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Dossier : 2014-3391(EI)

ENTRE :

MARK ROBERTS,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

MICHAEL LIBOURKINE,

intervenant.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 5 mai 2015, à Toronto (Ontario).

Devant : L’honorable juge suppléant D.W. Rowe


 Comparutions :

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocat de l’intimé :

Me Leonard Elias

Pour l’intervenant :

L’intervenant lui-même

 

JUGEMENT

L’appel est rejeté, et la décision du ministre du Revenu national datée du 17 juin 2013 relativement à un appel interjeté en vertu de la Loi sur l’assurance‑emploi est confirmée, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

Signé à Sidney (Colombie-Britannique), ce 10e jour de juin 2015.

« D.W. Rowe »

Juge suppléant Rowe

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de septembre 2015.

M.-C. Gervais


Référence : 2015 CCI 142

Date : 20150610

Dossier : 2014-3391(EI)

ENTRE :

MARK ROBERTS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

et

MICHAEL LIBOURKINE,

intervenant.

[traduction française officielle]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge suppléant Rowe

[1]             L’appelant, Mark Roberts (« M. Roberts »), a interjeté appel d’une décision rendue par le ministre du Revenu national (le « ministre ») le 17 juin 2013 en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi »), dans laquelle le ministre a conclu que son emploi auprès de l’intervenant, Michael Libourkine (« M. Libourkine » ou le « payeur »), n’était pas assurable parce que les conditions d’un contrat de louage de services n’étaient pas réunies et que, par conséquent, il n’existait pas de relation employeur‑employé pendant la période pertinente allant du 24 juillet 2011 au 10 septembre 2012.

[2]             Monsieur Roberts a déclaré qu’il avait été embauché par M. Libourkine à la suite d’une entrevue, en juin 2009, et avait fourni ses services jusqu’au 11 septembre 2012 (un jour après la date de la décision rendue par le ministre). M. Roberts a affirmé qu’il avait présenté une réplique à la réponse à l’avis d’appel (la « réplique ») en date du 21 février 2015, dans laquelle il fournissait des renseignements concernant la relation de travail. Il souhaitait utiliser le document dans son témoignage en le lisant textuellement. Il a obtenu la permission de le faire et il a lu la réplique ainsi :

[traduction]

[…] J’ai effectué du travail pour Michael Libourkine et le Toronto Mutual Group dans une relation employeur-employé, sous la direction de Michael Libourkine. Il exerçait un contrôle complet. Il me disait ce que je devais faire et comment le faire. Je n’étais jamais libre de décider comment le travail devait être effectué. Il m’a dit d’utiliser le téléphone de son bureau, ses listes d’appel, sa chaise, son bureau et son local de travail. Il me disait quand travailler et comment effectuer mon travail. Je ne fournissais aucun instrument de travail, je n’étais pas libre de déterminer à quelle heure je commençais à travailler ni la meilleure façon d’effectuer mon travail. J’étais rémunéré selon un taux horaire. Tous les instruments de travail lui appartenaient, et il assumait le risque en cas de perte liée au travail exécuté. Dans notre contrat, je convenais de lui fournir à lui et à TMG des services généraux. Il me supervisait et me donnait des consignes directement. J’avais une relation avec eux pour la prestation de services généraux, je n’étais pas en affaire à mon propre compte. Je ne fournissais pas mon propre matériel pour faire le travail. Ils exerçaient un contrôle complet. Je n’ai pas embauché mes propres aides et je n’étais pas autorisé à le faire. Je n’assumais absolument aucun risque financier, aucune responsabilité en matière d’investissement et de gestion, d’aucune manière. Ma tâche consistait à faire du télémarketing en étant rémunéré par Michael Libourkine et TMG selon un taux horaire. Aucune possibilité de réaliser un profit ne s’offrait à moi. Je n’ai pas négocié les taux horaires. On m’attribuait du travail à des heures particulières, pour des journées particulières et dans des secteurs géographiques donnés. Je ne pouvais pas demander qu’on m’attribue du travail à des moments ou dans des secteurs précis. Je devais travailler un minimum de trois heures par quart, six jours par semaine. On me demandait d’être continuellement disponible pendant mes quarts de travail. Les clients ne pouvaient pas communiquer directement avec moi. Ils devaient appeler la répartitrice. Michael Libourkine me demandait que je l’informe à la fin de chaque quart de travail. On m’a remis des cartes de sécurité d’accès et des clés des locaux. Je devais annuler les rendez-vous que j’avais fixés pour lui lorsque cela ne lui convenait pas d’y aller, et je ne recevais jamais de gratification, seulement ma rémunération horaire, dans ces cas-là. Je faisais partie intégrante de l’organisation pour Michael Libourkine et TMG. Leur travail consistait à rencontrer des clients potentiels, mon travail était de faire du télémarketing pour le régime d’assurance‑hypothécaire avec remboursement garanti de Canada-Vie et d’expliquer que j’appelais de la part de Canada‑Vie (en plus de prendre les arrangements pour eux sous réserve du contrôle par le groupe). Je n’étais pas libre d’offrir mes services à d’autres et je n’assumais pas de risques eu égard aux profits et aux pertes lorsque le travail n’était pas effectué assez rapidement. J’étais tenu d’assister aux réunions des employés et de me conformer aux instructions données à ces occasions. On s’est engagé à me verser un salaire horaire et, plus tard, on m’a versé des gratifications lorsque je fixais des rendez-vous. Je n’ai pas reçu d’avis de licenciement et aucun motif valable ne justifiait le licenciement. J’étais un employé occupant un emploi assurable pendant que je travaillais pour le payeur. Le payeur était associé au Toronto Mutual Group. Il était associé principal et directeur des ventes. Je n’ai jamais effectué mon travail à partir de mon domicile. J’ai toujours travaillé dans les locaux du Toronto Mutual Group, du 22 juin 2009 au 11 septembre 2012. On m’avait autorisé à le faire et j’avais reçu comme directive de le faire. J’ai fourni des services de télémarketing moyennant une rémunération versée par TMG et Michael Libourkine.

MODALITÉS

Je n’ai jamais fourni de services de façon intermittente à TMG ou à Michael Libourkine. J’ai travaillé six jours consécutifs par semaine du 22 juin 2009 au 11 septembre 2012. Je ne déterminais pas mes propres heures de travail, et je n’avais aucune latitude à cet égard. Je ne pouvais pas travailler aux heures qui me convenaient et prendre des congés lorsque je voulais. Je devais informer le payeur si je devais m’absenter du travail. Je devais obtenir l’autorisation du payeur avant de prendre certaines mesures. Je devais me présenter au payeur tous les jours. Je n’étais pas libre d’accepter ou de refuser du travail. Je n’ai pas trouvé moi-même les coordonnées des clients en cherchant dans Internet ou dans des annuaires téléphoniques. Michael Libourkine me fournissant des listes d’appel, et j’étais supervisé pendant mon travail dans leurs locaux. Je devais fournir mes services exclusivement au payeur, qui m’a fourni un bureau, un téléphone et un local de travail du 22 juin 2009 au 11 septembre 2012. Je n’ai jamais, que ce soit au début de mon emploi ou par la suite, fourni un bureau ni un bureau entièrement équipé ni un téléphone cellulaire. Je n’étais pas responsable de l’entretien ni de la réparation des instruments de travail ou du matériel.

J’étais tenu de fournir mes services personnellement. Je ne pouvais pas embaucher d’aides ni de remplaçants. Je n’étais pas chargé de l’embauche et de la rémunération des aides ou des remplaçants. Si je ne fixais aucun rendez-vous, je recevais tout de même une rémunération de 14 $ l’heure. Le payeur versait une gratification en plus de mon salaire horaire seulement lorsqu’il rencontrait un client potentiel (non pas lorsque j’avais fixé un certain nombre de rendez-vous). Je n’étais pas tenu de présenter des factures pour être payé. Les feuilles de temps étaient imprimées sur du papier en-tête de TMG. Je ne décidais pas si le travail devait être refait et je n’avais pas à assumer les coûts connexes. Je n’ai pas supporté de dépenses dans l’exercice de mes fonctions. Le payeur ne me considérait pas comme un travailleur autonome, et moi non plus. Je n’ai jamais travaillé pour un autre courtier d’assurance de TMG et je n’ai jamais fourni de services de télémarketing à TMG à titre d’entrepreneur indépendant. Je n’ai jamais eu une entreprise fournissant des services de disc‑jockey. Suivant mon licenciement par Michael Libourkine et TMG en 2012, j’ai fait imprimer des cartes pour mon passe-temps de disc-jockey qui n’a jamais constitué une entreprise.

MOTIFS INVOQUÉS et RÉPARATION DEMANDÉE

Je déclare que j’étais un assuré qui exerçait un emploi assurable auprès du payeur et qu’il existait un contrat de louage de services entre le payeur et moi-même. Je demande respectueusement que la décision soit annulée et que mon appel soit accueilli.

INTENTION DES PARTIES/DEGRÉ DE CONTRÔLE

Je croyais, comme je l’ai déclaré au cours de l’appel, que j’avais été embauché à titre d’employé pendant la période visée, ainsi que les années antérieures. Je n’étais pas libre d’utiliser mes propres méthodes pour trouver des clients en utilisant des annuaires téléphoniques ou Internet. Je n’établissais pas mon propre horaire et je n’aurais jamais pu effectuer mon travail à partir de mon domicile. J’étais supervisé et je ne pouvais pas utiliser les moyens qui me convenaient pour exécuter mes tâches. Michael Libourkine m’a formé pour le travail. Au cours de ma première année d’emploi, le payeur m’a versé des gratifications en plus de mon salaire horaire lorsque des rendez-vous avec des clients étaient confirmés. J’ai toujours reçu un salaire horaire du 22 juin 2009 au 11 septembre 2012. Je n’avais pas besoin d’un annuaire téléphonique pour effectuer mon travail. Je n’utilisais pas mon téléphone cellulaire ni aucun téléphone m’appartenant au lieu d’affaires du payeur. Je n’aurais pas pu effectuer mon travail d’un autre endroit que le bureau de TMG et utiliser un autre téléphone que les téléphones commerciaux et les lignes commerciales de TMG.

