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Dossier : 2013-3695(IT)I

ENTRE :

KUZI MAPISH,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

Appel entendu le 23 février 2015, à Hamilton (Ontario).

Devant : L’honorable juge suppléant Rommel G. Masse


Comparutions :

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocate de l’intimée :

Me Dominique Gallant

 

JUGEMENT

L’appel interjeté à l’encontre des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2007 et 2008 est rejeté conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Signé à Kingston (Ontario), ce 12e jour de mai 2015.

« Rommel G. Masse »

Le juge suppléant Masse


Référence : 2015 CCI 122

Date : 20150512

Dossier : 2013-3695(IT)I

ENTRE :

KUZI MAPISH,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge suppléant Masse

[1]             En l’espèce, la Cour est appelée à décider si l’appelant a droit au crédit d’impôt pour les dons de bienfaisance demandés à l’égard des années d’imposition 2007 et 2008 relativement à des dons qui auraient été faits par l’appelant à Revival Time Ministries International (ci-après « Revival »). Bien que l’avis d’appel fasse référence aux années d’imposition 2007, 2008, 2010 et 2011, le présent appel ne s’applique qu’aux années d’imposition 2007 et 2008.

[2]             L’appelant interjette appel des nouvelles cotisations établies à son égard par lesquelles le ministre du Revenu national (ci-après le « ministre ») a rejeté les crédits d’impôt pour dons de bienfaisance dont l’appelant s’était prévalu, soit 9 600 $ en 2007 et 11 600 $ en 2008.

[3]             Le ministre soutient en premier lieu que les reçus présentés par l’appelant ne satisfont pas aux exigences prévues par la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.) (ci-après la « Loi »), et le Règlement de l’impôt sur le revenu, C.R.C., ch. 945 (ci-après le « Règlement »). Subsidiairement, le ministre fait valoir que, quoi qu’il en soit, l’appelant est incapable de faire la preuve qu’il a fait les dons qui sont le sujet de ce litige.

Contexte factuel

[4]             L’appelant est originaire de l’ex-Zaïre, en Afrique. Il a témoigné qu’il est marié et a trois enfants. Son pays d’origine est « pauvre » et souvent en « guerre ». En arrivant au Canada, il a toujours eu à cœur d’aider ses compatriotes restés en Afrique. Il a dit qu’il a toujours fait des dons de bienfaisance pouvant bénéficier aux gens en Afrique. Il a donc commencé à faire des dons à Revival qui lui a remis des reçus pour usage fiscal. Il a dit que Revival était son église et qu’il assistait aux services religieux. Il a dit qu’il a fait ces dons en argent comptant et parfois en donnant des vêtements ou d’autres choses du même genre.

[5]             En produisant sa déclaration de revenus pour l’année 2007, l’appelant a déclaré avoir gagné un revenu d’emploi de 40 458,02 $ (voir la pièce I-1). Il a aussi déclaré avoir fait des dons de bienfaisance de 9 600 $ à Revival et a produit un reçu à l’appui (voir la pièce A-1). Ce montant est très important par rapport à son revenu brut, dont il représente presque 25 %.

[6]             En produisant sa déclaration de revenus pour l’année 2008, l’appelant a déclaré avoir gagné un revenu d’emploi de 45 553,56 $ (voir la pièce I-2). Il a aussi déclaré avoir fait des dons de bienfaisance de 11 600 $ à Revival et a produit un reçu à l’appui (voir la pièce A-2). Là encore, ce montant est très important par rapport à son revenu pour cette année d’imposition, dont il représente presque 25 %.

[7]             Le ministre a établi des cotisations à l’égard de l’appelant pour les années d’imposition 2008 et 2009 le 14 avril 2008 et le 9 avril 2009, respectivement. Le ministre a accepté les dons de bienfaisance tels que déclarés. Le 25 janvier 2010, le ministre a établi de nouvelles cotisations rejetant les crédits d’impôt pour don de bienfaisance dont l’appelant s’était prévalu, soit 9 600 $ en 2007 et 11 600 $ en 2008.

