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Dossier : 2013-1716(IT)I 

ENTRE : 

VANESSA SCOTT,

appelante, 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

Appel entendu le 27 octobre 2014, à Hamilton (Ontario).

Devant : L’honorable juge Valerie Miller

Comparutions : 

Pour l’appelante :    L’appelante elle-même 

Avocate de l’intimée :   Me Devon Peavoy 

 

 

JUGEMENT

L’appel interjeté à l’encontre des nouvelles déterminations établies au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années de base 2009 et 2010 de l’appelante concernant la prestation fiscale canadienne pour enfants, et pour les années d’imposition 2009 et 2010 de l’appelante en ce qui a trait à la taxe de vente harmonisée est accueilli sans frais, et l’affaire est déférée au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations en tenant compte du fait que l’appelante et son époux étaient séparés pour cause d’échec de leur mariage et vivaient séparés du 27 décembre 2010 à juin 2012. 

Signé à Ottawa, Canada, ce 16jour de janvier 2015.

 

 

« V.A. Miller »

Juge V.A. Miller


Référence : 2015 CCI 9 

Date : 20150116 

Dossier : 2013-1716(IT)I 

 

ENTRE : 

VANESSA SCOTT,

appelante, 

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée. 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge V.A. Miller 

 

[1]  Le présent appel porte sur la demande de prestation fiscale canadienne pour enfants (la « PFCE ») présentée par l’appelante pour les années de base 2009 et 2010 (juillet 2010 à juin 2011 et juillet 2011 à juin 2012) et le crédit relatif à la taxe de vente harmonisée (le « CTVH ») demandé pour les années d’imposition 2009 et 2010 (juillet et octobre 2010; janvier, avril, juillet et octobre 2011; janvier et avril 2012). Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établi une cotisation à l’égard de l’appelante pour les périodes allant de juillet 2010 à juin 2012 pour des paiements en trop réputés au titre de la PFCE et du CTVH. 

[2]  En l’espèce, la Cour est appelée à décider si Jeffrey Scott, l’époux de l’appelante, était l’« époux visé » de l’appelante pendant les périodes allant de juillet 2010 à juin 2012. 

Requête préliminaire 

[3]  Au début de l’audience, l’appelante a présenté une requête en vue de faire annuler la réponse à l’avis d’appel (la « réponse ») et de permettre que l’appel soit poursuivi sans opposition. La requête est fondée sur le défaut de l’intimée de déposer une copie de la réponse et d’en faire signification à l’appelante dans le délai prévu au paragraphe 6(2) des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure informelle) (les « Règles »). 

[4]  Le paragraphe 6(2) des Règles est ainsi libellé : 

(2) Le ministre du Revenu national signifie, par courrier recommandé, dans les cinq jours qui suivent le dépôt de la réponse, une copie de celle-ci à l’adresse de l’appelante aux fins de la signification des documents. 

[5]  La disposition qui porte sur le délai pour le dépôt de la réponse se trouve à l’article 18.16 de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt (la « LCCI »). Les passages pertinents de cette disposition sont ainsi libellés : 

Délai pour répondre à l’avis d’appel 

18.16 (1) Le ministre du Revenu national dispose de soixante jours suivant la transmission de l’avis d’appel par le greffe de la Cour pour y répondre; il peut, toutefois, répondre après ce délai avec le consentement de l’appelant ou la permission de la Cour; le consentement et la permission peuvent être demandés soit avant, soit après l’expiration du délai. 

 [...] 

   Conséquence du retard 

(4) Le ministre du Revenu national peut répondre à l’avis d’appel même après l’expiration des délais prévus aux paragraphes (1) ou (3) ou accordés par l’appelant ou la Cour en vertu de ces paragraphes; les allégations de fait énoncées dans l’avis d’appel sont alors réputées vraies aux fins de l’appel. 

 (5) Le ministre du Revenu national peut répondre à l’avis d’appel par la poste, auquel cas sa réponse est réputée avoir été déposée le jour de son envoi par la poste. 