SOUS-TRAITANCE et EMBAUCHE D’AIDES

Je n’occupais pas un poste qui m’autorisait à embaucher des aides et des assistants à ma discrétion. Je n’ai jamais pu décider de mon taux horaire. Le payeur insistait pour que j’exécute spécifiquement le travail et ne permettait pas que d’autres m’aident.

DEGRÉ DE RISQUE FINANCIER

Je n’ai supporté aucune dépense dans l’exécution de mon travail et je touchais un revenu garanti toujours sous la forme d’un salaire horaire. J’étais rémunéré par le payeur et je l’aurais été même si je n’avais pas fixé et confirmé les rendez-vous du payeur avec les clients.

DEGRÉ DE RESPONSABILITÉ EN MATIÈRE D’INVESTISSEMENT ET DE GESTION

Je constituais une partie importante de l’organisation pour TMG et Michael Libourkine. Je travaillais pour eux exclusivement et je n’étais pas autorisé à travailler pour d’autres payeurs, ce que je n’ai pas fait. Je n’avais pas le droit de sous-traiter mes services et je n’étais pas non plus en mesure de générer un profit s’ajoutant à mon revenu. Je ne pouvais pas établir mon propre horaire. Le payeur me versait un salaire calculé en fonction de mes heures de travail et me versait aussi des gratifications pour les rendez-vous confirmés (pour la première année). Au cours des années suivantes, je touchais un salaire horaire, plus des gratifications pour chaque personne que le payeur rencontrait. Le payeur me fournissait tous les renseignements sur les clients, les listes d’appel, etc.

AUTRES FACTEURS PERTINENTS

Il existait un contrat verbal entre les parties, et je n’avais aucune latitude ni occasion de réaliser des profits.

[…]

[3]             Dans un autre témoignage, M. Roberts a déclaré qu’à compter du 24 juillet 2011, les paiements lui étaient versés sous forme de chèques émis par M. Libourkine, alors qu’antérieurement les chèques portaient les noms de M. Libourkine et du Toronto Mutual Group (« TMG »). M. Roberts a aussi expliqué un autre changement dans le mode de paiement. En effet, aucune gratification ne serait payée si M. Libourkine ne rencontrait pas le client potentiel pour lequel Robert avait fixé un rendez-vous. Même s’il n’était pas d’accord, M. Libourkine lui a dit que cela était le nouveau système. M. Roberts a répété que ses services, à ce moment, étaient rémunérés à un taux horaire de 14 $, plus gratifications lorsque les rendez-vous fixés donnaient lieu à des rencontres avec des clients potentiels, et qu’il avait demandé à M. Libourkine de rétablir l’ancienne méthode qui prévoyait le paiement d’une gratification simplement pour les rendez‑vous fixés, même si ceux-ci ne menaient pas à des rencontres entre M. Libourkine et des clients potentiels. M. Roberts a déclaré qu’il avait demandé une augmentation de son salaire horaire à titre de compensation pour le changement. Il a fait valoir qu’il avait travaillé dans le commerce du détail et comme télévendeur et qu’il connaissait les relevés émis par un payeur indiquant le montant gagné et les différentes déductions de la paye brute. Il a affirmé qu’il avait demandé cette information à M. Libourkine, mais ne l’avait pas reçue. M. Roberts a produit (pièce A-1) une photocopie d’un chèque daté du 23 décembre 2011 d’une somme de 720 $ et a invoqué la ligne de note sur le chèque et l’inscription manuscrite, [traduction] « 5 jours + 1 RV + 500 gratification ». Il a dit que la mention de la gratification était incorrecte parce que le montant brut englobait également son droit à une paie de vacances. M. Roberts a déclaré que, pour la période pertinente, il a produit sa déclaration de revenus et a déclaré son revenu en tant que revenu d’emploi. En ce qui a trait au fait qu’il aurait commencé à travailler pour M. Libourkine avant la période pertinente, M. Roberts a déclaré qu’il avait répondu à une annonce publiée par TMG dans un quotidien de Toronto pour un poste en télémarketing. Au départ, M. Roberts croyait que TMG était une société, mais il a ensuite rencontré M. Libourkine qui lui a expliqué qu’il était un associé principal de TMG. M. Roberts a soutenu que, pendant toute la durée de la relation de travail, soit du 20 juin 2009 au 10 septembre 2012, il a fait du télémarketing pour le même produit, notamment le régime d’assurance‑hypothécaire avec remboursement garanti de Canada-Vie, et qu’il se référait à un scénario préparé lors des appels aux clients potentiels. Il travaillait de 18 h à 21 h, du lundi au samedi, ce qui représentait 18 heures par semaine. Il affirmait n’avoir reçu qu’un salaire horaire, plus gratifications, selon le système en place. Il n’a travaillé pour aucune autre entité pendant la période pertinente et n’avait pas travaillé à son propre compte comme télévendeur par le passé, comme l’a supposé le ministre à l’alinéa 10xx) de la réponse à l’avis d’appel (la « réponse »), ni à aucun autre moment. La durée des emplois en télémarketing peut aller de deux semaines à trois mois selon la nature du produit ou service offert. Il avait fourni ses services à 15 ou 20 entreprises, et les retenues habituelles avaient toujours été effectuées sur ses chèques de paie.

[4]             Au moment de contre-interroger M. Roberts, l’avocat de l’intimé a invoqué la ligne de note sur le chèque – pièce A-1 – daté du 23 décembre 2011, en faisant valoir qu’il s’agissait en grande partie d’une gratification de Noël. M. Roberts a répondu que cela était incorrect et que, bien que le montant en sus du salaire pour cinq jours et d’une gratification liée à un rendez-vous ne corresponde pas à la paie de vacances de 4 % calculée en fonction des revenus de l’année, il a tout de même été payé par M. Libourkine et reçu à titre de paie de vacances. L’avocat de l’intimé a mentionné que les revenus de l’appelant pour la période de paie se chiffraient à 220 $, en calculant 10 $ par rendez-vous fixé avec un client potentiel ayant mené à une rencontre. M. Roberts a nié qu’il s’agissait de la base de sa rémunération et a répété qu’il était rémunéré à un taux de 14 $ l’heure en 2011, quoique son salaire initial ait été de seulement 10 $ en 2009 lorsqu’il a commencé à travailler pour M. Libourkine. M. Roberts a soutenu qu’il avait répondu à une annonce dans le Toronto Star et qu’il avait rencontré M. Libourkine, qui lui avait dit que son associé et lui étaient tous deux des travailleurs autonomes. M. Roberts a déclaré qu’il avait droit à ses trois heures normales de paie les jours fériés, même s’il ne travaillait pas. L’avocat de l’intimé a renvoyé à la mention presque à la fin de sa réplique – qu’il a lue dans le cadre de son témoignage – dans laquelle il a déclaré qu’il n’avait jamais effectué de travail à partir de son domicile et qu’il avait travaillé constamment dans les locaux de TMG du 22 juin 2009 au 11 septembre 2012, et qu’il avait été autorisé par M. Libourkine et avait reçu comme directive de le faire. M. Roberts a également fait valoir qu’il avait reçu ses premiers paiements de M. Libourkine et de TMG. M. Roberts a rejeté l’assertion de l’avocat selon laquelle il avait demandé à M. Libourkine s’il pouvait utiliser les locaux de TMG afin d’utiliser ses téléphones pour faire des appels interurbains, au besoin. L’avocat de l’intimé a renvoyé M. Roberts à une liasse de trois documents : deux portaient la mention [traduction] « facture » dans le coin supérieur droit – et le troisième était la photocopie d’un chèque de 420 $ tiré sur le compte de M. Libourkine, en date du 2 juillet 2012. (La liasse de trois documents a été produite à des fins d’identification seulement). M. Roberts a reconnu qu’il avait inscrit son nom sur la ligne du coin supérieur gauche de la première facture correspondant à la période du 21 juin 2012 au 23 juin 2012, inclusivement, mais que le mot imprimé [traduction] « facture » n’était pas sur le formulaire à ce moment‑là. En ce qui concerne la facture à la deuxième page de la liasse, M. Roberts a convenu que l’inscription de son nom sur la ligne [traduction] « ressemblait » à son écriture, mais qu’il manquait la colonne intitulée [traduction] « heures de travail » et que la facture qu’il avait vue, et sur laquelle il avait probablement inscrit son nom, avait été imprimée sur du papier en-tête de TMG. L’avocat de l’intimé a renvoyé M. Roberts à l’avis d’appel et à l’écriture se trouvant sur celui-ci en laissant entendre qu’elle correspondait à celle se trouvant sur les deux factures susmentionnées. M. Roberts a soutenu que l’inscription des jours de travail effectués du 25 juin au 29 juin 2012 (deuxième page de la liasse) – faisant état de [traduction] « 30 rendez-vous x 14 = 420 » n’avait pas été entièrement écrite par lui, même s’il a reconnu avoir écrit les mots [traduction] « 30 rendez‑vous », mais non le calcul suivant « x 14 = 420 ». M. Roberts a expliqué que, pendant cette période de paie particulière, il avait effectué 24 heures de travail et avait fixé six rendez-vous ayant mené à des rencontres avec des clients potentiels de M. Libourkine et que le paiement de 420 $ représentait la somme de son salaire au taux horaire de 14 $, plus les gratifications. M. Roberts a déclaré qu’au cours de sa relation de travail avec M. Libourkine, il avait assisté à une seule réunion des employés au bureau de TMG à laquelle Andy Zwolinski (« M. Zwolinski ») était présent, mais qu’il avait rencontré M. Libourkine à plusieurs reprises. M. Roberts a répété qu’il avait demandé à M. Libourkine ses feuillets T-4, mais ne les avait pas reçus. Il a cependant continué de travailler parce qu’il avait besoin d’argent, et il a par la suite signalé l’absence de feuillets T-4 à Service Canada. L’appelant a soutenu que, avant sa relation de travail avec le payeur, lorsqu’il fournissait des services de télémarketing, il recevait toujours des feuillets T-4. Il a nié l’assertion de l’avocat de l’intimé selon laquelle on ne lui avait jamais fourni un scénario à utiliser lors d’appels concernant le produit de Canada-Vie offert par l’entremise de M. Libourkine, et il a déclaré que les télévendeurs sont toujours tenus de suivre un scénario lorsqu’ils expliquent le produit dont ils font la promotion. L’avocat de l’intimé a renvoyé à une photocopie de la page couverture d’une brochure décrivant les services et produits offerts par TMG. M. Roberts a admis qu’il avait vu ce document à la réception du bureau, mais il n’avait jamais reçu une copie directement. Il a affirmé qu’on lui avait remis un scénario dactylographié qu’il devait utiliser lors des appels, ainsi qu’une liste de vérification à suivre au moment de fixer un rendez-vous. Lorsqu’il faisait des appels à partir des locaux de TMG, de 18 h à 21 h, il voyait souvent M. Zwolinski. M. Roberts a affirmé que M. Libourkine et lui travaillaient parfois dans le même petit local de travail – contenant deux bureaux – et qu’ils faisaient beaucoup de bruit lorsqu’ils étaient tous les deux au téléphone, parce que la superficie complète des locaux de travail de TMG n’était pas très grande, peut-être deux fois la taille de la salle d’audience. M. Roberts a déclaré qu’il n’avait jamais travaillé à un poste de travail modulaire, parce qu’il y aurait eu trop de distractions, et qu’il avait dit à M. Libourkine qu’il lui fallait un environnement plus tranquille. M. Roberts a déclaré que le payeur lui avait demandé de travailler seulement de 18 h à 21 h et que, même s’il avait demandé de faire des heures supplémentaires, il n’avait jamais été autorisé à en faire. Pendant la période pertinente ou peut-être avant, TMG a déménagé dans d’autres locaux du même immeuble. M. Roberts a affirmé qu’il utilisait un téléphone du bureau de TMG pour faire des appels interurbains à Oshawa, à Barrie et à London ou à autres endroits à l’extérieur de la région du Grand Toronto. Il utilisait les numéros lui étant fournis sur une liste d’appel et n’utilisait pas son téléphone cellulaire personnel parce que son forfait limitait l’utilisation entre 8 h et 20 h et que les minutes en sus étaient facturées à 50 cents la minute, ce qui était très cher pour son revenu. M. Roberts a déclaré que M. Libourkine l’informait lorsqu’un rendez-vous avait été respecté, et que la gratification en vigueur à ce moment lui était payée. M. Roberts a affirmé que M. Zwolinski lui a dit spécifiquement de ne pas appeler les personnes s’étant plaintes de recevoir un appel, et il a répété que [traduction] « naturellement il existait des listes d’appel » fournies par le payeur et que le ministre s’était fondé sur cette hypothèse à l’alinéa 10x) de la réponse. Si un client potentiel souhaitait donner suite à un appel, on lui donnait un numéro auquel répondait Sandy, une réceptionniste qui, selon lui, agissait comme répartitrice. À l’occasion, une réponse était laissée par messagerie vocale.

