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Dossier : 2011-771(IT)G

ENTRE :

JANICE BONHOMME,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE]

 

Appels entendus sur preuve commune avec l’appel de Janice Bonhomme, 2012-3192(IT)G les 9, 10, 12 et 13 novembre 2015 et les 18, 19, 20 et 21 avril 2016, à Toronto (Ontario)

Devant : L’honorable juge David E. Graham


Comparutions :

Avocat de l’appelante :

Me Richard A. Pharand

Avocat de l’intimée :

Me John Grant

 

JUGEMENT

L’appel des années d’imposition 2001 à 2005 de l’appelante, interjeté en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, est accueilli et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national aux fins de réexamen et de l’établissement de nouvelles cotisations en tenant pour acquis que les profits pour lesquels une cotisation a été établie à l’égard de l’appelante en vertu du paragraphe 15(1), relativement à son utilisation d’une maison en 2001, en 2002, en 2003, en 2004 et en 2005, soient réduits de 11 987 $, de 16 460 $, de 21 405 $, de 20 620 $ et de 20 272 $, respectivement.

Les dépens sont adjugés à l’intimée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de juin 2016.

« David E. Graham »

Juge Graham


Dossier : 2012-3192(IT)G

ENTRE :

JANICE BONHOMME,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE]

 

Appels entendus sur preuve commune avec l’appel de Janice Bonhomme 2011-771(IT)G les 9, 10, 12 et 13 novembre 2015 et les 18, 19, 20 et 21 avril 2016, à Toronto (Ontario)

Devant : L’honorable juge David E. Graham


Comparutions :

Avocat de l’appelante :

Me Richard A. Pharand

Avocat de l’intimée :

Me John Grant

 

JUGEMENT

L’appel des années d’imposition 2006 à 2009 de l’appelante, interjeté en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, est rejeté.

Les dépens sont adjugés à l’intimée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de juin 2016.

« David E. Graham »

Juge Graham


Référence : 2016 CCI 152

Date : 20160614

Dossiers : 2012-3192(IT)G

2011-771(IT)G

ENTRE :

JANICE BONHOMME,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 


[TRADUCTION FRANÇAISE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Graham

[1]              Janice Bonhomme est l’unique actionnaire, administratrice et dirigeante de l’entreprise 1218395 Ontario Inc. (l’entreprise « 121 »). Au fil des ans, Mme Bonhomme et l’entreprise 121 ont mené diverses activités dans l’industrie minière. Le ministre du Revenu national a établi de nouvelles cotisations pour les années d’imposition 2001 à 2005 de Mme Bonhomme de façon à inclure ce que le ministre allègue être des avantages conférés à un actionnaire de 666 176 $ tirés de l’entreprise 121 au revenu de Mme Bonhomme. Le ministre a imposé des pénalités pour faute lourde relativement à certains de ces avantages. Le ministre a également établi de nouvelles cotisations pour les années d’imposition 2006 à 2009 de Mme Bonhomme, de façon à refuser des frais d’exploration au Canada s’élevant à 430 000 $ que Mme Bonhomme a déclarés au cours de ces années. Mme Bonhomme a interjeté appel de ces deux séries de nouvelles cotisations. Ces appels ont été entendus sur preuve commune, mais je les aborderai séparément dans les présents motifs[1].

I. Années d’imposition 2001 à 2005

[2]              Les avantages conférés à un actionnaire allégués que le ministre a inclus dans le revenu de Mme Bonhomme étaient répartis dans deux catégories : des dépôts inexpliqués sur les comptes bancaires personnels de Mme Bonhomme et des avantages conférés à un actionnaire relativement à l’occupation par Mme Bonhomme et sa famille d’une maison appartenant à l’entreprise 121.

[3]              Les questions en litige concernant les années d’imposition 2001 à 2005 sont les suivantes :

(a)  si les dépôts inexpliqués sur les comptes bancaires de Mme Bonhomme représentent un revenu non déclaré;

(b) si certains des dépôts inexpliqués effectués au cours des années d’imposition 2001 et 2003 de Mme Bonhomme, par ailleurs frappées de prescription, peuvent faire l’objet d’une cotisation;

(c)  si les pénalités pour faute lourde ont été appliquées correctement à certains de ces dépôts inexpliqués;

(d) si Mme Bonhomme a bénéficié d’avantages relatifs à un logement en raison de son occupation de la maison qui appartenait à l’entreprise 121 et, le cas échéant, le montant de ces avantages;

(e)  si ces avantages relatifs à un logement obtenus au cours des années d’imposition 2001 et 2003 de Mme Bonhomme, par ailleurs frappées de prescription, peuvent faire l’objet d’une cotisation.

[4]              Je conclus que le ministre a inclus à juste titre les dépôts inexpliqués ajoutés au revenu de Mme Bonhomme, que les dépôts qui ont été effectués en 2001 et 2003 peuvent faire l’objet d’une cotisation et que des pénalités pour faute lourde ont été appliquées correctement. Je conclus également que Mme Bonhomme bénéficiait d’avantages relatifs à un logement en raison de son occupation de la maison, bien que les montants ne correspondent pas aux montants des cotisations établis par le ministre. Enfin, je conclus que les avantages relatifs à un logement perçus en 2001 et 2003 peuvent faire l’objet d’une cotisation, bien que les montants ne correspondent pas non plus aux montants des cotisations établis par le ministre.

A. Dépôts inexpliqués

[5]              Le ministre a procédé à une analyse des dépôts bancaires des comptes de Mme Bonhomme pour les années d’imposition 2001 à 2005. L’analyse des dépôts bancaires est une autre méthode visant à déterminer un revenu parfois utilisée par le ministre lorsqu’il considère que les dossiers d’un contribuable ne constituent pas une méthode adéquate pour vérifier son revenu. L’analyse des dépôts bancaires consiste généralement à examiner chacun des dépôts effectués par un contribuable sur son compte bancaire au-delà d’un certain montant. Le ministre demande au contribuable d’expliquer la source de chacun de ces dépôts. Étant donné que le contribuable ne peut pas expliquer la source, qu’il fournit une explication que le ministre juge inacceptable ou admet que la source est imposable et n’a pas été déclarée, le ministre inclut le dépôt dans les revenus du contribuable. Si le contribuable parvient à démontrer, à la satisfaction du ministre, qu’un dépôt donné provient d’une source non imposable ou a déjà été déclaré dans le revenu du contribuable, le ministre ne tient pas compte du dépôt.

[6]              Le vérificateur de l’ARC qui a procédé à l’audit des années d’imposition 2001 à 2005 de Mme Bonhomme a témoigné au nom de l’intimée[2]. J’ai conclu qu’il était un témoin crédible. Il a fourni une description détaillée de la méthode utilisée pour procéder à l’analyse des dépôts bancaires de Mme Bonhomme pour les années d’imposition 2001 à 2005. Il n’est pas nécessaire que je répète cette description ici. J’ai conclu que le processus utilisé par le vérificateur était conforme à la description susmentionnée d’une analyse de dépôts bancaires type. J’ai également conclu qu’il a suivi les étapes normales et justes pour s’assurer qu’il n’y avait pas double comptabilisation, que tous les dépôts provenant de sources non imposables identifiables étaient éliminés et que tous les dépôts provenant de sources imposables identifiables qui avaient été déclarées antérieurement étaient également éliminés.

[7]              Le vérificateur a réparti les dépôts qui n’étaient pas expliqués convenablement dans quatre catégories :

(a)     les montants qui ont été enregistrés comme des « notes de crédit » dans le compte bancaire de Mme Bonhomme;

(b) les montants que Mme Bonhomme semble avoir reçus d’une entreprise appelée Explorers Alliance Corporation (« EAC »);

(c)  les autres dépôts de plus de 5 000 $;

(d) 50 % de tous les autres dépôts entre 1 000 $ et 5 000 $[3].

[8]              Le ministre a traité ces dépôts inexpliqués comme des montants que Mme Bonhomme a soustraits à l’entreprise 121 et a donc établi ses cotisations en vertu du paragraphe 15(1). Le ministre a appliqué des pénalités pour faute lourde aux trois premières catégories.

[9]              Pour un contribuable, il existe deux façons de contester une analyse des dépôts bancaires. La première consiste à démontrer que ses dossiers étaient adéquats et que son revenu aurait dû être déterminé à l’aide de ces dossiers. La deuxième, qui est la méthode la plus courante, consiste à démontrer que les dépôts inexpliqués provenaient d’une source non imposable ou étaient déjà inclus dans les revenus. Mme Bonhomme a opté pour la deuxième méthode.

[10]         L’argument principal de Mme Bonhomme était que la plupart des dépôts inexpliqués étaient des remboursements de son prêt aux actionnaires à l’entreprise 121, et qu’ils n’étaient donc pas imposables. Elle a également soutenu que certains dépôts provenaient de sources non imposables. Bien que j’aie clairement conseillé à Mme Bonhomme de se pencher sur chacun de ces dépôts inexpliqués individuellement, elle a choisi de ne pas le faire. J’estime qu’aucun des dépôts n’était des remboursements d’un prêt aux actionnaires versés par Mme Bonhomme et que les dépôts qui, selon elle, provenaient de sources non imposables, ne provenaient pas de ces sources.

[11]         Avant d’aborder les quatre catégories de dépôts inexpliqués, je vais procéder à une analyse de la qualité des éléments de preuve fournis par Mme Bonhomme.

[12]         Mme Bonhomme n’a pas témoigné relativement à l’analyse des dépôts bancaires. Tous les éléments de preuve à l’appui de son appel de l’analyse des dépôts bancaires ont été fournis par son époux, M. Lionel Bonhomme. Je n’ai pas jugé fiables les éléments de preuve fournis par M. Bonhomme. Il s’est exprimé de façon vague et par des affirmations générales qui se sont avérées erronées ou qui ont dû être modifiées considérablement. Son témoignage a été ponctué de déclarations où il confondait Mme Bonhomme avec l’entreprise 121. À d’autres occasions, il a confondu sa propre personne avec Mme Bonhomme ou l’entreprise 121, l’entreprise 121 avec EAC et EAC avec d’autres entités. Dans ses références aux dossiers présentés en preuve, j’ai constaté que M. Bonhomme avait tendance à exagérer la nature ou le contenu des documents. Il est arrivé fréquemment que M. Bonhomme ne parvienne pas à répondre aux questions, même si ces questions lui étaient présentées plusieurs fois. Bien qu’il était difficile de déterminer s’il était évasif ou avait simplement de la difficulté à suivre le cours de la conversation, il était évident qu’il était volontairement vague à l’égard d’un grand nombre des questions les plus importantes. Dans sa façon de rester vague et de semer la confusion chez les diverses parties, M. Bonhomme pouvait ainsi modifier son témoignage antérieur sans donner l’impression de se contredire lui-même. Ceci dit, il s’est contredit lui-même à plusieurs occasions. Pour les motifs qui précèdent, j’ai accordé peu d’importance au témoignage de M. Bonhomme lorsque celui-ci n’est pas étayé par une preuve documentaire.

