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Référence : 2016 CCI 76

Date : 20160329

Dossier : 2015-3020(IT)G


ENTRE :

DAVID CUDDY,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

ORDONNANCE ET MOTIFS DE L’ORDONNANCE

Le juge Jorré

[1]             Les parties s’entendent dans une certaine mesure sur l’échéancier du litige. Elles sont en désaccord sur la question de savoir si l’ordonnance devrait prévoir des questions complémentaires, le cas échéant, découlant des réponses aux engagements[1]. Le différend repose sur le fait de soumettre des questions complémentaires lors de la reprise de l’interrogatoire préalable qui avait eu lieu oralement.

[2]             L’appelant affirme que le fait de prévoir une telle étape équivaut à autoriser un second interrogatoire, ce qui ne peut avoir lieu qu’avec la permission de la Cour, conformément au paragraphe 93(1) des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale). L’appelant n’est pas disposé à consentir à un interrogatoire supplémentaire.

[3]             L’intimée affirme que cette étape proposée n’équivaut pas à un second interrogatoire parce qu’une partie ne peut poser que des questions complémentaires pertinentes découlant des engagements liés à l’interrogatoire[2].

[4]             Je suis d’accord avec les points principaux soulevés dans les observations des deux parties; ils ne sont toutefois pas incompatibles. Ils concernent des questions liées, mais différentes.

[5]             L’appelant a raison d’affirmer que la règle exige une autorisation pour effectuer un second interrogatoire.

[6]             L’intimée a également raison d’indiquer que le fait de poser des questions complémentaires pertinentes par rapport aux engagements n’équivaut pas à un second interrogatoire. Le paragraphe 95(2) des Règles traite des engagements. Il est libellé ainsi :

(2) Avant l’interrogatoire préalable, la personne interrogée doit faire toutes les recherches raisonnables portant sur les points en litige auprès de tous les dirigeants, préposés, agents et employés, passés ou présents, au Canada ou à l’étranger; si cela est nécessaire, la personne interrogée au préalable peut être tenue de se renseigner davantage et, à cette fin, l’interrogatoire préalable peut être ajourné.

[7]             La seconde partie du paragraphe 95(2) des Règles prévoit clairement qu’après qu’une personne se soit renseignée, l’interrogatoire puisse reprendre, plaçant de nouveau la partie interrogatrice dans la position qui aurait été la sienne si la partie interrogée avait pu fournir la réponse immédiatement sans avoir besoin de s’engager à trouver la réponse[3].

[8]             Ainsi, il existe un droit général de poser des questions complémentaires découlant des réponses données pour se conformer aux engagements. Cependant, ce droit en lui-même n’ouvre pas la porte à un interrogatoire supplémentaire allant au-delà des questions complémentaires. Il convient également de garder à l’esprit que l’interrogatoire préalable est toujours soumis au contrôle de la Cour[4].

[9]             Par conséquent, il est raisonnable qu’un échéancier prévoie du temps pour effectuer un interrogatoire préalable[5] et également pour répondre aux engagements et aux questions complémentaires.

[10]        J’ajouterais que je ne vois pas pourquoi une partie devrait, en temps normal, présenter une demande pour terminer l’interrogatoire préalable qu’elle a le droit de mener. Sous réserve de circonstances particulières, une partie ne devrait pas avoir à présenter une demande interlocutoire d’office en vue de terminer un interrogatoire préalable, dans la mesure où le paragraphe 95(2) des Règles le permet.

[11]        Si, à la reprise d’une audience, des questions allant au-delà de ce que la partie interrogée estime être des questions complémentaires pertinentes lui sont posées, la partie interrogée peut refuser de répondre, et la partie interrogatrice peut demander une ordonnance de la Cour contraignant la partie interrogée à répondre.

[12]        L’intimée a affirmé qu’étant donné que l’article 92 des Règles dispose que la partie interrogatrice peut mener un interrogatoire préalable oralement ou par écrit, mais qu’elle ne peut faire les deux sans l’autorisation de la Cour, la partie interrogatrice doit poser des questions complémentaires en reprenant l’interrogatoire préalable oral. Bien que cela soit exact, selon moi, les Règles n’empêchent pas les parties d’accepter de répondre aux engagements par écrit, et de traiter les questions complémentaires également par écrit, le cas échéant[6].

[13]        Bien entendu, si les parties acceptent que les réponses aux engagements soient données par écrit et qu’il en soit de même pour les questions complémentaires et les réponses à ces dernières, alors la partie interrogée peut répondre aux questions complémentaires pertinentes et refuser de répondre aux questions qu’elle estime non pertinentes. La partie interrogatrice pourrait alors présenter une requête en vue de contraindre la partie interrogée à fournir des réponses.