[5]             Monsieur Libourkine a contre-interrogé M. Roberts, et il a invoqué son témoignage à l’audience devant la Commission des relations de travail de l’Ontario ayant mené à une décision, en date du 6 mars 2015. À cette audience, M. Roberts avait déclaré qu’il avait droit à 1 336 $ à titre de vacances impayées, ce qui comprenait la rémunération pour les jours fériés. M. Roberts a répondu qu’il voulait dire que le montant impayé correspondait au solde de la paie de vacances auquel il avait droit pour la période complète de trois ans depuis le début de sa relation de travail en 2009 et qu’il avait reçu occasionnellement des montants partiels imputables à la paie de vacances. M. Libourkine a demandé à M. Roberts s’il pouvait produire un chèque ou un autre élément de preuve pendant cette période – ce qui comprend la période pertinente – indiquant [traduction] « paie de vacances ». M. Roberts a convenu que cette inscription n’apparaissait sur aucun de ses chèques. M. Libourkine a renvoyé aux deux factures qui indiquaient huit jours de travail pour un total de 24 heures, ce qui, à un taux horaire de 14 $ – comme il a été allégué – représenterait 336 $, alors que le chèque était de 420 $. M. Libourkine a expliqué à M. Roberts que, si la différence était attribuable à la rémunération supplémentaire pour les rendez-vous fixés et respectés, cela équivaudrait à 8,4 rendez-vous à 10 $ chacun, ce qui n’était pas logique. M. Roberts a répété qu’il devait utiliser les lignes téléphoniques de TMG pour faire des appels interurbains, qu’il y avait deux bureaux dans le local de travail de M. Libourkine et qu’il y avait travaillé pour éviter les distractions causées par les appels des autres télévendeurs de TMG ou leurs conversations entre eux.

[6]             L’avocat de l’intimé a mentionné que l’appelant avait déposé des déclarations de revenus à titre d’employé pendant la période pertinente, et non à titre de travailleur autonome.

[7]             L’appelant a clos sa preuve, sous réserve de réfutation, si l’autorisation est accordée.