[6]  À l’examen des documents judiciaires, il est apparu que la réponse a été déposée à temps. Elle a été déposée auprès de la Cour le 8 juillet 2013, une date qui se situe dans le délai de soixante jours suivant la transmission de l’avis au ministre par le greffe de la Cour conformément au paragraphe 18.16(1) de la LCCI. 

[7]  Le 10 juillet 2014, l’appelante a avisé l’avocate de l’intimée qu’elle n’avait pas reçu la réponse. L’avocate de l’intimée a envoyé la réponse à l’appelante par courriel et par courrier recommandé le 10 juillet 2014. 

[8]  Le paragraphe 18.16(4) de la LCCI prévoit une sanction si la réponse n’est pas déposée à temps. Toutefois, le paragraphe 6(2) des Règles ne prévoit aucune sanction si la réponse n’est pas signifiée dans les cinq jours qui suivent le dépôt de la réponse. Par conséquent, la requête de l’appelante est rejetée : Zhuang v R, [1996] 3 CTC 2886 (CCI); confirmée par [1998] 3 CTC 284 (CAF). 

L’appel 

[9]  Le terme « époux visé » est défini à l’article 122.6 de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») pour l’application des dispositions relatives à la CFPE et au CTVH, de la manière suivante : 

« époux ou conjoint de fait visé » Personne qui, à un moment donné, est l’époux ou conjoint de fait d’un particulier dont il ne vit pas séparé à ce moment. Pour l’application de la présente définition, une personne n’est considérée comme vivant séparée d’un particulier à un moment donné que si elle vit séparée du particulier à ce moment, pour cause d’échec de leur mariage ou union de fait, pendant une période d’au moins 90 jours qui comprend ce moment; 

[10]  En l’espèce, la Cour était appelée à décider si l’appelante et Jeffrey Scott vivaient séparés pour cause d’échec de leur mariage pendant la période visée par l’appel. Il incombe à l’appelante d’établir les faits qui permettraient de démontrer que les déterminations étaient inexactes. 

[11]  Les seuls témoins à l’audience étaient l’appelante et Doris Arsenault, agente des Appels à l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »). 

Le témoignage de l’appelante 

[12]  L’appelante et Jeffrey Scott se sont mariés en 2006. Au moment de leur mariage, l’appelante avait deux enfants issus d’un mariage antérieur, à savoir N. M-R, né en 1996, et A. M-R, né en 1998. L’époux de l’appelante n’était pas le père biologique des deux enfants, mais il a assumé toutes les responsabilités parentales à leur égard. 

[13]  L’appelante et son époux ont eu trois enfants ensemble – S.S, né en 2008; C.S., né en 2009, et J.S., né en 2012. 

[14]  Selon l’appelante, elle et son époux ont vécu ensemble au 367 Yale Crescent, à Oakville, en Ontario, jusqu’au 7 décembre 2010, lorsqu’ils se sont séparés pour cause d’échec de leur mariage. Elle n’était pas certaine de l’endroit où son époux avait vécu après la séparation, mais elle avait continué à vivre en Ontario dans le domicile familial. Après la séparation, son époux venait rendre visite aux enfants au domicile familial. À un certain moment, son époux a déménagé à l’Île-du-Prince-Édouard (l’« Î.-P.-E. ») pour un emploi qui commençait en mai 2011. 

[15]  L’appelante a déclaré que, après la séparation, elle avait éprouvé des difficultés financières et, le 21 avril 2011, elle avait présenté une demande d’aide sociale dans le contexte du programme Ontario au travail. Sa demande avait été approuvée le 5 mai 2011. Toutefois, l’aide financière en question avait été annulée le 3 août 2011 parce que l’appelante avait commencé à recevoir de son premier époux une pension alimentaire non imposable. 