[8]             L’appelant s’est opposé aux nouvelles cotisations; le ministre les a ratifiées le 29 aout 2013.

[9]             Le ministre a établi les nouvelles cotisations à l’égard de l’appelant en tenant pour acquis qu’il n’avait fait aucun don de bienfaisance à Revival en 2007 et en 2008. Subsidiairement, le ministre a conclu que les reçus délivrés à l’appelant par Revival ne contenaient pas tous les renseignements qui doivent figurer sur un reçu pour don de bienfaisance selon l’article 3501 du Règlement.

[10]        Par les motifs exposés ci-après, je conclus que les reçus fournis par Revival ne contiennent pas tous les renseignements exigés par le Règlement et que pour ce seul motif, les appels doivent être rejetés. Je conclus également que même si les reçus avaient été conformes au Règlement, l’appelant n’a pas réussi à prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il a fait les dons en question.

Dispositions légales

[11]        Le paragraphe 118.1(3) de la Loi donne droit à un crédit d’impôt à l’égard des dons faits à un organisme de bienfaisance enregistré. Selon l’alinéa 118.1(2)a) de la Loi, le don doit être attesté par la présentation d’un reçu contenant les renseignements prescrits. L’alinéa 118.1(2)a) dispose ce qui suit :

118.1(2) Attestation du don — Pour que le montant admissible d’un don soit inclus dans le total des dons de bienfaisance, le total des dons à l’État, le total des dons de biens culturels ou le total des dons de biens écosensibles, le versement du don doit être attesté par la présentation au ministre des documents suivants :

a) un reçu contenant les renseignements prescrits;

[…]

[12]        Les renseignements prescrits qui doivent être inclus dans le reçu officiel pour don de bienfaisance sont énumérés au paragraphe 3501(1) du Règlement. Le paragraphe dispose ce qui suit :

3501(1) Contenu des reçus — Tout reçu officiel délivré par une organisation enregistrée doit énoncer qu’il s’agit d’un reçu officiel aux fins de l’impôt sur le revenu et indiquer clairement, de façon à ce qu’ils ne puissent être modifiés facilement, les détails suivants :

a) le nom et l’adresse au Canada de l’organisation ainsi qu’ils sont enregistrés auprès du ministre;

b) le numéro d’enregistrement attribué par le ministre à l’organisation;

c) le numéro de série du reçu;

d) le lieu ou l’endroit où le reçu a été délivré;

e) lorsque le don est un don en espèces, la date ou l’année où il a été reçu;

e.1) lorsque le don est un don de biens autres que des espèces :

(i) la date où il a été reçu,

(ii) une brève description du bien, et

(iii) le nom et l’adresse de l’évaluateur du bien si une évaluation a été faite;

f) la date de délivrance du reçu;

gle nom et l’adresse du donateur y compris, dans le cas d’un particulier, son prénom et son initiale;

h) celle des sommes ci-après qui est applicable :

(i) le montant du don en espèces,

(ii) lorsque le don est un don de biens autres que des espèces, à la juste valeur marchande du bien au moment où le don a été fait;

h.1) le montant de l’avantage, le cas échéant, au titre du don;

h.2) le montant admissible du don;

i) la signature, ainsi qu’il est prévu au paragraphe (2) ou (3), d’un particulier compétent qui a été autorisé par l’organisation à accuser réception des dons;

j) le nom de l’Agence du revenu du Canada et l’adresse de son site Internet

[nos caractères gras].

Analyse

[13]        Lues conjointement, les dispositions mentionnées plus haut exigent que les éléments suivants soient réunis :

a)       un don;

b)      un reçu prouvant qu’il s’agit d’un don de bienfaisance.

[14]        Le ministre soutient que l’appelant n’a pas prouvé l’existence de l’un ou l’autre de ces deux éléments.

