ensuite retenu les services d’un avocat pour faire affaire avec l’ARC.

[45]     En juin 2006, Andrew Paving a été soumise à une vérification et a été l’objet d’une cotisation pour des retenues à la source non versées, plus des pénalités et des intérêts, d’un montant de 142 335,98 $ pour l’année 2005 et de 1 365,05 $ pour les mois de janvier à mai 2006. M. Andrew a déclaré qu’il n’était pas au courant de la vérification et que c’était [traduction« le bureau » qui se serait chargé de cette affaire. Il a ajouté qu’il pensait que la société était à jour dans le versement de ses retenues à la source. Cependant, un rapport T4 Sommaire qu’Andrew Paving avait établi pour 2005, qui était inclus dans les documents de vérification des retenues à la source produits à l’audience, montrait qu’Andrew Paving avait déclaré au sujet des retenues à la source un solde à payer de 164 377,21 $ pour cette année‑là. Le montant des retenues à la source non versées pour 2005 a été réduit à 124 377,21 $ par le vérificateur, exclusion faite des pénalités et des intérêts. M. Andrew a admis qu’il avait donné instruction au personnel du bureau d’Andrew Paving de ne pas verser les retenues à la source parce qu’il croyait qu’Andrew et Meld avaient fait des paiements de taxe en trop.

[46]     Au printemps de 2007, les dossiers de recouvrement de l’ARC concernant Andrew Paving, Meld et 155 ont été confiés à un agent de recouvrement du nom de C. Andrews et, ensuite, à l’automne de 2007, à Ron Jarman.

[47]     À deux reprises au moins, M. Andrew et son avocat ont rencontré M. Jarman. Selon le souvenir de ce dernier, M. Andrew ne contestait que les écritures comptables de l’ARC dans le compte de TPS de Meld, notamment au sujet du montant de 123 000 $ dont il était question dans la lettre relative à Meld, ainsi qu’au sujet des trois paiements qu’Andrew Paving avait faits par chèque à l’égard du compte de Meld.

[48]     M. Andrew a déclaré que M. Jarman avait tenté de découvrir à quoi les trois paiements avaient été imputés, mais qu’il n’y était pas parvenu.

[49]     M. Jarman a déclaré par contre qu’il avait rapproché les trois paiements, dont un lui avait pris un certain temps à trouver. Des parties d’un des paiements avaient été imputées à trois périodes de déclaration différentes et, de ce fait, l’état de compte n’indiquait pas un crédit d’un montant qui correspondait au paiement. M. Jarman a donc été en mesure de montrer que la totalité de ce paiement ainsi que les deux autres paiements contestés avaient bel et bien été portés au crédit du compte de Meld.

[50]     En contre‑interrogatoire, M. Andrew a reconnu que M. Jarman était parvenu à rapprocher les paiements en question et à les imputer au compte de Meld, mais qu’il était contrarié par le fait que, sans l’aide de M. Jarman, il n’aurait pas pu dire comment avait été appliqué l’unique paiement que l’on avait fractionné.

[51]     Dans une lettre datée du 23 avril 2008 à l’avocat de M. Andrew, M. Jarman a aussi expliqué la position de l’ARC selon laquelle aucun crédit de 123 000 $ n’était dû à Meld. M. Jarman a écrit :

[traduction] Deuxièmement, il continue d’y avoir une certaine confusion de la part de M. Andrew à propos de la lettre du 11 décembre 1996. Celle‑ci a été rédigée à la suite d’une demande formelle de paiement signifiée à la banque de Meld. À cette date, une cotisation arbitraire, d’un montant de 144 861,82 $, avait été établie à l’endroit de Meld, et ce montant s’appliquait aux déclarations non produites pour les périodes prenant fin les 1994‑06‑30, 1994‑09‑30, 1994‑12‑31, 1995‑03‑31, 1995‑06‑30, 1995‑09‑30, 1995‑12‑31, 1996‑03‑31 et 1996‑06‑30. Comme l’exige habituellement l’Agence, il aurait fallu que Meld produise ces déclarations en souffrance avant que l’on puisse envisager de renoncer à la demande formelle de paiement. Vous trouverez ci‑joint un tableau montrant les déclarations de Meld pour ces périodes :

 

Date de fin de la période

TPS perçue

Crédit de taxe sur les intrants

Total pour la période

30 juin 1994

13 180,00

7 623,00

5 557,00

30 sept. 1994

15 481,00

8 201,00

7 280,00

31 déc. 1994

17 822,00

8 607,00

9 215,00

31 mars 1995

650,00

5 157,00

‑4 507,00

30 juin 1995

11 857,00

7 789,00

4 068,00

30 sept. 1995

19 602,00

12 080,00

7 522,00

31 déc. 1995

24 075,00

14 690,00

9 385,00

31 mars 1996

0,00

5 100,00

‑5 100,00

30 juin 1996

12 600,00

6 100,00

6 500,00

Totaux

115 267,00

75 347,00

39 920,00

Les chiffres mentionnés dans la lettre de M. Jarman étaient tirés d’un état de compte de TPS complet de Meld que M. Jarman avait envoyé par la suite à l’avocat de M. Andrew le 6 mai 2008. Cet état confirmait que les montants de TPS à percevoir, de même que les CTI dont disposait Meld pour les périodes visées par les déclarations susmentionnées, avaient été fixés à partir des chiffres que Meld avait inscrits dans les déclarations produites auprès de l’ARC.

[52]     M. Jarman a également écrit, dans une lettre datée du 23 avril 2008 :

[traduction] Lors de notre réunion du 6 mars 2008, M. Andrew a souscrit aux soldes qu’Andrew et 1555223 avaient à payer. Cela étant, il m’est impossible d’accepter votre demande de renonciation aux demandes formelles de paiement qui ont été signifiées.

[53]     Les cotisations de TPS établies au titre de la responsabilité de l’administrateur à l’encontre de M. Andrew ont été établies le 23 avril 2008. La cotisation de retenues à la source établie au titre de la responsabilité de l’administrateur a été établie plus tôt, soit le 13 décembre 2007.

La position de l’appelant

[54]     L’appelant soutient qu’à titre d’administrateur de ces sociétés, pour éviter le défaut de ces versements, il a fait preuve du degré de soin, de diligence et d’habileté qu’une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables. Il maintient qu’il croyait raisonnablement que l’ARC devait à Meld plus d’argent que ce qu’Andrew Paving et 155 devaient à l’ARC, et que les tentatives qu’il avait faites pour faire reconnaître cette créance étaient tout ce qu’un administrateur raisonnablement prudent aurait fait dans les circonstances pour éviter le défaut de versement d’Andrew Paving et de 155.

[55]     Il conteste également l’exactitude des cotisations sous‑jacentes établies à l’endroit des sociétés et soutient qu’étant donné les circonstances de l’affaire, c’est au ministre qu’il incombe d’établir cette exactitude. Il allègue que le ministre ne l’a pas fait.

La thèse de l’intimée

[56]     L’intimée soutient que l’appelant n’a pas fait preuve de diligence raisonnable. Il a plutôt causé intentionnellement le défaut de versement des sociétés. Il s’est servi de ces versements pour exploiter l’entreprise et payer ensuite des créanciers. Le fait que l’appelant croie que l’on devait un remboursement à Meld et que le ministre avait mal imputé ou calculé erronément les crédits ne le dégageait pas de son obligation de prévenir toute omission de versement des retenues à la source ou de paiement de la TPS.

[57]     L’intimée prétend également que, même si les inscriptions portées au compte de TPS d’Andrew Paving peuvent être source de confusion, les cotisations sous‑jacentes établies à l’endroit des sociétés sont exactes et faciles à comprendre. Elles sont fondées sur les déclarations que les sociétés ont produites. L’appelant a décidé de régler les problèmes de compte par lui‑même, même s’il n’avait aucune formation en comptabilité et même s’il disposait des services d’un comptable et d’un commis‑comptable. De plus, l’ARC a eu des réunions et a parlé avec l’appelant à de nombreuses reprises et elle a fourni des renseignements sur les comptes quand on lui en a fait la demande. Les agents de l’ARC qui ont été appelés à témoigner ont donné des explications cohérentes sur les états de compte, et l’appelant n’a pas démontré qu’il y avait des erreurs dans les cotisations sous‑jacentes.

Les dispositions législatives applicables

La Loi de l’impôt sur le revenu

[58]     Les paragraphes 227.1(1) et (3) sont libellés en ces termes :

227.1(1) Lorsqu’une société a omis de déduire ou de retenir une somme, tel que prévu aux paragraphes 135(3) ou 135.1(7) ou aux articles 153 ou 215, ou a omis de verser cette somme ou a omis de payer un montant d’impôt en vertu de la partie VII ou VIII pour une année d’imposition, les administrateurs de la société, au moment où celle‑ci était tenue de déduire, de retenir, de verser ou de payer la somme, sont solidairement responsables, avec la société, du paiement de cette somme, y compris les intérêts et les pénalités s’y rapportant.

[…]

(3) Un administrateur n’est pas responsable de l’omission visée au paragraphe (1) lorsqu’il a agi avec le degré de soin, de diligence et d’habileté pour prévenir le manquement qu’une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables.