[13]         Malgré sa vaste expérience du domaine de la comptabilité, M. Bonhomme n’a pas tenu de livres et de registres pour l’entreprise 121. Aucun registre comptable contemporain n’a été tenu. En réponse à une ordonnance de la cour de produire ses déclarations de revenus en retard, l’entreprise 121 a préparé ces déclarations à partir de balances de vérification qui ne reflétaient pas les opérations réelles de l’entreprise. Les balances de vérification ont été préparées suivant la comptabilité de caisse et non la comptabilité d’exercice. Elles ne tiennent pas compte du revenu de 290 000 $ qui, selon le témoignage de M. Bonhomme, a été reçu par l’entreprise 121 entre août 2003 et décembre 2005[4]. À une exception près, en 2002, il n’y a eu aucun débit inscrit au compte de prêt aux actionnaires. En d’autres termes, aucun des dépôts inexpliqués qui, aux dires de M. Bonhomme, étaient des remboursements d’un prêt aux actionnaires, à l’exception d’un seul, n’est pris en compte dans ces balances de vérification. En outre, les balances de vérification ne tiennent pas compte du montant de 339 000 $ qu’EAC devait à l’entreprise 121, des montants dus au titre de la marge de crédit de l’entreprise 121, des frais d’intérêt prétendument engagés par l’entreprise 121 relativement à l’intérêt à payer à Mme Bonhomme et aux revenus d’intérêt prétendument gagnés par l’entreprise 121 sur les montants que lui devait EAC. Il n’y a aucun changement à la balance des [traduction] « prêts et effets débiteurs » de l’entreprise 121 de 1997 à 2005, en dépit du fait que M. Bonhomme affirme que l’entreprise 121 avançait des fonds ou engageait des dépenses remboursables au nom d’EAC au cours de cette période. Finalement, tous les ajustements au compte de prêt aux actionnaires dans les balances de vérification ont clairement été établis au moyen de différences plutôt que de registres réels des opérations pertinentes.

[14]         M. Bonhomme a fourni diverses piètres explications pour le manque de détail susmentionné. Sa principale explication est qu’en raison d’une ordonnance de la cour de produire ses déclarations de revenus, l’entreprise 121 a essayé de mettre l’accent sur les aspects relatifs à l’état des résultats de la production d’une déclaration plutôt que sur les aspects liés aux bilans. Je ne puis retenir cette explication. Si l’entreprise 121 avait véritablement mis l’accent sur les aspects liés à l’état des résultats de sa production de déclaration, alors pourquoi n’a-t-elle pas déclaré le revenu de 290 000 $ reçus d’EAC? L’explication de M. Bonhomme selon laquelle l’entreprise 121 n’avait pas besoin de le faire puisqu’EAC avait renoncé à compenser les frais d’exploitation au Canada au profit de l’entreprise 121 sonne faux. Cela pourrait expliquer pourquoi l’entreprise 121 pensait que ces revenus n’étaient pas imposables, mais cela ne justifie pas l’absence de comptabilisation de ses revenus. L’entreprise est parvenue à comptabiliser ses dépenses malgré le fait qu’elle pensait ne pas devoir d’impôt. Il semble un peu trop commode qu’elle ait simplement oublié de déclarer la quasi-totalité de son revenu.

[15]         Même si je retenais les explications de M. Bonhomme concernant la comptabilité de l’entreprise 121, je ne sais pas comment je pourrais me fier aux balances de vérification préparées sans tenir compte des éléments du bilan. Si les bilans ne tiennent pas compte des montants retirés par l’entreprise 121 de sa marge de crédit, comment puis-je être certain que les diverses dépenses ont été payées par l’entremise du prêt aux actionnaires, et non de la marge de crédit? Si le bilan ne tient pas compte des comptes créditeurs, comment puis-je être certain que les dépenses déclarées ont été réellement payées au moyen du prêt aux actionnaires et qu’elles ne sont pas restées impayées à la fin d’un exercice particulier?

[16]         M. Bonhomme a fourni au vérificateur ce qu’il considère être un rapprochement du compte de prêt aux actionnaires[5]. À partir du solde de clôture du compte en 1997, il a apporté des ajustements jusqu’à l’année 2005. Au procès, Mme Bonhomme s’est appuyée sur ce rapprochement en tant que supposée preuve qu’il y avait, en tout temps, un solde créditeur dans le compte de prêt aux actionnaires et que, par conséquent, elle ne s’était pas approprié de fonds de l’entreprise 121. Je ne puis retenir le rapprochement comme preuve pour diverses raisons.

                       (a)     Comme les autres feuilles de calcul préparées par M. Bonhomme et déposées en preuve au procès, le rapprochement me semble représenter ce que M. Bonhomme souhaite ou croit être des faits plutôt qu’un résumé d’une analyse rigoureuse de ce que les faits et les documents sous-jacents ont démontré.

                      (b)    Le solde du prêt aux actionnaires est gonflé par divers montants définis comme des [traduction] « avances ». On ne m’a remis aucune preuve documentaire que ces avances ont été versées.

                       (c)    Les ajustements réels au prêt aux actionnaires qui apparaissent dans les balances de vérification n’ont pas été inclus dans le rapprochement. M. Bonhomme a plutôt pris en compte la perte déclarée chaque année par l’entreprise 121 et, en se fondant sur l’hypothèse selon laquelle la perte était financée par le compte de prêt aux actionnaires, a porté la perte au crédit de ce compte. Il a procédé ainsi malgré le fait que la perte tenait compte de l’amortissement, un élément hors caisse qui ne pourrait possiblement avoir d’influence sur le prêt aux actionnaires.

                      (d)    Le solde du prêt aux actionnaires est gonflé par des montants définis comme des [traduction] « intérêts ». Selon ce que je comprends, ces montants sont censés représenter les intérêts dus par l’entreprise 121 à Mme Bonhomme sur les montants qu’elle a empruntés. M. Bonhomme a mentionné plusieurs fois une résolution adoptée par un administrateur qui autorisait prétendument l’entreprise 121 à verser des intérêts à Mme Bonhomme à un taux de 18 %, jusqu’à ce que le solde du prêt aux actionnaires de Mme Bonhomme soit nul ou que le solde de ses cartes de crédit personnelles ait été remboursé. J’ai plutôt compris que le taux de 18 % représentait le taux d’intérêt payé par Mme Bonhomme pour ses cartes de crédit. Aucune copie de la résolution n’a été déposée en preuve. Aucune copie des relevés de carte de crédit de Mme Bonhomme montrant ses soldes impayés n’a été déposée en preuve. Aucun calcul montrant comment le montant des intérêts dus a été établi n’a été déposé en preuve. Mme Bonhomme n’a pas déclaré les intérêts en question comme un revenu dans ses déclarations de revenus.

                       (e)    Fait plus important, le rapprochement est simplement un rapprochement de l’un des comptes dans l’abstrait. Il n’atténue aucunement mes préoccupations générales concernant les balances de vérification. Il ne fournit pas de renseignements comptables complets. Même si l’entreprise 121 a dû faire face à des contraintes de temps pour produire ses déclarations de revenus, l’entreprise a eu par la suite plusieurs années pour créer des dossiers comptables pertinents sur lesquels s’appuyer. Je tire une conclusion défavorable de son manquement à cet égard.

[17]         Ce qui suit présente une analyse des quatre catégories de dépenses inexpliquées relevées par le vérificateur.

(1) Notes de crédit

[18]         Dans son témoignage, le vérificateur a affirmé que les montants désignés comme des « notes de crédit » sur les relevés de compte bancaire de Mme Bonhomme étaient des virements d’autres comptes ou d’autres banques. Il a expliqué qu’il a supprimé toutes les notes de crédit liées aux virements à partir des propres comptes de Mme Bonhomme et ceux de sa famille, laissant des notes de crédit inexpliquées totalisant 268 470 $. Il a affirmé qu’il était incapable de déterminer la source exacte de ces montants, mais qu’il pensait qu’EAC pouvait en avoir été la source, en raison de certains renseignements que lui avait fournis Mme Bonhomme[6]. Je conclus que le ministre a ajouté ces montants au revenu de Mme Bonhomme comme il se devait.

[19]         Un grand nombre des notes de crédit se rapportent aux dépôts de deux montants précis : 4 990 $ et 9 990 $. M. Bonhomme a expliqué que ces montants représentaient des dépôts de 5 000 $ et de 10 000 $ provenant d’EAC, desquels étaient déduits des frais de virement de 10 $. Certains faits sont nécessaires pour comprendre l’explication de M. Bonhomme concernant ces dépôts. M. Bonhomme était actionnaire d’EAC jusqu’au début des années 2000. En 2001, EAC devait à M. Bonhomme la somme de 157 000 $ et à l’entreprise 121, la somme de 339 000 $. En 2003, EAC s’est retrouvée dans une situation financière difficile. Une déclaration a été déposée par l’entreprise 121, qui a obtenu un bref de saisie-exécution. EAC a ensuite conclu ce que M. Bonhomme a présenté comme un [traduction] « arrangement privé avec ses créanciers », parmi lesquels figuraient M. Bonhomme et l’entreprise 121. M. Bonhomme a expliqué que, malgré une situation financière difficile, il restait du travail à faire relativement aux intérêts miniers d’EAC afin de préserver ces intérêts. Il a témoigné qu’ainsi, EAC a conclu avec Mme Bonhomme et l’entreprise 121 une entente en vertu de laquelle Mme Bonhomme ou l’entreprise 121, ou les deux, fourniraient des services à EAC en échange [traduction] « de frais de gestion et de consultation » s’élevant à 10 000 $ par mois[7]. M. Bonhomme a affirmé qu’en échange de ces paiements mensuels, EAC renoncerait chaque mois à des frais d’exploration au Canada de 10 000 $ auprès de l’entité concernée, selon les services rendus[8].

[20]         Outre le témoignage de M. Bonhomme, la seule preuve de cette prétendue entente figure dans un document présenté comme le procès-verbal d’une réunion tenue le 12 août 2003. L’entente intégrale se lit comme suit [9]:

[traduction]
« Il a été convenu que 1218395 Ontario Inc. organise les services, prenne les mesures nécessaires et s’acquitte du paiement des frais d’exploration et d’autres travaux, et qu’il y aura renonciation aux crédits pour son entreprise ou elle-même, au besoin.

Ce facteur était crucial compte tenu des sommes dues à l’entreprise et à elle-même. » [sic dans le texte intégral]

[21]         Le procès-verbal n’est pas signé. Il ne fait pas référence au paiement d’une somme ni à un montant de 10 000 $ par mois. Il fait mention de renonciations, mais n’en précise pas le montant.

[22]         M. Bonhomme n’a pas convoqué comme témoins les autres personnes soi-disant présentes à la réunion. Je tire une conclusion défavorable de ce fait. Je souligne plus particulièrement que l’une de ces personnes était le président d’EAC, Jean-Claude Bonhomme, qui est le cousin de M. Bonhomme. Il habite Toronto, où se tenait le procès.

[23]         M. Bonhomme a témoigné que l’entreprise 121 a fourni des services en vertu de l’entente, d’août 2003 à décembre 2005, et que Mme Bonhomme a fourni des services de janvier 2006 à juillet 2009.

[24]         Le témoignage de M. Bonhomme relativement à ces paiements était incohérent. Il a affirmé qu’EAC avait versé 10 000 $ chaque mois. Lorsqu’il a été confronté à la liste réelle de notes de crédit inexpliquées, il a changé son témoignage, affirmant qu’un certain nombre des premiers paiements s’élevaient à 5 000 $ seulement. M. Bonhomme a également affirmé que les paiements étaient faits sans délai chaque mois; pourtant, il n’y a eu aucun dépôt certains mois.

[25]         M. Bonhomme a affirmé que le paiement mensuel de 10 000 $ versé à l’entreprise 121 en vertu de cette prétendue entente était déposé sur un compte bancaire personnel de Mme Bonhomme en raison du fait que l’entreprise 121 ne possédait pas de compte bancaire au cours de l’année en question. Il a déclaré que l’entreprise 121 traitait les dépôts comme des remboursements du prêt aux actionnaires de Mme Bonhomme et qu’ils n’étaient donc pas imposables lorsqu’ils étaient en sa possession. Je ne puis retenir cette explication. L’entreprise 121 n’a pas déclaré ces montants à titre de revenus dans ses déclarations de revenus et ne les a pas comptabilisés non plus à titre de crédits au compte de prêt aux actionnaires de Mme Bonhomme. L’argent est seulement passé d’EAC au compte de Mme Bonhomme sans être comptabilisé ni déclaré par l’entreprise 121 ou Mme Bonhomme. L’explication de M. Bonhomme n’est rien de plus que la description de la situation qu’il aurait souhaitée après coup.