[8]             Monsieur Libourkine a été appelé à témoigner par l’avocat de l’intimé. M. Libourkine a déclaré qu’il résidait à Toronto, qu’il était un vendeur et qu’il était dans les affaires depuis 15 ans. Il avait une relation d’affaires avec TMG et exerçait ses activités à titre de courtier en recourant à différentes sources pour trouver des clients potentiels pour différents produits du secteur de l’assurance (p. ex., REER, FERR, assurance-médicale et autres régimes d’assurance maladie et de soins de longue durée). Une des méthodes de sollicitation est le télémarketing. Pour embaucher des télévendeurs, il a placé une annonce sur Kijiji – un site Web sur Internet – et non dans le quotidien Toronto Star, comme le prétendait M. Roberts. M. Libourkine a déclaré qu’il a reçu de nombreuses réponses à l’offre d’emploi annoncé sur Kijiji, y compris une de M. Roberts, qu’il a interviewé. Lors de leur discussion, il s’est rendu compte que M. Roberts avait travaillé comme télévendeur pour un ami qui avait été courtier pour la compagnie d’assurance Clarica. M. Libourkine a par la suite appelé cette personne pour obtenir une référence. M. Libourkine a déclaré que, selon la pratique habituelle dans le secteur de l’assurance, différents produits et services sont offerts par l’entremise d’un courtier et le télévendeur est rémunéré seulement en fonction des rendez-vous qu’il fixe avec les personnes qui sont intéressées. Selon l’accord avec M. Roberts, ce dernier devait utiliser le téléphone pour solliciter des clients potentiels qui étaient disposés à rencontrer M. Libourkine ou – au besoin – un autre courtier travaillant au bureau de TMG. M. Libourkine disposait d’un droit de premier refus à l’égard des clients potentiels sollicités par M. Roberts, et il pouvait transmettre le nom d’un ou de plusieurs de ces clients à un autre courtier en suivant une liste administrée par TMG. Si un autre courtier de TMG rencontrait le client potentiel, M. Roberts était tout de même rémunéré pour le rendez-vous fixé par M. Libourkine, qui partageait la commission avec son remplaçant, en cas de vente. M. Libourkine estimait qu’il ne serait pas logique sur le plan économique de rémunérer un télévendeur selon un taux horaire, parce que le revenu généré par un courtier dépend des rendez-vous fixés et des rencontres subséquentes avec des clients potentiels pouvant donner lieu à la vente d’un produit ou d’un service pour laquelle le courtier recevra une commission. M. Libourkine a déclaré que, selon son expérience, les télévendeurs qui fournissaient des services aux courtiers dans le secteur de l’assurance travaillent à partir de leur domicile ou d’un autre endroit, mais M. Roberts souhaitait travailler chez TMG parce qu’il disait que son domicile ne se prêtait pas bien aux activités commerciales. M. Libourkine a déclaré qu’il avait transmis cette demande à M. Zwolinski, et que celui-ci avait donné son approbation. En ce qui concerne l’allégation de M. Roberts selon laquelle il travaillait à partir d’un bureau dans le local de travail de M. Libourkine, ce dernier a affirmé que cela était incorrect. À l’exception du gérant de l’immeuble qui y avait accès en cas d’urgence, personne ne pouvait entrer dans ce local de travail en raison des exigences relatives aux permis, à la réglementation et de cautionnement, et que la porte était verrouillée par M. Libourkine même s’il sortait pour une courte période pour se rendre dans un autre local de TMG ou ailleurs dans l’immeuble. Les classeurs étaient remplis de renseignements extrêmement confidentiels concernant les titulaires de polices et leurs familles. M. Libourkine a affirmé qu’il n’y avait jamais eu un deuxième bureau dans son local de travail, mais qu’il y avait deux bureaux dans un autre local de TMG. Les heures auxquelles M. Roberts faisait ses appels et le nombre d’heures qu’il travaillait importaient peu à M. Libourkine. La réussite des prises de contact était une [traduction] « question de mathématique » parce qu’un plus grand nombre d’appels permettra de fixer un plus grand nombre de rendez-vous ayant le potentiel de générer des ventes. M. Libourkine a affirmé qu’il était arrivé que M. Roberts s’absente pendant des périodes de deux semaines ou plus. Selon l’expérience de M. Libourkine, les télévendeurs fournissent des services aux courtiers en utilisant différentes méthodes, notamment en faisant des recherches sur Google ou dans les pages blanches d’un annuaire téléphonique. Il ne tenterait pas de vendre des produits ou des services aux personnes vivant en région périphérique, comme Barrie ou London, parce que cela ne serait pas avantageux en raison du déplacement et du temps requis par rapport à la commission obtenue. M. Libourkine a déclaré qu’il ne savait pas comment M. Roberts trouvait ses clients potentiels et qu’il ne lui fournissait pas de listes d’appel, car il ne disposait pas de tels documents, pas plus que TMG. Aucun scénario n’était remis à M. Roberts ni à aucun autre télévendeur fournissant des services aux courtiers travaillant aux installations de TMG, puisque la conversation avec le client potentiel dictait le produit qu’il pouvait se procurer, qu’il s’agisse d’une police d’assurance études pour jeunes enfants ou d’une assurance maladie ou soins de longue durée pour aîné. M. Roberts avait obtenu le poste de télévendeur en raison de son expérience. M. Libourkine a identifié la photocopie – pièce R-1 – de la brochure de TMG mentionnée précédemment lors du contre‑interrogatoire de M. Roberts – décrivant les produits et les services vendus pour différentes compagnies d’assurance par l’entremise des courtiers. M. Libourkine a soutenu que, pendant une certaine période, le nom TMG et son propre nom étaient imprimés sur les chèques payables à M. Roberts ou à d’autres fins commerciales, mais que le compte était exclusivement à son nom. TMG appartient à M. Zwolinski, et celui-ci loue les locaux aux courtiers, qui paient des frais pour leurs locaux de travail et d’autres services. En ce qui concerne la liasse de documents, notamment les deux factures mentionnées précédemment lors du contre-interrogatoire de M. Roberts, M. Libourkine a affirmé qu’il s’agissait de factures qu’il avait reçues de M. Roberts, qu’elles n’avaient pas été modifiées et que l’écriture était celle de l’appelant. La liasse de trois documents a été déposée en tant que pièce R‑2. M. Libourkine a expliqué qu’il multipliait la somme des rendez-vous confirmés par 14 pour déterminer la rémunération payable à M. Roberts. M. Roberts devait appeler le client potentiel le jour précédant le rendez-vous pour le confirmer, et au moins 90 % du temps la rencontre avait lieu comme prévu. Dans les cas où la rencontre avec le client n’avait pas lieu, M. Roberts ne touchait pas les 14 $, mais il pouvait fixer un nouveau rendez-vous et recevoir éventuellement un paiement si la rencontre avait lieu. M. Libourkine se souvenait de quelques occasions – moins de 10 % du total – où M. Roberts avait été payé pour un rendez-vous manqué et que le montant avait ensuite été déduit du paiement pour une période de paie subséquente. M. Libourkine a déclaré qu’il n’avait jamais utilisé une facture de TMG parce que les chèques émis au nom de M. Roberts – et encaissés par lui – permettaient à son comptable de faire le suivi de ses dépenses d’entreprise. En ce qui a trait au chèque daté du 23 décembre 2011 – pièce A-1 – M. Libourkine a expliqué que M. Roberts n’avait pas gagné beaucoup d’argent pendant ce mois et, comme Noël était dans deux jours, le montant payé incluait une gratification n’étant fondée sur aucune paie de vacances ni sur aucun autre montant auquel il avait droit, que la structure de la paie était demeurée la même pendant toute la période – depuis juin 2009 – et que M. Roberts avait fourni ses services de télévendeur, ce qui n’avait jamais compris de paie de vacances ou de paie pour jours fériés. Bien que la rémunération liée aux rendez-vous fixés soit passée de 10 $ à 14 $ au fil des années, aucune autre rétribution n’était versée. Quatre ou cinq autres télévendeurs travaillant au bureau de TMG avaient des relations de travail de longue date avec différents courtiers exerçant leurs activités dans le cadre du modèle opérationnel de TMG. Il s’agissait de personnes plus âgées qui travaillaient occasionnellement et gagnaient de 20 $ à 50 $ par semaine dans des circonstances qui cadraient davantage avec une activité sociale. M. Libourkine a affirmé que, selon son expérience, même lorsque les services d’une entreprise de télémarketing sont retenus, le paiement est calculé en fonction des rendez-vous confirmés. TMG n’avait ni réceptionniste ni répartitrice, et M. Roberts fournissait aux clients potentiels le numéro de téléphone cellulaire de M. Libourkine, au besoin. TMG avait un site Web que les personnes intéressées pouvaient consulter.

[9]             Monsieur Libourkine a été contre-interrogé par M. Roberts. Il a nié avoir fourni les clés de son local de travail à M. Roberts, mais a toutefois reconnu qu’une carte d’accès lui avait été remise pour lui permettre de se rendre au 9e étage où étaient situés les locaux de TMG. L’annonce pour obtenir les services d’un télévendeur n’avait pas été placée dans le Toronto Star en raison du coût et parce que le service offert sur Kijiji était gratuit. M. Libourkine a nié avoir fourni une liste d’appel à M. Roberts. Il avait cependant suggéré à M. Roberts de solliciter des clients résidant dans les secteurs à proximité du domicile de M. Libourkine, par souci de commodité et pour réduire les frais et le temps de déplacement par rapport au revenu pouvant être généré par la vente d’un produit ou d’un service particulier. Il fallait parfois rendre visite trois ou quatre fois à un client avant de conclure une vente.

[10]        Andy Zwolinski a été appelé à témoigner par l’avocat de l’intimé. Il a déclaré être l’actionnaire unique de la société The Mutual Group Inc. appelée ci‑après TMG. Tous les courtiers ayant une relation de travail avec TMG sont des courtiers indépendants dont les activités consistent à vendre des produits et des services fournis par différentes compagnies d’assurance. Leurs revenus proviennent de commissions sur les primes et de gratifications, s’il y a lieu. Les courtiers obtiennent des clients de différentes façons, notamment en faisant des visites personnelles aux entreprises clientes et en recourant aux services de télévendeurs. TMG n’a pas de personnel, et la personne mentionnée précédemment, Sandy, n’était pas une employée, mais travaillait comme télévendeuse et a fourni des services à trois courtiers pendant plusieurs années. Un administrateur externe indépendant fournissait tous les services administratifs pour TMG. M. Zwolinski a déclaré qu’il avait informé les courtiers qu’il souhaitait rencontrer les télévendeurs avant leur embauche, ce qu’il aurait fait avant que M. Libourkine recoure aux services de M. Roberts. Lors de cette rencontre, il aurait fourni à M. Roberts la brochure décrivant les produits et les services offerts par l’entremise des courtiers associés à TMG. M. Zwolinski a affirmé qu’il savait que M. Roberts avait travaillé – à un certain moment entre 2002 et 2004 – comme télévendeur pour un courtier qui vendait les produits de Clarica. Les télévendeurs qui travaillaient dans les locaux de TMG n’avaient pas de scénarios à suivre, et la seule suggestion qu’il avait faite aux courtiers était de demander aux télévendeurs de ne pas appeler après 21 h ou les fins de semaine, mais les courtiers qui louaient des locaux de TMG étaient indépendants et pouvaient choisir le mode de fonctionnement qui leur convenait. M. Zwolinski a déclaré qu’il était logique de payer les télévendeurs en fonction des rendez-vous ayant eu lieu, puisque les courtiers ont alors la possibilité de faire une vente. Il connaît de 80 à 90 courtiers, et 10 % d’entre eux représentent 90 % des activités dans le secteur et plusieurs travaillent à partir de leur domicile. M. Zwolinski a confirmé qu’il avait permis à M. Roberts d’utiliser un poste de travail modulaire vacant chez TMG pour faire ses appels de 18 h à 21 h, mais qu’il n’était pas souvent présent quand M. Roberts travaillait parce que son fils pratiquait une activité sportive et que cela occupait beaucoup de son temps en soirée. M. Zwolinski a confirmé que des protocoles stricts de sécurité sont appliqués en ce qui concerne les locaux de travail des courtiers et que, même si aucune supervision directe n’est exercée, il incombe toujours à une personne qui travaille dans les locaux de TMG de verrouiller les lieux et de s’assurer que le local de travail de chaque courtier est verrouillé. M. Zwolinski a affirmé qu’au cours de ses 31 années de carrière dans le secteur de l’assurance, il n’a jamais connu de télévendeur qui fournissait des services à un courtier en tant qu’employé.

[11]        Lors du contre-interrogatoire par M. Roberts, M. Zwolinski a répété qu’il n’avait aucune raison de donner des directives aux courtiers relativement aux télévendeurs, et qu’il n’a certes pas donné de telles directives.

[12]        L’avocat de l’intimé a fait savoir que l’intimé ne s’était pas fié à l’hypothèse, formulée à l’alinéa 10hh) de la réponse, selon laquelle l’appelant touchait une rémunération de 14 $ l’heure, et que cette hypothèse avait été incorporée en fonction de renseignements erronés reçus plus tôt dans la procédure. L’avocat a fait savoir que la preuve de l’intimé était close.

[13]        Monsieur Roberts a été autorisé à témoigner en contre-preuve et a répété que M. Libourkine lui avait fourni les clés de son local de travail privé, que la pratique habituelle dans le domaine du télémarketing est de verser un salaire horaire et qu’il avait été rémunéré de cette façon lorsqu’il avait fourni des services au courtier associé à Clarica. Il a nié avoir travaillé à partir de son domicile et a soutenu avoir travaillé seulement à partir des installations de TMG depuis qu’il avait commencé à fournir des services de télémarketing à M. Libourkine en 2009.