La Loi sur la taxe d’accise

[59]     Les paragraphes 323(1) et (3) sont libellés ainsi :

323.(1) Les administrateurs d’une personne morale au moment où elle était tenue de verser, comme l’exigent les paragraphes 228(2) ou (2.3), un montant de taxe nette ou, comme l’exige l’article 230.1, un montant au titre d’un remboursement de taxe nette qui lui a été payé ou qui a été déduit d’une somme dont elle est redevable, sont, en cas de défaut par la personne morale, solidairement tenus, avec cette dernière, de payer le montant ainsi que les intérêts et pénalités afférents.

[…]

(3) L’administrateur n’encourt pas de responsabilité s’il a agi avec autant de soin, de diligence et de compétence pour prévenir le manquement visé au paragraphe (1) que ne l’aurait fait une personne raisonnablement prudente dans les mêmes circonstances.

L’analyse

Le fardeau

[60]     L’avocate de l’appelant a fait valoir que, compte tenu des faits particuliers de l’espèce, c’est à l’intimée que devrait plutôt incomber le fardeau d’établir l’exactitude des cotisations de taxe sous‑jacentes établies à l’endroit d’Andrew Paving et de 155. Les circonstances qui, de l’avis de l’appelant, ont pour effet d’inverser le fardeau habituel dans cette affaire sont les suivantes : l’état de compte de TPS concernant Andrew Paving ne fait pas état des rajustements dont l’ARC a convenu, les montants imposés par voie de cotisation comportent des intérêts et des pénalités à l’égard de périodes pour lesquelles, d’après le montant de la taxe nette établi, il aurait dû y avoir des soldes de crédit, les agents de recouvrement n’ont pas vérifié l’exactitude des cotisations sous‑jacentes établies à l’endroit des sociétés et les états de compte n’étaient pas compréhensibles à première vue.

[61]     L’appelant soutient que la décision Simon c. Sa Majesté la Reine, [2001] A.C.J. no 526 étaye la thèse voulant qu’il incombe au ministre d’établir l’exactitude des cotisations sous‑jacentes dans une affaire qui met en cause la responsabilité d’un administrateur. Dans cette décision, le juge Archambault a écrit, au paragraphe 74 :

Nous sommes ici en présence d’une cotisation établie « à titre dérivé » pour reprendre l’expression employée par le juge Rothstein dans l’affaire Gaucher (précitée), et l’approche adoptée par les tribunaux doit tenir compte du fait que se trouvent en litige deux cotisations distinctes établies par le ministre à l’égard de deux contribuables différents. Par conséquent, lorsque le montant des DAS faisant l’objet de la cotisation établie dans le cas d’un administrateur est contesté, il est nécessaire de faire comparaître le vérificateur qui a établi la cotisation à l’égard de la société ayant omis de remettre les DAS conformément à l’article 153 de la Loi, laquelle cotisation sert de fondement à celle établie à l’égard de l’administrateur. Il n’est pas suffisant qu’un agent de recouvrement qui a établi une cotisation à l’égard de l’administrateur affirme qu’il s’est fié à la cotisation établie à l’égard de la société par le vérificateur des DAS tout comme il ne serait pas suffisant de simplement produire la cotisation de cette société. La Cour ne peut faire un acte de foi aveugle en tenant pour acquis que tout le travail de vérification visant la société s’est déroulé selon les règles de l’art et que l’on a analysé les documents pertinents en établissant la cotisation de cette société.

[62]     Cependant, il y a lieu de lire cet énoncé de pair avec le commentaire fait plus tôt par le juge Archambault, au paragraphe 68 de sa décision, à savoir que, lorsqu’une cotisation établie à titre dérivé est fondée sur les montants que le contribuable a lui‑même déclarés, le ministre n’a pas à supporter le fardeau de prouver l’exactitude des cotisations.

De plus, j’ajoutais qu’il n’était pas suffisant de produire l’avis de cotisation visant le débiteur fiscal primaire, à moins que le montant établi par le ministre dans cette cotisation ne corresponde à celui indiqué par le débiteur fiscal dans sa déclaration de revenu.

[63]     De plus, au paragraphe 41 de la décision que j’ai rendue dans l’affaire Mignardi c. Sa Majesté la Reine, 2013 CCI 67, [2013] A.C.J. no 66, j’ai décrété que le fardeau de prouver une dette fiscale sous‑jacente n’incombait pas au ministre dans tous les appels relatifs à une cotisation établie à titre dérivé :

Je reviens maintenant sur la proposition qui semble découler de la décision Gestion Yvan Drouin Inc., selon laquelle il incombe au ministre de prouver l’existence de la dette fiscale sous‑jacente dans tous les appels interjetés à l’égard d’une cotisation fondée sur la responsabilité dérivée établie en vertu du paragraphe 160(1) ou de l’article 227.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu ou des articles 323 ou 325 de la Loi. Je souscris à l’opinion de l’avocate de l’intimée selon laquelle une telle conclusion va à l’encontre des arrêts de la Cour suprême et de la Cour d’appel fédérale auxquels j’ai fait référence. Ce n’est que lorsque le ministre a une connaissance exclusive ou particulière des faits relatifs à la dette fiscale sous‑jacente que le fardeau de la preuve est renversé. Chaque affaire repose sur des faits qui lui sont propres. Bien qu’il puisse y avoir des situations dans lesquelles seule la Couronne est au fait de la dette fiscale du débiteur fiscal d’origine, dans la majorité des cas, le contribuable peut obtenir ces renseignements auprès du débiteur fiscal d’origine. Il convient de rappeler que la relation qui unit une personne au débiteur fiscal constitue l’un des fondements de la cotisation dont cette personne fait l’objet en vertu de ces dispositions, que ce soit dans le cas d’un administrateur d’une société débitrice, comme c’est le cas en l’espèce, ou dans celui d’une partie ayant un lien de dépendance avec le débiteur fiscal. Du fait de cette relation, il se peut très bien qu’un contribuable dispose déjà des informations nécessaires à la vérification de l’existence ou du montant de la dette fiscale, ou qu’il soit en mesure de les obtenir.

[64]     Dans la décision Mignardi, j’ai reconnu qu’il est possible, dans des circonstances exceptionnelles, que le fardeau de la preuve soit transféré du contribuable au ministre. Mais cela ne survient que dans les cas où les faits relatifs à la dette sous‑jacente sont ceux dont « le ministre a une connaissance exclusive ou particulière ». Dans le contexte d’une cotisation fondée sur la responsabilité d’un administrateur, cela peut survenir lorsqu’un contribuable n’a pas et ne peut pas obtenir les renseignements nécessaires pour vérifier l’existence ou le montant de la dette fiscale sous‑jacente.

[65]     En l’espèce, je ne suis pas d’accord avec l’appelant pour dire que le fardeau de prouver les cotisations sous‑jacentes établies à l’endroit des sociétés devrait être transféré à l’intimée, car je ne suis pas persuadé que l’appelant a établi, comme l’avait fait l’appelant dans la décision Mignardi, que le ministre avait une connaissance exclusive ou particulière des faits relatifs aux cotisations sous‑jacentes d’Andrew Paving et de 155.

[66]     Premièrement, tant M. Jarman que M. Locantore ont déclaré que les montants de taxe nette établis à l’endroit d’Andrew Paving et de 155 aux termes de la LTA pour les périodes applicables aux cotisations fondées sur la responsabilité de l’administrateur étaient des montants de taxe nette indiqués dans les déclarations que ces sociétés avaient produites. M. Andrew a confirmé cela lui aussi. Étant donné que ce dernier, selon son propre témoignage, s’est personnellement occupé de la production de toutes les déclarations de TPS, il s’ensuivrait, selon moi, que M. Andrew serait le mieux placé pour savoir quelles étaient les erreurs, s’il y en avait, que contenaient les cotisations sous‑jacentes. Il est également clair que, même si c’était des employés travaillant dans le bureau d’Andrew Paving qui s’occupaient des retenues à la source, ce travail était fait sous l’autorité de M. Andrew et que ce dernier disposait de toutes les informations concernant les retenues à la source de cette société. En outre, il existe une preuve qu’Andrew Paving a elle‑même déclaré que, pour l’année 2005, elle devait des retenues à la source dont le montant était supérieur à celui qui était imposé à l’appelant.

[67]     En conséquence, je conclus qu’il n’y a pas de circonstances, comme celles de l’affaire Mignardi, où l’on a refusé à M. Andrew la possibilité de consulter les dossiers concernant soit Andrew Paving, soit 155. En fait, il ressort de la preuve que M. Andrew aurait été en mesure de conserver tous les dossiers et les documents relatifs aux deux sociétés après la fin de leurs activités, et que cela inclurait tous les dossiers et documents concernant la TPS et les retenues à la source.

[68]     Le fait que les cotisations sous‑jacentes ont été fondées sur les documents produits par les sociétés elles‑mêmes signifie aussi qu’il n’aurait pas été nécessaire que ces cotisations soient vérifiées par l’agent de recouvrement ayant établi les cotisations fondées sur la responsabilité de l’administrateur.

