Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Dossier : 2015-2417(IT)I

ENTRE :

Marek Shevchyk,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE]

 

Appel entendu le 23 février 2016 à Toronto (Ontario)

Devant : L’honorable juge Guy R. Smith


Comparutions :

Pour l’appelant :

Me Michael Ding

Me Osnat Nemetz

Avocats de l’intimée :

Me Sebastian Budd

Me Laurent Bartleman

 

JUGEMENT

L’appel interjeté à l’encontre du réexamen effectué en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition de référence 2011 de l’appelant est accueilli, sans dépens, et l’affaire est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation au motif que l’appelant était un particulier admissible au sens de l’article 122.6 de la Loi de l’impôt sur le revenu en ce qui concerne ses trois enfants pendant la période qui s’étend de mai 2013 à juin 2013.

L’accès au dossier de cet appel, le dossier 2015-2417(IT)I, est limité conformément aux motifs du jugement ci-joint.

Signé à Ottawa, Canada, ce 22e jour de mars 2016.

« Guy Smith »

Juge Smith


Référence : 2016 CCI 64

Date : 20160322

Dossier : 2015-2417(IT)I

ENTRE :

Marek Shevchyk,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Smith

[1]             Il s’agit d’un appel de la décision du ministre du Revenu national (le « ministre ») en ce qui concerne l’admissibilité de l’appelant à la Prestation fiscale canadienne pour enfants (la « PFCE ») pour l’année de référence 2011.

[2]             Dans son avis d’appel, l’appelant fait aussi référence aux décisions corrélatives prises à l’égard des prestations découlant de la loi provinciale, sur lesquelles la Cour n’a pas compétence. Même si des ajustements corrélatifs à l’impôt provincial dû peuvent être apportés par suite du présent appel, la question sur laquelle la Cour a compétence est l’application du crédit d’impôt fédéral pertinent aux faits en l’espèce.

[3]             Dans sa décision, le ministre a refusé le droit de l’appelant à la PFCE pour les mois de mai et juin 2013, et ce, principalement au motif que les trois enfants de l’appelant ne résidaient pas chez lui. L’appel porte uniquement sur cette période.

[4]             Pour appuyer sa décision de refuser le droit à la PFCE, le ministre a émis bon nombre d’hypothèses que je paraphrase comme suit :

1.     L’appelant est le père de trois enfants, soit :

M, un fils qui avait environ 12 ans à ce moment-là;

V, une fille qui avait environ 13 ans à ce moment-là;

M, une fille qui avait environ 17 ans à ce moment-là.

2.     L’appelant et la mère ne vivent plus ensemble depuis au moins 2004 en raison de l’échec de leur mariage.

3.     En tout temps jusqu’en mai 2013, les trois enfants résidaient avec l’appelant dans la maison familiale située dans la ville de Barrie.

4.     En avril 2013, l’aînée a quitté la maison familiale et les deux autres enfants ont été retirés par la Société d’aide à l’enfance du comté de Simcoe.

5.     Aucun des trois enfants ne vivait selon un mode de vie stable et régulier avec l’appelant à tout moment pendant les mois de mai et juin 2013.

Enfin :

6.     En tout temps pendant les mois de mai et juin 2013, l’appelant n’a pas joué un rôle principal en assumant la responsabilité pour le soin et l’éducation des trois enfants.

Les hypothèses énoncées aux points 4, 5 et 6 sont contestées.

Contexte factuel

[5]             L’appelant a témoigné à l’audience et il n’y a eu aucun autre témoin.

[6]             En guise de contexte, il a expliqué qu’il touchait une prestation d’invalidité à la suite d’un grave incendie ayant eu lieu en 2010. Il a subi divers traitements, notamment des greffes de peau, et ces traitements étaient en cours en 2013.

[7]             En janvier 2013, il a glissé sur une surface glacée à un arrêt d’autobus et s’est cassé la cheville droite. Il a dû être opéré et hospitalisé pendant une semaine. Il a subi une perte de mobilité et avait besoin de béquilles.

[8]             En ce qui concerne la période visée (mai et juin 2013), l’appelant explique qu’à la mi-avril 2013, il s’est disputé avec sa fille aînée. La dispute a dégénéré, l’aînée l’a poussé et il s’est de nouveau cassé la cheville droite. L’aînée a ensuite quitté la maison familiale.

