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Dossier : 2014-4563(GST)G

ENTRE :

TRIPLE M METAL LP,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

Appel entendu le 5 octobre 2016, à Toronto (Ontario)

Devant : L’honorable juge Randall S. Bocock

Comparutions :

 

Avocates de l’appelante :

Me Louise Summerhill

 

Me Meghan Cowan

 

Avocat de l’intimée :

Me Charles Camirand

 

JUGEMENT

          CONFORMÉMENT aux motifs du jugement ci‑joint, LA COUR DÉCIDE:

1.     l’appel est accueilli;

2.     l’appelante est une « personne désignée » au sens de l’article 236.01 de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. (1985), c. E‑15, dans sa forme modifiée, ainsi que des règlements et des accords connexes;

3.     l’appelante n’est pas tenue de récupérer le crédit de taxe sur les intrants provincial déterminé concernant ses activités de mise en paquets et de déchiquetage pour les périodes de déclaration s’étendant du 1er août 2010 au 30 septembre 2010;

4.     l’affaire est renvoyée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation;

5.     la Cour recevra des parties de brèves observations écrites sur la question des dépens dans les 30 jours suivant la date du présent jugement.

Signé à Ottawa, Canada, ce 23e jour de décembre 2016.

« R.S. Bocock »

Juge Bocock

Traduction certifiée conforme

ce 2e jour de février 2018.

François Brunet, réviseur


Référence : 2016 CCI 293

Date : 20161223

Dossier : 2014-4563(GST)G

 


ENTRE :

TRIPLE M METAL LP,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Bocock

I. Introduction, contexte et questions en litige

a)     Harmonisation de la taxe provinciale de vente au détail et de la taxe fédérale sur les produits et services

[1]              En juillet 2010, la province de l’Ontario (l’« Ontario ») a intégré sa taxe de vente au détail (la « TVD ») à la taxe fédérale sur les produits et services (la « TPS »). Les deux régimes n’étant pas symétriques.Il a fallu procéder à une certaine coordination et à des compromis dans le cadre de leur fusion. Cette coordination a été assurée au moyen d’un accord appelé « Entente intégrée globale de coordination fiscale conclue entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de l’Ontario » (l’« Entente »). Pour ce qui était des compromis, l’Ontario a renoncé à certaines recettes tirées de la TVD. Sous l’effet des crédits de taxe sur les intrants (« CTI ») récupérables que prévoyait le régime de la TPS – une taxe à la consommation exigible en bout de ligne au stade de la consommation finale de biens et de services – certains montants de la TVD que percevait auparavant l’Ontario ont disparu dans la chaîne de production, la raison étant que, dans cette chaîne, le contribuable inscrit aux fins de la TPS pouvait déduire de la TPS à payer sur les biens et services qu’il avait vendus au cours d’une période de déclaration la TPS qu’il avait payée sur les biens et les services qu’il avait acquis. Le montant de TPS que paie un fournisseur sur les biens et services qu’il acquiert est regroupé en un montant total de CTI pour la période de déclaration. Le régime de la TVD n’avait aucun crédit de taxe de cette nature. C’est quand les deux régimes de taxation ont fusionné pour former le régime de la taxe de vente harmonisée (la « TVH ») qu’il a fallu procéder à l’intégration et aux compromis nécessaires.

b)    Préservation des recettes de la TVD provinciale à court terme par voie de récupération

[2]              Dans la mesure où elle voulait préserver les recettes qu’elle tirait de la TVD sur certaines ventes au sein du nouveau régime de la TVH (et sa composante nouvellement rebaptisée « taxe sur la valeur ajoutée » de la province, ou « TVAP »), l’Ontario a refusé à certaines grandes entreprises (« personnes visées par règlement ») le droit de se prévaloir de CTI sur une certaine base (« selon les modalités réglementaires ») pour certains biens ou services (« biens ou services déterminés »). Il a plutôt exigé que ces personnes récupèrent (ou rajoutent) un montant calculé (« crédit de taxe sur les intrants provincial déterminé » ou « CTIPD ») pendant un certain temps (« période de restitution des CTI). Ce processus complexe est le compromis qui a permis en fin de compte que soient accordés des CTI sur la TVH à l’égard de la totalité des biens et des services acquis, mais uniquement après que l’Ontario eut préservé, durant cinq ans, une partie des recettes qu’elle tirait antérieurement de la TVD.

[3]              Certains de ces termes ont définis de manière plus détaillée : (i) l’annexe C de l’Entente a défini les mots « biens ou services déterminés » comme étant « l’énergie, sauf si elle est achetée par des exploitations agricoles ou sert à produire des produits destinés à la vente », (ii) les « personnes visées par règlement » étaient les entreprises dont les ventes taxables annuelles excédaient 10 millions de dollars, et (iii) l’« énergie déterminée pour la production » n’était pas assujettie aux CTIPD et à la récupération connexe.

