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Dossier : 2014-1543(GST)I

ENTRE :

NANCY MENDES,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 8 janvier 2015 à Toronto (Ontario).

Devant : L’honorable juge Judith Woods

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

MMario Giovane

 

Avocate de l’intimée :

Me Rishma Bhimji

 

JUGEMENT

          L’appel interjeté à l’encontre d’une cotisation, établie au titre de la Loi sur la taxe d’accise au moyen d’un avis de nouvelle cotisation daté du 3 septembre 2013, est rejeté. Chaque partie assumera ses propres frais.

       Signé à Toronto (Ontario), ce 16e jour de janvier 2015.

« J.M. Woods »

Juge Woods

 

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour de mai 2015.

 

Espérance Mabushi, M.A. Trad. Jur.

 


 

Référence : 2015 CCI 11

Date : 20150116

Dossier : 2014-1543(GST)I

ENTRE :

NANCY MENDES,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Woods

[1]             Le présent appel concerne une demande de remboursement de la taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée (« TPS/TVH ») pour habitation neuve présentée par Nancy Mendes au titre de la Loi sur la taxe d’accise (la « LTA »).

[2]             La Couronne soutient que la demande de remboursement devrait être refusée parce que l’exigence énoncée à l’alinéa 254(2)b) de la LTA n’a pas été respectée.

[3]             La disposition susmentionnée est libellée ainsi :

254.(2)

[…]

b) au moment où le particulier devient responsable ou assume une responsabilité aux termes du contrat de vente de l’immeuble ou du logement conclu entre le constructeur et le particulier, celui-ci acquiert l’immeuble ou le logement pour qu’il lui serve de lieu de résidence habituelle ou serve ainsi à son proche ;

[4]             En l’espèce, la question à trancher est de savoir si, au moment de la conclusion du contrat de vente, Mme Mendes avait l’intention d’acquérir le bien pour qu’il lui serve de lieu de résidence habituelle. Le fardeau d’établir les faits pertinents au moyen d’une preuve prima facie incombe à Mme Mendes.

Contexte législatif

[5]             Les parties conviennent qu’il y a une question particulière à trancher, et elles ont fourni très peu de contexte en ce qui concerne le cadre législatif général. J’ai limité mon analyse à cette question. Toutefois, par souci d’exhaustivité, il est utile de formuler des observations sur ce que j’estime être la législation applicable.

[6]             Selon la demande de remboursement présentée par Mme Mendes, un montant de remboursement de 24 000 $ a été demandé à la case D. Celle‑ci est décrite comme se rapportant au « Montant du remboursement provincial pour habitations neuves ». Aucun montant n’a été demandé à la case C, qui est décrite comme se rapportant au « Montant du remboursement de la TPS/TVH pour habitations neuves ».

[7]             Selon la réponse, le remboursement a été refusé à juste titre en application des paragraphes 254(2) et 256(2.1) de la LTA et du paragraphe 41(2) du Règlement no 2 sur le nouveau régime de la taxe à valeur ajoutée harmonisée. Étant donné que le paragraphe 254(2) de la LTA prévoit un remboursement fédéral, j’ai supposé que la demande de remboursement du montant provincial de 24 000 $ a été présentée au titre du paragraphe 256(2.1) de la LTA.

[8]             Je tiens aussi à préciser que Mme Mendes a cédé le remboursement au constructeur. Pour autant que je sache, le ministre a payé le remboursement au constructeur et demande maintenant que Mme Mendes lui retourne le montant du remboursement, que le constructeur a porté au crédit de son compte.

Contexte factuel

[9]             En 2011, Mme Mendes et son époux ont acquis deux immeubles résidentiels neufs situés à proximité l’un de l’autre, à Brampton, en Ontario. L’un des immeubles est visé par le présent appel. L’autre a fait l’objet d’un remboursement pour habitation neuve qui a été accordé à l’époux de Mme Mendes.

[10]        Les deux opérations sont pertinentes et sont décrites ci‑dessous.