[9]             Peu de temps après, en raison d’une plainte déposée par l’aînée, un agent de traitement des cas de la Société d’aide à l’enfance locale s’est présenté à la maison familiale accompagné de deux sergents.

[10]        Selon l’appelant, la plainte déposée par sa fille aînée a donné lieu à une enquête. Lorsqu’on lui a demandé si la Société d’aide à l’enfance lui avait retiré ses enfants à ce moment-là, il a soutenu qu’il s’agissait seulement d’une enquête.

[11]        La preuve de l’appelant est que, en raison de sa nouvelle blessure à sa cheville droite, il a réalisé qu’il ne serait pas en mesure de bien prendre soin de ses deux plus jeunes enfants et a décidé de demander à une amie de la famille de s’occuper d’eux. Il connaissait DR depuis au moins dix ans, et elle connaissait les enfants de l’appelant puisque ses enfants à elle allaient à la même école et qu’ils avaient des activités communes.

[12]        Selon le témoignage de l’appelant, DR a pris soin de ses deux plus jeunes enfants pendant la seconde moitié d’avril, ainsi que pendant les mois de mai et juin 2013. En raison des difficultés physiques persistantes de l’appelant, notamment une chirurgie, DR a continué de s’occuper des enfants en juillet et en août 2013.

[13]        Pour les mois de septembre à décembre 2013, le fils de l’appelant est retourné habiter avec ce dernier à la maison familiale, mais la plus jeune des filles a choisi de demeurer avec DR. Comme il est indiqué précédemment, l’aînée a quitté la maison familiale après l’incident d’avril 2013, a déménagé avec sa mère pour l’été et n’est pas revenue à la maison familiale.

[14]        Selon le témoignage de l’appelant, il a vu ses enfants aussi souvent qu’il le pouvait pendant la période visée, parfois aussi souvent que deux ou trois fois par semaine. Lorsque cela était possible, il préparait des repas ou des dîners pour l’école, que DR ou un autre ami (DJ) venait chercher. L’appelant a également payé un abonnement familial au YMCA local. Aussi souvent que possible, il allait au cinéma avec ses enfants. Lorsqu’on lui a demandé si les enfants, y compris l’aînée, avaient déménagé leurs meubles et leurs effets personnels à l’extérieur de la maison familiale, il a répondu que non étant donné que la situation était temporaire. Rien n’a été modifié à leur école. L’appelant a indiqué qu’on prenait bien soin de ses enfants et que si ce n’était de son état de santé, il s’occuperait de ses enfants. De plus, il a gardé contact avec sa fille aînée et lui a donné de l’argent.

[15]        Même si j’ai certains doutes à l’égard de la crédibilité de l’appelant, dans l’ensemble, je l’ai trouvé honnête et franc. Son témoignage était cohérent, même lors du contre-interrogatoire.

Preuve documentaire

[16]        L’appelant a fourni des copies de deux reçus de 600 $ datés du 17 mai et du 20 juin 2013, signés par DR, ainsi que trois reçus de 300 $ datés du 19 avril, 17 mai et 20 juin 2013, supposément signés par sa fille aînée. La signature est cependant illisible. Tous les reçus portent la mention « aide à la prestation fiscale pour enfants », et la preuve offerte par l’appelant était que l’argent était utilisé par DR à titre de pension alimentaire pour ses deux enfants, et par sa fille aînée, pour sa pension alimentaire.

[17]        Même si les reçus constituent la preuve la plus forte présentée devant la Cour, d’autres documents ont été fournis. Certains sont antérieurs à la période visée, et d’autres sont postérieurs de plusieurs mois. Même s’ils fournissent un contexte, aucun de ces documents ne fournit de preuve directe sur la période en question.

[18]        Concernant son fils M, l’appelant a fourni une note manuscrite (la « note ») d’un avocat-conseil à l’interne d’Aide juridique Ontario. Cette note fait référence au procès-verbal de transaction et à un projet d’ordonnance de la Société d’aide à l’enfance. Un projet d’ordonnance de la Cour supérieure de justice de l’Ontario, Cour de la famille est également joint.

[19]        Un examen de la note donne à penser que le procès-verbal de transaction aurait été rédigé en mai 2014, et que le projet d’ordonnance de la Société d’aide à l’enfance, mettant vraisemblablement en œuvre cette transaction, a été préparé en novembre 2014, près de 18 mois après l’incident en question.