[4]              C’est dans le cadre de cette dernière exemption que certaines « personnes désignées » n’ont pas été tenues de récupérer les CTI sur l’énergie utilisée dans les activités de production (l’« exemption relative à la production »), ce qui a eu pour effet de réduire l’inclusion prescrite des CTIPD (la « réduction des CTIPD ») et de rehausser le montant total des CTI que ces utilisateurs pouvaient demander. Cette exemption relative à la production est l’objet principal du présent appel, car, même si les personnes désignées doivent consommer ou utiliser cette énergie pour leurs activités de production, il existe une autre exception selon laquelle la « personne désignée » signifie, notamment, la personne « autre que les commerçants en ferraille » (l’« exception relative aux commerçants en ferraille »).

[5]              Une autre limite à l’étendue du refus de l’exemption relative à la production a été adoptée. L’Entente a incorporé par renvoi un [traduction] « plafond » imposé aux personnes, aux biens et aux services déterminés. L’annexe C de l’Entente a restreint l’étendue de ces personnes, biens et services à ceux qui se voyaient refuser des remboursements de taxe sur les intrants (« RTI ») dans la province du Québec à compter d’une certaine date.

c)     Les questions en litige

[6]              L’appelante (« Triple M ») affirme que certaines de ses activités ne sont pas celles d’un commerçant en ferraille. L’intimée dit que Triple M est un commerçant en ferraille, et rien d’autre. La question générale qui est posée dans le présent appel est celle de savoir si Triple M est assujettie à la récupération temporaire de la fraction provinciale complète (8/13) de la TVH à l’égard de la totalité des coûts de l’énergie utilisés dans la transformation de la ferraille pour les périodes de déclaration s’étendant du 1er août 2010 au 30 septembre 2010 (les « périodes de déclaration »). En bref, l’exception relative au commerçant en ferraille vise‑t‑elle Triple M de façon à ce qu’on lui refuse l’« exemption relative à la production » dont elle s’est prévalue à l’égard d’une certaine quantité d’électricité achetée dans le cadre de son entreprise?

II. L’entreprise de l’appelante

a)     En général

[7]              L’entreprise de Triple M consiste principalement à collecter, à trier, à compacter et à transformer la ferraille destinée à la production d’acier. Dans le cadre du processus de transformation, après les étapes de tri, de cisaillage et de compactage (les « activités d’agrégation »), Triple M utilise divers procédés de mise en paquets et de déchiquetage qui, de manière très efficace, reséparent, reconstituent, pulvérisent et rassemblent les éléments ferreux et non ferreux de la ferraille (les « activités de transformation »). Les paquets de métaux ferreux sont ensuite envoyés à des aciéries, qui se servent du fer compacté, pulvérisé et trié dans le cadre de leurs activités de production. Quand aux résidus non ferreux ou non métalliques, ils sont vendus à des fins diverses à d’autres clients non producteurs d’acier. L’entreprise principale de Triple M demeure la conversion d’automobiles, de produits dits « blancs » et d’autres appareils mis au rebut en des unités ferreuses et non ferreuses en vue de leur vente à des groupes distincts de producteurs subséquents, qui se servent des produits sous deux formes – ferreuse et non ferreuse – triées de manière distincte pour d’autres activités de production. L’ entreprise complète requiert à la fois des activités d’agrégation et des activités de transformation.

b)    Les activités de recyclage spécifiques

[8]              Triple M affirme qu’elle n’est pas tenue de récupérer les CTIPD à l’égard des coûts d’énergie qui s’appliquent uniquement à ses activités de déchiquetage et de mise en paquets, parce que ces activités de transformation font d’elle un recycleur. Ces activités de transformation tombent sous le coup de l’exemption relative à la production. De manière cohérente, elle a récupéré les CTIPD qui s’appliquent au reste de ses autres activités, lesquelles comprennent les simples activités d’agrégation. N’est pas controversé entre les parties le montant de la répartition entre les activités de transformation, qui comprennent les activités de mise en paquets et de déchiquetage, et les autres activités à l’égard desquelles les CTIPD ont été récupérés. Le différend porte sur la question de savoir si les CTI qui se rapportent uniquement aux activités de transformation peuvent être récupérés ou non à titre de CTIPD.

III. Le régime et le contexte législatifs

[9]              Le régime législatif applicable appelle l’examen des lois, des règlements et des accords qui touchent trois administrations : le Canada, l’Ontario et le Québec. Toute décision rendue dans le présent appel appelle l’incorporation de ces sources, qui sont citées ci‑après et dont les passages importants sont soulignés.

a)    La LTA et le Règlement

[10]         Une disposition importante qui est en cause en l’espèce est le paragraphe 236.01(2) de la LTA :

(2) Si un accord d’harmonisation de la taxe de vente conclu avec le gouvernement d’une province participante relativement au nouveau régime de la taxe à valeur ajoutée harmonisée permet la récupération de crédits de taxe sur les intrants, les grandes entreprises sont tenues d’ajouter, dans le calcul de leur taxe nette pour leur période de déclaration qui comprend un moment prévu par règlement, la totalité ou une partie, déterminée selon les modalités réglementaires, de leur crédit de taxe sur les intrants provincial déterminé.