La validité des reçus

[15]        Dans l’affaire Afovia c. La Reine, 2012 CCI 391 (CanLII), 2013 DTC 1016, [2012] ACI no 314 (QL), le juge Paris de notre Cour a examiné les questions de la preuve de l’existence de dons et de la validité d’un reçu. Il s’est exprimé comme suit en ce qui a trait aux exigences en matière de reçu :

[9]        La Cour doit rechercher s’il est obligatoire qu’un reçu pour don de bienfaisance contienne tous les renseignements énumérés au paragraphe 3501(1) du Règlement, y compris un numéro de série et le nom de l’ARC et l’adresse de son site Internet. Compte tenu du texte explicite de cette disposition, je conclus qu’il est impératif de faire état de tous les renseignements qui y sont énumérés. À la partie pertinente de la disposition en question, il est prévu que « tout reçu officiel délivré par une organisation enregistrée doit […] indiquer clairement, de façon à ce qu’ils ne puissent être modifiés facilement […] » les renseignements énumérés aux alinéas a) à j) du Règlement. (Non souligné dans l’original.)

[…]

[12]      Les appelants ne soutiennent pas, et je ne saurais d’ailleurs me prononcer en ce sens qu’interpréter le terme « doit », à l’article 3501 du Règlement, de manière impérative pourrait aboutir à une issue déraisonnable. On peut supposer que le législateur a choisi d’imposer la mention d’un numéro de série sur les reçus pour don de bienfaisance afin de faciliter les vérifications sur les dons de bienfaisance, d’autres termes en imposant la tenue ordonnée des documents relatifs aux dons; la mention de l’adresse du site Internet de l’ARC, quant à elle, permet au donateur de vérifier si l’organisme de bienfaisance est enregistré et si le don donne droit au crédit d’impôt pour don de bienfaisance. En outre, la connotation impérative cadre avec le contexte. Par exemple, l’exigence concernant les numéros de série sur les reçus est également prévue par les paragraphes 3501(1.1), (3) et (4) du Règlement, et l’exigence concernant l’adresse du site Internet de l’ARC est réitérée au paragraphe 3501(1.1) du Règlement. La conclusion s’impose donc : faire état des renseignements énumérés au paragraphe 3501(1) du Règlement est incontournable en matière de reçu officiel pour don de bienfaisance.

[13]      Étant donné qu’aucun des reçus que la PDGL a fournis aux appelants ne contient tous les renseignements prescrits, ces reçus ne répondent pas aux exigences du paragraphe 118.1(2) de la Loi; il s’ensuit que les demandes de crédits d’impôt pour dons de bienfaisance présentées par les appelants ne peuvent pas être acceptées.

[14]      Le fait que les appelants n’étaient pas au courant des renseignements qu’un reçu pour don de bienfaisance devait contenir ne saurait les exempter de l’obligation de produire des reçus officiels contenant les renseignements prescrits au soutien de leur demande de crédits d’impôt pour don de bienfaisance. Le paragraphe 118.1(2) de la Loi s’impose à la Cour.

[16]        Le juge Paris a répété ces mêmes principes dans Ofori-Darko c. La Reine, 2014 CCI 54 (CanLII), 2014 DTC 1074, au paragraphe 14 :

[14]      En outre, il n’est pas précisé dans ces reçus à quel moment les dons en nature ont été recueillis par Redemption, non plus que leur juste valeur marchande à ce moment-là. Enfin, n’y sont pas reportés le lieu ou l’endroit où le reçu a été délivré. Comme je l’ai mentionné dans Afovia et al. c. La Reine, faire état des renseignements énumérés au paragraphe 3501(1) du RIR est incontournable en matière de reçu officiel pour don de bienfaisance, et, par conséquent, les reçus produits dans les présents appels ne suffisent pas à prouver l’existence d’un don ainsi qu’il est prescrit à l’alinéa 118.1(2)a) de la LIR

[note de bas de page omise].