[69]     Ensuite, contrairement à ce que l’appelant allègue, il semble aussi que l’ARC a répondu aux demandes de M. Andrew en vue d’obtenir une explication sur les dettes de TPS d’Andrew Paving et de Meld ou leur rapprochement. Il a admis qu’à deux reprises au moins, en 2003 et en 2008, des agents de recouvrement de l’ARC ont fourni des rapprochements de ces comptes. Il ressort de la preuve que M. Andrew a semblé satisfait du rapprochement de 2003, disant à l’agent des appels chargé des avis d’opposition qu’Andrew Paving et Meld avaient signifiés que M. Schafer avait montré que tous les crédits applicables à la période visée par l’opposition avaient été imputés. Il a également déclaré qu’après la rencontre avec M. Schafer, les deux hommes étaient arrivés à une entente sur ce que Meld et Andrew Paving devaient jusqu’à ce moment‑là, sauf pour ce qui était de la prétention de M. Andrew quant à la lettre relative à Meld. En 2008, M. Jarman s’est occupé de chacun des chèques particuliers qui, d’après l’appelant, n’avaient pas été crédités aux comptes des sociétés et il avait démontré où les crédits avaient été imputés. Aucune preuve ne montre que MM. Schafer et Jarman n’ont pas su rendre compte des paiements effectués par les sociétés ou n’ont pas su répondre aux questions de l’appelant sur ces comptes.

[70]     S’il est vrai que le directeur du Bureau des services fiscaux de Toronto‑Nord et certains des agents de recouvrement avec lesquels M. Andrew a fait affaire n’ont pas répondu à sa demande d’examen de la situation concernant la lettre relative à Meld, la position de l’ARC sur la question lui a finalement été communiquée par M. Jarman, dans sa lettre datée du 23 avril 2008. Avant d’établir la cotisation à l’endroit de M. Andrew à titre d’administrateur d’Andrew Paving et de 155, l’ARC lui avait fourni les détails des cotisations pour les périodes de déclaration pour lesquelles M. Andrew croyait que Meld avait droit à un crédit de 123 000 $. Aucune preuve n’a été produite pour établir que l’explication de M. Jarman était inexacte.

[71]     Pour ces motifs, il m’est impossible de conclure que M. Andrew ne disposait pas des informations nécessaires pour déterminer l’exactitude des cotisations établies à l’encontre d’Andrew Paving, de 155 et de Meld, ou que l’ARC a omis de fournir à M. Andrew des informations sur les comptes de TPS de ces entreprises.

[72]     L’appelant a également fait valoir que, en l’espèce, les documents de l’ARC qui exposent le calcul et l’imputation des divers crédits, de même que les intérêts et les pénalités, n’étaient [traduction« pas compréhensibles à première vue ou non assortis de l’explication d’un agent de recouvrement ». Le témoignage des agents de recouvrement de l’ARC a confirmé qu’il faudrait un rapport d’un vérificateur pour bien comprendre ce qui s’était passé à divers moments.

[73]     Cependant, l’appelant n’a produit aucune preuve dénotant qu’il n’avait pas accès aux livres et aux registres des sociétés, ni aucune preuve qu’il n’aurait pas eu accès aux rapports de vérification ou aux autres informations requises pour vérifier l’existence ou le montant de la dette fiscale sous‑jacente. Il semble aussi qu’il ait reçu l’aide de l’ARC pour rapprocher divers paiements et crédits portés aux comptes des sociétés.

Les présumées erreurs dans les cotisations de TPS sous‑jacentes d’Andrew Paving

[74]     Comme je l’ai mentionné plus tôt, le contribuable qui est l’objet d’une cotisation établie en vertu de l’article 227.1 de la LIR ou de l’article 323 de la LTA est en droit de contester les cotisations sous‑jacentes qui ont été établies à l’encontre de la société dont il était un administrateur, et ce, pour tout motif à l’égard duquel cette société aurait pu les contester

[75]     L’appelant allègue que le montant total de la taxe nette ainsi que des intérêts et des pénalités à payer que le ministre a calculé est trop élevé. Je présume que l’appelant fait référence aux montants que doit, selon le ministre, Andrew Paving sous le régime de la LTA, car aucune des présumées erreurs, dont je traiterai ci‑après, n’a trait au compte de TPS de 155 ou au compte des retenues à la source d’Andrew Paving. De plus, M. Andrew a souscrit aux montants qui ont été établis par voie de cotisation à l’encontre d’Andrew Paving pour des retenues à la source non versées ainsi qu’à l’encontre de 155 pour un montant de TPS non versé.

[76]     Avant de traiter des erreurs particulières qui, d’après l’appelant, ont été commises dans le compte de TPS d’Andrew Paving, je signale que la plupart d’entre elles se rapportent à des périodes de déclaration non visées par la cotisation au titre de la responsabilité d’un administrateur qui a été établie à l’encontre de l’appelant. Par exemple, ce dernier soutient que certains crédits découlant des déclarations faisant état d’un crédit net (c’est‑à‑dire que celles dans lesquelles les CTI demandés par le contribuable étaient plus élevés que le montant de TPS à percevoir pour la période) n’ont pas été imputés en temps opportun au compte d’Andrew Paving. Même si son avocate n’a pas précisé les périodes de déclaration pour lesquelles les déclarations faisant état d’un crédit net pertinentes ont été produites, il semble que des déclarations faisant état d’un crédit aient été produites après la date prescrite pour chacune des périodes de déclaration suivantes : 31 mars 1991, 31 mars 1992, 31 mars 1993, 31 mars 1996, 31 mars 1998, mars 1999, 31 mars 2004 et 31 mars 2006. De l’avis de l’appelant, cela a donné lieu à l’imputation de pénalités et d’intérêts excédentaires.

[77]     Toutes les périodes, sauf deux, pour lesquelles les déclarations faisant état d’un crédit ont été produites sont antérieures aux périodes de déclaration d’Andrew Paving que vise la cotisation au titre de la responsabilité d’un administrateur qui a été établie à l’encontre de l’appelant, et les crédits ont été également imputés à des périodes antérieures. Dans la présente affaire, la taxe nette qu’Andrew Paving a omis de verser pour les périodes de déclaration débutant en 2000 a été incluse dans la cotisation établie à l’endroit de l’appelant.

[78]     Deux autres erreurs que l’ARC a commises, selon l’appelant, dans la comptabilisation des paiements ou des crédits sont également liées à des périodes datant d’avant celles qui sont visées par les cotisations établies au titre de la responsabilité de l’administrateur. L’appelant dit qu’un rajustement tenant compte de la période de déclaration d’Andrew Paving prenant fin le 30 septembre 1996, en vue de majorer les CTI, n’a été traité que cinq ans et cinq mois après qu’un vérificateur de l’ARC eut déterminé qu’Andrew Paving y avait droit. De plus, l’appelant conteste les rajustements qui ont été effectués aux intérêts et aux pénalités à la suite de la demande d’équité d’Andrew Paving. Ces rajustements se rapportent à des périodes de déclaration prenant fin avant juillet 1999.

[79]     Pour contester la dette sous‑jacente des sociétés en matière de taxe nette non versée, l’appelant doit se limiter aux arguments que ces sociétés auraient pu invoquer dans le cadre d’un appel relatif aux cotisations sous‑jacentes.

[80]     Je ne crois pas que, dans le cas d’une cotisation concernant une période de déclaration particulière, la Cour soit compétente pour examiner de quelle façon l’ARC a imputé les crédits ou les paiements relatifs à d’autres périodes de déclaration, car cela n’aurait pas d’incidence sur le montant de taxe imposé par voie de cotisation pour la période de déclaration en question. Aux termes de la LTA, la taxe nette est établie par voie de cotisation pour chaque période de déclaration particulière, comme il est indiqué au paragraphe 296(1) :

296.(1) Cotisation — Le ministre peut établir une cotisation, une nouvelle cotisation ou une cotisation supplémentaire pour déterminer :

a) la taxe nette d’une personne, prévue à la section V, pour une période de déclaration;

[81]     À mon avis, il n’est pas loisible à l’appelant de contester les cotisations établies au titre de la responsabilité d’un administrateur qui ont été établies à son encontre pour de présumées erreurs commises au moment d’établir par voie de cotisation la taxe nette, ainsi que les intérêts ou les pénalités connexes, pour des périodes de déclaration autres que celles qui sous‑tendent les cotisations au titre de la responsabilité d’un administrateur, car les sociétés elles‑mêmes n’auraient pas été en mesure d’invoquer ces arguments si elles avaient interjeté appel des cotisations sous‑jacentes. La comptabilisation des paiements faits à l’égard du compte d’un contribuable pour des périodes autres que celles visées par une cotisation est une affaire de recouvrement qui excède la compétence de la Cour : voir l’arrêt Neuhaus c. La Reine, 2002 CAF 391, [2002] A.C.F. no 1480. Pour la même raison, il n’est pas non plus loisible à l’appelant de contester les cotisations en raison d’erreurs qui auraient été commises au moment d’imputer des paiements relatifs à des montants exigibles pour d’autres périodes de déclaration.

[82]     Même si la Cour était compétente pour traiter de ces questions, j’aurais conclu que l’appelant n’a pas montré que des erreurs ont bel et bien été commises dans le traitement comptable des éléments énumérés plus tôt.