[26]         En fonction de ce qui précède, je conclus que les notes de crédit de 4 990 $ et 9 990 $ étaient des montants de l’entreprise 121 que Mme Bonhomme s’est appropriés.

[27]         Cinq notes de crédit de 4 990 $ ont été déposées au cours des mois précédant la soi-disant entente entre EAC, l’entreprise 121 et Mme Bonhomme. M. Bonhomme a fourni diverses explications quant à la nature de ces montants. Aucune preuve documentaire n’a été déposée pour soutenir ces explications. Je trouve peu crédible l’explication de M. Bonhomme voulant que ces notes de crédit diffèrent quelque peu des notes de crédit identiques qui ont suivi. Par conséquent, je conclus qu’il s’agit de paiements versés par EAC à l’entreprise 121 que Mme Bonhomme s’est appropriés.

[28]         M. Bonhomme a affirmé qu’un dépôt de 10 990 $ et un dépôt de 11 590 $ étaient la combinaison de deux paiements mensuels de 10 000 $ versés à l’entreprise 121 et des remboursements par EAC de dépenses engagées par l’entreprise 121 ou Mme Bonhomme en son nom. Il a désigné d’autres dépôts de 6 190 $ et de 6 490 $ qui, combinés, représentaient selon lui des paiements mensuels de 5 000 $ versés à l’entreprise 121 et des remboursements. Il a également témoigné qu’un dépôt de 3 990 $ correspondait simplement à un remboursement. Aucune preuve documentaire n’a été déposée pour soutenir ces affirmations. Je ne suis pas prêt à les retenir en me fiant uniquement au témoignage de M. Bonhomme. Je conclus que ces montants étaient des paiements versés par EAC à l’entreprise 121 que Mme Bonhomme s’est appropriés.

[29]         M. Bonhomme a témoigné que deux autres notes de crédit de 7 990 $ et de 4 990 $ pourraient correspondre à des virements de l’un des comptes de courtage de Mme Bonhomme, mais n’a pas tenté de retracer ces virements dans les comptes de courtage. Je ne suis pas prêt à retenir cette affirmation en me fiant uniquement au témoignage de M. Bonhomme.

[30]         M. Bonhomme a affirmé qu’une note de crédit de 18 990 $ correspondait à un versement de la compagnie d’assurance de Mme Bonhomme concernant un accident de la route. Encore une fois, M. Bonhomme a négligé de fournir des documents à l’appui ou une explication plausible quant au fait que le lendemain du dépôt de cette note de crédit, la compagnie d’assurance a émis un chèque (plutôt qu’une autre note de crédit) de 19 309,76 $ (montant qui a été admis comme non imposable par le vérificateur). Je ne suis pas prêt à conclure que le montant de 18 990 $ était non imposable en me fiant uniquement au témoignage de M. Bonhomme.

[31]         Il y a deux autres notes de crédit (de 2 990 $ et de 4 490 $) que M. Bonhomme n’a pas abordé dans son témoignage.

[32]         En fonction de ce qui précède, je conclus que le montant de 268 470 $ en notes de crédit correspondait à des appropriations de la part de Mme Bonhomme provenant de l’entreprise 121 et qu’il a été correctement pris en compte dans son revenu.

(2) Montants provenant d’Explorers Alliance Corporation

[33]         Le vérificateur a ajouté un montant de 72 629 $ au revenu de Mme Bonhomme au motif des différents montants qu’il a présentés comme [traduction] « des frais de consultation et des intérêts versés à EAC ».

[34]         Mme Bonhomme a indiqué dans une télécopie envoyée au vérificateur que [traduction] « le montant de 72 629 $ est composé principalement du paiement d’intérêts [sic] sur un montant de 339 000 $ »[10]. La somme de « 339 000 $ » désigne le montant de 339 000 $ dû à l’entreprise 121 par EAC. Cette explication est complètement incohérente par rapport aux explications suivantes fournies par M. Bonhomme lors du procès[11].

[35]         On compte huit dépôts dans cette catégorie. Les cinq premiers dépôts totalisent 32 990 $. M. Bonhomme a reconnu que ces dépôts provenaient tous d’EAC. Dans son témoignage direct, il a expliqué que ces dépôts étaient des paiements versés à Mme Bonhomme pour couvrir les coûts associés à un employé de l’entreprise 121[12]. Je ne puis retenir l’explication de M. Bonhomme. Je note que la balance de vérification de l’entreprise 121 pour 2001 montre qu’un montant total de 0,20 $ a été consacré aux salaires au cours de cette année. Au cours de son contre-interrogatoire, M. Bonhomme a fourni une explication complètement différente. Après avoir initialement affirmé que ces dépôts étaient des frais de consultation, il a ensuite changé d’avis et présenté les dépôts comme des remboursements de dépenses effectués par l’entreprise 121 au nom d’EAC[13]. Aucun document n’a été déposé pour démontrer les montants dépensés, la facturation de ces montants ou comment les cinq totaux ont été déterminés. Ces débours n’ont pas été comptabilisés dans les balances de vérification (comme des dépenses compensées par les revenus après le remboursement ou des prêts à court terme qui ont été remboursés). De même, il n’y a eu aucune entrée dans le compte de prêt aux actionnaires pour comptabiliser la réception de ces montants. Par conséquent, je rejette aussi l’autre explication de M. Bonhomme. Je conclus que ces cinq dépôts étaient des paiements d’intérêts versés à l’entreprise 121 par EAC qui n’ont pas été déclarés par l’entreprise 121 et que Mme Bonhomme s’est appropriés.

[36]         Le sixième dépôt s’élevait à 26 213 $. Mme Bonhomme a fait valoir que ce dépôt était un remboursement de son prêt aux actionnaires. M. Bonhomme a témoigné que l’entreprise 121 avait refinancé son prêt hypothécaire en 2002 et que ce montant représentait les produits de ce refinancement. La balance de vérification pour 2002 montre un remboursement du prêt aux actionnaires en lien avec le refinancement, mais ce remboursement s’élève à 35 288 $. M. Bonhomme n’a pas expliqué pourquoi les dépôts sur le compte bancaire de Mme Bonhomme différaient du montant débité du compte de prêts aux actionnaires. Le montant de 26 213 $ a été présenté dans la feuille de calcul de M. Bonhomme comme des [traduction] « intérêts d’EAC »[14] et, comme il est indiqué ci-dessus, a été présenté dans la télécopie envoyée au vérificateur. Je conclus que ce dépôt correspondait à un paiement d’intérêts versé à l’entreprise 121 par EAC qui n’a pas été déclaré par l’entreprise 121, n’est pas lié au remboursement de 35 388 $ du prêt aux actionnaires comptabilisé et qu’il s’agit donc d’un montant que Mme Bonhomme s’est approprié.

[37]         Le septième dépôt s’élevait à 5 426 $. M. Bonhomme a initialement fait valoir que le montant n’a jamais été déposé sur le compte bancaire de Mme Bonhomme et qu’il représentait plutôt des intérêts imputés à la marge de crédit de l’entreprise 121 par sa banque[15]. Ce montant apparaît dans les balances de vérification de 2002 à titre de dépenses engagées par l’entreprise 121 sous la rubrique [traduction] « intérêts et frais bancaires ». Toutefois, lorsque l’on a porté à l’attention de M. Bonhomme que le même montant avait été déposé en janvier 2003[16], il a modifié son témoignage et présenté le dépôt comme un remboursement de la livraison de carottes de forage et d’outils de forage au nom d’EAC. Il a soutenu que le fait que le montant soit identique à l’intérêt imputé à la marge de crédit était une coïncidence[17]. Selon la balance de vérification comptabilisée et la télécopie envoyée au vérificateur, je conclus que le dépôt était un remboursement par EAC de l’intérêt imputé à 121 sur sa marge de crédit et que Mme Bonhomme s’est approprié ce dépôt.

[38]         M. Bonhomme a affirmé qu’il ne se rappelait pas ce que le dernier dépôt de 8 000 $ représentait. Il a soutenu qu’il s’agissait peut-être d’un prêt accordé à Mme Bonhomme ou du produit de la vente d’actions[18]. À la lumière de la télécopie envoyée au vérificateur et de mes conclusions relativement aux autres montants de cette catégorie, je conclus qu’il s’agissait d’un paiement d’intérêts versé par EAC à l’entreprise 121 que Mme Bonhomme s’est approprié.

[39]         En fonction de ce qui précède, je conclus que le montant de 72 629 $ en dépôts correspondait à des appropriations de la part de Mme Bonhomme provenant de l’entreprise 121 et qu’il a été correctement pris en compte dans ses revenus.

(3) Dépôts de 5 000 $ et plus

[40]         Le vérificateur a ajouté un montant de 131 749 $ au revenu de Mme Bonhomme relativement à d’autres dépôts inexpliqués de 5 000 $ ou plus.

[41]         Dans son témoignage oral, M. Bonhomme a fourni peu de détails pour soutenir l’affirmation de Mme Bonhomme selon laquelle elle ne s’était pas approprié les montants de l’entreprise 121, et ce, malgré le fait que j’ai expliqué très clairement à Mme Bonhomme que si elle désirait que son appel soit accueilli, elle devait mettre l’accent sur l’établissement de la source de chaque dépôt inexpliqué.

[42]         On compte six dépôts de 10 000 $ chacun. M. Bonhomme a fait valoir que certains de ces dépôts ont pu correspondre à des versements de 10 000 $ mensuels d’EAC payés par chèque au lieu d’une note de crédit. Étant donné que les explications de M. Bonhomme concernant les remboursements du prêt aux actionnaires de Mme Bonhomme visaient ces dépôts ou tout autre dépôt dans cette catégorie, je rejette les explications pour les motifs énoncés précédemment.

[43]         Le seul élément de cette catégorie que M. Bonhomme a précisément mentionné était un dépôt de 20 000 $ qu’il affirme être un prêt d’un collègue avec qui il a joué au poker et au blackjack. Ce collègue n’a pas été appelé à témoigner. Je tire une conclusion défavorable de ce fait.

[44]         M. Bonhomme a témoigné que diverses autres sommes avaient également été prêtées à Mme Bonhomme au cours des années en question, mais n’a pas indiqué précisément de dépôts représentant ces sommes. Je conclus qu’aucun des dépôts de 5 000 $ n’était un prêt. Quatre documents qui, selon M. Bonhomme, soutiennent les allégations de prêt ont été déposés en preuve.

                (a)            Le premier document est une lettre écrite manuscrite sur le papier à en-tête d’une entreprise nommée Colbert Drilling and Exploration Co[19]. La lettre, qui date d’avant le début de la vérification, est intrinsèquement incohérente. Elle met en avant un prêt impayé de 16 000 $ [traduction] « payable à Colbert Drilling par 1218395 Ont. Inc. »; à la ligne suivante, il est indiqué que [traduction] « ces sommes ont été prêtées à Janice Bonhomme pour son entreprise ». M. Colbert n’a pas été appelé à témoigner. Je tire une conclusion défavorable de ce fait.