[16]  L’appelante a déclaré qu’en raison de ses problèmes financiers, elle avait demandé à sa mère de venir vivre avec elle à Yale Crescent. Je ne sais pas trop à quel moment la mère de l’appelante a emménagé avec elle parce qu’elle a déclaré au départ que c’était après l’annulation de l’aide sociale, et elle a ensuite dit que c’était en juin ou en juillet 2011 et, lors du contre-interrogatoire, elle a précisé que c’était en octobre ou en novembre 2011. 

[17]  Dans son témoignage, l’appelante a affirmé qu’elle était tombée enceinte en mai 2011. Elle avait demandé à son époux si les deux enfants plus âgés pouvaient vivre avec lui et fréquenter l’école à l’Î.-P.-É. Ces enfants avaient 13 et 15 ans à l’époque et ils s’étaient installés à l’Î.-P.-É. pour l’année scolaire allant de septembre 2011 à juin 2012. 

[18]  L’appelante a déclaré qu’elle et ses enfants plus jeunes avaient continué à vivre en Ontario, mais qu’ils avaient rendu visite à son époux et aux enfants plus âgés à l’Î.-P.-É. à Noël en 2011. Elle était tombée malade et le médecin lui avait interdit de voyager jusqu’à la naissance de son enfant. Elle avait donné naissance à son fils JS à l’Î.-P.-É. le 8 février 2012. 

[19]  L’appelante a affirmé qu’elle et les enfants plus jeunes avaient rendu visite à son époux et aux enfants plus âgés pendant les vacances du mois de mars en 2012. Elle s’était rendue à l’Î.-P.-É encore une fois à la fin de juin 2012 pour aller chercher ses enfants plus âgés. L’appelante a livré un témoignage dans ce sens et a fourni divers documents pour prouver que, même si elle avait rendu visite à son époux et à ses enfants à l’Î.-P.-É, elle avait continué à vivre en Ontario pendant la période allant de décembre 2010 à juin 2012. Ces documents sont les suivants : 

  1. Une demande d’aide sociale à Ontario au travail datée du 21 avril 2011.

  2. Une lettre datée du 5 mai 2011 provenant d’Ontario au travail qui approuvait sa demande d’aide financière à partir du 12 avril 2011.

  3. Une lettre datée du 3 août 2011 provenant d’Ontario au travail qui avisait l’appelante que l’aide sociale qui lui avait été accordée avait été annulée parce qu’elle recevait une pension alimentaire non imposable.

  4. Une fiche de la Banque Royale du Canada qui mentionnait que sa situation de famille était « séparée » et qu’elle était une cliente de la banque depuis octobre 2011.

  5. Une ordonnance de la Cour de justice de l’Ontario qui mentionnait qu’elle s’était présentée à la cour le 13 mai 2011. Cette ordonnance fixait la pension alimentaire pour enfants que la Cour avait ordonnée au premier époux de payer.

  6. Un formulaire d’inscription au ministère des Services sociaux et communautaires de l’Ontario pour le dépôt direct de ses paiements de pension alimentaire provenant de son premier époux. Le formulaire avait été signé le 24 novembre 2011.

  7. Une liste de ses rendez-vous avec un médecin à l’hôpital St. Michael’s à Toronto. La liste a été préparée par l’hôpital et comprend les rendez-vous de chaque mois, de juin à décembre 2011 et de juin à août 2012. L’appelante avait deux rendez-vous médicaux dans chacun des mois d’août, d’octobre, de novembre et de décembre 2011.

  8. Le permis de conduire de l’Ontario de l’appelante qui avait été délivré le 12 août 2011.

  9. La carte santé de son fils JS qui précisait qu’il avait été inscrit au programme d’assurance-santé de l’Ontario le 13 juillet 2012.

  10. La fiche d’immunisation de l’Ontario de son fils JS. Il avait reçu des vaccins en avril, en juin et en août 2012 ainsi qu’en juin et en août 2013.

  11. Son formulaire T5007 pour 2011 de l’ARC qui précisait que son adresse était Yale Crescent, en Ontario.

  12. Le relevé de son compte visa TD de mars 2011 qui lui avait été adressé à son adresse sur Yale Crescent. Toutefois, l’appelante avait supprimé tous les achats figurant sur le relevé.