[14]        Pour ces motifs, l’ordonnance portera sur les questions complémentaires figurant dans l’échéancier.

[15]        Le langage utilisé dans les observations indique que les deux parties supposent que les réponses aux engagements seront données par écrit. Dans le cadre de ses observations, l’appelant soutient que l’autorisation de la Cour serait nécessaire pour les questions complémentaires si elles étaient posées dans le cadre d’un interrogatoire oral. Il soutient également que la façon appropriée de procéder est de poser des questions complémentaires par écrit, sans que soit nécessaire une requête pour effectuer un autre interrogatoire. La thèse de l’intimée étant que, puisqu’elle avait opté pour un interrogatoire oral, elle était obligée de procéder oralement pour les questions complémentaires et agirait ainsi [traduction] « sauf autorisation contraire de la Cour », il est clair que l’intimée accepte également que les questions complémentaires soient posées par écrit. Donc, il ne fait pas de doute que les parties sont prêtes à procéder par voie écrite pour les questions complémentaires, et mon ordonnance en tiendra compte.

[16]        Par conséquent, l’ordonnance du 3 mars 2016 est remplacée par l’ordonnance qui suit :

1.       Chaque partie préparera une liste de documents, conformément à l’article 81 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale), puis produira et signifiera sa liste à l’autre partie au plus tard le 31 mars 2016.

2.       Les interrogatoires préalables devront  prendre fin au plus tard le 27 mai 2016.

3.       Les engagements pris lors des interrogatoires préalables devront être remplis au plus tard le 30 juin 2016.

4.       Les questions complémentaires découlant des réponses aux engagements, le cas échéant, devront être présentées au plus tard le 29 juillet 2016.

5.       Les réponses aux questions complémentaires devront être présentées au plus tard le 31 août 2016.

6.       Les parties devront communiquer avec le coordonnateur des audiences par écrit, au plus tard le 14 octobre 2016, pour indiquer à la Cour si l’affaire se réglera, si une conférence de règlement est susceptible d’être bénéfique ou si une date d’audience doit être fixée. Dans la dernière des éventualités, les parties devront présenter une demande conjointe pour fixer une heure et une date pour l’audience, conformément à l’article 123 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale), d’ici cette date.

[17]        Puisque les observations écrites traitaient seulement, de manière limitée, de dates postérieures au 30 juin 2016, j’ai, de façon assez arbitraire, laissé plus de temps pour les étapes subséquentes. Si une des dates subséquentes au 30 juin 2016 pose problème pour l’une ou l’autre des parties, je les invite à formuler des observations par écrit, ou mieux encore, à formuler des observations conjointes, et je réexaminerai ces dates.

Signé à Ottawa (Ontario), ce 29e jour de mars 2016.

« Gaston Jorré »

Juge Jorré

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de mars 2017.

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


RÉFÉRENCE :

2016 CCI 76

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :

2015-3020(IT)G

INTITULÉ :

DAVID CUDDY c. LA REINE

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

L’honorable juge Gaston Jorré

DATE DE L’ORDONNANCE :

Le 29 mars 2016

DATES DES OBSERVATIONS FORMULÉES PAR ÉCRIT :

Les 19 et 29 février 2016,

les 1er et 14 mars 2016

SIGNATAIRES DES OBSERVATIONS :

 

Avocate de l’appelant :

Me Natalie Worsfold

Avocate de l’intimée :

Me Rita Araujo

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour l’appelant :

Me Peter Aprile

 

      Cabinet :

Counter Tax Lawyers

Toronto (Ontario)

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 



[1] Les parties ont convenu que je devrais statuer sur ce différend en tenant compte des observations écrites.

[2] À l’appui de cette affirmation, l’intimée cite la décision Senechal v. Muskoka (Municipality), [2005] O.J. Nº 1406 (QL).

[3] Il s’agit du point soulevé par le protonotaire MacLeod au paragraphe 5 de la décision Senechal. Voir aussi le paragraphe 12 de la décision du juge Bowie dans l’affaire Labow c. La Reine, 2008 CCI 511. Dans cette décision, la Cour a décidé que la partie souhaitant reprendre l’interrogatoire cherchait à poser des questions allant au-delà des questions complémentaires pertinentes.

[4] Comme il est clairement exprimé au paragraphe 6 et aux paragraphes suivants de la décision Senechal.

[5] Sous réserve des engagements ou des questions pour lesquelles une réponse sera fournie ultérieurement.

[6] La règle en question indique que la partie interrogatrice « ne peut » soumettre une personne aux deux formes d’interrogatoire sans autorisation; toutefois, il n’empêche pas les parties d’accepter de procéder de la sorte.

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