              (b)            Le deuxième document est une liste manuscrite censée montrer les montants dus et les remboursements effectués[20]. Il semble que le montant total prêté s’élevait à 40 500 $. M. Bonhomme a témoigné que ce document se rapportait à un prêt accordé personnellement par M. Colbert. Le document n’est pas signé. L’emprunteur est désigné comme étant M. Bonhomme, et non Mme Bonhomme. Une fois de plus, je tire une conclusion négative du fait que M. Colbert n’a pas été appelé à témoigner.

              (c)            Le troisième document est une liste des montants prétendument prêtés à Mme Bonhomme par le cousin de M. Bonhomme, Jean Claude Bonhomme[21]. Le document n’est pas signé. Le document montre les dates auxquelles les divers montants ont soi-disant été avancés. M. Bonhomme n’a pas fait le lien entre ces montants et les dépôts inexpliqués. Un seul montant peut être facilement lié aux dépôts inexpliqués. Le vérificateur a déjà reconnu que ce montant était non imposable[22]. Une fois de plus, Jean Claude Bonhomme n’a pas été appelé à témoigner. Je tire une conclusion défavorable de ce fait.

              (d)            Le dernier document est une liste de prêts préparée par M. Bonhomme au cours de la vérification[23]. Une liste de prêts préparée par un témoin ne constitue pas une preuve fiable des prêts souscrits. Aucun document n’a été déposé en preuve pour appuyer ces prêts, outre ceux déjà mentionnés précédemment, et les prêteurs n’ont pas été appelés à témoigner[24]. La liste combine les montants prêtés à l’entreprise 121 avec les montants prêtés à Mme Bonhomme. Aucun rapprochement évident ne peut être effectué entre cette liste et les dépôts inexpliqués, et M. Bonhomme n’a pas tenté de le faire dans son témoignage. Il m’est impossible de savoir si les montants présentés à cet égard ont été inclus ou non dans la liste de dépôts inexpliqués. Cette liste comprend le prêt de 20 000 $ mentionné précédemment. Le prétendu prêt de 16 000 $ de Colbert Drilling est indiqué comme étant un prêt de M. Colbert. Il n’y aucune mention du prêt de 40 500$ avancé par M. Colbert personnellement. La liste comprend également divers soldes de cartes de crédit. Aucun renseignement n’indique si les soldes de cartes de crédit étaient des avances de fonds ou simplement des achats accumulés.

[45]         En fonction de ce qui précède, je conclus que le montant de 131 749 $ en dépôts inexpliqués de 5 000 $ ou plus représentait des appropriations de la part de Mme Bonhomme provenant de l’entreprise 121 et qu’il a été correctement pris en compte dans son revenu.

(4) Dépôts variant entre 1 000 $ et 5 000 $

[46]         Le vérificateur a ajouté un montant de 68 362 $ au revenu de Mme Bonhomme relativement à d’autres dépôts inexpliqués variant entre 1 000 $ et 5 000 $. Le vérificateur a établi la somme à 136 726 $, mais a choisi de n’ajouter que 50 % de celle-ci au revenu de Mme Bonhomme. J’estime que cette décision était raisonnable.

[47]         Malgré ma recommandation contraire, Mme Bonhomme n’a fourni aucune preuve orale ou documentaire des motifs selon lesquels ces montants ne devraient pas être ajoutés à son revenu. Étant que les explications concernant les prêts de tiers ou les remboursements de prêts aux actionnaires visaient à couvrir ces dépôts, je rejette ces explications pour les motifs précités.

[48]         En fonction de ce qui précède, je conclus que le montant de 68 362 $ en dépôts inexpliqués représentait des appropriations de la part de Mme Bonhomme provenant de l’entreprise 121 et qu’il a été correctement pris en compte dans son revenu.

(5) Années frappées de prescription

[49]         Les années d’imposition 2001 et 2003 de Mme Bonhomme sont frappées de prescription. Par conséquent, pour ces années, je dois décider si Mme Bonhomme a fait de fausses déclarations en ne déclarant pas les dépôts sur son compte bancaire à titre de revenu et si ces fausses déclarations étaient attribuables à de l’inattention, à de la négligence ou à une omission volontaire.

[50]         Je n’ai aucune hésitation à conclure que Mme Bonhomme a fait de fausses déclarations en ne déclarant pas les dépôts de 2001 et de 2003 dans ses déclarations de revenus. Compte tenu de l’absence de livres et de dossiers pertinents, je conclus qu’il était approprié pour le vérificateur de procéder à une analyse des dépôts bancaires. Cette analyse a révélé un nombre important de dépôts inexpliqués. En 2001, Mme Bonhomme a déclaré un revenu de 1 472 $ seulement. Le ministre a ajouté un montant de 76 210 $ au revenu de Mme Bonhomme à la suite de la vérification des dépôts bancaires. Mme Bonhomme a déclaré des revenus de 34 349 $ pour l’année d’imposition 2003. Le ministre a ajouté un montant de 91 557 $ au revenu de Mme Bonhomme à la suite de la vérification des dépôts bancaires. Comme il est indiqué en détail ci-dessus, je rejette l’explication de Mme Bonhomme selon laquelle ces montants ne devraient pas être traités comme un revenu. Devant d’importants dépôts inexpliqués, des sources identifiables de revenus qui pourraient avoir donné lieu à ces dépôts et l’absence d’une autre explication plausible, il convient de conclure que Mme Bonhomme a fait de fausses déclarations en ne déclarant pas ces montants dans son revenu[25].

[51]         Il serait difficile de présenter Mme Bonhomme comme étant une personne diligente à la lumière de sa situation fiscale de 2001 à 2005. Au mieux, elle s’est montrée indifférente quant à l’acquittement de ses obligations fiscales. Sa déclaration de revenus de 2001 est la seule déclaration produite en temps au cours de cette période. Sa déclaration de revenus de 2003 a été produite en 2005 seulement. Ses déclarations de revenus de 2002, 2004 et 2005 ont été produites en 2007. En 2001 et en 2002, Mme Bonhomme a déposé sur son compte bancaire personnel des montants appartenant à l’entreprise 121. À la fin de l’année 2002, le compte bancaire de l’entreprise a été fermé et toutes les opérations bancaires de l’entreprise 121 à partir de ce moment ont été effectuées à partir du compte personnel de Mme Bonhomme. Aucune explication plausible n’a été fournie pour justifier cette situation. Malgré la fusion des comptes, aucun dossier n’a été tenu à jour pour déterminer la source des dépôts. Mme Bonhomme était l’unique administratrice, dirigeante et actionnaire de l’entreprise 121. Pour pouvoir produire adéquatement ses déclarations de revenus pour 2001 à 2005, il aurait fallu qu’elle tienne à jour des livres et des registres propres à cette entreprise. Elle ne l’a pas fait. Elle n’a pas fait en sorte que l’entreprise 121 tienne à jour des livres et des registres contemporains. Mme Bonhomme a plaidé coupable devant la Cour de justice de l’Ontario de ne pas avoir produit de déclaration de revenus pour l’entreprise 121, en violation d’une exigence à cet égard. Les déclarations produites ont été établies à partir de renseignements partiels et ne reflétaient pas les sources de revenus importantes qui, selon Mme Bonhomme, ont été reçues par l’entreprise 121. Mme Bonhomme soutient qu’une grande partie de l’argent reçu de la part de l’entreprise 121 visait des remboursements de son prêt aux actionnaires, mais elle a omis de tenir à jour les livres et les registres appropriés qui auraient indiqué le montant de ce prêt ainsi que les crédits et débits pertinents à cet égard.

[52]         En fonction de ce qui précède, je conclus que le ministre est parvenu à revenir sur les années par ailleurs frappées de prescription de Mme Bonhomme relativement aux dépôts inexpliqués.

(6) Pénalités pour faute lourde

[53]         Le ministre a imposé des pénalités pour faute lourde pour les trois premières catégories de dépôts inexpliqués. Au total, ces trois catégories représentent un revenu non déclaré de 472 848 $ perçu entre 2001 et 2005. Il s’agit d’un montant important de revenu non déclaré. Au cours de cette même période, Mme Bonhomme a déclaré un revenu s’élevant seulement à 101 273 $. Par conséquent, son revenu déclaré ne représente qu’environ 20 % de son revenu total.

[54]         Mme Bonhomme a fait preuve d’indifférence quant à savoir si elle se conformait ou non à la Loi de l’impôt sur le revenu. Comme il est indiqué ci-dessus, elle a produit ses déclarations de revenus en retard au cours de quatre des cinq années en question. Elle a regroupé inutilement ses affaires et celles de l’entreprise 121. Ni elle ni l’entreprise 121 n’ont tenu à jour des livres et des registres appropriés qui leur auraient permis d’établir ses revenus. Elle n’a produit les déclarations de revenus de l’entreprise 121 que lorsqu’elle a été forcée de le faire sous peine d’emprisonnement.

[55]         À tout le moins, Mme Bonhomme savait que des montants importants étaient déposés sur son compte bancaire personnel, que ni elle ni l’entreprise 121 ne produisaient de déclaration de revenus et que le ministre la pressait de le faire. Les dépôts sur lesquels les pénalités ont été appliquées n’étaient pas négligeables. À l’exception de trois d’entre eux, tous les dépôts s’élevaient à 5 000 $ ou plus. La principale source de revenus de Mme Bonhomme et de son conjoint de 2003 à 2005 a été le montant de 10 000 $ par mois reçu de la part de l’entreprise 121. Ni l’entreprise 121 ni Mme Bonhomme n’ont tenu compte de ces montants dans leurs déclarations de revenus. Mme Bonhomme se les est simplement appropriés, comme elle l’a fait pour les autres dépôts.

[56]         Mme Bonhomme a très peu témoigné au cours du procès. Elle a simplement dit qu’elle s’était fiée à M. Bonhomme pour préparer ses déclarations de revenus et qu’elle croyait qu’il l’avait fait correctement. Elle a fait valoir qu’elle n’avait pas examiné ses déclarations de revenus, se contentant de les signer[26]. Il est clair que Mme Bonhomme n’était guère au courant, voire nullement, de la situation de l’entreprise 121, et encore moins de sa propre situation fiscale. M. Bonhomme contrôlait tous les aspects de l’entreprise 121 et les intérêts de Mme Bonhomme dans cette entreprise. Il a été mandaté par Mme Bonhomme ou par l’entreprise 121 pour fournir des services à EAC et à d’autres entités en leur nom. Il a perçu de modestes honoraires en échange de ces services. Ceci dit, je ne suis pas disposé à permettre que Mme Bonhomme utilise M. Bonhomme comme bouclier. Ses déclarations de revenus et la tenue à jour de livres et de registres appropriés, tant pour elle-même que pour l’entreprise 121, relèvent de sa responsabilité et non de celle de son conjoint. M. Bonhomme n’est pas un comptable indépendant ayant commis une faute qui aurait pu échapper à la vigilance de Mme Bonhomme. Il s’agit de son conjoint, qui a un intérêt financier clair à payer moins d’impôts. Bien qu’il possède une expérience en comptabilité et dans la préparation de déclarations de revenus, il n’est pas professionnel et elle a eu tort de se fier aveuglément à lui. Alors qu’elle savait que des montants substantiels étaient déposés sur son compte bancaire et qu’aucune déclaration de revenus n’était produite, elle n’a pris aucune mesure pour s’assurer de déclarer ses revenus correctement.

[57]         Je n’admets pas non plus l’argument de Mme Bonhomme selon lequel le problème est entièrement attribuable au fait qu’elle n’avait pas les moyens de payer un comptable pour préparer ses déclarations de revenus et celles de l’entreprise 121. J’estime que le problème découle entièrement du fait qu’elle et son conjoint ont choisi d’utiliser leurs ressources financières pour soutenir les investissements miniers de Mme Bonhomme au lieu de s’acquitter de leurs obligations en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu. Essentiellement, Mme Bonhomme soutient que si elle n’a pas déclaré les revenus qu’elle gagnait, c’est qu’elle avait déjà dépensé ces revenus et qu’elle n’avait pas les moyens d’embaucher un comptable. Cela ne constitue aucunement une défense.