  13. Le relevé d’un compte de placement pour décembre 2011 adressé à l’appelante à son adresse sur Yale Crescent.

  14. Une entente de séparation que l’appelante et son époux avaient conclue le 18 août 2011, qui mentionnait qu’ils s’étaient séparés le 27 décembre 2010. Elle avait été enregistrée auprès de la Cour de justice de l’Ontario le 29 février 2012.

[20]  L’appelante a déclaré dans son témoignage que, lorsqu’elle emmenait les enfants à l’Î.-P.-É. pour rendre visite à son époux, elle ne restait pas toujours avec lui. Lors des vacances du mois de mars, elle avait déposé les enfants plus jeunes et avait pris les plus vieux avec elle à Moncton. À ce moment-là, elle logeait à un hôtel à Moncton. Elle avait proposé à Mme Arsenault, l’agente des Appels, de lui fournir des copies des reçus, mais celle-ci lui avait écrit que cela n’était pas nécessaire. 

Le témoignage de l’intimée 

[21]  Selon l’intimée, l’appelante n’a pas présenté suffisamment d’éléments de preuve pour établir qu’elle et son époux vivaient séparés. Mme Arsenault a déclaré qu’elle avait demandé à l’appelante de lui fournir ses relevés bancaires, mais que celle-ci avait refusé. Les relevés bancaires auraient permis de constater l’endroit où l’appelante faisait ses courses pendant la période. Elle avait également demandé une lettre de l’école que les enfants fréquentaient, qui aurait précisé la personne qui avait inscrit les enfants à l’école à l’Î.-P.-É. L’appelante n’avait pas fourni ces documents. 

[22]  Il ressort de la preuve documentaire présentée par l’intimée que l’appelante était à l’Î.-P.-É. en avril 2012. L’enveloppe dans laquelle se trouvait l’avis d’opposition de l’appelante avait été mise à la poste à Charlottetown le 26 avril 2012. 

[23]  L’intimée a également déposé en preuve une ordonnance émanant du bureau du directeur des immeubles d’habitation locatifs (Office of the Director of Residential Rental Property) pour l’Î.-P.-É. L’ordonnance était datée du 5 juin 2013 et mentionnait que l’appelante et son époux étaient preneurs à bail d’un bien situé à Kingston, à l’Î.-P.-É. (le « bien »). Selon l’ordonnance, les preneurs à bail avaient présenté une demande le 27 décembre 2012 pour récupérer leur dépôt de garantie. La demande avait été entendue le 15 mai 2013 et, selon les motifs écrits, l’appelante était présente à l’audience. 

[24]  Mme Arsenault a également consulté ses notes qu’elle avait produites comme pièce. Ces notes concernaient une discussion que Mme Arsenault avait eue avec le propriétaire du bien à Kingston, à l’Î.-P.-É. Selon Mme Arsenault, le propriétaire du bien lui avait confirmé que M. Scott, son épouse et ses enfants vivaient dans le bien. Le bail concernant le bien couvrait la période allant de décembre 2011 à novembre 2012. 

Analyse 

[25]  Dans un appel en matière fiscale, l’appelant a la charge initiale de « démolir » les présomptions formulées par le ministre en présentant une preuve prima facie. Le fardeau initial consiste seulement à « démolir » les présomptions exactes qu’a utilisées le ministre. Lorsque l’appelant a démoli les présomptions du ministre, le fardeau de la preuve passe au ministre, qui doit prouver ses présomptions : arrêt Hickman Motors Ltd c R, [1997] 2 RCS 336, aux paragraphes 92 à 94. 