[83]     Premièrement, l’avocate de l’appelant a fait valoir que les crédits indiqués dans les déclarations faisant état d’un crédit n’ont été appliqués au remboursement de la dette de la société qu’à la date à laquelle l’ARC a reçu la déclaration, et non à la date limite de production de la déclaration. Elle a ajouté que cela avait donné lieu à des frais d’intérêt et de pénalité excédentaires en application du paragraphe 280(1) de la LTA car, étant donné que la déclaration faisant état d’un crédit avait été produite en retard, les crédits n’avaient pas été appliqués au compte de l’appelant aussitôt que ce dernier avait eu droit aux crédits.

[84]     L’avocate de l’appelant a fait valoir qu’on aurait dû se servir des crédits indiqués dans ces déclarations pour les appliquer au remboursement de n’importe quel montant que devait le contribuable à la date à laquelle il fallait produire la déclaration, plutôt qu’à la date à laquelle l’ARC avait reçu la déclaration, c’est‑à‑dire après la date limite de production dans ces cas en particulier.

[85]     La thèse de l’appelant va à l’encontre de la décision qu’a rendue la Cour dans l’affaire Paquin c. La Reine, 2004 CCI 597. Dans cette dernière, l’ancien juge en chef Garon est arrivé à la conclusion que le droit à un CTI ne prend pas naissance avant que l’on en fasse la demande. Après avoir passé en revue les articles 169 et 225 de la LTA, il a écrit, aux paragraphes 17 et 18 de sa décision :

De ce qui précède, il ressort que ce droit au crédit de taxe sur les intrants n’existe pas avant qu’il soit demandé. On ne prévoit pas dans la législation que ce droit rétroagit à la période où il aurait pu être réclamé validement par le contribuable dans sa déclaration pour une période antérieure. De plus, il n’est pas prévu dans la législation que dans le calcul des intérêts et pénalités sur la taxe nette qui est payable il faut prendre en compte les montants représentant les crédits sur les intrants dès le moment où ce crédit aurait pu être validement demandé. À ce sujet, je me réfère notamment à l’article 280 de la Loi sur la taxe d’accise.

[…] De plus, dans le calcul des intérêts et pénalités sur le montant de taxe nette, le ministre ne pouvait tenir compte des montants représentant les crédits de taxe sur les intrants qu’à compter du moment où est né le droit au crédit de taxe sur les intrants. Ce moment se situe eu égard aux faits de la présente cause au moment de la présentation de la déclaration réclamant le crédit de taxe sur les intrants et de la remise de la taxe nette.

[Non souligné dans l’original.]

[86]     La conclusion selon laquelle le droit à un crédit n’existe pas avant la date à laquelle on en fait la demande concorde également avec l’article 229 de la LTA, lequel dispose que les intérêts sur un remboursement dû à l’égard d’une déclaration faisant état d’un crédit deviennent payables trente jours après la date à laquelle la déclaration est produite ou le lendemain du dernier jour de la période de déclaration, la plus tardive de ces deux dates étant celle qui est retenue. C’est donc dire que, dans le cas d’une déclaration faisant état d’un crédit produite en retard, les intérêts sur le crédit ne commenceraient pas à courir avant que la déclaration soit produite.

[87]     L’appelant soutient qu’il n’y a pas lieu de suivre la décision Paquin parce que la Cour n’a pas pris en considération l’application du paragraphe 296(2) de la LTA. Cette disposition porte sur les CTI non demandés et exige que le ministre, au moment d’établir la cotisation, prenne en compte tout CTI dont dispose un fournisseur au moment de calculer la taxe nette que ce dernier n’a pas encore demandé et qui aurait été autorisé s’il en avait fait la demande dans une déclaration applicable à la période de déclaration en particulier :

296 (2) Le ministre, s’il constate les faits ci‑après relativement à un montant (appelé « crédit déductible » au présent paragraphe) lors de l’établissement d’une cotisation concernant la taxe nette d’une personne pour une période de déclaration donnée de celle‑ci, prend en compte le crédit déductible dans l’établissement de la taxe nette pour cette période comme si la personne avait demandé le crédit déductible dans une déclaration produite pour cette période :

a) le crédit déductible aurait été accordé à titre de crédit de taxe sur les intrants pour la période donnée ou à titre de déduction dans le calcul de la taxe nette pour cette période s’il avait été demandé dans une déclaration produite aux termes de la section V pour cette période à la date limite où la déclaration pour cette période était à produire et si les exigences en matière de documentation, énoncées aux paragraphes 169(4) ou 234(1), qui s’appliquent au crédit avaient été remplies;

b) le crédit déductible n’a pas été demandé par la personne dans une déclaration produite avant le jour où l’avis de cotisation lui est envoyé ou, s’il l’a été, a été refusé par le ministre;

c)  le crédit déductible serait accordé à titre de crédit de taxe sur les intrants ou de déduction dans le calcul de la taxe nette de la personne pour une de ses périodes de déclaration s’il était demandé dans une déclaration produite aux termes de la section V le jour où l’avis de cotisation est envoyé à la personne, ou serait refusé s’il était demandé dans cette déclaration du seul fait que le délai dans lequel il peut être demandé a expiré avant ce jour.

[88]     Si un CTI est autorisé en vertu du paragraphe 296(2), [traduction« le paragraphe 296(5) prévoit qu’il a été demandé dans une déclaration et qu’il a été appliqué en réduction de la taxe nette. Le paragraphe 296(2) a pour effet que non seulement le CTI est accepté, mais aussi qu’il l’est dans la même période que celle pour laquelle la taxe a été établie par voie de cotisation. C’est donc dire qu’aucun montant d’intérêt et de pénalité n’est accumulé en application du paragraphe 280(1) sur la taxe non payée, dans la mesure où celle‑ci est compensée par le CTI, car la compensation s’applique rétroactivement à l’application de la taxe ». (David Sherman : GST Commentary, article 296).

[89]     L’appelant soutient qu’une fois que le ministre a décidé que les CTI étaient à payer pour les périodes à l’égard desquelles Andrew Paving avait produit les déclarations faisant état d’un crédit et qu’il a accepté les déclarations conformément au paragraphe 296(2), ces crédits auraient dû être disponibles comme s’ils avaient été demandés dans une déclaration produite pour la période, et non après la date à laquelle la taxe a été établie pour les périodes ultérieures.

[90]     La première difficulté que pose cet argument est qu’Andrew Paving a demandé les CTI dans des déclarations qu’elle a produites auprès du ministre pour les périodes dans lesquelles les CTI avaient pris naissance et que le ministre a accepté les CTI pour ces périodes avant qu’Andrew Paving ne produise des déclarations selon lesquelles un montant de taxe nette était à payer. En conséquence, la condition énoncée à l’alinéa 296(2)b) ne serait pas remplie parce que les CTI avaient déjà été demandés et acceptés. Dans la décision Pawlak c. Sa Majesté la Reine, 2012 CCI 355, [2012] A.C.J. no 289, la Cour a fait remarquer, au paragraphe 19 :

[…] la condition énoncée à l’alinéa 296(2)b) de la Loi a pour but de faire en sorte que le contribuable n’ait pas déjà bénéficié des CTI au moment où sa taxe nette est calculée pour une période de déclaration donnée. Par conséquent, la condition énoncée à l’alinéa 296(2)b) de la Loi est remplie pourvu que des CTI n’aient pas déjà été accordés au moment où la taxe nette de la personne concernée est calculée pour une période de déclaration donnée. […]

[91]     L’appelant a également invoqué la décision Humber College c. Sa Majesté la Reine, 2013 CCI 146, [2013] A.C.J. no 117, où il était question de l’application du paragraphe 296(2.1) de la LTA. Ce paragraphe prévoit une provision pour un montant de remboursement non demandé. Dans l’affaire Humber College, l’appelante s’était vu imposer par voie de cotisation un montant d’intérêt à l’égard du paiement de TPS tardif qu’elle était censée établir et verser à l’achat d’un bien immeuble. L’appelante étant un collège public, elle avait droit à un remboursement aux organismes de services publics de 67 % de la TPS payable sur l’achat du bien en question. La question soumise à la Cour consistait à savoir si le ministre avait imposé à juste titre des intérêts sur le plein montant de la TPS qui était à payer avant d’avoir pris en compte le remboursement, ou si les intérêts sur le paiement tardif n’étaient à payer que sur le montant net de la TPS exigible après avoir soustrait le remboursement. Le juge Campbell Miller a conclu que les intérêts sur un paiement tardif de TPS devaient être calculés à partir du montant net de la TPS à payer.

[92]     Cependant, cette affaire, comme le soutient l’avocate de l’appelant, n’avait pas trait à une demande de CTI. En fait, dans la décision Humber College, le juge Campbell Miller a pris soin de faire la distinction entre le droit à des remboursements et le droit à des CTI. Comme il l’a écrit, au paragraphe 17 :

M. Cheung, l’avocat de l’intimée, soutient que la décision de l’ancien juge en chef Garon dans l’affaire Claude Paquin c. Sa Majesté la Reine est déterminante quant à l’issue du présent appel. Je suis en désaccord. L’ancien juge en chef Garon était saisi d’une affaire relative à des remises de taxe tardives où il était réclamé des crédits de taxe sur les intrants (« CTI »). Ceux‑ci n’ont été accordés qu’à compter de la date de la présentation tardive de la déclaration. Des intérêts ont été imputés, par conséquent, sur l’intégralité de la taxe à payer, sans déduire rétroactivement les CTI de la taxe. Fait intéressant, le paragraphe 296(2) de la Loi n’a jamais été mentionné. Manifestement, la déduction des CTI n’a pas été appliquée au moment où le contribuable y aurait eu droit, mais seulement lorsqu’il en a fait la demande. Cependant, le droit aux CTI n’est pas le même que le droit aux remboursements, compte tenu de l’interprétation contextuelle et téléologique des dispositions législatives liées aux remboursements. Les CTI ne sont pas inextricablement liés à la transaction donnant lieu à la TPS. Les CTI ne sont pas propres aux organismes de services publics clairement désignés, qui bénéficient d’un traitement spécial. [Renvoi omis.]