[58]         En fonction de ce qui précède, je conclus que les pénalités pour faute lourde imposées par le ministre étaient appropriées.

B. Avantages relatifs à un logement

[59]         L’entreprise 121 a fait l’achat du bungalow surélevé comptant trois chambres et situé à Timmins (Ontario), en 1997[27]. Initialement, la maison était utilisée exclusivement à des fins résidentielles par Mme Bonhomme et sa famille. M. Bonhomme a témoigné qu’à partir de septembre 2001 et pendant toute la durée de la période visée, l’entreprise 121 a commencé à utiliser le sous-sol et le garage à des fins professionnelles. Mme Bonhomme et sa famille ont continué à habiter dans la partie restante de la maison. Le ministre a évalué les avantages conférés à un actionnaire de Mme Bonhomme relativement à son utilisation de la maison. Je conclus que les montants de la cotisation établie devaient être réduits pour chacune des années.

[60]         Dans les décisions Canada c. Fingold[28] et Youngman v. The Queen[29], la Cour d’appel fédérale a établi que pour déterminer la valeur des avantages tirés d’une maison, je devais d’abord déterminer en quoi consistent les avantages (c’est-à-dire ce que l’entreprise 121 a permis à Mme Bonhomme), puis déterminer quel aurait été le prix à payer par Mme Bonhomme, dans des circonstances comparables, pour obtenir les mêmes avantages d’une entreprise dont elle n’était pas actionnaire.

[61]        Il est clair que les avantages conférés par l’entreprise 121 à Mme Bonhomme consistaient à lui procurer, à elle et à sa famille, une maison dans laquelle ils souhaitaient habiter, dans la ville où ils souhaitaient résider[30]. La maison a été achetée par l’entreprise 121 en 1997 comme maison familiale. À cette époque, l’entreprise 121 possédait un bureau à un autre endroit. Ce n’est qu’en septembre 2001 que l’entreprise 121 a quitté son bureau et a commencé à utiliser le sous-sol et le garage de la maison comme bureau. Le fait de décider d’utiliser une partie de la maison à des fins professionnelles ne change rien au fait que Mme Bonhomme en tirait un avantage. L’objet principal visé par l’entreprise 121 en acquérant la maison était de fournir à Mme Bonhomme et à sa famille un endroit où habiter.

[62]        Après avoir établi que l’avantage conféré à Mme Bonhomme était l’utilisation d’une maison (ou d’une partie de celle-ci), la prochaine étape consistait à établir les montants qu’elle aurait dû débourser pour obtenir le même avantage d’une entreprise dont elle n’était pas actionnaire.

[63]         Dans ses déclarations de revenus, l’entreprise 121 a déclaré un revenu de location de 6 000 $ par année de la part de Mme Bonhomme. Les écritures de journal de rajustement effectuées par l’entreprise 121 indiquent que Mme Bonhomme a payé ce loyer en achetant des biens et des services pour l’entreprise 121. Mme Bonhomme soutient que la somme de 6 000 $ est le montant qu’elle aurait eu à débourser par année pour obtenir le même avantage d’une entreprise indépendante. Par conséquent, Mme Bonhomme fait valoir que ses cotisations n’auraient pas dû être établies en fonction de l’utilisation de la maison puisqu’elle avait déjà payé un montant approprié en échange.

[64]         Le ministre a établi que les avantages relatifs à un logement de Mme Bonhomme sont de l’ordre de 20 000 $ à 30 000 $ par année. Le vérificateur a calculé les avantages en additionnant deux composants différents, soit le rendement du capital investi théorique et les dépenses personnelles.

                       (a)               Rendement du capital investi : Le vérificateur a calculé ce qui lui semblait être un rendement approprié que l’entreprise 121 aurait pu tirer du capital immobilisé pour la maison si l’entreprise avait utilisé ce capital à des fins autres que pour fournir un logement à Mme Bonhomme. Pour ce faire, il a utilisé le montant le plus élevé entre le coût de la maison et ce qu’il estimait être la juste valeur marchande de la maison au début de chaque année, montant qu’il a multiplié ensuite par le taux d’intérêt moyen prescrit énoncé à l’alinéa 4301c) du Règlement pour l’année.

                      (b)               Dépenses personnelles : Le vérificateur a établi le total des montants versés au cours de l’année pour le paiement des impôts fonciers, des assurances, des services publics, de l’entretien et de l’intérêt hypothécaire et a inclus ces montants dans les avantages relatifs à un logement.

[65]         Je ne suis pas convaincu par l’approche adoptée par les deux parties ni par les éléments de preuve qui m’ont été soumis. Il reste trop de questions non résolues par les éléments de preuve. C’est au ministre que revient le fardeau de la preuve pour les années 2001 et 2003, puisque ces années sont frappées de prescription. Le fardeau de la preuve pour les autres années revient à Mme Bonhomme. Je vais examiner chaque groupe d’années individuellement.

(1) Années frappées de prescription

[66]         Les années d’imposition 2001 et 2003 de Mme Bonhomme sont frappées de prescription. Pour ces années, le ministre doit prouver que Mme Bonhomme a bénéficié d’un avantage locatif supérieur à 6 000 $ par année. Quatre éléments de l’approche adoptée par le vérificateur me préoccupent :

(a) son calcul du rendement du capital investi;

(b) son calcul des dépenses personnelles;

(c) son omission de tenir compte de l’utilisation de la maison par l’entreprise 121;

(d) son omission de tenir compte du loyer payé par Mme Bonhomme.

[67]         Ma première préoccupation concerne la méthode utilisée par le vérificateur pour calculer le rendement du capital investi. Comme il est indiqué ci-dessus, il a utilisé le montant le plus élevé entre le coût de la maison et la juste valeur marchande de la maison chaque année et a multiplié ce montant par le taux moyen prescrit pour l’année. Je ne suis pas préoccupé par l’utilisation des taux prescrits par le vérificateur[31]. Je le suis, toutefois, par le montant de base auquel il applique ces taux.

[68]         Le vérificateur a amorcé le calcul avec une juste valeur marchande présumée de 215 000 $ en 2001 à laquelle il a ensuite ajouté l’appréciation présumée de 5 000 $ par année. Le ministre ne peut pas formuler d’hypothèses de fait lorsqu’il établit une cotisation pour des années frappées de prescription. L’intimée n’a pas fourni de preuve quant à la valeur marchande réelle de la maison en 2001 et en 2003. Par conséquent, je ne suis pas prêt à permettre à l’intimée d’utiliser la juste valeur marchande pour calculer les avantages relatifs à un logement au cours de ces années.

[69]         Puisque la méthode du vérificateur consistait à utiliser le montant le plus élevé entre le coût et la juste valeur marchande de la maison, en l’absence d’éléments de preuve de la juste valeur marchande, il y a lieu d’utiliser plutôt le coût de la propriété dans ces calculs. La propriété a été achetée au prix de 192 329 $, ce qui inclut les débours[32]. Les ajustements consécutifs à cette substitution sont présentés dans le tableau ci-dessous.

[70]         Ma deuxième préoccupation concerne la méthodologie utilisée par le vérificateur pour calculer les dépenses personnelles. Le vérificateur a inclus les intérêts versés par l’entreprise 121 sur son prêt hypothécaire chaque année. J’admets qu’il convenait d’inclure ce montant en 2001. Les intérêts ont été payés par l’entreprise 121 et représentent des coûts engagés par l’entreprise 121 dans le but de fournir un logement à Mme Bonhomme. Toutefois, la propriété a été refinancée en 2002 lorsque la banque de l’entreprise 121 a demandé le remboursement de ses prêts. L’entreprise avait initialement emprunté 125 000 $ pour acheter la propriété en 1997. Le solde du prêt au moment du refinancement s’élevait à 96 446 $[33]. L’entreprise a emprunté 162 056 $ au moment du refinancement. Le montant supplémentaire de 65 610 $ emprunté lors du refinancement n’a pas été clairement utilisé pour acquérir la maison et n’aurait donc pas dû être inclus dans le calcul des avantages relatifs à un logement. À mon avis, la méthode appropriée pour établir le montant d’intérêt à inclure dans les avantages relatifs à un logement à un moment ultérieur au refinancement consiste à multiplier les intérêts payés par 40,5 % (ce qui représente le ratio de l’emprunt non lié à la maison par rapport à l’emprunt total[34]). L’ajustement consécutif à cette modification est présenté dans le tableau ci-dessous.

[71]         Je ne suis pas entièrement convaincu par la décision du vérificateur d’inclure les paiements d’intérêt dans les avantages. Il a calculé le rendement des fonds empruntés et ajouté le coût de ces fonds aux avantages. Il est possible que ce calcul entraîne une double comptabilisation. J’estime qu’il aurait été plus approprié d’utiliser un rendement plus élevé et de ne pas tenir compte des frais d’intérêt. Toutefois, puisque les parties n’ont formulé aucune observation à cet égard et que j’estime que le taux de rendement utilisé par le vérificateur était beaucoup trop bas dès le départ, je suis prêt à retenir la méthode utilisée.

[72]         Les autres éléments que le vérificateur a inclus dans les dépenses personnelles sont les impôts fonciers, les services publics, les assurances et les frais d’entretien. Même si le vérificateur a conclu que Mme Bonhomme avait assumé elle-même ces dépenses, il a quand même choisi de les inclure dans les avantages relatifs à un logement. Il l’a fait au motif que le prêt aux actionnaires de Mme Bonhomme a été crédité incorrectement avec d’autres paiements qui excédaient le montant de ces dépenses personnelles. Son raisonnement n’a pas été remis en question par Mme Bonhomme et je le retiens.

[73]         Ma troisième préoccupation concerne le fait que l’auditeur n’a pas pris en compte l’utilisation de la maison par l’entreprise 121 à des fins professionnelles. M. Bonhomme a témoigné que, de septembre 2001 à décembre 2005, le sous-sol et le garage de la maison ont été utilisés aux fins professionnelles de l’entreprise 121. Ces parties de la maison semblent représenter environ 50 % de sa superficie en pieds carrés. Les éléments de preuve présentés par M. Bonhomme relativement à ce point n’ont pas été contestés sérieusement lors du contre-interrogatoire. Bien que j’aie généralement considéré M. Bonhomme comme un témoin peu fiable, je suis prêt à retenir la preuve présentée sur ce point. Par conséquent, j’estime que les avantages relatifs à un logement de Mme Bonhomme auraient dû être réduits de 50 % au cours de la période correspondante.

[74]         Ma dernière préoccupation concerne le fait que l’auditeur n’a pas réduit le montant d’avantages relatifs à un logement de Mme Bonhomme pour tenir compte du revenu de location de 6 000 $ que l’entreprise 121 a déclaré avoir reçu d’elle. Les raisons fournies par le vérificateur pour expliquer ces omissions n’étaient pas satisfaisantes. J’estime que les avantages auraient dû être réduits en fonction de ces montants.

 

[75]         Voici un résumé des ajustements qui, selon moi, auraient dû être apportés aux années frappées de prescription.