[17]        Dans l’affaire Sowah c. La Reine, 2013 CCI 297 (CanLII), 2013 DTC 1234, le juge Miller a repris la même thèse, statuant ainsi :

[16]      […] Il ressort clairement de la jurisprudence que ces exigences sont obligatoires et qu’elles doivent être rigoureusement respectées (voir par exemple les affaires Afovia c La Reine, Sklowdowski c La Reine et Plante c Canada).

[17]      Le reçu fourni par l’appelante satisfait-il à toutes les exigences? La réponse est non. Trois de ces exigences ne sont pas remplies. Tout d’abord, le reçu ne contient pas d’énoncé indiquant qu’il s’agit d’un reçu officiel aux fins de l’impôt sur le revenu. Dans la décision Ehiozomwangie c R, la juge Campbell a précisé que l’exigence selon laquelle le reçu devait indiquer qu’il s’agissait d’un reçu officiel aux fins de l’impôt sur le revenu était l’une des exigences obligatoires. Je suis du même avis. Il n’y a pas meilleure garantie pour un contribuable que de voir sur le reçu l’indication qu’il s’agit d’un reçu officiel aux fins de l’impôt sur le revenu. Le fait que le reçu ne satisfait pas à cette simple exigence jette des doutes sérieux sur son authenticité. Il s’agit d’une exigence obligatoire qui n’a pas été satisfaite en l’espèce.

[18]      Ensuite, la date de délivrance du reçu est une autre simple exigence. Aucune date ne figure sur le reçu de Mme Sowah, on y voit seulement l’année (janvier à décembre 2006). Encore une fois, il s’agit d’une exigence obligatoire qui n’a tout simplement pas été satisfaite.

[19]      Enfin, le reçu doit indiquer le lieu ou l’endroit où le reçu a été délivré. Il s’agit d’une exigence distincte de celle de l’adresse de l’organisation ainsi qu’elle est enregistrée auprès du ministre. Dans la présente affaire, bien que nous puissions supposer que l’adresse de l’organisation est la même que celle du lieu où le reçu a été délivré, on ne devrait pas avoir à faire de suppositions. Il y a peut-être plusieurs organisations appelées Jesus Healing Center un peu partout à Toronto. Le reçu doit indiquer clairement le lieu où il a été délivré. Ici, cela n’est pas le cas. Encore une fois, une exigence n’a pas été satisfaite.

[20]      L’appelante n’a donc pas fourni un reçu renfermant les renseignements prescrits et n’a donc pas rempli la deuxième exigence nécessaire pour avoir droit à un crédit pour don de bienfaisance. Par conséquent, l’appel peut être rejeté pour cette raison

[notes de bas de page omises].

[18]        En l’espèce, il y a plusieurs déficiences à l’égard des reçus pour les années d’imposition en question :

a)   le nom de l’organisation tel qu’il est enregistré auprès du ministre n’est pas le même que celui qui figure sur le reçu. Le nom enregistré est « Revival Time Ministries International » alors que le nom qui figure sur le reçu est « Revival Time Ministries »;

b)  le reçu pour l’année 2008 porte une adresse apposée par un timbre au bas du reçu qui donne l’adresse du bénéficiaire comme étant le 415 Aokdale alors que celle inscrite dans l’en-tête du reçu est le 415 Oakdale. Donc, on se demande quelle est la vraie adresse du bénéficiaire;

c)   le lieu ou l’endroit où le reçu a été délivré n’est pas indiqué sur le reçu. Comme indiqué dans l’affaire Sowah, supra, il s’agit d’une exigence distincte de celle de l’adresse de l’organisation ainsi qu’elle est enregistrée auprès du ministre. Bien que nous puissions supposer que l’adresse de l’organisation est le lieu où le reçu a été délivré, nous ne devrions pas avoir à faire des suppositions. Le reçu doit indiquer clairement le lieu où il a été délivré, car l’adresse de l’organisation peut être différente du lieu où le reçu a été délivré. L’organisation en l’espèce a des sites web aux États‑Unis et, donc, il est probable que Revival a plusieurs succursales à travers le Canada et le monde;