[11]        Le 16 octobre 2009, Mme Mendes a signé un contrat de vente concernant une maison qui devait être construite au 52 Balin Crescent, à Brampton, en Ontario (le « bien Balin »).

[12]        Le 15 avril 2010, Mme Mendes et son époux, Maxim Mendes, ont signé un contrat de vente concernant une maison qui devait être construite au 32 Legendary Circle, à Brampton, en Ontario (le « bien Legendary »).

[13]        Le 30 août 2011 ou vers cette date, M. et Mme Mendes sont devenus propriétaires du bien Balin et y ont emménagé avec leurs deux enfants et les parents de Mme Mendes.

[14]        Le 2 novembre 2011, le bien Balin a été mis sur le marché de la location.

[15]        Le 13 décembre 2011 ou vers cette date, M. Mendes, seul ou avec Mme Mendes, est devenu propriétaire du bien Legendary, dans lequel la famille a emménagé après avoir quitté le bien Balin. Selon une des pièces produites, M. Mendes serait l’unique propriétaire (pièce A‑2) et selon une autre, M. et Mme Mendes seraient copropriétaires (pièce R‑4, onglet A). Cet aspect n’est pas déterminant en l’espèce.

[16]        Le 19 décembre 2011, le bien Balin a été mis en vente.

[17]        Le 16 janvier 2012, un bail d’un an prenant effet en mars 2012 a été conclu à l’égard du bien Balin.

[18]        Le 2 février 2012, le bien Balin a été vendu.

[19]        La famille Mendes réside toujours dans le bien Legendary.

[20]        Mme Mendes a présenté une demande de remboursement pour habitation neuve concernant le bien Balin en tant que résidence habituelle et M. Mendes a présenté le même type de demande de remboursement pour le bien Legendary.

[21]        En plus de ces biens, il semble que M. et Mme Mendes possèdent aussi d’autres immeubles résidentiels à des fins de location. Pendant la période allant de 2010 à 2013, Mme Mendes et/ou son époux ont présenté des demandes de remboursement pour habitation neuve en tant que locateurs relativement à trois autres biens.

[22]        Pendant la période pertinente, M. Mendes était agent immobilier. Mme Mendes est aussi maintenant une agente immobilière.

Analyse

[23]        En l’espèce, la Cour est appelée à se prononcer sur la question de savoir si, au moment de la signature du contrat de vente du bien Balin, Mme Mendes avait l’intention que le bien lui serve de lieu de résidence habituelle.

[24]        Dans son témoignage, Mme Mendes a affirmé qu’au moment de la signature du contrat de vente du bien Balin, elle avait l’intention de faire du bien le foyer familial.

[25]        Mme Mendes a également déclaré dans son témoignage qu’au moment de la signature du contrat de vente du bien Legendary, elle avait l’intention de faire du bien une source de revenus de location pour son époux.

[26]        Mme Mendes a en outre précisé dans son témoignage qu’il y avait eu un changement d’intention vers l’automne 2011 lorsqu’elle avait reçu les résultats d’un examen médical qu’elle avait subi indiquant l’existence d’un risque de cancer. Elle a ajouté que le bien Legendary était mieux à même de l’aider à faire face à ses problèmes de santé. Le bien était situé à proximité d’un hôpital et comportait une chambre au rez‑de‑chaussée avec une salle de bains communicante. Compte tenu de cette situation, Mme Mendes a déclaré que la famille avait quitté le bien Balin pour s’installer au bien Legendary au moment de l’acquisition de celui‑ci.

[27]        Je n’ai pas été convaincue par le témoignage de Mme Mendes. Il s’agit d’un témoignage intéressé et il ne semble pas plausible.

[28]        Je constate que le bien Legendary est beaucoup plus cher que le bien Balin et que la présence d’une chambre à coucher au rez‑de‑chaussée du bien legendary convenait vraisemblablement mieux aux parents de Mme Mendes. C’est la chambre à coucher que les parents occupent actuellement.

[29]        En outre, il ressort de la preuve objective que l’inquiétude concernant le cancer s’est manifestée à un stade très précoce.