[26]  Comme je l’ai mentionné précédemment, la période en cause en l’espèce va de juillet 2010 à juin 2012. L’appelante a déclaré qu’elle et son époux s’étaient séparés le 27 décembre 2010 et qu’ils avaient vécu séparés par la suite pour cause d’échec de leur mariage. Pour les besoins du présent appel, la période de séparation va du 27 décembre à juin 2012. Les dates mentionnées dans la partie des hypothèses de la réponse n’étaient pas exactes et ne se rapportaient pas à la bonne période visée par le présent appel. Voici certaines des hypothèses formulées au paragraphe 21 : 

b) à toutes les époques pertinentes pendant les années d’imposition 2009 et 2010, l’appelante et Jeffrey vivaient ensemble en union de fait; 

c) à toutes les époques pertinentes pendant les années d’imposition 2009 et 2010, l’appelante et Jeffrey vivaient ensemble au 367 Yale Crescent, à Oakville, en Ontario (le « domicile familial »); 

[…]

e) à aucun moment durant les années d’imposition 2009 et 2010 l’appelante et Jeffrey n’ont vécu séparés, pour cause d’échec de leur union de fait, pendant une période d’au moins 90 jours, qui comprend ce moment; 

L’appelante s’est exprimée sur les hypothèses et a admis que son époux et elle vivaient ensemble en 2009 et en 2010, jusqu’au 27 décembre 2010. À mon avis, les hypothèses de fait susmentionnées ont été bâclées et, comme dans la décision Bekesinski c R, 2014 CCI 245, elles sont préjudiciables à la cause de l’intimée. Je tiens à souligner que les actes de procédure en question ont été préparés par un représentant de l’intimée et non par l’avocate qui a plaidé en l’espèce. 

[27]  La preuve présentée par les parties portait principalement sur la question de savoir si l’appelante et son époux vivaient « séparés » pendant la période pertinente. L’appelante a déclaré dans son témoignage que son époux et elle s’étaient séparés le 27 décembre 2010 pour cause d’échec de leur mariage. Aucune preuve documentaire n’est venue établir la date réelle de la séparation des époux. Toutefois, Mme Arsenault a affirmé dans son témoignage que l’appelante lui avait fourni une lettre signée par un agent de police en avril 2011. La lettre n’a pas été produite en tant que pièce, mais selon ce que j’ai retenu du témoignage de Mme Arsenault, il y avait eu une « altercation » entre l’appelante et son époux, et la police avait averti l’appelante qu’elle devait se tenir éloignée de son époux « sauf pour les périodes de visite des enfants ou pour un échange par l’intermédiaire d’un tiers convenu ». À mon avis, ce témoignage a manifestement établi qu’en avril 2011, le mariage de l’appelante avait échoué. Toutefois, aucune preuve documentaire n’est venue corroborer le témoignage de l’appelante selon lequel le mariage avait été rompu jusqu’en juin 2012, soit la fin de la période pertinente. 

[28]  L’appelante a expliqué qu’elle avait eu des relations sexuelles avec son époux en mai 2011 lorsque celui-ci était venu rendre visite à ses enfants. Cela était arrivé par hasard et ils ne s’étaient pas remis ensemble. Elle était tombée enceinte de leur troisième enfant, qui était né en février 2012. L’appelante ne savait pas où son époux vivait après son départ du domicile familial le 27 décembre 2010, mais elle connaissait son numéro de téléphone. 

[29]  L’appelante a affirmé dans son témoignage qu’elle ne vivait pas dans une relation conjugale avec son époux. Celui-ci a confirmé séparément à un employé de l’ARC en janvier 2011 qu’il était séparé de l’appelante et qu’il versait une pension alimentaire. Toutefois, aucune preuve documentaire ne démontrait qu’il devait verser une pension alimentaire ou qu’il avait effectivement versé une pension alimentaire à l’appelante. L’entente de séparation conclue entre l’appelante et son époux le 18 août 2011 ne comportait pas de clause relative à la pension alimentaire. 

[30]  La preuve établit manifestement que l’époux de l’appelante a déménagé à l’Î.-P.-É. en raison de son travail. Sa fiche de paie indique qu’il a reçu sa première paie à la fin de mai 2011. 