 
2001
2003
Avantages établis
29 688 $
25 225 $
moins le rendement du capital investi établi
(11 825 $)
(6 750 $)
plus le rendement du capital investi démontré
10 578 $[35]
5 770 $[36]
moins les frais d’intérêt inappropriés
-           
(4 605 $[37])
avantages avant l’utilisation à des fins professionnelles
28 411 $
19 640 $
moins l’utilisation de la maison à des fins professionnelles[38]
(4 740 $)
(9 820 $)
avantages ajustés
23 701 $
9 820 $
moins le loyer versé
(6 000 $)
(6 000 $)
avantages démontrés
17 701 $
3 820 $

 

[76]         Même en tenant compte des réductions des avantages, j’estime que les avantages restants de 17 701 $ et de 3 820 $ qui n’ont pas été entièrement déclarés sont des omissions attribuables à de l’inattention ou à de la négligence. Mme Bonhomme n’a clairement pas tenté d’évaluer correctement les avantages qu’elle recevait.

[77]         Pour les motifs qui précèdent, les avantages relatifs à un logement de Mme Bonhomme en 2001 et en 2003 seront réduits de 11 987 $[39] et de 21 405 $[40], respectivement.

(2) Années non frappées de prescription

[78]         Le ministre a formulé des hypothèses de fait selon lesquelles les avantages relatifs à un logement reçus par Mme Bonhomme en 2002, 2004 et 2005 s’élevaient à 20 809 $, à 24 848 $ et à 24 396 $, respectivement.

[79]         Mme Bonhomme n’a fourni aucune preuve pour soutenir sa position selon laquelle les avantages appropriés correspondaient au montant de 6 000 $ déjà déclaré par l’entreprise 121. Elle n’a pas réussi à expliquer adéquatement comment le montant de 6 000 $ a été calculé. Elle n’a nullement tenté de contester l’approche utilisée par le vérificateur ou tout autre élément à cet égard. Elle n’a pas remis en question le caractère approprié du taux de rendement utilisé par le vérificateur. Elle n’a pas fourni de preuve quant à la juste valeur marchande réelle de la propriété au cours de ces années et encore moins de preuve d’experts. Elle n’a pas remis en question le choix de la juste valeur marchande de la propriété, plutôt que son coût, comme point de départ pour déterminer le rendement du capital investi. Elle n’a remis en question aucune des dépenses personnelles. Enfin, elle n’a pas remis en question les erreurs alléguées relatives au compte de prêt aux actionnaires que le vérificateur a utilisé pour justifier l’ajout aux avantages relatifs à un logement des intérêts, des impôts fonciers, des assurances, des services publics et des frais d’entretien qu’elle a payés. En résumé, Mme Bonhomme n’a pas réussi à réfuter les hypothèses du ministre.

[80]         Ceci dit, malgré le fait que ces arguments n’ont pas été soulevés par Mme Bonhomme, je ne peux faire abstraction de l’omission du vérificateur de tenir compte du fait qu’une partie des intérêts n’était pas liée à l’achat de la maison, que la maison était utilisée dans une proportion de 50 % à des fins professionnelles et que Mme Bonhomme a versé un loyer de 6 000 $. Il s’agit d’erreurs flagrantes dont je ne peux pas simplement faire abstraction.

[81]         En fonction de ce qui précède, voici un résumé des ajustements qui, selon moi, auraient dû être apportés aux années non frappées de prescription :

 

2002

2004

2005

Avantages établis

20 809 $

24 848 $

24 396 $

Moins l’intérêt non lié à la maison

(110 $)[41]

(4 392 $)[42]

(4 148 $)[43]

avantages avant l’utilisation à des fins professionnelles

20 699 $

20 456 $

20 248 $

moins 50 % pour l’utilisation à des fins professionnelles

(10 350 $)

(10 228 $)

(10 124 $)

avantages ajustés

10 349 $

10 228 $

10 124 $

moins le loyer versé

(6 000 $)

(6 000 $)

(6 000 $)

avantages appropriés

4 349 $

4 228 $

4 124 $

 

[82]         Pour les motifs qui précèdent, les avantages relatifs à un logement pour les années 2002, 2004 et 2005 seront réduits de 16 460 $, 20 620 $ et 20 272 $, respectivement[44].

II. Années d’imposition 2006 à 2009

[83]         Mme Bonhomme a déclaré des frais d’exploration au Canada de 120 000 $ au cours de chacune des années d’imposition 2006, 2007 et 2008 et de 70 000 $ au cours son année d’imposition 2009. Comme il est indiqué ci-dessus, Mme Bonhomme fait valoir qu’en 2003, EAC a conclu une entente en vertu de laquelle Mme Bonhomme et l’entreprise 121 fourniraient des services à EAC en échange d’un paiement de 10 000 $ par mois et d’une renonciation équivalente aux frais d’exploration au Canada. De 2006 à 2009, ces paiements ont été versés à Mme Bonhomme personnellement. Mme Bonhomme a déclaré ces versements dans ses revenus. Elle a ensuite déclaré des montants correspondants de frais d’exploration au Canada pour les compenser. Je suis d’avis qu’elle n’avait pas le droit de le faire.

[84]         Mme Bonhomme n’a pas témoigné relativement aux frais d’exploration au Canada qu’elle a déclarés. Tous les éléments de preuve de son appel de cette question ont été fournis par M. Bonhomme. Comme il est indiqué ci-dessus, les éléments de preuve fournis par M. Bonhomme ne m’ont pas semblé fiables. Son témoignage sur cette question m’est apparu particulièrement peu fiable.

[85]         Tout au long de son appel, Mme Bonhomme a offert une série d’explications incohérentes et parfois incompréhensibles relativement aux frais d’exploration au Canada qu’elle a déclarés. Voici un résumé de ces explications dans l’ordre où elles ont été présentées :

                   (a)          Les dépenses ont été [traduction] « engagées par elle, en son nom ou dans [son] intérêt »[45].

                  (b)          Elle faisait partie d’une coentreprise[46].

                  (c)          Elle avait conclu une [traduction] « entente semblable à un séquestre, à une forclusion, à une entente amicale selon laquelle [elle] prendrait en main la gestion des actifs en échange de 10 000 $ par mois et de frais d’exploration au Canada connexes… Le principe est que si vous gérez quelque chose et qu’il y existe un crédit pour frais d’exploration au Canada, vous êtes admissible à y renoncer à titre privé ou à titre de membre d’un syndicat »[47].

                  (d)          Elle détenait des [traduction] « droits de redevance » et une « participation aux bénéfices nets » relativement à des propriétés exploitées par EAC[48] et elle cherchait à protéger ses intérêts à l’égard de ces redevances et sa dette impayée due par EAC[49].

                   (e)          Elle faisait partie d’une société de personnes[50].

                    (f)          Elle était membre d’une société à responsabilité limitée pour les frais d’exploration au Canada[51].

[86]         La seule position que Mme Bonhomme n’a pas semblé faire valoir à un moment ou un autre est qu’elle a perçu des frais d’exploration au Canada par l’intermédiaire d’actions accréditives. Cela s’explique sans doute par le fait qu’elle n’était pas actionnaire d’EAC au cours des années en question.

[87]         Le soir avant que les parties présentent leurs observations, j’ai avisé l’avocat de M. Bonhomme qu’en raison du témoignage vague de M. Bonhomme et de la complexité des dispositions sur les frais d’exploration au Canada de la Loi, je désirais qu’au moment de livrer ses observations, il me décrive les dispositions précises selon lesquelles Mme Bonhomme affirmait être autorisée à déclarer les dépenses. Il ne l’a pas fait. Il a mentionné le paragraphe 66(10.4), mais n’a pu me fournir d’explication sur son application. Ses observations sur le paragraphe se sont limitées à la lecture à haute voix du préambule, avant de passer à une discussion sur une société de personnes présumée regroupant Mme Bonhomme et EAC. Le paragraphe 66(10.4) n’aborde pas les sociétés de personnes ni la myriade de relations que M. Bonhomme a décrites dans son témoignage. Il porte sur les renonciations d’une compagnie en faveur d’une autre. Puisque Mme Bonhomme n’est pas une personne morale, je ne vois pas comment le paragraphe pourrait s’appliquer.

[88]         L’avocat de M. Bonhomme ne m’a indiqué aucun autre article de la Loi.

[89]         En définitive, il m’a semblé pendant l’argumentation que Mme Bonhomme avait finalement tranché en faveur d’une seule position expliquant pourquoi elle pensait avoir le droit de déclarer des frais d’exploration au Canada. À la fin des observations de l’avocat sur la question, j’ai énoncé avec soin ce que je croyais avoir compris de cette position. L’avocat de Mme Bonhomme était d’accord pour dire que ce qui suit explique pourquoi Mme Bonhomme estime avoir le droit de déclarer des frais d’exploration au Canada[52] :

« Mme Bonhomme est une associée d’EAC. Elle est admissible au remboursement des frais d’exploration au Canada à partir de l’ensemble de ressources d’EAC à titre d’associée ayant accepté de fournir des services à EAC en échange d’argent et de frais d’exploration au Canada. »

[90]         Cette position peut être facilement rejetée. Il n’existe aucune preuve fiable selon laquelle Mme Bonhomme et EAC étaient membres d’une société de personnes. Aucune entente de société de personnes écrite n’a été déposée en preuve et aucune description des dispositions d’une telle entente n’a été fournie. Aucune description fiable des associés n’a été fournie. Aucune déclaration de revenus de société de personnes n’a été produite et aucun formulaire T5013 n’a été délivré. Mme Bonhomme n’a pas déposé en preuve les déclarations de revenus d’EAC, si bien que je n’ai aucune façon de savoir si l’entreprise a déclaré ou non un revenu de société de personnes. Je tire une conclusion défavorable de l’omission des représentants d’EAC de venir témoigner de l’existence d’une société de personnes.

[91]         Comme il est indiqué ci-dessus, aucune preuve fiable n’a été fournie quant à l’identité des associés de la société de personnes. Mme Bonhomme a présenté l’argument comme si elle et EAC étaient les seules associées. Toutefois, l’entreprise 121 a déclaré des frais d’exploration au Canada découlant de la même relation dans ses déclarations de revenus de 2003 à 2005. Par conséquent, si une société de personnes avait existé, l’entreprise 121 en aurait été associée à cette époque. On n’a mentionné aucun changement dans la société de personnes de l’entreprise 121 à Mme Bonhomme, ce qui indique qu’elles auraient été associées de 2003 à 2009. J’ai entendu des témoignages de l’existence d’autres créditeurs qui étaient également associés de la société de personnes et du fait que, à partir de 2006, la société de personnes était gérée par une entreprise appelée EAC Creditors Inc.[53] J’ai entendu des témoignages selon lesquels EAC a cédé [traduction] « tous ses intérêts dans des propriétés minières » à une filiale d’EAC appelée International Explorers & Prospectors Inc. (« IEPI ») en 2008, ce qui m’amène à me demander comment ou pourquoi EAC serait restée associée de la société de personnes et si IEPI est devenue associée et comment[54].

[92]         Il n’y avait aucune indication des activités que les associés étaient censés mener en commun en vue de réaliser un bénéfice. Il est clair que Mme Bonhomme fournissait des services à EAC, mais cela ne fait pas d’elle une associée d’EAC. J’ai demandé à l’avocat de Mme Bonhomme comment la relation d’EAC avec Mme Bonhomme différait de ma relation avec mon nettoyeur à sec (il me fournit un service et je le paie). Il n’a pas pu me fournir d’explication.