d)  aucune date ne figure sur les reçus, on y voit seulement l’année (2007 sur la pièce A-1, et 2008 sur la pièce A-2). L’appelant prétend qu’il a fait des dons chaque mois pendant la période en question et que les montants pouvaient varier d’un mois à l’autre. Il me parait étrange que l’appelant n’ait pas demandé un reçu chaque fois qu’il aurait fait un don, étant donné qu’il s’agissait de dons de 500 $, de 800 $ ou de 900 $ pour chaque paiement. Ces prétendus dons constituaient des montants importants par rapport aux revenus de l’appelant. Il est donc surprenant que l’appelant n’ait pas demandé ni obtenu un reçu chaque fois qu’il aurait fait un don;

[19]        Il s’agit d’exigences nécessaires auxquelles il n’a pas été satisfait. Toutes ces exigences sont obligatoires. Il n’est pas question ici de faute, de responsabilité, de bonne ou de mauvaise foi, ni même de négligence. Il s’agit d’exigences obligatoires prévues par la Loi et le Règlement. En raison de ces déficiences manifestes et évidentes à ces exigences obligatoires, le présent appel doit être rejeté. L’appelant n’a donc pas droit au crédit d’impôt pour don de bienfaisance en vertu du paragraphe 118.1(2) de la Loi.

La preuve des dons

[20]        C’est à l’appelant qu’il incombe d’établir l’existence des dons qu’il prétend avoir faits à Revival. La norme de preuve applicable est celle de la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer que, selon toute vraisemblance, il a fait les dons en question. Les seuls éléments qu’il avance à l’appui de sa thèse consistent en son propre témoignage et les reçus délivrés par Revival. Ceci n’est pas suffisant dans les circonstances.

[21]        L’intimée soutient que l’appelant n’a fait aucun don à Revival. Monsieur Gary Huenemoeder est chef d’équipe de la vérification à la Direction des organismes de bienfaisance de l’Agence du revenu du Canada (ci‑après l’« Agence »). Revival a obtenu son numéro d’enregistrement le 1er juillet 2006. L’Agence a mené une vérification auprès de Revival pour les années 2006, 2007 et 2008. M. Huenemoeder a constaté que Revival a déclaré un revenu dépassant 830 000 $ pour sa première année d’existence, ce qui semblait très élevé pour une première année. M. Huenemoeder a demandé les relevés de comptes bancaires de l’organisme et il a constaté que, d’après les relevés de comptes, l’organisme avait déposé 1,8 million de dollars à la banque. M. Huenemoeder a soupçonné quelque chose de louche. L’Agence a donc demandé la production de documents auprès des banques faisant affaire avec Revival. À la suite de l’examen de ces documents, l’Agence a constaté que seul 3 000 $ avait été déposés aux banques. Donc, tous les documents que l’organisme avait fournis à l’Agence étaient des faux. L’Agence a communiqué avec 920 donateurs, demandant des preuves de paiements des dons, et ces gens ont tous indiqué qu’ils avaient payé en argent comptant et non par chèque ou par traite bancaire. Le pasteur de Revival, M. Daniel Mokwe, avait fourni aux vérificateurs de l’Agence une boite pleine d’enveloppes qu’il prétendait avoir été utilisées par les paroissiens ou les donateurs. Il s’agissait de 1 000 enveloppes pour des dons totalisant approximativement 4 000 000 $. Toutes ces enveloppes étaient numérotées en séquences et on y avait écrit à la main. Cependant, l’écriture sur chaque enveloppe était la même. Pas une de ces enveloppes n’avait été scellée. Tout ceci constituait des indices de fraude. M. Huenemoeder n’a décelé aucun indice d’activités de bienfaisance organisées par Revival. Son enregistrement comme organisme de bienfaisance fut donc révoqué le 8 janvier 2011. M. Daniel Mokwe s’est depuis enfui du Canada. Si jamais M. Mokwe revient au Canada, il fera face à des accusations d’évasion fiscale ou de fraude.