[14]        L’appelant a clos sa preuve.

[15]        L’appelant a fait valoir que sa preuve était claire et qu’elle étayait sa prétention selon laquelle il avait été un employé de M. Libourkine pendant la période pertinente et avant. Il a soutenu qu’il n’avait pas agi à titre d’entrepreneur indépendant et qu’il avait déclaré des revenus d’emploi pendant les années d’imposition correspondant à la période pertinente.

[16]        L’avocat de l’intimé a prétendu que la preuve produite pour le compte de l’intimé avait démontré l’absence de contrôle et de supervision, puisque M. Libourkine ne se souciait que du résultat, c’est-à-dire une rencontre fructueuse avec un client potentiel suivant la confirmation d’un rendez-vous fixé par M. Roberts. L’avocat a reconnu qu’aucun instrument de travail important n’était fourni ou nécessaire, à part un téléphone, et que M. Roberts avait demandé la permission d’utiliser les locaux et les lignes téléphoniques de TMG. En ce qui concerne la possibilité de réaliser des gains, le revenu gagné par l’appelant était directement relié à ses efforts et à la méthode choisie par lui pour faire assez d’appels pour fixer des rendez-vous de sorte que M. Libourkine, en tant que courtier, ait la possibilité de conclure une vente et d’en tirer des revenus. L’avocat a soutenu que M. Roberts connaissait la nature des services qu’il fournissait et qu’il le faisait en tant qu’entrepreneur indépendant, en faisant appel à ses propres compétences et à sa propre expérience. En ce qui concerne l’écriture sur la facture – page 2 de la pièce A-2 – il est évident que les parties manuscrites et la mention [traduction] « 30 rendez-vous x 14 = 420 » avaient été écrites par l’appelant, comme en témoigne la comparaison avec le contenu de son avis d’appel. L’avocat a fait valoir que la preuve produite par l’appelant n’avait pas démontré que la décision du ministre était incorrecte et que la décision devrait être confirmée.

[17]        La définition pertinente, aux fins du présent appel, de l’emploi assurable sous le régime de la Loi est énoncée à l’alinéa 5(1)a) de cette loi, qui est ainsi libellé :

5.(1) Sens de « emploi assurable » – Sous réserve du paragraphe (2), est un emploi assurable :

a) l’emploi exercé au Canada pour un ou plusieurs employeurs, aux termes d’un contrat de louage de services ou d’apprentissage exprès ou tacite, écrit ou verbal, que l’employé reçoive sa rémunération de l’employeur ou d’une autre personne et que la rémunération soit calculée soit au temps ou aux pièces, soit en partie au temps et en partie aux pièces, soit de toute autre manière;

[Non souligné dans l’original.]

[18]        J’ai souligné ce passage parce que, bien que cette question n’ait pas été soulevée dans le cadre du présent appel, les deux parties à une relation de travail ont souvent la conviction erronée que la rétribution à la commission, à la pièce ou autre, ce qui comprend les gratifications, conférera, sans plus, le statut d’entrepreneur indépendant au fournisseur de service.

[19]        Dans l’arrêt 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., 2001 CSC 59, [2001] 2 RCS 983 (« Sagaz »), la Cour suprême du Canada était saisie d’une affaire de responsabilité du fait d’autrui; en examinant diverses questions pertinentes, la Cour suprême a également eu à se demander ce qu’est un entrepreneur indépendant. Le juge Major a prononcé le jugement de la Cour; il a examiné l’évolution de la jurisprudence concernant la portée de la différence entre un employé et un entrepreneur indépendant au regard de la responsabilité du fait d’autrui. Après s’être reporté aux motifs rendus par le juge MacGuigan de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Wiebe Door Services Ltd. c. Ministre du Revenu national, [1986] 3 CF 553, et à la mention qui y était faite du critère d’organisation énoncé par lord Denning, ainsi qu’à la synthèse faite par le juge Cooke dans la décision Market Investigations Ltd. v. Minister of Social Security, [1968] 3 All E.R. 732, le juge Major s’est exprimé en ces termes aux paragraphes 47 et 48 des motifs de son jugement :

47.       Bien qu’aucun critère universel ne permette de déterminer si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant, je conviens avec le juge MacGuigan que la démarche suivie par le juge Cooke dans la décision Market Investigations, précitée, est convaincante. La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte. Pour répondre à cette question, il faut toujours prendre en considération le degré de contrôle que l’employeur exerce sur les activités du travailleur. Cependant, il faut aussi se demander, notamment, si le travailleur fournit son propre outillage, s’il engage lui-même ses assistants, quelle est l’étendue de ses risques financiers, jusqu’à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion et jusqu’à quel point il peut tirer profit de l’exécution de ses tâches.

48.       Ces facteurs, il est bon de le répéter, ne sont pas exhaustifs et il n’y a pas de manière préétablie de les appliquer. Leur importance relative respective dépend des circonstances et des faits particuliers de l’affaire.

[20]        Dans l’affaire 1392644 Ontario Inc. s/n Connor Homes c. Canada (Ministre du revenu national, MRN), 2013 CAF 85, [2013] ACF no 327 (QL) (« Connor Homes »), la Cour d’appel fédérale s’est penchée sur la façon dont l’analyse devrait être faite, c’est-à-dire qu’il faut déterminer quelle est l’intention des parties avant de procéder à l’analyse énoncée dans les arrêts Wiebe et Sagaz. La Cour d’appel déclare ce qui suit pour expliquer comment effectuer l’analyse :

38.       C’est pourquoi Wolf et Royal Winnipeg Ballet exposent une méthode en deux étapes pour l’examen de la question centrale, telle que l’ont définie les arrêts Sagaz et Wiebe Door, qui est d’établir si l’intéressé assure, ou non, les services en tant que personne travaillant à son compte.

39.       La première étape consiste à établir l’intention subjective de chacune des parties à la relation. On peut le faire soit d’après le contrat écrit qu’elles ont passé, soit d’après le comportement effectif de chacune d’elles, par exemple en examinant les factures des services rendus, et les points de savoir si la personne physique intéressée s’est enregistrée aux fins de la TPS et produit des déclarations d’impôt en tant que travailleur autonome.

40.       La seconde étape consiste à établir si la réalité objective confirme l’intention subjective des parties. Comme le rappelait la juge Sharlow au paragraphe 9 de l’arrêt TBT Personnel  Services Inc. c. Canada, 2011 CAF 256, 422 N.R. 366, « il est également nécessaire d’examiner les facteurs exposés dans Wiebe Door afin de déterminer si les faits concordent avec l’intention déclarée des parties ». Autrement dit, l’intention subjective des parties ne peut l’emporter sur la réalité de la relation telle qu’établie par les faits objectifs. À cette seconde étape, on peut aussi prendre en considération l’intention des parties, ainsi que les modalités du contrat, puisqu’elles influent sur leurs rapports. Ainsi qu’il est expliqué au paragraphe 64 de l’arrêt Royal Winnipeg Ballet, les facteurs applicables doivent être examinés « à la lumière de » l’intention des parties. Cela dit, cependant, la seconde étape est une analyse des faits pertinents aux fins d’établir si le critère des arrêts Wiebe Door et de Sagaz est, ou non, rempli, c’est‑à‑dire si la relation qu’ont nouée les parties est, sur le plan juridique, une relation de client à entrepreneur indépendant ou d’employeur à employé.

[21]        Dans le présent appel, il est évident que ni M. Roberts ni M. Libourkine n’ont discuté du statut qui devrait être accordé à la prestation des services par M. Roberts. D’une part, M. Libourkine a déclaré qu’il était manifeste, non seulement pour lui, mais également pour M. Roberts, que la nature du service fourni dans le contexte du secteur de l’assurance faisait en sorte que la rémunération était calculée en fonction des résultats, notamment de prises de contact menant à des rencontres entre des clients potentiels et M. Libourkine. Selon son interprétation, M. Roberts – en tant que télévendeur d’expérience en général et plus particulièrement en tant que télévendeur ayant fourni ses services à Clarica, une compagnie d’assurance de Toronto – savait qu’il était libre d’utiliser les méthodes de son choix et de travailler aux heures qui lui convenaient et selon les conditions qui lui semblaient appropriées pour générer un revenu. M. Libourkine n’a jamais eu l’intention d’embaucher M. Roberts en tant qu’employé. D’autre part, M. Roberts a soutenu qu’il avait de l’expérience antérieure dans le secteur du commerce de détail et à titre de télévendeur et que, même si certains emplois en télémarketing ne duraient que trois semaines, il avait toujours eu le statut d’employé et avait reçu des chèques à titre de paiement avec les renseignements concernant les déductions s’appliquant au montant brut de ses revenus. Il n’y avait pas de contrat écrit entre les parties ni d’intention subjective de la part de M. Libourkine. Par ailleurs, la seule mesure prise par M. Roberts allant dans le sens de la prétendue intention à cet égard a été de déposer, bien plus tard, une déclaration de revenus fondée sur des revenus d’emploi calculés en fonction de la rémunération reçue de M. Libourkine pour cette année d’imposition.

[22]        Conformément à l’arrêt Sagaz, je me livre à l’analyse suivante.

Niveau de contrôle

[23]        Pour parvenir à une décision relativement à ce facteur, il faut se reporter à la preuve produite par M. Roberts et M. Libourkine et, en partie, à celle de M. Zwolinski pour démontrer les contradictions sur plusieurs points importants.