[93]     Pour ces motifs, je conclus qu’Andrew Paving n’aurait pas pu se prévaloir du paragraphe 296(2) pour contester les montants d’intérêts et de pénalités qui ont été imposés par voie de cotisation.

[94]     L’avocate de l’appelant a également fait valoir que le ministre avait omis de porter au crédit d’Andrew Paving des intérêts sur un remboursement qui était à payer pour sa période de déclaration prenant fin le 30 septembre 2001. Andrew Paving avait demandé des CTI de 41 246 $ dans sa déclaration relative à cette période, que l’ARC avait reçue le 22 novembre 2001. Le ministre avait refusé les CTI le 6 juin 2002, mais avait accepté par la suite un montant moins élevé, qui donnait quand même lieu, pour la période, à un solde créditeur de 2 074,96 $. Ce crédit avait été appliqué en réduction de la taxe qu’Andrew Paving devait pour une autre période, mais uniquement à compter du 6 juin 2002 plutôt que du 22 novembre 2001, soit la date à laquelle l’ARC avait reçu la déclaration. MM. Jarman et Locantore n’ont pas pu dire si un montant d’intérêt applicable à la période située entre le 22 novembre 2001 et le 6 juin 2002 avait été crédité à l’égard du montant de 2 074,96 $, et il n’y avait dans le compte aucune inscription qui semblait liée à un montant d’intérêt pour cette somme et pour cette période. Cependant, en parlant d’un autre point dans son témoignage, M. Locantore a déclaré que des rajustements de vérification pouvaient également contenir des montants relatifs à des intérêts et à des pénalités sans être désignés comme tels dans les rajustements apparaissant dans le compte. Étant donné que les inscriptions relatives au refus et à l’acceptation ultérieure des CTI ont été qualifiées de rajustements de vérification, il serait nécessaire de consulter les documents de vérification pour savoir en quoi consistaient les montants apparaissant dans le compte. C’est à l’appelant qu’il incombe de prouver la présumée erreur, et il lui reviendrait donc de fournir une preuve suffisante pour convaincre la Cour que les montants de rajustement n’englobaient pas les montants d’intérêt en question. Je ne suis pas persuadé que MM. Locantore ou Jarman étaient en mesure de confirmer qu’aucun montant d’intérêt n’avait été accepté à titre de crédit pour Andrew Paving dans ces circonstances et, en l’absence d’une preuve définitive de ce que le vérificateur a fait, je conclus que l’appelant n’a pas établi l’existence d’une erreur à cet égard.

[95]     L’appelant a également mis en doute un crédit d’intérêt applicable à un autre rajustement de vérification semblable, pour la période prenant fin le 30 septembre 1996. Aucune question sur ce point n’a été soumise à MM. Jarman ou Locantore, et aucun élément de preuve n’a été présenté. Je m’abstiendrai donc de conclure qu’une erreur a été commise à cet égard également.

[96]     À cette étape-ci, je signale que l’appelant n’a pas plaidé spécifiquement ces présumées erreurs particulières, à l’instar de celles dont je traiterai ci‑après, pas plus que des éléments de preuve ont été soulevés lors de l’interrogatoire préalable de M. Locantore ou communiqués à l’intimée avant l’audience. Dans ce contexte, même si la question des intérêts entrerait normalement dans le champ des connaissances du ministre, on ne peut blâmer l’intimée pour ne pas avoir fourni les renseignements disponibles en vue de réfuter les détails de la demande.

[97]     L’appelant a également allégué que des paiements avaient été inscrits dans le compte d’Andrew Paving pour les périodes prenant fin entre le 31 mars 2002 et le 30 septembre 2003, plutôt qu’affectés au solde exigible plus ancien qui existait à l’époque où ces paiements avaient été faits, ce qui avait entraîné l’accumulation d’intérêts et de pénalités additionnels. L’avocate de l’appelant a également déclaré que les paiements applicables aux périodes situées entre le 31 mars 2002 et le 30 septembre 2003 n’avaient été imputés que sur certains des montants à payer pour chaque période, avec le résultat que chaque période avait conservé un montant en souffrance sur lequel des intérêts et des pénalités avaient continué de s’accumuler.

[98]     La réponse toute simple à cet argument est que les paiements faits pour ces périodes ont été versés conformément aux instructions données par Andrew Paving dans une lettre adressée à M. Schafer en date du 18 août 2003. M. Andrew avait remis à M. Schafer des chèques couvrant la taxe nette en souffrance pour chacune de ces périodes et, conformément à la politique de l’ARC, les paiements avaient été appliqués selon les instructions données, même s’il y avait des soldes en souffrance à payer à l’égard de périodes antérieures. Comme les déclarations relatives à ces périodes avaient été produites en retard, des frais d’intérêts et de pénalités avaient été imputés, ce qui avait fait augmenter le solde à payer pour la période à un niveau supérieur à ce qu’Andrew Paving avait déclaré et payé. Il subsistait donc de légers soldes en souffrance pour ces périodes, après l’application des paiements qu’Andrew Paving avait faits le 18 août 2003.

[99]     L’appelant soutient que des erreurs ont été commises dans les calculs relatifs à l’allègement fondé sur l’équité qui a été accordé à Andrew Paving le 30 avril 2004, et ce, pour les périodes prenant fin entre le 30 juin 1996 et le 30 juin 1999. L’avocate a déclaré qu’il ne semblait pas y avoir de crédits appliqués à d’autres périodes en date du 30 avril 2004, ce qui devrait être le cas si des crédits antérieurement appliqués à la période de vérification étaient transférés à d’autres périodes par suite de la réduction du montant d’intérêts et de pénalités accordée par le comité de l’équité. L’avocate a également déclaré que le journal des recouvrements ne faisait pas état d’une réduction du montant total qui était en souffrance entre le 27 et le 30 avril 2004. S’il y avait eu un rajustement à la baisse des intérêts et des pénalités à compter du 30 avril 2004, on se serait attendu à ce que le solde du compte soit inférieur.

[100]M. Locantore a déclaré avoir passé en revue les calculs relatifs à l’allègement des intérêts et des pénalités qui avait été accordé à Andrew Paving et s’est dit convaincu que tous les montants avaient été comptabilisés d’une manière appropriée. On ne lui a jamais demandé précisément pourquoi aucune inscription ayant comme date d’effet le 30 avril 2004 ne figurait dans le compte, mais il a toutefois déclaré que, selon le système de comptabilisation qu’employait l’ARC à l’époque, les réductions d’intérêts et de pénalités que l’on accordait en vertu des dispositions en matière d’équité n’apparaissaient pas sous forme d’inscriptions dans le compte. À l’époque, on effectuait des rajustements afin d’empêcher les intérêts et les pénalités de s’accumuler pendant les périodes visées par l’allègement, ce qui avait pour effet d’exclure les intérêts et les pénalités comme s’ils n’avaient pas été imputés au départ. C’est donc dire que les rajustements relatifs aux intérêts et aux pénalités n’apparaissaient pas dans le compte. Cela pouvait aussi expliquer l’absence de toute inscription concernant les transferts de paiement liés à l’allègement accordé. Le fait que l’appelant n’ait pas interrogé les agents de l’ARC sur ce point nous amène à nous demander de quelle façon la comptabilisation a été faite pour tenir compte de l’allègement en matière d’équité. En l’absence de toute preuve sur ce point, je souscris au témoignage de M. Locantore, à savoir qu’il avait passé en revue le travail de comptabilisation qui avait été fait et qu’il était persuadé que les rajustements avaient été portés au crédit d’Andrew Paving. Dans le même ordre d’idées, aucun des agents de l’ARC n’a été interrogé sur le solde apparaissant dans le journal des recouvrements aux environs du 30 avril 2004 et il est donc impossible d’arriver à une conclusion quelconque à partir de ce qui a été indiqué. Je signale toutefois que le journal des recouvrements fait bel et bien état d’une réduction importante du montant total que devait Andrew Paving le 4 mai 2004.

[101]L’appelant soutient également que le montant de TPS imposé par voie de cotisation à Andrew Paving après 2003 incluait les dettes de TPS de Meld, et qu’il faudrait soustraire la part de la dette de TPS se rapportant à Meld de la cotisation au titre de la responsabilité de l’administrateur qui a été établie à l’endroit de l’appelant.