[30]        Il est possible que le témoignage de Mme Mendes concernant la raison du déménagement au bien Legendary soit véridique, mais il semble improbable que cela soit le cas.

[31]        La preuve dans son ensemble laisse croire qu’il est plus vraisemblable qu’au moment de la signature du contrat de vente concernant le bien Legendary, Mme Mendes avait l’intention que le bien serve de lieu de résidence habituelle pour sa famille plutôt que de servir de source de revenus de location pour M. Mendes.

[32]        Cette version semble davantage compatible avec le contrat de vente du bien Legendary auquel M. et Mme Mendes étaient tous les deux parties. Cela est également plus compatible avec l’obtention par M. Mendes d’un remboursement pour habitation neuve à l’égard du bien Legendary en fonction du fait que la famille avait l’intention qu’il lui serve de lieu de résidence habituelle (affidavit de Teresa D’Sa, onglet A).

[33]        La preuve ne démontre pas clairement pourquoi la famille s’est installée au bien Balin avant de déménager au bien Legendary quelques moins plus tard. C’était peut‑être pour des raisons fiscales, y compris l’exonération fiscale accordée relativement à la vente d’une résidence principale. Le profit tiré de la vente du bien Balin était d’environ 193 000 $. Cela pourrait constituer une explication de l’attention portée aux détails lorsque la famille avait emménagé au bien Balin, tel que le fait de donner des avis de changement d’adresse.

[34]        Dans une large mesure, Mme Mendes a tenté d’établir l’intention qu’elle avait au moment de la conclusion du contrat de vente du bien Balin en prouvant qu’elle avait réellement emménagé au bien Balin et qu’elle avait déménagé peu après pour une raison imprévue.

[35]        J’ai conclu que ce témoignage n’était pas convaincant, mais cela ne règle pas pour autant la question. C’est l’intention au moment de la conclusion du contrat de vente qui doit être établie. Le contrat a été signé le 16 octobre 2009.

[36]        Le contrat de vente du bien Balin a été conclu environ six mois avant la signature du contrat de vente du bien Legendary. Par conséquent, il serait satisfait à l’exigence énoncée à l’alinéa 254(2)b) de la LTA si Mme Mendes avait au départ l’intention que le bien Balin lui serve de lieu de résidence habituelle et qu’elle avait changé d’intention six mois plus tard au moment de la signature du contrat concernant le bien Legendary.

[37]        Bien que cette possibilité soit plausible, les éléments de preuve n’étaient pas suffisamment fiables ou détaillés pour me convaincre quant à l’intention de Mme Mendes au moment de la signature du contrat de vente du bien Balin.

[38]        Mme Mendes a simplement fait de brèves déclarations quant à son intention aux dates où les contrats de vente avaient été signés pour les biens Balin et Legendary. Les éléments de preuve n’étaient tout simplement pas suffisamment détaillés pour me convaincre.

[39]        Pour les motifs exposés ci‑dessus, j’ai conclu qu’il n’a pas été satisfait à l’exigence énoncée à l’alinéa 254(2)b) de la LTA. L’appel est rejeté.

       Signé à Toronto (Ontario), ce 16jour de janvier 2015.

« J.M. Woods »

Juge Woods

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour de mai 2015.

 

Espérance Mabushi, M.A. Trad. Jur.


RÉFÉRENCE :                                 2015 CCI 11

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :    2014-1543(GST)I

                                                         

INTITULÉ :                                      NANCY MENDES c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 8 janvier 2015

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L’honorable juge Judith Woods

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 16 janvier 2015

 

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

Me Mario Giovane

 

Avocate de l’intimée :

Me Rishma Bhimji

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

             Pour l’appelante :                         

 

Nom :                               Mario Giovane

 

Cabinet :                              Ayoub A. Ali Professional Corporation

Mississauga (Ontario)

 

             Pour l’intimée :                              William F. Pentney

                                                                    Sous-procureur général du Canada

                                                                    Ottawa, Canada

 

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