[24]        Monsieur Roberts a adhéré au contenu de sa réplique en la lisant lors de son interrogatoire principal et a fait, lors de témoignages subséquents, notamment lors du contre-interrogatoire mené par l’avocat de l’intimé et par M. Libourkine, les affirmations suivantes :

1.    il a répondu à une annonce de recherche de télévendeurs dans le Toronto Star;

2.    au moment de son embauche par M. Libourkine et au début de son emploi le 22 juin 2009, il a été tenu de faire des quarts de travail et faisait partie intégrante de l’entreprise de M. Libourkine, ainsi que de TMG;

3.    il devait assister aux réunions des employés et se conformer aux instructions données lors de ces réunions;

4.    M. Libourkine et M. Zwolinski se sont engagés au départ à lui payer un taux horaire et, plus tard dans la relation de travail, ils ont pris comme arrangement de lui verser des gratifications fondées sur les rendez-vous fixés, mais M. Libourkine a ensuite révisé unilatéralement l’arrangement de sorte à payer seulement pour les rendez-vous qui menaient à des rencontres avec des clients potentiels;

5.    M. Libourkine lui a dit qu’il était associé principal de TMG et directeur des ventes;

6.    il a toujours travaillé dans les locaux de TMG, du 22 juin 2009 au 11 septembre 2012, sa dernière journée réelle de travail avant la cessation de sa relation de travail, au lieu du 10 septembre, comme il est énoncé dans la décision du ministre;

7.    il a été payé au moyen de chèques émis conjointement par M. Libourkine et TMG;

8.    il a toujours travaillé six jours par semaine pendant la durée de son emploi en télémarketing pour M. Libourkine;

9.    il devait se présenter tous les jours à M. Libourkine, qui lui fournissait des listes d’appel;

10.  il était rémunéré selon un taux horaire en tout temps, et ce taux est passé de 10 $ à 14 $ dans les derniers temps de son emploi, et il touchait au départ une gratification pour chaque rendez-vous fixé;

11.  il a présenté des feuilles de temps sur le papier en-tête de TMG et a reçu des paiements en conséquence sans avoir à présenter de factures;

12.  il ne pouvait pas déterminer son propre horaire de travail et n’a jamais travaillé à partir de son domicile;

13.  il n’utilisait pas un téléphone cellulaire, comme il l’a déclaré en adhérant à cette partie de sa réplique; il a par la suite admis qu’il en avait un, mais que le forfait ne se prêtait pas au travail de télémarketing puisque le nombre de minutes était limité et que les frais pour le temps en sus étaient élevés par rapport au revenu éventuellement généré;

14.  il n’a pas écrit les chiffres utilisés dans le calcul de la facture à la pièce R-2;

15.  on lui a fourni les clés du local de travail de M. Libourkine, et il travaillait à un des deux bureaux de ce local, mais il arrivait que le bruit le dérange parce qu’ils parlaient tous les deux au téléphone en même temps avec des clients potentiels;

16.  il avait toujours droit à une paie de vacances et à une rémunération pour le travail effectué les jours fériés, mais il n’a reçu que des paiements partiels pendant la période allant du 22 juin 2009 à sa dernière journée de travail, le 11 septembre 2012;

17.  M. Libourkine lui fournissait une liste d’appel et un scénario qu’il devait suivre pour faire ses appels;

18.  lorsque des clients potentiels appelaient au bureau de TMG, Sandy, la réceptionniste/répartitrice, répondait et acheminait l’appel à M. Libourkine ou à un autre courtier de TMG;

19.  il devait utiliser les lignes téléphoniques de TMG pour faire des appels interurbains pour le compte de M. Libourkine;

20.  pendant toute sa carrière de télévendeur pour le compte de différentes entreprises – notamment lorsqu’il a fourni des services à un courtier associé à Clarica 10 ou 12 ans auparavant – il n’avait jamais été traité autrement que comme un employé pour lequel les déductions habituelles étaient faites sur le chèque de paie, cette paie étant toujours calculée selon un taux horaire.

[25]        Monsieur Libourkine a déclaré ce qui suit à l’égard de ces points :

1.    il n’a pas placé d’annonce dans le Toronto Star en raison du coût demandé, mais a utilisé le site Web Kijiji, qui est gratuit;

2.    M. Roberts n’était pas tenu de travailler selon des quarts de travail particuliers et ne faisait pas partie intégrante de son entreprise de courtage ou de l’entreprise de TMG;

3.    il n’y a pas eu de réunions des employés, mais M. Zwolinski a rencontré M. Roberts avant que M. Libourkine l’embauche pour travailler comme télévendeur;

4.    pendant toute la durée de la relation de travail, il n’y a jamais eu un accord selon lequel M. Roberts devait être payé selon un taux horaire, étant donné que cela ne serait pas faisable ou pratique sur le plan économique et qu’il ne s’agit pas d’un mode de rémunération utilisé par les courtiers indépendants dans le secteur de l’assurance;

5.    il ne s’est pas présenté à M. Roberts comme étant un associé ou un investisseur de TMG, mais lui a expliqué qu’il utilisait un local dans les installations louées par TMG;

6.    la plupart des télévendeurs qui fournissent des services aux courtiers font les appels à partir de leur domicile, ce que M. Roberts a fait pendant un certain temps jusqu’à ce qu’il se plaigne que l’environnement à son domicile ne convenait plus et qu’il demande la permission d’utiliser un local de travail et les téléphones des installations de TMG;

7.    pendant un certain temps, les chèques émis au nom de M. Roberts portaient le nom de TMG, mais le compte a toujours été exclusivement à son nom et il en était le seul signataire autorisé. Il avait utilisé ce type de chèque pour distinguer les dépenses d’entreprise jusqu’à ce que son comptable lui dise que cela n’était pas nécessaire;

8.    M. Roberts ne travaillait pas six jours par semaine de manière continue et s’était absenté pendant certaines périodes du 22 juin 2009 au dernier jour de la période pertinente, le 10 septembre 2012, sans nécessiter de permission;

9.    M. Roberts n’a jamais reçu de liste d’appel ou de scénario à suivre lors des appels, mais il avait à sa disposition une brochure décrivant les divers produits et services offerts par différentes compagnies d’assurance, selon les dispositions qu’avait prises un courtier associé de TMG;

10.  M. Roberts n’a jamais été payé selon un taux horaire. Il était uniquement payé pour les rendez-vous fixés pour des clients potentiels et respectés par ceux-ci. Le paiement pour ce service est passé au fil du temps à 14 $, et M. Roberts n’avait jamais été payé seulement pour fixer un rendez-vous;

11.  TMG n’avait pas de feuilles de temps, et les paiements étaient versés à M. Roberts conformément aux factures présentées par lui, qui étaient rédigées dans sa propre écriture;

12.  M. Roberts pouvait faire les appels à d’autres moments que de 18 h à 21 h et à partir d’autres endroits que les installations de TMG;

13.  comme l’a reconnu M. Roberts dans son témoignage, il avait son propre téléphone cellulaire, et il aurait pu l’utiliser pour faire les appels;

14.  les factures de la pièce R-2 n’avaient pas été modifiées, et les mots et les chiffres étaient rédigés dans l’écriture de M. Roberts;

15.  il n’a pas remis à M. Roberts les clés de son local de travail privé, parce que des exigences strictes relatives aux permis, ainsi que d’autres exigences et protocoles réglementaires régissant l’industrie, interdisent l’accès de personnes non autorisées aux renseignements extrêmement confidentiels et personnels concernant les titulaires de police se trouvant dans les dossiers conservés dans un classeur verrouillé dans le local de travail; seul le gérant de l’immeuble détenait une clé en cas d’urgence. Lorsqu’il quittait son local de travail privé, même pour une courte période en demeurant dans les locaux de TMG ou dans l’immeuble, il le verrouillait. M. Roberts n’a jamais travaillé à partir d’un bureau dans son local de travail privé, et ce dernier ne contenait qu’un seul bureau, et non deux comme il a été prétendu;

16.  aucune paie de vacances ou paie pour les jours fériés n’a été versée à M. Roberts, comme il le prétend;

17.  aucune liste d’appel et aucun scénario n’ont été fournis à M. Roberts parce qu’il était un télévendeur d’expérience, qui avait travaillé auparavant pour un collègue courtier qui vendait des produits de Clarica et parce que les types de produits offerts étaient décrits dans les brochures qui étaient disponibles à la réception de TMG;

18.  Sandy était une télévendeuse qui travaillait depuis longtemps pour certains courtiers ayant des locaux de travail chez TMG, elle travaillait occasionnellement, mais n’avait aucunement la responsabilité de répondre aux appels et de les acheminer aux personnes concernées;

19.  M. Roberts n’était pas tenu de faire des appels interurbains pour chercher des clients potentiels, parce que cela n’était pas du tout pratique, compte tenu du temps nécessaire pour se déplacer à l’extérieur de la région du Grand Toronto et pour conclure une vente, par rapport à l’éventuelle commission qu’il toucherait; il a plutôt demandé à M. Roberts d’appeler les personnes résidant à proximité de son domicile pour réduire les déplacements et lui permettre de rencontrer plus de personnes;

20.  au cours de sa carrière de courtier dans le secteur de l’assurance, il n’avait jamais connu de télévendeur qui était rémunéré pour les services qu’il fournissait autrement qu’en fonction d’un paiement déterminé pour chaque rendez-vous fixé, et, dans le cas présent, M. Roberts était payé seulement si une rencontre avait lieu avec un client potentiel.