[102]Cependant, il a été impossible à M. Andrew de donner des détails quelconques sur la part de la TPS et des CTI que chaque société avait déclarée en 2005 et en 2005, et il a dit à un moment donné qu’en 2005 une part très faible du montant se rapporterait à Meld, ensuite que les actions étaient peut‑être égales, et ensuite encore que la part de Meld était peut‑être inférieure à 40 %, mais que cela était difficile à dire. Aucune preuve n’a été produite pour montrer quel montant précis de TPS, le cas échéant, Andrew Paving avait déclaré pour le compte de Meld.

[103]En l’absence d’une preuve quelconque quant au montant réel de la dette de TPS de Meld, après l’année 2003, qu’Andrew Paving a déclaré, l’argument de l’appelant ne peut pas être retenu. Seul l’appelant est en mesure de fournir une preuve sur ce point, et il ne l’a pas fait.

[104]L’appelant a également fait valoir qu’il fallait réduire les cotisations établies au titre de la responsabilité de l’administrateur d’un montant de 21 564,67 $, soit le total des trois montants que le ministre avait payés à Meld en 2010 à titre de remboursement de crédits exigibles pour des périodes antérieures à 2004. Cependant, ces montants se rapportent à Meld et non à Andrew Paving ou à 155, et l’appelant n’a pas expliqué pourquoi il fallait réduire ces cotisations pour tenir compte de ces remboursements.

[105]Pour les motifs qui précèdent, je conclus que l’appelant n’a pas établi que l’on avait commis des erreurs au moment de déterminer les montants que devait Andrew Paving sous le régime de la LTA.

La diligence raisonnable

[106]La dernière question à trancher consiste à savoir si, pour éviter les défauts de versement d’Andrew Paving et de 155, M. Andrew a fait preuve du degré de soin, de diligence et d’habileté qu’une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables.

[107]Dans l’arrêt Buckingham c. La Reine, 2011 CAF 142, 2011 DTC 5078, la Cour d’appel fédérale est arrivée à la conclusion que, pour établir une défense de diligence raisonnable en vertu du paragraphe 227.1(3) de la LIR et du paragraphe 323(3) de la LTA, un administrateur doit prouver qu’il se souciait précisément des versements d’impôt ou de taxe et qu’il a fait preuve du soin, de la diligence et de l’habileté nécessaires pour prévenir tout défaut de versement. Se fondant sur l’arrêt de la Cour suprême du Canada Magasins à Rayons Peoples c. Wise, 2004 CSC 68, [2004] 3 RCS 461, la Cour d’appel fédérale a conclu que la norme applicable de soin, de diligence et d’habileté est de nature objective plutôt que subjective :

Une norme objective ne signifie toutefois pas qu’il ne doit pas être tenu compte des circonstances propres à un administrateur. Ces circonstances doivent être prises en compte, mais elles doivent être considérées au regard de la norme objective d’une « personne raisonnablement prudente ». (Au paragraphe 39)

[108]La Cour d’appel fédérale a également confirmé que, pour qu’une défense de diligence raisonnable soit retenue, il faut que l’on conclue que l’administrateur a pris des mesures concrètes pour éviter le défaut de versement.

[109]Dans l’affaire Buckingham, une cotisation avait été établie à l’endroit de l’administrateur parce que la société avait omis de verser des retenues à la source pour les mois d’octobre 2002 à août 2003 et des montants de TPS en mars et en juin 2003. La Cour canadienne de l’impôt avait conclu que, à compter de 2002, la société avait pris des mesures raisonnables pour régler ses difficultés financières et éviter les défauts de versements jusqu’en février 2003. Ces mesures avaient consisté en diverses tentatives pour trouver des capitaux d’exploitation additionnels. La Cour canadienne de l’impôt a conclu que, jusqu’en février 2003, l’administrateur pouvait s’attendre de manière raisonnable à ce que les efforts faits en vue d’obtenir des fonds permettent d’éviter les défauts de versement et qu’il avait ainsi satisfait à la norme de soin que l’on exige d’un administrateur aux termes du paragraphe 227.1(3) de la LIR.

[110]Pour arriver à cette conclusion, la Cour canadienne de l’impôt s’était fondée sur l’arrêt Worrell v. The Queen, 2000 DTC 6593, [2001] 1 C.T.C. 79 de la Cour d’appel fédérale. Dans cette affaire de responsabilité des administrateurs, des efforts avaient été faits pour le compte d’une société qui avait des difficultés financières en vue de trouver un nouvel investisseur. Pendant le temps de recherche d’un investisseur, la société avait omis de faire certains versements de taxe. Aucun investisseur n’avait été trouvé en fin de compte, mais la Cour a considéré qu’il était raisonnable de la part des administrateurs de croire que, s’ils avaient trouvé un investisseur, cela aurait pu éviter les défauts de versement. Elle a donc conclu que les administrateurs avaient fait des efforts raisonnables pour éviter les défauts de versement.

[111]En l’espèce, l’appelant soutient que les efforts qu’il a faits pour récupérer les montants de TPS payés en trop à l’égard des comptes de TPS de Meld et d’Andrew Paving étaient aussi raisonnables que les efforts qu’avaient faits les administrateurs dans les affaires Buckingham et Worrell pour trouver des capitaux supplémentaires. L’avocate soutient que l’appelant avait la conviction raisonnable que les comptes de Meld et d’Andrew Paving seraient rectifiés et rapprochés et que les crédits disponibles seraient payés et soustraits de toute dette ultérieure. L’avocate dit aussi que l’appelant n’aurait pas pu raisonnablement prévoir que personne à l’ARC n’examinerait les comptes, malgré ses demandes répétées à cet effet.

[112]Je conviens avec l’appelant que, si un administrateur croyait raisonnablement qu’une société avait un solde de crédit disponible dans son compte de TPS, cela serait assimilable à une croyance raisonnable que la société disposait d’assez de fonds pour payer au fur et à mesure les versements futurs de TPS, ou même que les versements futurs avaient en fait déjà été réglés. Comme dans les affaires Worrell et Buckingham, les efforts pertinents faits par un administrateur en vue d’éviter un défaut de versement incluraient les mesures prises en vue de disposer des fonds nécessaires pour effectuer les versements à temps. Il importe peu de savoir si ces fonds seraient obtenus au moyen d’un crédit pour des trop‑payés d’impôt ou de taxe antérieurs, plutôt qu’au moyen d’un investissement de capitaux par un investisseur.

[113]Cependant, je ne suis pas persuadé que l’appelant a démontré que sa conviction selon laquelle Meld et Andrew Paving avaient droit à des crédits de TPS additionnels était objectivement raisonnable.

[114]Premièrement, il ressort de la preuve qu’il était peu probable qu’un crédit de 123 000 $ était dû à Meld pour la période antérieure au 30 juin 1996. L’appelant dit que ce crédit découlait de l’entente relative à Meld, qui était datée du 11 décembre 1996 et qui, allègue‑t‑il, obligeait le ministre à réduire d’environ 123 000 $ les montants qui avaient été établis à l’encontre de Meld par la voie de cotisations arbitraires. Celles‑ci couvraient les périodes de déclaration de TPS de Meld prenant fin entre le 30 juin 1994 et le 30 juin 1996. L’appelant dit que Meld n’a jamais été l’objet d’une nouvelle cotisation en vue de réduire le montant de TPS à payer pour ces périodes. Cependant, cette position est contredite par l’état du compte de TPS de Meld que M. Jarman a fourni à l’appelant en 2008, et qui montre que le montant total de la taxe nette que le ministre avait fixé par voie de cotisation pour ces périodes de déclaration s’élevait à 39 920 $. L’état de compte indique que ces cotisations ont été établies le 13 décembre 1996. De plus, il ressort de la preuve que les cotisations ont été fondées sur des déclarations que Meld avait elle‑même produites à l’automne de 1996, après l’établissement des cotisations arbitraires. Dans la lettre datée du 5 août 2003 qu’il a envoyée au directeur du Bureau des services fiscaux de Toronto‑Nord au sujet de l’entente relative à Meld, l’appelant confirme que les déclarations relatives à ces périodes ont été produites à l’automne de 1996, après l’établissement des cotisations arbitraires.

[115]Il vaut la peine de mentionner que, dans sa lettre au directeur au sujet de l’entente relative à Meld, l’appelant ne demandait pas un crédit de 123 000 $. Il faisait plutôt référence à un montant de 78 859,12 $ en paiements et en crédits qui, disait‑il, avaient été appliqués erronément par l’ARC aux périodes de déclaration prenant fin avant le 30 juin 1996. Les détails de la manière dont l’appelant avait calculé ce dernier montant n’étaient pas inclus dans la lettre, et il ne semble pas, d’après un examen de l’état de compte de Meld, qu’il existait des crédits et des paiements qui totalisaient un montant se rapprochant, même de loin, de celui qui avait été appliqué après 1996 aux périodes de déclaration prenant fin le 30 juin 1996. La demande de crédit de 123 000 $ n’apparaît pas avant 2005, dans la lettre de l’appelant datée du 7 juillet 2005 dont il a été question plus tôt dans les présents motifs.