[93]         À plusieurs reprises, M. Bonhomme a en fait témoigné que Mme Bonhomme ne faisait pas partie d’une société de personnes avec EAC. Par exemple, il a affirmé ce qui suit :
[traduction]

« À ce moment-là, je ne voulais pas être associée avec [EAC]. Je contrôlais 1,3 million de dollars de jugements selon la faillite et j’ai plutôt conclu une entente amicale avec les créanciers, et j’ai accepté de travailler en échange des frais d’exploration au Canada… »[55]

« Les [avocats de Mme Bonhomme] voulait que je dise que j’étais associé avec [EAC]. Et j’ai refusé parce qu’ils étaient en faillite et j’ai conclu une entente amicale avec les créanciers. »[56]

« J’ai toujours refusé de m’associer à [EAC]. » [57]

[94]         J’ai conclu que « je/j’ » utilisé par M. Bonhomme dans les déclarations précédentes désignait Mme Bonhomme et/ou l’entreprise 121. M. Bonhomme a souvent eu de la difficulté à établir une distinction entre lui-même, Mme Bonhomme et l’entreprise 121.

[95]         Même si Mme Bonhomme était associée à EAC au sein d’une société de personnes, son explication sur la provenance des frais d’exploration au Canada demeure illogique. Pour réitérer, Mme Bonhomme a affirmé [traduction] « être admissible au remboursement des frais d’exploration au Canada grâce à la réserve de ressources d’EAC, à titre d’associée ayant accepté de fournir des services à EAC en échange d’argent et de frais d’exploration au Canada ». Une société de personnes engage des frais d’exploration au Canada et les attribue ensuite à ses associés. Dans ses explications visant à savoir pourquoi elle devrait être en mesure de déclarer ces frais, Mme Bonhomme indique clairement que les dépenses sont assumées par EAC, et non la société de personnes. Tout au long de son témoignage, M. Bonhomme a parlé des frais d’exploration au Canada comme étant transférés[58] ou accordés par EAC[59] ou faisant l’objet d’une renonciation de la part[60] d’EAC. À une seule occasion, il les présente comme [traduction] « ce à quoi la société de personnes a convenu de renoncer »[61]. En outre, selon son explication, Mme Bonhomme a droit aux frais non pas en vertu de son statut d’associée, mais en raison de l’échange de services qu’elle a offerts. Mme Bonhomme ne m’a pas indiqué de mécanisme dans la Loi en vertu duquel un fournisseur de services pourrait être payé par des frais d’exploration au Canada. Enfin, il n’existe aucune preuve que cette société de personnes a engagé des dépenses qui pourraient être admissibles à titre de frais d’exploration au Canada. Tous les éléments de preuve indiquent que dans la mesure où ces dépenses ont été engagées, elles l’ont été par EAC ou IEPI.

[96]         En définitive, il semble que la déclaration par Mme Bonhomme des frais d’exploration au Canada n’est guère plus qu’un prétexte commode pour éviter de payer des impôts sur les revenus de 430 000 $ gagnés entre 2006 et 2009. Je n’ai entendu aucune explication rationnelle justifiant qu’elle ait droit à ces frais. Il n’existe aucune preuve d’une tierce partie et aucune preuve documentaire fiable. Ce n’est pas mon rôle de me prononcer sur les témoignages contradictoires et peu fiables de M. Bonhomme dans l’espoir d’en tirer une quelconque substance qui s’harmoniserait avec les complexités de la Loi. C’est à Mme Bonhomme qu’il incombe de me présenter des éléments de preuve et de m’expliquer comment ceux-ci satisfont à la Loi. Elle ne l’a pas fait. Je ne vais pas passer la Loi en revue et exclure tous les moyens possibles par lesquels Mme Bonhomme aurait pu avoir droit aux frais d’exploration au Canada à la lumière des explications sans cesse changeantes qu’elle a fournies quant à son droit à ces frais. Elle a eu suffisamment de temps et de possibilités de clarifier sa position. La position précédente est la plus crédible qu’elle a su présenter. J’estime que cette position est insoutenable. Cela est suffisant pour statuer sur l’appel de Mme Bonhomme pour les années d’imposition 2006 à 2009.

[97]         Ceci dit, puisque Mme Bonhomme a déjà interjeté appel d’une décision prise dans une affaire connexe et compte tenu de sa tendance à trouver de nouvelles raisons pour lesquelles elle devrait avoir le droit de déclarer des frais d’exploration au Canada, j’estime que je dois tirer d’autres conclusions de fait au bénéfice de la Cour d’appel fédérale, si elle décide d’en appeler également de la présente décision. Par conséquent, je tire les conclusions suivantes :

                            (a)          Mme Bonhomme n’était pas actionnaire d’EAC après 2002;

                           (b)          Mme Bonhomme est devenue actionnaire d’IEPI en 2008 à l’occasion d’une conversion de dette;

                            (c)          Aucun formulaire T101 rempli par EAC n’a été produit avec les déclarations de revenus de Mme Bonhomme ou déposé en preuve;

                           (d)          Aucun formulaire T101 rempli par IEPI n’a été produit avec les déclarations de revenus de Mme Bonhomme ou déposé en preuve;

                            (e)          Aucune Annexe 12 pour EAC ou IEPI n’a été déposée en preuve;

                             (f)          Aucun formulaire T1229 n’a été produit avec les déclarations de revenus de Mme Bonhomme ou déposé en preuve;

                            (g)          EAC n’a pas produit de déclaration de revenus pour ses années d’imposition se terminant le 31 décembre 1998 à 2009 et jusqu’à 2011 au plus tôt.

[98]          Je conclus également qu’outre ce que je qualifierais de rêveries ou de souhaits pendant le témoignage de M. Bonhomme, il n’y avait aucune preuve fiable démontrant :

(a)         qu’EAC a renoncé aux frais d’exploration au Canada au profit de Mme Bonhomme au cours des années en question;

 

(b)        qu’IEPI a renoncé aux frais d’exploration au Canada au profit de Mme Bonhomme au cours des années en question;

 

(c)         qu’EAC ou IEPI ont engagé des frais d’exploration à hauteur des montants déclarés par Mme Bonhomme[62];

 

(d)        que Mme Bonhomme a engagé des dépenses en son propre nom qui seraient considérées comme des frais d’exploration au Canada;

 

(e)         que Mme Bonhomme était partie à une coentreprise;

 

(f)          compte tenu du fait que Mme Bonhomme était membre d’une coentreprise, qu’elle a engagé des dépenses qui seraient considérées comme des frais d’exploration au Canada;

 

(g)         que Mme Bonhomme était associée dans une société de personnes;

 

(h)         compte tenu du fait que Mme Bonhomme était associée dans une société de personnes, que cette société de personnes limitée a engagé des dépenses qui seraient considérées comme des frais d’exploration au Canada.

 

[99]         Mme Bonhomme a appelé à témoigner Michael Johnston, comptable agréé. M. Johnston a examiné et analysé les feuilles de calcul préparées initialement par un associé de son cabinet, maintenant décédé, Jeff Hunter. Selon ce que je comprends, M. Hunter était le comptable d’EAC. Ces feuilles de calcul présentent les frais d’exploration au Canada prétendument accumulés par EAC. M. Johnston m’a semblé être un témoin crédible et je ne le blâme aucunement pour les constatations suivantes. Malgré la volonté de M. Bonhomme d’interpréter le contraire, je conclus que M. Johnston n’a pas témoigné qu’EAC a renoncé à des frais d’exploration au Canada au profit de Mme Bonhomme. Au mieux, M. Johnston a été en mesure d’affirmer que les documents financiers d’EAC indiquaient que certains montants auraient pu être considérés comme des frais d’exploration au Canada n’ayant pas été utilisés par EAC au cours de l’année en question et pouvaient donc faire l’objet d’une renonciation, et que ces montants étaient équivalents aux montants que Mme Bonhomme et l’entreprise 121 se sont vu attribuer entre 2003 et 2009. Outre ses discussions avec M. Bonhomme, M. Johnston n’avait aucune connaissance indépendante du fait que ces frais ont fait ou non l’objet d’une renonciation au profit de Mme Bonhomme et le cas échéant, quand et au moyen de quel mécanisme. Il n’a vu aucun document indiquant une renonciation à des frais d’exploration au Canada au profit de Mme Bonhomme et n’a observé aucun élément en ce sens dans les documents comptables d’EAC. Il n’était pas au courant des actions d’EAC et n’a mentionné aucune société de personnes dont les associés comprenaient Mme Bonhomme et EAC. Il m’apparaît clair que tout élément dans les feuilles de calcul préparées par M. Johnston qui soutient une renonciation des frais d’exploration au Canada par EAC, qui plus est, au profit d’un particulier, ou permet de le conclure, n’y figure que parce que M. Bonhomme a affirmé à M. Johnston ou à M. Hunter que tel était le cas. Cette information n’est pas le résultat d’un examen indépendant.

III. Dépens

[100]     Les parties ont accepté que je tranche la question des dépens sans que d’autres observations soient nécessaires.

[101]     Il a fallu près de six jours à Mme Bonhomme pour déposer ses éléments de preuve. À mon avis, ces éléments de preuve auraient pu être présentés en deux jours. Une journée complète a été perdue en cour lorsque Mme Bonhomme s’est présentée la première journée du procès avec des documents qui n’avaient pas été divulgués à l’intimée. Une autre demi-journée a été perdue lors du témoignage de M. Johnston, dont les éléments de preuve n’ont rien apporté[63]. Une autre demi-journée a été perdue le deuxième jour du procès lorsque Mme Bonhomme a annoncé qu’elle devait consulter un avocat en droit fiscal. Les services de cet avocat n’ont jamais été retenus.

[102]     Lorsque M. Bonhomme a finalement été appelé à la barre, il a fait perdre beaucoup de temps à la Cour. Il n’était pas préparé. Il n’a pas présenté ses éléments de preuve de manière logique et cohérente. Il ne parvenait pas à trouver les documents dont il avait besoin. Ses réponses vagues et incohérentes ont fait perdre du temps, tout comme sa tendance à s’écarter complètement du sujet. Ses réponses évasives ont également entraîné une perte de temps.

[103]     La question des frais d’exploration au Canada était, dans son intégralité, sans fondement. En ce qui concerne l’analyse des dépôts bancaires, si Mme Bonhomme avait pris le temps d’analyser son cas, de mener des interrogatoires préalables et de rassembler ses éléments de preuve, cette question aurait pu être résolue hors cour ou, à tout le moins, être grandement simplifiée. Bien que Mme Bonhomme ait remporté un franc succès relativement aux avantages relatifs à un logement, ce succès représente moins de 9 % du revenu en cause, a nécessité relativement peu de temps de la cour et était entièrement attribuable à des préoccupations que j’ai soulevées relativement aux calculs du vérificateur, et non à des questions soulevées par Mme Bonhomme.

[104]     En fonction de ce qui précède, j’attribue les dépens à l’intimée. Les deux appels ont été interjetés à deux ans d’intervalle et sont suffisamment différents pour qu’il y ait lieu d’attribuer des dépens distincts. Un seul mémoire de dépens sera payé pour chaque appel conformément au tarif établi pour les instances de la catégorie C pour toutes les questions antérieures à la préparation du procès et pour tous les services rendus après le jugement. Selon mes estimations, l’audience des appels aurait dû être terminée en quatre jours, ce qui était la durée initialement prévue du procès, plutôt qu’en huit jours. À la lumière de la nécessité pour l’avocat de l’intimée de se préparer deux fois en vue du procès, j’accorde deux mémoires de dépens à chaque appel conformément au tarif établi pour les instances de la catégorie C pour la préparation du procès (c.-à-d. 1 900 $ par appel). Puisque les appels ont été entendus sur preuve commune, il ne serait pas approprié d’accorder des mémoires de dépens distincts pour l’audition des appels. Toutefois, en raison du procès inutilement long et du gaspillage de ressources qui s’est ensuivi, tant pour la Cour que pour l’intimée, j’accorde un mémoire de dépens conformément au tarif établi pour les instances de la catégorie C pour les quatre premiers jours de procès et le double des coûts pour les quatre derniers jours, soit un total de 24 000 $ pour les frais d’audience. Seul un mémoire de dépens sera payé.

Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de juin 2016.

« David E. Graham »

Juge Graham

 


RÉFÉRENCE :

2016 CCI 152

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2012-3192(IT)G

2011-771(IT)G

INTITULÉ :

JANICE BONHOMME c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATES DE L’AUDIENCE :

Les 9, 10, 12 et 13 novembre 2015 et les 18, 19, 20 et 21 avril 2016

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge David E. Graham

DATE DU JUGEMENT :

Le 14 juin 2016

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

Me Richard A. Pharand

Avocat de l’intimée :

Me John Grant

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

Nom :

Me Richard A. Pharand

 

Cabinet :

 

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Canada)

 

 



[1]              Le ministre a également établi une nouvelle cotisation pour les années d’imposition de l’entreprise 121 prenant fin le 31 décembre 1998 jusqu’à l’année 2005, de façon à inclure des revenus non déclarés allégués et à refuser diverses dépenses. Le ministre a établi une nouvelle cotisation connexe pour les périodes de déclaration de la TPS de l’entreprise 121 allant du 1er janvier au 31 décembre 2001. Des appels ont été déposés par l’entreprise 121 relativement à ces nouvelles cotisations et devaient être entendus avec les appels de Mme Bonhomme. J’ai annulé les appels de l’entreprise 121 dans une ordonnance datée du 19 février 2016. Puisque ma décision d’annuler les appels fait actuellement l’objet d’un appel devant la Cour d’appel fédérale, il serait inapproprié de fournir d’autres détails sur les raisons qui ont motivé ma décision.

[2]               Il y a eu un autre vérificateur pour les années d’imposition 2006 à 2009. Ce vérificateur n’a pas été appelé à témoigner.

[3]               Le vérificateur a fait le suivi de tous les dépôts sur le compte de Mme Bonhomme, mais a décidé de ne pas évaluer les montants de moins de 1 000 $. À mon avis, il s’agissait d’une approche appropriée compte tenu des circonstances.

[4]               Il est question ici du montant mensuel de 10 000 $, que nous aborderons plus en détail ci-dessous, dans l’analyse des notes de crédit.

[5]               Pièce A-3, onglet 24.

[6]               Voir la pièce R-1, vol. 1, onglet 33, à la page 294.

[7]               Transcription, 13 novembre, à la page 260.

[8]               L’appel des années d’imposition de 2006 à 2009 de Mme Bonhomme porte exclusivement sur ces frais d’exploration au Canada allégués.

[9]               Pièce A-4.

[10]             Pièce R-1, vol. 1, onglet 33, à la page 294.

[11]             Lorsque cette incohérence lui a été soulignée, M. Bonhomme a fourni une explication aussi incompréhensible qu’évasive [transcription, 19 avril, aux pages 167 à 169].

[12]             Transcription, 12 novembre, aux pages 202 à 204.

[13]             Transcription, 19 avril, aux pages 141 à 145.

[14]             Pièce R-1, vol. 1, onglet 62, à la page 498.

[15]             Transcription, 19 avril, aux pages 159 à 162.

[16]             Pièce R-1, vol. 1, onglet 66, à la page 569.

[17]             Transcription, 19 avril, aux pages 164 à 165.

[18]             Transcription, 19 avril, aux pages 165 et 166.

[19]             Pièce R-1, vol. 1, onglet 27.

[20]             Pièce R-1, vol. 1, onglet 57.

[21]             Pièce R-1, vol. 1, onglet 58.

[22]             Je me réfère à l’avance de 11 500 $ datée du 3 mai 2002 dont le vérificateur reconnaît le dépôt le 13 mai 2002.

[23]             Pièce R-1, vol. 1, onglet 28.

[24]             Je note qu’au troisième jour du procès, l’avocat de Mme Bonhomme a expressément mentionné [traduction] « qu’il pourrait y avoir six témoins ou plus à appeler relativement à ces prêts » [transcription, 12 novembre, à la page 71]. Je présume qu’au moins trois de ces témoins auraient été M. Colbert, Jean Claude Bonhomme et le collègue avec qui M. Bonhomme jouait aux cartes. Les autres témoins n’ont pas été identifiés. Aucune explication n’a été fournie quant à l’absence de ces témoins. Je tire une conclusion négative du fait qu’ils n’ont pas été appelés.

[25]             Arrêt Lacroix c. Canada, 2008 CAF 241.

[26]             Transcription, 19 avril, aux pages 226 et 227.

[27]             Au cours du contre-interrogatoire de M. Bonhomme, l’intimée a fait valoir que la propriété avait en fait été achetée par une autre entreprise appelée 961372 Ontario Inc. Je conclus que la modification à l’entente déposée sous la cote R-1, vol. 1, onglet 3, à la page 5, démontre que l’acheteur a ensuite été remplacé par l’entreprise 121 avant la clôture.

[28]             [1998] 1 C.F. 406.

[29]             1990 CarswellNat 323, 90 DTC 6322.

[30]             Bien que dans les décisions Youngman et Fingold, l’avantage dont bénéficiait le contribuable était une propriété conçue et construite sur mesure plutôt qu’une maison préexistante, la Cour d’appel fédérale a clairement établi, dans l’arrêt Arpeg Holdings Ltd. c. Canada, 2008 CAF 31, que le critère est également appliqué aux propriétés qui ne sont pas construites sur mesure.

[31]             Le vérificateur a utilisé les taux moyens prescrits énoncés en vertu de l’alinéa 4301c) du Règlement. Ces taux représentent essentiellement le taux des bons du Trésor de 90 jours en vigueur à ce moment-là. L’achat d’une maison à Timmins peut difficilement être qualifié de placement ayant le même niveau de risque que l’achat d’un bon du Trésor de 90 jours. Selon moi, un tiers dans la position de l’entreprise 121 aurait exigé un rendement du capital investi beaucoup plus élevé. Je conclus que les taux utilisés par le vérificateur sont beaucoup trop bas.

[32]             Pièce R-1, vol. 1, onglet 54.

[33]             La balance de vérification pour 2002 montre que le solde d’ouverture du prêt était de 101 616 $ et que le capital remboursé avant le refinancement était de 5 170 $.

[34]             (162 056 $ - 96 446 $) / 162 056 $

[35]             Coût de 192 329 $ x taux prescrit moyen de 5,5 %.

[36]             Coût de 192 329 $ x taux prescrit moyen de 3 %.

[37]             Intérêts de 11 375 $ x 40,5 %.

[38]             50 % en 2003 et 16,67 % en 2001 (50 % de l’utilisation de septembre à décembre).

[39]             Avantages établis de 29 688 $, moins les avantages démontrés de 17 701 $.

[40]             Avantages établis de 25 225 $, moins les avantages démontrés de 3 820 $.

[41]             Intérêt total de 7 109 $ - intérêt avant le refinancement de 6 837 $ = intérêt à affecter de 272 $  272 $ x 40,5 %

[42]             10 848 $ x 40,5 %

[43]             10 246 $ x 40,5 %

[44]             20 809 $ - 4 349 $ = 16 460 $; 24 848 $ - 4 228 $ = 20 620 $ et 24 396 $ - 4 124 $ = 20 272 $

[45]             Avis d’appel, aux paragraphes 8, 9 et 19.

[46]             C’est ce qu’a fait valoir Mme Bonhomme dans son avis d’appel [au paragraphe 5] et que M. Bonhomme a semblé faire valoir initialement au troisième jour du procès. Il a présenté la coentreprise comme étant [traduction] « des services contractuels offerts par [Mme Bonhomme] et son entreprise pour protéger les intérêts et les actifs de l’entreprise » [transcription, 12 novembre, à la page 135]. Il semble que la première « entreprise » dans cette citation est l’entreprise 121. Il est difficile de dire si la deuxième « entreprise » est l’entreprise 121 ou EAC. Dans les deux cas, cette relation n’est pas une coentreprise. M. Bonhomme a ensuite décrit la coentreprise en ces termes : « …lorsque vous exercez vos activités ensemble en vertu d’une entente. Et en l’espèce, l’entente correspond à un associé en faillite et qui n’est pas obligé de déclarer faillite et parvient à une entente quant à une entente amicale, pour sauver les actifs dans l’intérêt de tous (au lieu de sa forclusion), d’exercer le bref de saisie-exécution qu’elle détenait… » [Transcription, 12 novembre, à la page 142].

[47]             Transcription, 12 novembre, à la page 152.

[48]             Il est possible que certaines ou la totalité de ces redevances aient été détenues par l’entreprise 121, diverses sociétés de personnes auxquelles Mme Bonhomme ou l’entreprise 121 étaient associées, diverses coentreprises dont Mme Bonhomme ou l’entreprise 121 faisaient partie, divers « syndicats » dont Mme Bonhomme, l’entreprise 121 ou diverses sociétés de personnes ou coentreprises faisaient partie, divers « associés » de Mme Bonhomme ou une combinaison de ces éléments. Les explications fournies par M. Bonhomme relativement à la possession de ces redevances étaient vagues et très changeantes.

[49]             C’est ce qu’a semblé faire valoir M. Bonhomme par la suite, le troisième jour du procès. Je n’ai plus entendu parler de coentreprise, mais plutôt de cet argument [transcription, 12 novembre, aux pages 154 et 155 et 167 à 173].

[50]             Sans vraiment dire que c’est ce qu’il faisait, c’est ce qu’a soudainement décidé de faire valoir M. Bonhomme, le quatrième jour du procès [transcription, 13 novembre, aux pages 246 à 250, 254 et 255 et 262 à 264]. Il a affirmé qu’il y avait une différence importante entre une société de personnes et une entente avec les créanciers, mais il n’a pas expliqué en quoi consistait cette différence ni comment l’entreprise 121 a reçu des frais d’exploration au Canada en vertu d’une entente avec les créanciers, alors que M. Bonhomme les a reçus d’une société de personnes.

[51]             Transcription, 19 avril, à la page 196.

[52]             Transcription, 21 avril, à la page 430.

[53]             Transcription, 13 novembre, à la page 247.

[54]             Pièce A-3, onglets 14 et 18.

[55]             Transcription, 18 avril, à la page 23.

[56]             Transcription, 18 avril, à la page 26.

[57]             Transcription, 18 avril, à la page 32.

[58]             Avis d’appel, au paragraphe 19; transcription, 12 novembre, à la page 145.

[59]             Transcription, 12 novembre, à la page 80.

[60]             Transcription, 12 novembre, à la page 114.

[61]             Transcription, 13 novembre, à la page 263.

[62]             Je ne considère pas les documents de la pièce A-3, onglets 11, 12, 15 et 23 comme des éléments de preuve fiables de quoi ce que soit. Ils sont présentés comme des [traduction] « actions accréditives pour IEP » alors qu’IEPI n’existait même pas au cours des deux premières années visées. Je ne dispose pas d’éléments de preuve suffisants pour déterminer d’où proviennent ces chiffres, comment ils ont été compilés et ce qu’ils représentent pour pouvoir m’y fier à quelque égard que ce soit. De même, je ne considère pas la pièce A-1 comme une preuve fiable qu’EAC a engagé des dépenses qui seraient considérées comme des frais d’exploration au Canada. Aucun représentant d’EAC n’est venu témoigner quant à la nature des dépenses, à la façon de compiler les chiffres et à leur exactitude.

[63]             Encore une fois, j’aimerais souligner que je ne blâme pas M. Johnston pour cette situation. À mon avis, M. Johnston a livré un témoignage sincère et de manière efficace. Il n’y est pour rien si Mme Bonhomme n’a pas su reconnaître que ses déclarations n’étaient d’aucune utilité pour son appel.

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