[26]        Monsieur Zwolinski a déclaré ce qui suit concernant certains aspects du témoignage de l’appelant :

1.    TMG ne compte aucun employé et Sandy n’est pas une employée, mais une télévendeuse de longue date qui utilisait les locaux lorsqu’elle voulait travailler et faire des appels. Il n’y avait pas de réunions des employés;

2.    conformément à la politique de TMG – établie par lui en sa qualité d’unique actionnaire – il a dit aux courtiers qu’il voulait rencontrer les télévendeurs avant leur embauche, et il a rencontré M. Roberts qu’il avait connu des années auparavant lorsque M. Roberts travaillait comme télévendeur pour un courtier qui vendait des produits de Clarica;

3.    M. Roberts n’a pas reçu de scénario, et il n’existait pas de scénario que les courtiers devaient suivre dans le modèle opérationnel de TMG; une brochure décrivant les produits offerts a cependant été remise à M. Roberts;

4.    il a dit aux courtiers de demander aux télévendeurs de ne pas appeler les personnes ayant demandé de ne pas recevoir d’autres appels, et il estimait qu’il était préférable en affaires de ne pas appeler après 21 h, la fin de semaine ou les jours fériés;

5.    les courtiers payait TMG pour louer des locaux et pour obtenir certains autres services, mais ils étaient entièrement indépendants et pouvaient recourir aux modes de fonctionnement qui leur convenaient pour solliciter les clients; il ne leur donnait pas de directives et n’en donnait certainement pas à leurs télévendeurs avec qui il n'avait aucune relation d’affaires;

6.    à la suite d’une demande de M. Libourkine, M. Roberts a été autorisé à utiliser un poste de travail modulaire dans les installations de TMG pour faire ses appels pendant le quart de travail qui lui convenait, en l’occurrence de 18 h à 21 h, mais l’accès aux locaux de travail privés de chaque courtier était restreint, et des protocoles de sécurité étaient en place pour protéger les renseignements confidentiels dans les dossiers;

7.    ses 31 années d’expérience dans le secteur de l’assurance lui ont appris que la seule façon du point de vue économique pour un courtier de rémunérer une personne pour obtenir des clients potentiels valables est de payer cette personne pour chaque rendez-vous avec un client potentiel qui est susceptible de lui valoir une commission;

8.    il ne se trouvait pas souvent aux installations de TMG pendant les heures où M. Roberts faisait ses appels;

9.    M. Roberts avait le laissez-passer approprié pour accéder à l’étage et aux aires principales de TMG, mais certains courtiers ou certaines personnes dignes de confiance étaient chargés de s’assurer tous les soirs que les locaux de travail privés des courtiers étaient bien verrouillés.

[27]        Une évaluation de la crédibilité du témoignage et de la fiabilité des quelques documents produits s’impose manifestement.

[28]        Dans l’affaire Le Conseil Atlantique du Canada – The Atlantic Council of Canada c. le ministre du revenu national, 2012 CCI 13, [2012] A.C.I. no 3, la juge D’Auray a instruit un appel où elle devait trancher la question de savoir s’il existait une relation employeur-employé. En ce qui concerne la question relative à la teneur des témoignages contradictoires, aux paragraphes 80 à 82, inclusivement, elle a déclaré ce qui suit :

[80]      La nature de la relation entre l’appelant et Mme Sargsyan a fait l’objet des témoignages détaillés, et à l’occasion contradictoires, de Mme Sargsyan et de Mme Lindhout. Certaines des contradictions dans les témoignages concernent des points cruciaux. Lorsqu’il s’agit d’évaluer la version des témoins, je tiens compte de la mise en garde formulée par la Cour d’appel de la Colombie-Britannique dans l’arrêt Faryna c. Chorny, [1952] 2 D.L.R. 354, p. 359, suivant laquelle la Cour doit examiner la véridicité de la version d’un témoin en tenant compte du contexte des circonstances qui l’ont entourée. Selon les termes de cette Cour :

[TRADUCTION] Bref, le véritable critère applicable à la véridicité de la version du témoin dans un tel cas doit être sa conformité à la prépondérance des probabilités qu’une personne pratique et bien informée estimerait d’emblée raisonnable dans le lieu et la situation en question.

[81]      À mon avis, Mme Lindhout a été le témoin le plus crédible. Elle s’est montrée solide comme témoin, ses réponses étaient précises et pertinentes, aussi bien lors de son interrogatoire principal qu’en contre-interrogatoire. Par ailleurs, Mme Sargsyan s’est montrée à l’occasion évasive en contre-interrogatoire; elle n’a pas répondu directement aux questions qui lui ont été posées. Fait plus important, j’estime que le témoignage de Mme Lindhout reflétait davantage les circonstances entourant les événements, y compris la preuve écrite.

[82]      La preuve écrite étaye le témoignage de Mme Lindhout. L’objectif du programme de stages du FSD était de permettre aux stagiaires d’acquérir une expérience de travail pertinente et de compléter leurs études. La bourse du programme des stages du FSD était offerte par l’AUCC et non par l’appelant. Ce dernier jouait le rôle d’organisme d’accueil dans le cadre du programme.

[29]        Suivant une analyse détaillée des témoignages de M. Roberts, de M. Libourkine et de M. Zwolinski ayant trait aux contradictions susmentionnées, j’ai conclu que le témoignage de M. Roberts n’est pas digne de foi et, dans les cas où son témoignage est contraire à ceux de M. Libourkine ou de M. Zwolinski sur des questions susmentionnées, j’accepte les versions de M. Libourkine et de M. Zwolinski et je rejette celle de M. Roberts. Le témoignage de M. Roberts était empreint de nombreuses incohérences, ainsi que de contradictions flagrantes des affirmations faites dans sa réplique qu’il a incorporées dans son témoignage direct et dans les témoignages subséquents. Il était évasif et, lorsqu’on lui présentait des faits directement contraires à sa position, il inventait allégrement une autre version qu’il souhaitait faire accepter. Lorsqu’il ne pouvait pas échapper à une confrontation directe entre deux positions contraires ou lorsqu’il était aux prises avec une question, telle que son écriture sur les factures, il n’hésitait pas à attaquer la crédibilité de M. Libourkine en le taxant de menteur et essentiellement de faussaire, qui aurait modifié ou substitué les factures et détruit les feuilles de temps, censément imprimées sur du papier en-tête de TMG, pour faire obstacle à sa prétention valide au sujet de son emploi. Pour reprendre les mots de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique, l’histoire racontée par M. Roberts n’était pas en [traduction] « conformité à la prépondérance des probabilités qu’une personne pratique et bien informée estimerait d’emblée raisonnable dans le lieu et la situation en question ». Les témoignages de M. Libourkine et de M. Zwolinski concernant les modes normaux de fonctionnement des courtiers dans le secteur de l’assurance et la méthode conventionnelle d’embauche de télévendeurs ou d’autres personnes pour leur fournir des clients potentiels sont raisonnables et conformes à la réalité économique. Un courtier comme M. Libourkine gagne de l’argent au moyen des commissions et des parts connexes des primes ou des gratifications lui étant payées par les compagnies d’assurance, et il peut conclure une vente seulement lorsqu’il rencontre un client potentiel après qu’un rendez-vous a été fixé par une personne dont les services sont retenus à cette fin précise. Les témoignages pertinents de M. Libourkine et de M. Zwolinski étaient cohérents, fiables et dignes de confiance.

[30]        Monsieur Libourkine n’exerçait pas de contrôle notable sur M. Roberts, qui était libre de travailler aux heures de son choix et d’utiliser les techniques qui lui semblaient appropriées pour convaincre les personnes de rencontrer M. Libourkine. En ce qui a trait aux indices de contrôle dont fait état M. Roberts pour étayer sa position selon laquelle il était un employé pendant la période pertinente et depuis le 22 juin 2009, M. Roberts savait qu’il devait inventer des détails comme la tenue de réunions d’employés, le fait qu’il devait se présenter quotidiennement à M. Libourkine, l’attribution de quarts de travail particuliers, la nécessité d’obtenir des permissions pour s’absenter du travail et son droit – à titre d’employé – à une paie de vacances et à une paie pour les jours fériés. Il ne pouvait toutefois pas produire de documents à l’appui de ces simples affirmations et a admis qu’aucun chèque émis à son nom par M. Libourkine ne contenait de mention de ces éléments. M. Roberts était un télévendeur d’expérience capable de fonctionner de manière indépendante en vue d’obtenir des résultats lui permettant de recevoir des paiements de M. Libourkine.

[31]        L’évaluation de la crédibilité a une incidence sur l’analyse des autres indices.

Fourniture du matériel et/ou embauche d’assistants

[32]        Le seul outil nécessaire était un téléphone, qu’il s’agisse d’un cellulaire ou d’un autre type de téléphone. Pendant un certain temps de la période pertinente, M. Roberts utilisait un poste de travail modulaire vacant aux installations de TMG pour faire ses appels et, bien que la question n’ait jamais été discutée, il était évident que M. Roberts devait assurer personnellement les activités de télémarketing.

Étendue des risques financiers et responsabilité quant aux mises de fonds et à la gestion

[33]        Le seul inconvénient économique associé aux activités de télémarketing de M. Roberts était le forfait de son téléphone cellulaire qui ne lui permettait pas de faire de nombreux appels de longue durée après 20 h en raison des frais imposés pour les minutes supplémentaires trop élevés pour le revenu qu’il gagnait. Cependant, ces frais n’auraient pas semblé être si importants si M. Roberts avait réellement été rémunéré selon un taux horaire, comme il le prétendait, peu importe le nombre de rendez-vous fixés. M. Roberts n’avait pas à investir d’argent ou à participer à quelque fonction de gestion que ce soit.