[116]Je conclus aussi qu’il n’était pas raisonnable de la part de l’appelant de croire que la lettre relative à Meld obligeait le ministre à établir une nouvelle cotisation à l’égard de Meld ou qu’elle constituait une entente obligatoire au sujet de la dette de TPS de Meld. La lettre porte sur la renonciation à une demande formelle de paiement signifiée à la banque de Meld. J’ai de la difficulté à croire que l’appelant ait pensé que la note inscrite à la main sur la lettre, qui faisait référence à une dette de 21 150 $ plus un montant de pénalités et d’intérêts, écarterait des cotisations établies conformément aux déclarations que Meld avait produites peu de temps avant. Il me semble que, si Meld avait jugé que les cotisations établies le 13 décembre 1996 étaient erronées, d’après la lettre relative à Meld, elle y aurait fait opposition. Il n’y avait aucune preuve que Meld l’avait fait.

[117]Il n’existe aucune preuve que l’appelant a sollicité une aide ou des conseils juridiques pour ce qui était de faire appliquer la présumée entente incluse dans la lettre relative à Meld à un moment quelconque dans les années postérieures à la date à laquelle cette entente avait été censément conclue. Cela est surprenant, vu que l’appelant dit maintenant qu’il croyait que l’on devait à Meld la somme de 123 000 $ et que le ministre a refusé de reconnaître la présumée entente.

[118]Cette absence manifeste de conseils professionnels est un autre facteur qui m’amène à conclure que la conviction de l’appelant que le ministre devait à Meld la somme de 123 000 $ par suite de la lettre relative à Meld n’était pas objectivement raisonnable.

[119]L’appelant dit qu’il croyait aussi que les montants établis par voie de cotisation à l’encontre de Meld et d’Andrew Paving étaient trop élevés pour les périodes de déclaration prenant fin avant 1996 à cause de l’application erronée de crédits et de paiements. Aux dires de l’appelant, Andrew Paving et Meld avaient produit des déclarations faisant état d’un crédit dont le ministre n’avait pas accusé réception et qu’il avait fallu produire de nouveau et que, de ce fait, des frais de pénalités et d’intérêts avaient été imposés pour des périodes de déclaration à l’égard desquelles un montant de taxe nette était exigible. Selon la demande d’équité que M. Andrew a établie pour Andrew Paving, les frais de pénalités et d’intérêts imposés par erreur s’élevaient jusque‑là à 28 953,69 $. Aucun montant n’était indiqué dans la demande d’équité de Meld.

[120]Un examen rapide de l’état de compte de TPS d’Andrew Paving jette un doute sérieux sur la position de l’appelant selon laquelle le ministre a perdu ses déclarations faisant état d’un crédit avant 1996 ou a omis d’en accuser réception. Selon les témoins de l’ARC, les dates qui correspondent aux inscriptions [traduction] « TPS/TVH à percevoir » et [traduction] « Crédits de taxe sur les intrants » apparaissant sur l’état de compte étaient les dates auxquelles le ministre avait reçu les déclarations de TPS. Selon l’état de compte de TPS d’Andrew Paving, la première déclaration de TPS de cette société était une déclaration faisant état d’un crédit, qui a été traitée le 9 février 1993. Les déclarations d’Andrew Paving concernant les six périodes suivantes ont été traitées au début de mars 1993 et elles comportaient une seule déclaration faisant état d’un crédit. Les déclarations d’Andrew Paving qui s’appliquaient aux six périodes suivantes ont été traitées le 20 décembre 1994 et incluaient deux déclarations faisant état d’un crédit. Les cinq déclarations suivantes ont été traitées le 12 janvier 1996. Aucune d’entre elles n’était une déclaration faisant état d’un crédit. Il semble donc qu’à l’exception de la première déclaration produite, Andrew Paving ait produit ses déclarations en lots. Les déclarations faisant état d’un crédit faisant partie de ces lots portaient les mêmes dates de traitement que les déclarations dans lesquelles Andrew Paving avait déclaré la taxe nette à payer. Cela m’inciterait à conclure qu’aucune déclaration faisant état d’un crédit n’a été perdue et qu’elles ont été traitées par le ministre en temps opportun. En fait, il semble qu’Andrew Paving ait produit la majeure partie de ses déclarations en retard et que ce sont ces retards qui ont mené à l’imposition de frais d’intérêts et de pénalités élevés.

[121]Il n’existe non plus aucune preuve convaincante que le ministre a appliqué erronément des paiements au compte d’Andrew Paving.

[122]Je conclus donc que l’appelant n’a pas établi le caractère raisonnable de sa conviction que les pénalités et les intérêts imposés pour les périodes de déclaration prenant fin en 1996 étaient trop élevés.

[123]La dernière présumée erreur examinée concerne deux montants assujettis aux dispositions en matière d’équité auxquelles l’appelant fait référence dans les lettres qu’il a adressées à Sylvia Williams et à Kevin Bailey. Il y soutient qu’en juin 2004, il a rencontré M. Malisani et a discuté de l’allègement fiscal pour raison d’équité accordé à Meld et à Andrew Paving le 30 avril 2004, de même que de sa lettre adressée au directeur du Bureau des services fiscaux de Toronto‑Nord pour laquelle il n’avait pas reçu de réponse. Dans les lettres destinées à Mme Williams et à M. Bailey, il dit qu’à la suite de cette réunion, Meld s’était vu accorder un allègement d’intérêts et de pénalités additionnel d’un montant de 16 302,53 $ et qu’Andrew Paving s’était vu accorder un allègement additionnel de 9 810,63 $. Cependant, dans ses lettres, l’appelant a déclaré que ces montants n’avaient pas été portés au crédit de Meld ou d’Andrew Paving. Son avocate n’a pas traité précisément de ces montants dans ses observations écrites, et aucun des témoins n’a été interrogé à leur sujet. À part les lettres de l’appelant, dans aucun des documents n’est‑il indiqué que Meld et Andrew Paving avaient droit à des crédits d’un tel montant. Je conclus donc que l’appelant n’a pas établi le caractère raisonnable de sa conviction qu’Andrew Paving et Meld avaient droit à ces montants.

[124]Même si l’avocate de l’appelant a interrogé assez longuement les témoins de l’ARC sur d’autres erreurs possibles dans les cotisations de TPS établies à l’encontre d’Andrew Paving, il ne s’agissait pas de celles que l’appelant avait évoquées à un moment quelconque dans ses discussions ou dans sa correspondance avec des membres de la section du recouvrement de l’ARC, et elles n’auraient donc pas constitué le fondement de sa conviction selon laquelle un montant de taxe et d’intérêts et de pénalités avait été payé en trop dans le cas des comptes de Meld et d’Andrew Paving. L’appelant n’acceptait peut‑être pas les montants à payer, mais la conviction qu’il y avait des paiements en trop ou des erreurs dans la comptabilité de l’ARC, et ce, sans avoir obtenu l’aide comptable d’un conseiller professionnel pour confirmer ces paiements ou ces erreurs, ne serait pas un fondement raisonnable pour ne pas avoir versé la TPS et les retenues à la source que devaient Andrew Paving et 155. Même à l’audience, l’appelant a été incapable de relever des inscriptions erronées dans l’état de compte de la TPS d’Andrew Paving. Tout ce qu’il a pu dire était qu’il savait que cet état de compte comportait des erreurs.

[125]Pour ces motifs, je conclus que l’appelant n’a pas établi que, pour éviter les défauts d’Andrew Paving et de 155 de verser la TPS et le défaut d’Andrew Paving de verser les retenues à la source, il a fait montre du degré de soin, de diligence et d’habileté qu’aurait exercé une personne raisonnablement prudente dans des circonstances comparables.

La fiabilité du témoignage de M. Andrew

[126]Avant de conclure, je crois qu’il est nécessaire de commenter de façon générale le témoignage de l’appelant. Je suis d’avis que, dans l’ensemble, malgré sa sincérité, M. Andrew n’a pas été un témoin fiable. Son témoignage manquait de détails et a souvent été difficile à suivre et confus. Plus tôt dans les présents motifs, j’ai fait référence à certains éléments du témoignage de l’appelant qui, d’après moi, n’étaient pas fiables.

[127]De plus, l’explication de M. Andrew quant à la manière dont 155 fonctionnait et rendait des comptes aux fins de la taxe n’était pas très logique et ne correspondait pas aux déclarations de TPS que 155 avait produites. Il a dit tout d’abord que toutes les déclarations fiscales de taxe de 155, à l’exception des versements de retenues à la source des employés, avaient été annulées après que le comptable de la société lui avait indiqué au début de 2004 qu’en transférant ses activités à 155, Andrew Paving ne serait plus en mesure de se prévaloir des pertes fiscales d’années antérieures. En contre‑interrogatoire, il a changé son témoignage pour dire qu’au moment où il avait reçu ce conseil fiscal, c’était en fait les déclarations de TPS de 155 que l’on ne pouvait pas annuler. Cependant, l’état de compte de la TPS semble indiquer que trois des déclarations de TPS de 155 n’ont pas été produites avant le mois de décembre 2004, alors que l’appelant a censément reçu les conseils du comptable au début de 2004. Dans des documents transmis en janvier 2006 à Betty Chan, vérificatrice de l’impôt sur le revenu auprès de l’ARC, il est également fait référence à des montants de revenus que 155 a déclarés dans l’année ayant pris fin le 31 décembre 2003.