[22]        M. Huenemoeder a pris connaissance du dossier de l’appelant. Il a vérifié les registres et les documents de Revival et il n’a pu établir que l’appelant avait payé les sommes allégués. L’Agence a reçu les relevés du compte bancaire de l’appelant, mais ces relevés ne prouvaient pas que les sommes réclamées avaient été payées ou transférées à Revival.

[23]        De son côté, il est évident que l’appelant n’a pas conservé de registres des dons qu’il a faits en 2007 et 2008, même si les dons qu’il prétend avoir faits représentaient des montants très importants par rapport à ses revenus (approximativement 25 %). Il a dit qu’il donnait de l’argent chaque mois, des fois 800 $ et des fois 900 $. Il mettait l’argent dans une enveloppe qu’il remettait à Revival. Il recevait un reçu à la fin de l'année et il se fiait au reçu pour établir le montant exact qu’il avait donné. Comme il l’a dit : « [C]’est eux qui ont fait le calcul de ce que j’avais donné parce que je sais ce que j’ai donné; des fois 800 $, 500 $ ici, 500 $ ici; ainsi de suite. Et des fois 1 $ et c’est cela. […] » L’appelant n’a pas été en mesure de confirmer exactement quels montants il aurait donnés à l’organisme sans se fier aux reçus. L’appelant a fourni à l’Agence ses relevés de comptes bancaires, mais au procès il a dit que tous ces documents avaient été détruits lors d’une fuite d’eau dans sa résidence. Par ailleurs, il aurait pu obtenir des copies de la banque, ce qu’il n’a pas fait. Étant donné que l’appelant a déclaré avoir fait des dons en espèces importants à Revival, je m’attendais à ce qu’il présente à la Cour des documents démontrant la source de ces fonds. Il a dit qu’il retirait de l’argent de son compte bancaire pour faire des dons à Revival. Il semble probable que ces relevés bancaires auraient comporté des renseignements de nature à confirmer ou à contredire son témoignage. L’appelant n’a présenté aucun chèque, aucun bordereau de retrait par guichet automatique, aucun relevé de dons, ni aucune enveloppe de dons se rapportant aux dons prétendus. Il a peut-être donné un certain montant, mais la Cour ne peut déterminer exactement combien.

[24]        Les reçus en cause constituaient la seule preuve des dons effectués et ces reçus ont été remis par un organisme qui faisait l’objet de vérifications au terme desquelles on a conclu que les livres et les registres comptables de l’organisme étaient des faux. Mis à part les reçus, aucun document ou relevé de compte n’a été produit à l’appui des allégations de l’appelant. L’appelant n’ayant apporté aucune preuve objective pour réfuter l’hypothèse du ministre selon laquelle il n’a pas fait les dons en espèces, celui-ci ne s’est pas acquitté du fardeau qui lui incombait de produire une preuve selon la prépondérance des probabilités. Bien qu’il soit possible que des sommes quelconques aient été versées en espèces, la preuve à l’égard des dons et du montant exact des dons est insuffisante.

Conclusion

[25]        Pour ces motifs, l’appel est rejeté.

 

Signé à Kingston (Ontario), ce 12e jour de mai 2015.

« Rommel G. Masse »

Le juge suppléant Masse


RÉFÉRENCE :

2015 CCI 122

No DE DOSSIER DE LA COUR :

2013-3695(IT)I

INTITULÉ :

KUZI MAPISH c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Hamilton (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 23 février 2015

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :

L’honorable juge suppléant Rommel G. Masse

DATE DU JUGEMENT :

Le 12 mai 2015

COMPARUTIONS :

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocate de l’intimée :

Me Dominique Gallant

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

 

Cabinet :

 

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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