[20]        Un projet d’ordonnance daté du 7 mai 2014 de la Cour supérieure de justice, Cour de la famille, est joint à la note. Il n’est pas signé et est incomplet, mais il fait clairement référence au fils et suggère de le confier aux soins et sous la garde de sa mère. Aucune date d’entrée en vigueur n’est indiquée.

[21]        L’appelant a également fourni une ordonnance définitive signée de la Cour supérieure de justice, Cour de la famille, datée du 23 janvier 2015, qui lui accorde la garde de M. L’ordonnance précise que l’appelant a eu la garde principale de M pendant toute l’année 2014. Elle ne mentionne rien concernant l’année 2013.

[22]        La Couronne a remis en question la crédibilité de l’appelant, dans la mesure où il n’a pas fourni le procès-verbal de la transaction, qui aurait confirmé l’appréhension des enfants par la Société d’aide à l’enfance. L’appelant a nié et expliqué que cela a nécessité beaucoup de temps pour obtenir des documents de la Société d’aide à l’enfance ou de son avocat de l’Aide juridique. Quoi qu’il en soit, j’ai déjà conclu que le procès-verbal de la transaction a vraisemblablement été préparé en mai 2014, une année complète après l’incident en question. Par conséquent, le procès-verbal n’est pas directement pertinent à la période en question.

[23]        Pour ce qui est de la plus jeune des filles, l’appelant a fourni ce qui est présenté comme étant une ordonnance définitive de la Cour supérieure de justice, Division de la famille, datée du 13 décembre 2013. L’ordonnance accorde la garde de V à DR sans qu’il soit fait obstacle aux parents de voir leur enfant sur demande.

[24]        De même, pour ce qui est de l’aînée, l’appelant a fourni ce qui est présenté comme étant une ordonnance définitive de la Cour supérieure de justice, Cour de la famille, datée du 13 décembre 2013. L’ordonnance déclare que l’aînée doit devenir pupille de la Couronne et être confiée aux soins et sous la garde de la Société d’aide à l’enfance sans qu’il soit fait obstacle aux parents de voir leur enfant sur demande.

[25]        Il est important de noter que les deux projets d’ordonnance ne sont pas signés par le juge, mais une note manuscrite indique que leur forme et leur contenu ont été autorisés par l’avocat de l’appelant le 8 août 2014.

[26]        Puisque les deux projets d’ordonnance sont datés du 13 décembre 2013, il est évident que les procédures légales en lien avec V et M ont été entamées par la Société d’aide à l’enfance au cours de l’année 2013. Cependant, sans autre preuve, je suis incapable de tirer quelque conclusion que ce soit quant à la date de début de ces procédures.

[27]        Pendant le contre-interrogatoire, on a montré à l’appelant une lettre manuscrite (la « lettre ») rédigée par DR datée du 19 octobre 2011 et adressée « à qui de droit ». Cette lettre fait état de la situation familiale de l’appelant et du lien entre leurs enfants respectifs, et elle dresse un portrait assez édifiant du rôle de l’appelant et de son dévouement en tant que père tout en reconnaissant ses problèmes physiques.

[28]        La lettre fait également référence à l’exigence de diligence raisonnable dans le cadre d’un hébergement et suggère que si on permettait aux deux plus jeunes enfants de retourner vivre avec leur père, DR serait disponible pour les héberger pendant de courtes périodes, au besoin. Cela me laisse supposer que la Société d’aide à l’enfance était impliquée auprès de l’appelant depuis au moins octobre 2011, date de la lettre.

[29]        Toutefois, la lettre fait référence à une situation qui précède la période visée de plus de 18 mois, et le ministre a admis que les trois enfants étaient sous la garde de l’appelant au moins jusqu’en avril 2013.

[30]        En ce qui concerne la valeur probante, la lettre confirme certainement la description de DR par l’appelant, selon laquelle il s’agit d’une bonne amie de la famille, et met en contexte les raisons pour lesquelles les enfants ont déménagé chez elle après l’incident de 2013.