Possibilité de tirer profit de l’exécution des tâches

[34]        La possibilité de réaliser des bénéfices était directement liée au nombre d’appels étant effectués et de rendez-vous probables étant fixés, dont 90 % étaient normalement respectés par les clients potentiels. M. Roberts recevait alors une rétribution. Il a décidé de travailler à des heures restreintes, habituellement 18 heures par semaine, et d’utiliser les téléphones de TMG. Cependant, la recherche de clients potentiels aurait pu être élargie en recourant à d’autres techniques et méthodes, surtout du fait qu’il avait de l’expérience en télémarketing parce qu’il avait déjà travaillé pour un courtier dans le secteur de l’assurance. M. Roberts pouvait décider du nombre d’heures qu’il consacrait à cette activité et adapter ses techniques au besoin pour fixer plus de rendez-vous étant susceptibles de mener à des rencontres entre des clients potentiels et M. Libourkine. Pendant la période où il a travaillé à partir des installations de TMG, M. Roberts s’est absenté occasionnellement pendant un certain temps, pour des raisons qui lui sont propres, et n’a pas fixé de rendez-vous pour M. Libourkine.

[35]        Dans l’arrêt Connor Homes, précité, parmi les huit travailleurs dont les appels ont été instruits, trois avaient signé des contrats qui leur conféraient le statut d’entrepreneur indépendant. Le jugement de la Cour d’appel fédérale a été rendu par le juge Mainville qui, au moment d’examiner la question du contrôle (44 à 47 inclusivement), a déclaré ce qui suit :

44.       Or, les faits de l’espèce ne cadrent pas avec l’intention déclarée des parties de nouer une relation de client à entrepreneur indépendant. L’examen de ces faits ne me permet pas de penser que le juge de la Cour de l’impôt a commis d’erreur en concluant que les intéressées n’assureraient pas leurs services aux appelantes en tant que personnes travaillant à leur propre compte. En effet, si l’on considère le degré élevé de contrôle exercé par les appelantes sur l’exécution de leurs tâches, les limites de leurs possibilités de profit, et l’absence de risques financiers comme d’investissements de quelque importance, les trois intéressées intervenaient essentiellement comme employées des appelantes.

45.       Premièrement, il ressort à l’évidence du dossier que les appelantes exerçaient un degré élevé de contrôle sur la nature et les modalités d’exécution des tâches remplies par les intéressées. Connor Homes a rédigé et distribué son propre manuel des politiques et procédures, fondé sur les exigences de la législation provinciale des services à l’enfance et à la famille. Ce manuel définissait et fixait les procédures régissant la prestation des services dans les foyers. Il a été remis aux intéressées, qu’elles exercent des fonctions de surveillance de secteur ou de première ligne auprès des enfants et des jeunes. De plus, leurs contrats respectifs prévoyaient pour les intéressées l’obligation de se conformer en tout temps aux politiques et aux règles de conduite énoncées dans ce manuel. (Témoignage de Robert Connor, dossier d’appel, volume 2, page 175, lignes 18 à 24, et pages 191 et 192, lignes 20 à 25 et 1 à 20.)

46.         En plus d’appliquer le manuel, les appelantes contrôlaient aussi le travail des intéressées au jour le jour. Elles leur fixaient des tâches administratives et les obligeaient à assister à des réunions du personnel pour discuter des procédures opérationnelles, des calendriers de travail et des événements quotidiens de la vie des foyers. Les appelantes donnaient aussi conseils et instructions aux intéressées concernant la gestion des situations difficiles avec les clients, aussi bien que les activités de commercialisation à exercer pour leur compte. (Témoignage de Rollie Allaire, dossier d’appel, volume 2, page 414, ligne 15, à page 416, ligne 19; Zoe Fulton, page 509, lignes 10 à 16; et Jodi Greer, pages 463 et 464, lignes 6 à 25 et 1 à 17.)

47.       Le degré de contrôle exercé par les appelantes sur le travail des intéressées était assimilable à celui qu’exerce un employeur, et qui plus est, il a été reconnu en première instance qu’elles remplissaient en fait les mêmes tâches que les employées des appelantes (témoignage de Robert Connor, dossier d’appel, volume 2, page 207, lignes 9 à 17).

[36]        Il est évident que ces types de contrôle, d’orientation, de conseils et d’instructions s’appliquant notamment aux activités de marketing n’existaient pas en l’espèce. 

[37]        Dans l’affaire Greenshield Windows and Doors Ltd. c. Canada (Ministre du Revenu national – MRN), 2015 CCI 70, [2015] A.C.I. no 51 (QL), la juge Woods a instruit les appels interjetés par des travailleurs ayant été embauchés comme télévendeurs par le payeur. Sur la question du contrôle, la juge Woods a exposé les faits (paragraphes 16 à 25 inclusivement) avant de conclure comme suit au paragraphe 26 :

[16]      Le facteur concernant le contrôle est souvent important pour établir si un travailleur est un employé. La question à trancher est celle de savoir si Greenshield avait la capacité de contrôler la façon dont le travail était accompli. Compte tenu de l’ensemble de la preuve, je conclus que le facteur concernant le contrôle est compatible avec l’intention des parties d’établir une relation d’entrepreneur indépendant.

[17]      Le poste en télévente n’exigeait pas de connaissances spécialisées et il était souvent occupé par des étudiants qui souhaitaient du travail à temps partiel. Le taux de roulement était très élevé. En effet, environ 50 % des télévendeurs partaient au cours du premier mois.

[18]      Comme je l’ai mentionné plus tôt, le travail était accompli en groupe. Ainsi, Greenshield mettait au point les horaires de travail hebdomadaires en fonction des demandes des télévendeurs. Il y avait deux quarts de travail quotidiens de quatre heures : de 10 heures à 14 heures et de 17 heures à 21 heures, avec une pause de 15 minutes.

[19]      Il est probable qu’on s’attendait à ce que les télévendeurs avisent Greenshield s’ils ne pouvaient pas par la suite se présenter au travail selon l’horaire établi. J’accepte le témoignage de M. Solomon selon lequel plusieurs télévendeurs ne le faisaient pas.

[20]      De plus, puisque le travail devait être accompli en groupe, M. Hayes ou un télévendeur principal décidait du moment où la pause de 15 minutes était prise.

[21]      En ce qui a trait à la comptabilisation des heures travaillées, elles devaient être comptabilisées d’une certaine manière parce que les travailleurs étaient payés en partie selon un taux horaire et en partie sous forme de commissions.

[22]      Le travail consistait à tenter d’obtenir le consentement des propriétaires de maison pour la préparation d’une estimation. Le service des ventes de Greenshield effectuait ensuite suivi. Les travailleurs recevaient une formation minimale à cet égard. J’accepte le témoignage de M. Solomon selon lequel il était illogique d’investir du temps dans la formation alors que le taux de roulement était élevé.

[23]      La preuve révèle que les travailleurs recevaient à titre d’exemple un [traduction] « argumentaire » qu’ils pouvaient utiliser. Ils n’étaient toutefois pas tenus de l’utiliser et, habituellement, ils mettaient au point leurs propres techniques. Il est probable que les travailleurs ont appris les uns des autres à cet égard.

[24]      En ce qui a trait à la supervision, il y avait une surveillance et une censure générales si les travailleurs exerçaient des activités personnelles au travail, mais aucun élément de preuve ne permet de penser que les travailleurs se faisaient dire comment faire leur travail. Mme Trapara a été informée que M. Hayes pouvait écouter les appels, mais aucun élément de preuve n’établit que Greenshield intervenait dans la manière selon laquelle les argumentaires étaient présentés ni qu’elle le faisait.

[25]      Les réunions avec les travailleurs consistaient en une rencontre de cinq minutes au début de chaque quart, à l’occasion de laquelle les renseignements pertinents étaient communiqués, comme les promotions de vente spéciales.

[26]      Je conclus que, prise dans son ensemble, la preuve est plus compatible avec le fait que Greenshield n’avait pas la capacité de contrôler la façon dont le travail était accompli. Les travailleurs pouvaient choisir leurs heures de travail et la manière de l’accomplir. Ce facteur milite en faveur d’une relation d’entrepreneur indépendant.

[38]        La conclusion de la juge Woods se trouve aux paragraphes 35 et 36 :

[35]      Après avoir soupesé la preuve dans son ensemble, je conclus que la relation entre Greenshield et les travailleurs était compatible avec leur intention commune que les travailleurs soient des entrepreneurs indépendants.

[36]      Le facteur dominant en l’espèce est le contrôle. Les travailleurs étaient en mesure d’établir leurs propres horaires de travail et leurs propres argumentaires de télévente. Dans une relation aussi peu stricte, je conclus que les travailleurs ont été engagés en qualité d’entrepreneurs indépendants.

[39]        Dans l’affaire susmentionnée, les faits visés par l’analyse du degré de contrôle n’étaient pas suffisants pour confirmer les décisions rendues par le ministre selon lesquelles ces faits militaient en faveur d’une relation employeur‑employé. En revanche, il n’existe aucune circonstance semblable ayant trait à la question du contrôle dans la relation de travail entre M. Roberts et M. Libourkine, qui fonctionnait comme un entrepreneur indépendant.

[40]        Au moment de se préparer au présent appel, M. Roberts aurait gagné à réfléchir à l’avertissement servi dans le distique souvent cité du poème de sir Walter Scott, datant de 1908, Marmion: A Tale of Flodden Field – chant VI, XVII :

[TRADUCTION]

Oh, qu’elle est emmêlée la toile que nous tissons

Lorsque nous cherchons à tromper!

[41]        Monsieur Roberts a inventé un tissu de chimères lors de son témoignage, ainsi que de son contre-interrogatoire, et il s’est empêtré dans un écheveau de contradictions, de tromperies, de bêtises servant ses intérêts et de mensonges éhontés duquel il ne pouvait pas s’échapper.

[42]        Compte tenu de la preuve et de la jurisprudence pertinente, la décision du ministre est confirmée et l’appel est rejeté.

Signé à Sidney (Colombie-Britannique), ce 10e jour de juin 2015.

« D.W. Rowe »

Juge suppléant Rowe

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de septembre 2015

M.-C. Gervais


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