[128]Je conclus aussi que le témoignage de M. Andrew sur ses rapports avec M. Schafer est invraisemblable, et ce, à un certain nombre d’égards. Par exemple, M. Andrew a déclaré que, même si M. Schafer lui avait dit qu’il n’était pas habilité à confirmer la présumée entente dans la lettre relative à Meld, il lui avait dit : [traduction« vous allez récupérer cet argent avec (sic) de Meld pour ces cent vingt‑trois là, plus les intérêts. Je ne vois pas pourquoi vous ne le récupéreriez pas, mais je ne peux pas le confirmer parce que ce n’est pas – je ne l’ai pas fait, je n’ai pas conclu l’entente avec vous ». Il m’est difficile de croire que M. Schafer aurait précisément prévenu M. Andrew qu’il n’était pas habilité à accepter la présumée entente figurant dans la lettre relative à Meld, mais qu’il aurait ensuite encouragé M. Andrew de la manière indiquée. Je signale également que l’avocate de l’appelant, lors du contre‑interrogatoire, n’a pas interrogé M. Schafer sur le fait d’avoir assuré de quelque manière à M. Andrew que le crédit de 123 000 $ que ce dernier voulait obtenir serait accepté. À mon avis, il est fort peu probable que M. Schafer l’ait fait.

[129]M. Andrew a également déclaré que M. Schafer l’a aidé à établir les demandes d’allègement fondé sur l’équité, ce que M. Schafer a nié. Sur ce point également, je préfère le témoignage de M. Schafer, car il est fort peu probable, selon moi, que ce dernier ait fourni une telle aide.

[130]Ensuite, M. Andrew a déclaré que, selon ce qu’il avait compris, les paiements postdatés qu’il avait faits à l’égard des comptes d’Andrew Paving et de Meld en août 2003 couvraient la totalité des montants que devaient ces deux sociétés, y compris les pénalités et les intérêts. Selon le souvenir qu’avait M. Schafer de l’entente conclue avec M. Andrew, les paiements ne s’appliquaient qu’au prochain montant de taxe nette que chacune des sociétés devait payer, et non aux pénalités ou aux intérêts qui avaient été imposés entre 1991 et 2003, car M. Andrew avait l’intention de présenter une demande d’allègement pour raison d’équité en vue de faire annuler la totalité des pénalités et des intérêts.

[131]Je conclus que le souvenir qu’avait M. Schafer de l’entente est plus fiable, car il concorde, d’une part, avec un résumé de l’entente que MM. Andrew et Schafer ont tous deux signée le 22 août 2003 pour Andrew Paving, relativement aux paiements qu’Andrew Paving devait effectuer et, d’autre part, avec les déclarations que M. Andrew lui‑même a faites. Dans une lettre adressée à M. Schafer en date du 16 juillet 2003, M. Andrew admet que Meld doit 107 200 $ à titre de [traduction« montant principal des rapports trimestriels » et il convient de payer cette somme. Dans sa demande d’allègement fondé sur l’équité datée de novembre 2003, M. Andrew écrit que [traduction« le solde des pénalités et des intérêts est encore impayé, mais j’accepte le montant, conformément aux instructions du représentant de l’ADRC, afin de pouvoir présenter une demande à la Commission d’examen de l’équité fiscale ». De plus, dans sa lettre datée du 7 juillet 2005 et adressée à l’agent de recouvrement de l’ARC, M. Andrew mentionne que [traduction] « le principal des montants exigibles » a été payé.

[132]M. Andrew a également déclaré, comme je l’ai mentionné plus tôt dans les présents motifs, que M. Schafer avait recommandé qu’Andrew Paving et Meld produisent des déclarations de TPS consolidées sous le nom d’Andrew Paving. Là encore, je souscris au témoignage de M. Schafer sur ce point, à savoir qu’il n’a pas fait cette recommandation.

[133]Le souvenir qu’avait l’appelant de la vérification des retenues à la source d’Andrew Paving en 2006 a été lui aussi déroutant. Il a tout d’abord déclaré qu’il n’était pas au courant de cela et que c’était [traduction] « le bureau » qui s’en serait chargé. Il a déclaré plus tard se souvenir que M. Jarman avait envoyé un vérificateur pour examiner les retenues à la source et qu’aucun montant exigible n’avait été trouvé. Cependant, la vérification des retenues à la source a eu lieu en juin 2006, tandis que M. Jarman n’a été affecté au dossier qu’à l’automne de 2007. Aucune question n’a été posée à M. Jarman au sujet du lancement d’une vérification des retenues à la source et, dans la preuve, rien d’autre ne dénote qu’il l’a fait.

[134]Par ailleurs, même si l’appelant a insisté pour dire que l’ARC ne lui a jamais donné de réponse sur ses préoccupations selon lesquelles Meld et Andrew Paving avaient payé un excédent de taxe, dès les premières déclarations produites au début des années 1990 il y a une preuve que, à sa demande, Andrew Paving a reçu un état de son compte de TPS en octobre 2002. En 2003, il a rencontré M. Schafer, qui semble avoir donné des explications sur les montants à payer. En avril 2004, le ministre a autorisé des parties des demandes d’allègement fondé sur l’équité d’Andrew Paving et de Meld et a inclus une ventilation du montant total des intérêts et des pénalités imputés aux comptes depuis 1991. Après la réception de l’allègement fondé sur l’équité, la plainte de l’appelant au sujet de la dette fiscale d’Andrew Paving a été axée sur trois points : le montant indiqué dans la lettre relative à Meld et les deux montants qu’il fallait, disait‑il, porter au crédit des comptes d’Andrew Paving et de Meld à l’égard d’un examen de deuxième niveau de la demande d’équité. C’est ce qui ressort des lettres qu’il a envoyées à des agents de recouvrement de l’ARC en 2005 et en 2006. M. Jarman était également d’avis que, en 2008, l’appelant ne contestait pas le montant de la dette de TPS d’Andrew Paving. L’avocate de l’appelant a renvoyé M. Jarman à une lettre que l’appelant avait envoyée à l’ARC et qui semblait indiquer que le montant était en litige, mais cette lettre avait été envoyée à un autre agent de recouvrement, nettement avant que M. Jarman soit affecté au dossier. Ce dernier a également traité de la préoccupation de l’appelant selon laquelle certains paiements qu’Andrew Paving avait faits à l’égard du compte de TPS de Meld en 2003 n’avaient pas été portés au crédit du compte de Meld. Il n’a pas été contesté que M. Jarman était capable de montrer à l’appelant à quel endroit les crédits avaient été imputés.

[135]Il est toutefois évident que le directeur du Bureau des services fiscaux de Toronto‑Nord n’a pas répondu à la lettre de l’appelant concernant la lettre relative à Meld et qu’aucune explication de la thèse du ministre sur l’affaire n’a été donnée avant 2008. Il ne fait aucun doute que le fait que le directeur n’ait pas envoyé de réponse a été l’une des principales causes du mécontentement de l’appelant, tant dans ses rapports avec l’ARC que dans le cadre de la présente instance. Aucune explication n’a jamais été donnée quant à la raison pour laquelle ce directeur n’avait pas répondu à la lettre de l’appelant. Cette manière de traiter l’appelant est déplorable, quel que soit le bien‑fondé de sa prétention au sujet de la lettre relative à Meld. Malheureusement, la conduite de l’ARC n’est pas un aspect sur lequel la Cour a compétence : Main Rehabilitation Co. c. Canada, 2004 CAF 403, 247 D.L.R. (4th) 597.

Conclusion

[136]L’intimée a admis à l’audience qu’il faudrait supprimer la somme de 385 $ à l’égard de la cotisation liée à l’obligation d’Andrew Paving en matière de retenues à la source, de même que la somme de 100 $ à l’égard de la cotisation concernant la dette de TPS de 155. Ces sommes se rapportaient à des frais engagés pour tenter de recouvrer les soldes en souffrance des sociétés et il ne s’agissait pas de montants que ces dernières avaient omis de verser.

[137]De plus, les cotisations au titre de la responsabilité de l’administrateur qui se rapportent à la dette de TPS d’Andrew Paving devraient être réduites de 1 070 $, de 1 141 $ et de 2 202 $, plus les pénalités et les intérêts connexes, le cas échéant, en vue de tenir compte des paiements qui ont été faits à l’égard du compte de TPS d’Andrew Paving en mai 2008, après l’établissement de la cotisation au titre de la responsabilité de l’administrateur en matière de TPS à l’encontre de l’appelant.

[138]Les appels sont accueillis en partie et les nouvelles cotisations sont renvoyées au ministre pour nouvel examen et nouvelles cotisations, conformément aux deux paragraphes qui précèdent. L’intimée a droit à un seul mémoire de dépens entre parties pour les deux appels.

Signé à Vancouver, Canada, ce 2e jour de janvier 2015.

« B. Paris »

Juge Paris

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de juillet 2015.

Mario Lagacé, jurilinguiste


RÉFÉRENCE :

2015 CCI 1

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :

2010‑2830(IT)G et 2010‑2205(GST)G

INTITULÉ :

Donald Andrew et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATES DE L’AUDIENCE :

Les 21 et 22 janvier 2014

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge B. Paris

DATE DU JUGEMENT :

Le 2 janvier 2015

COMPARUTIONS :

Avocate de l’appelant :

Me Leigh Somerville Taylor

Avocat de l’intimée :

Me Craig Maw

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

Leigh Somerville Taylor

 

Cabinet :

Leigh Somerville Professional Corporation

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 

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