[31]        Le prochain document soumis à l’appelant pendant son contre-interrogatoire était son avis d’opposition manuscrit préparé en juin 2014. Cet avis fait référence à l’incident avec sa fille aînée en avril 2013 et il y est mentionné :

[traduction]

Même si j’ai bien agi, je suis puni par les employés arrogants et prétentieux de la Société d’aide à l’enfance qui ont pris le contrôle [sic] de mes enfants sans avoir de preuve, et qui n’ont même pas discuté avec moi pour me demander ce qui s’était passé entre ma fille aînée et moi. Ils ont déposé l’affaire devant la Cour.

[32]        La Couronne a adopté la position selon laquelle le mot « pris le contrôle » s’entend de « appréhendé » et que cela équivaut à admettre que les enfants ont en fait été retirés par la Société d’aide à l’enfance. L’appelant a rejeté cette interprétation, soutenant qu’à ce moment-là, il ne s’agissait que d’une enquête.

[33]        L’appelant n’a aucune formation juridique et j’hésite à conclure en fonction des mots utilisés dans l’avis d’opposition qu’il y avait vraiment une ordonnance de retrait. À ce moment-là, il aurait pu s’agir d’une intervention de la Société d’aide à l’enfance plutôt que d’une appréhension et d’un retrait.

[34]        L’appelant était gravement blessé. Il a réalisé qu’il aurait de la difficulté à répondre à tous les besoins de ses enfants. L’agent de traitement des cas de la Société d’aide à l’enfance a-t-il insisté ou même fortement insisté pour que les enfants soient placés temporairement chez DR ou ailleurs? L’appelant a-t-il eu le choix?

[35]        D’après la lettre du 19 octobre 2011, je peux conclure que DR entretenait déjà une relation avec l’appelant et ses enfants et qu’elle était connue de la Société d’aide à l’enfance. Un placement temporaire chez elle aurait vraisemblablement été acceptable pour la Société d’aide à l’enfance. Il n’y a aucune preuve que cela était inacceptable.

Quelles conclusions puis-je tirer de ce qui précède?

[36]        Même s’il est clair que la plainte déposée par la fille aînée a donné lieu à une intervention de la Société d’aide à l’enfance, je ne peux pas conclure que les enfants ont été appréhendés ou qu’une ordonnance de retrait était en vigueur à ce moment-là.

[37]        En raison de sa blessure et probablement poussé par la Société d’aide à l’enfance, les deux plus jeunes enfants de l’appelant ont été confiés temporairement aux soins d’une bonne amie de la famille pendant au moins la période visée. L’appelant a donné de l’argent à cette amie et est resté impliqué autant qu’il le pouvait malgré ses handicaps physiques.

[38]        La fille aînée, qui avait 17 ans à ce moment-là, a quitté la maison familiale en avril 2013, après une dispute avec l’appelant. Elle a vécu ailleurs, soit avec son petit ami ou avec sa mère, mais sa situation n’était en rien permanente. L’appelant est resté le père gardien et lui a donné de l’argent directement, comme le montrent les reçus fournis.

[39]        Compte tenu de ce qui précède, je conclus que l’appelant a présenté une preuve prima facie que les deux plus jeunes enfants n’avaient pas été retirés par la Société d’aide à l’enfance et que, même si l’aînée avait quitté la maison familiale, elle était toujours sous sa garde pendant la période visée. L’appelant n’a pas cédé la tutelle légale de ses trois enfants, même temporairement.

Quelles sont les questions juridiques?

[40]        Le ministre affirme que l’appelant n’a pas droit à la PFCE pour la période visée parce qu’il n’est pas un « particulier admissible ».

[41]        L’article 122.6 de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») est libellé comme suit :

particulier admissible S’agissant, à un moment donné, du particulier admissible à l’égard d’une personne à charge admissible, personne qui répond aux conditions suivantes à ce moment :

a)   elle réside avec la personne à charge;

b)   elle est la personne — père ou mère de la personne à charge — qui :

(i)   assume principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation de la personne à charge et qui n’est pas un parent ayant la garde partagée à l’égard de celle-ci,

(ii)  est un parent ayant la garde partagée à l’égard de la personne à charge[.]

[42]        Puisque rien ne laisse croire que l’appelant était un parent ayant la garde partagée, il n’y a que deux questions à trancher. Dans la décision Loyer c. La Reine, [2002] 3 CTC 2304, la juge Lamarre (tel était alors son titre) a expliqué (au paragraphe 14) :

Pour satisfaire à la définition de particulier admissible, un contribuable doit remplir deux conditions cumulatives : il doit résider avec la personne à charge et il doit assumer principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation de cette dernière.