[31]  L’appelante a fourni des éléments de preuve documentaire pour démontrer qu’elle était présente en Ontario pour ses rendez-vous médicaux de juin à décembre 2011 et en juin 2012. Elle recevait son courrier en 2011 et en 2012 à son adresse en Ontario. Toutefois, l’appelante n’aurait eu aucun problème à recevoir n’importe quel courrier qui lui était envoyé à l’adresse sur Yale Crescent en 2011 et en 2012 parce que sa mère vivait à cette adresse. 

[32]  L’ordonnance rendue par le bureau du directeur des immeubles d’habitation locatifs pour l’Î.-P.-É. désignait l’appelante et son époux comme étant tous les deux preneurs à bail du bien alors que le bail concernant le bien mentionnait manifestement que l’époux de l’appelante était le seul preneur à bail du bien. L’appelante était à l’Î.-P.-É. pour l’audition de la demande devant le directeur des immeubles d’habitation locatifs. Toutefois, cette audition avait eu lieu le 4 juin 2013, une date qui est située en dehors de la période pertinente. Je n’ai accordé aucun poids à cette ordonnance ni au fait qu’elle désignait l’appelante à titre de preneuse à bail. 

[33]  Bien que les notes de Mme Arsenault et son témoignage concernant sa discussion avec le propriétaire du bien à l’Î.-P.-É. aient constitué une preuve par ouï-dire, je les ai admis en preuve parce que le présent appel a été interjeté sous le régime de la procédure informelle et que les éléments de preuve étaient pertinents en l’espèce : Suchon c Canada, 2002 CAF 282. Toutefois, je n’ai accordé aucun poids au témoignage de Mme Arsenault ayant trait à la discussion qu’elle avait eue avec le propriétaire du bien à l’Î.-P.-É. Ce témoignage était au cœur même de la question soulevée en appel, et l’appelante n’a pas eu l’occasion de contre-interroger le propriétaire du bien à l’Î.-P.-É. 

[34]  Bien que l’appelante n’ait pas pu se rappeler la date à laquelle sa mère avait emménagé avec elle à la maison située sur Yale Crescent, la grande partie du témoignage de l’appelante était compatible avec les documents qu’elle avait présentés et les déclarations antérieures qu’elle avait faites à l’ARC au stade de l’opposition de son appel. Sa crédibilité n’a pas été ébranlée lors du contre-interrogatoire. 

[35]  J’estime que l’appelante a présenté une preuve prima facie pour établir que son époux et elle s’étaient séparés le 27 décembre 2010 pour cause d’échec de leur mariage et qu’ils avaient vécu séparés à partir de cette date et pendant la période où elle avait touché les prestations. Cela a déplacé le fardeau sur l’intimée. Celle-ci a présenté une preuve par ouï-dire qui n’était pas suffisante pour qu’elle puisse s’acquitter du fardeau qui lui avait été passé. Je ne puis me fonder sur cette preuve par ouï-dire pour démontrer que les cotisations établies par le ministre étaient exactes. 

[36]  Toutefois, des doutes ont été soulevés dans mon esprit par le refus de l’appelante de fournir à l’ARC ou à l’audience du présent appel ses relevés bancaires et les formulaires d’inscription des enfants à l’école. 

[37]  Dans les circonstances, je n’ai d’autre choix que d’accueillir l’appel. 

Signé à Ottawa, Canada, ce 16jour de janvier 2015.

 

« V.A. Miller »

Juge V.A. Miller

 


 

RÉFÉRENCE:

2015TCC9

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2013-1716(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE:

VANESSA SCOTT et SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE:

Hamilton, Ontario

DATE DE L’AUDIENCE:

27 octobre 2014

MOTIFS DE JUGEMENT PAR:

L’Honorable Juge Valerie Miller

DATE DU JUGEMENT:

16 janvier 2015

 

COMPARUTIONS:

 

Pour l’appelante :

 

L’appelante elle-même

 Pour l’intimée:

Me Devon Peavoy

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Pour l’appelante:

Nom:

 

 

Cabinet:

 

Pour l’intimée:

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 

 

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