[43]        Le ministre a fait référence à la récente décision Jhanjii c. La Reine 2014 CCI 126, dans laquelle le juge Hogan a conclu qu’un enfant qui vivait dans un pensionnat en Inde et qui y est resté pour terminer ses études après le décès imprévu de sa mère et le déménagement de son père au Canada, était néanmoins toujours réputé résider avec son père aux fins de l’article 122.6 de la LIR.

[44]        Le juge Hogan a examiné plusieurs autres affaires concernant différentes situations factuelles et la définition du mot « résider », et a affirmé (au paragraphe 22) :

Le régime de la PFCE a été conçu pour appuyer les familles dans leurs efforts pour répondre à leurs besoins fondamentaux et améliorer leurs conditions économiques. Je ne crois pas que l’intention du législateur, en ce qui a trait à l’obligation de résidence, était d’exclure des familles par ailleurs admissibles qui ont dû s’adapter à des circonstances malheureuses.

[Non souligné dans l’original.]

[45]        Dans ce cas en particulier, il est clair que l’appelant et sa famille ont eu à s’adapter aux circonstances malheureuses résultant de sa dernière blessure physique. Même sa dispute avec sa fille aînée et la décision de cette dernière de quitter la maison familiale devraient être considérées dans ce contexte jusqu’à ce qu’il soit devenu clair que son départ était permanent.

[46]        Le juge Hogan a également fait référence à la décision Bouchard c. La Reine, 2009 CCI 38, dans laquelle la juge Woods a attribué la PFCE à un père célibataire alors qu’il était incarcéré. En rendant cette décision, elle a déclaré ce qui suit :

18. Je suis d’avis qu’il faut faire preuve de compassion lorsque l’on interprète les dispositions portant sur la Prestation fiscale pour enfants dans de telles circonstances, de manière à ne pas aller à l’encontre de l’intention évidente du législateur, qui était d’aider les familles à faible revenu.

19. Quand un parent a la garde d’un enfant et s’en occupe, ce parent devrait généralement avoir droit à la Prestation fiscale pour enfants, et ce, même s’il arrive que ce parent ne réside pas physiquement sous le même toit que l’enfant pendant une certaine période.

20. La situation dans laquelle la fille de l’appelant s’est retrouvée n’était pas facile pour une jeune fille de 17 ans. Refuser au parent qui en avait la garde et qui s’en occupait son droit à la prestation irait radicalement à l’encontre de ce que le législateur avait à l’esprit en adoptant le régime de prestations familiales.

[Non souligné dans l’original.]

[47]        Compte tenu de ce qui précède et des faits particuliers de cette affaire, je conclus que les trois enfants résidaient avec l’appelant pendant la période visée et que l’appelant était le parent qui a assumé principalement la responsabilité pour leur soin et leur éducation.

[48]        En d’autres mots, je conclus que l’appelant était un particulier admissible en ce qui concerne les trois enfants pour les mois de mai et juin 2013 et que, par conséquent, il a droit à la PFCE pour cette période.

[49]        Pour les motifs énoncés ci-dessus, j’accueille l’appel et renvoie l’affaire au ministère au motif que l’appelant était un particulier admissible au sens de l’article 122.6 de la LIR en ce qui concerne ses trois enfants au cours de la période qui va de mai 2013 à juin 2013.

[50]        À la demande de la Couronne, je scelle le dossier de la Cour et en limite l’accès à la Couronne, aux représentants désignés de la Couronne, à l’appelant, et aux juges et agents du greffe de la Cour canadienne de l’impôt.

Signé à Ottawa, Canada, ce 22e jour de mars 2016.

« Guy Smith »

Juge Smith


RÉFÉRENCE :

2016 CCI 64

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :

2015-2417(IT)I

INTITULÉ :

Marek Shevchyk c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 23 février 2016

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Guy R. Smith

DATE DU JUGEMENT :

Le 22 mars 2016

COMPARUTIONS :

Pour l’appelant :

Me Michael Ding

Me Osnat Nemetz

Avocats de l’intimée :

Me Sebastian Budd

Me Laurent Bartleman

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

 

Cabinet :

 

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.