[11]         Par ailleurs, les principaux mots (et, plus précisément, le CTIPD) sont définis plus en détail au paragraphe 236.01(1) de la LTA et dans les dispositions pertinentes du Règlement :

236.01 (1) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

bien ou service déterminé Bien ou service visé par règlement ou faisant partie d’une catégorie réglementaire. (specified property or service)

crédit de taxe sur les intrants provincial déterminé

a) La partie d’un crédit de taxe sur les intrants d’une grande entreprise, relatif à un bien ou service déterminé, qui est attribuable à la taxe prévue au paragraphe 165(2), aux articles 212.1 ou 218.1 ou à la section IV.1 relativement à l’acquisition, à l’importation ou au transfert dans une province participante du bien ou service déterminé;

b) un montant visé par règlement se rapportant soit à un crédit de taxe sur les intrants d’une grande entreprise qui est attribuable à la taxe prévue au paragraphe 165(2), aux articles 212.1 ou 218.1 ou à la section IV.1, soit à un montant qui serait un tel crédit si les conditions prévues par règlement étaient remplies dans les circonstances prévues par règlement. (specified provincial input tax credit)

grande entreprise Personne visée par règlement ou faisant partie d’une catégorie réglementaire. (large business)

[12]         Pour l’application de la définition de la « grande entreprise » que l’on trouve au paragraphe 236.01(1) de la LTA, en ce qui concerne le présent appel, la « personne visée par règlement », de façon générale, est l’« inscrit dont le montant seuil de récupération des crédits de taxe sur les intrants pour la période [de récupération] excède 10 000 000 $ », aux termes du paragraphe 27(1) du Règlement[1].

[13]         Les mots « bien ou service déterminé » sont définis de manière plus détaillée à l’alinéa 28(1)e) du Règlement :

28(1) Sont visés pour l’application de la définition de bien ou service déterminé au paragraphe 236.01(1) de la Loi les biens et services suivants :

[…]

e) toute forme d’énergie déterminée qui est acquise ou transférée dans une province déterminée, sauf s’il s’agit d’huile de chauffage admissible, au sens de l’article 1 du Règlement sur la déduction pour le remboursement provincial (TPS/TVH),

[…]

[14]         Le montant du « crédit de taxe sur les intrants provincial déterminé » (le « CTIPD ») qui est susceptible de récupération désigne, en l’espèce, le montant de la fraction provinciale de la TVH, c’est‑à‑dire la fraction ontarienne de 8/13 de la TVH (la taxe visée au paragraphe 165(2) de la LTA), conformément au paragraphe 29(1) du Règlement :

29 (1) Pour l’application de l’alinéa b) de la définition de crédit de taxe sur les intrants provincial déterminé au paragraphe 236.01(1) de la Loi, est un montant visé se rapportant à un montant qui serait un crédit de taxe sur les intrants d’une personne, relatif à un bien ou service déterminé, attribuable à la taxe prévue au paragraphe 165(2) ou aux articles 212.1 ou 218.1 de la Loi ou à la section IV.1 de la partie IX de la Loi le montant qui serait un tel crédit si :

a)      dans le cas où le bien ou service déterminé est acquis, ou transféré dans une province déterminée, par la personne pour qu’il soit consommé, utilisé ou fourni exclusivement dans le cadre d’activités commerciales et où, par suite de cette consommation, utilisation ou fourniture exclusive, la taxe prévue à l’article 218.1 de la Loi ou à la section IV.1 de la partie IX de la Loi n’est pas payable relativement à l’acquisition ou au transfert, cette taxe avait été payable relativement à l’acquisition ou au transfert;

[…]

[15]         Le paragraphe 31(3) du Règlement énonce les « modalités réglementaires » selon lesquelles la personne qui est une grande entreprise doit ajouter ou récupérer le CTIPD en vertu du paragraphe 236.01(2) de la LTA à l’égard de la « forme d’énergie déterminée » qu’elle a consommée dans le cadre de ses activités commerciales. Les parties applicables du paragraphe 31(3) du Règlement sont les suivants :

(3) Si une personne est une grande entreprise au cours de sa période de déclaration, que le moment prévu, établi selon l’article 30 relativement à son crédit de taxe sur les intrants provincial déterminé au titre d’une forme d’énergie déterminée, fait partie de la période de déclaration et qu’elle est une grande entreprise à ce moment, le montant à ajouter à sa taxe nette pour cette période relativement à ce crédit pour l’application du paragraphe 236.01(2) de la Loi s’obtient par la formule suivante :

A × B

[…]

d) dans les autres cas, le montant qui correspondrait au crédit de taxe sur les intrants provincial déterminé au titre de la forme d’énergie déterminée si celle‑ci ne comprenait pas d’énergie déterminée pour la production ni d’énergie déterminée pour la recherche;

B le taux de récupération applicable au moment déterminé relativement au crédit de taxe sur les intrants provincial déterminé[2].

[16]         Par ailleurs, les mots « forme d’énergie déterminée » sont définis à l’article 26 du Règlement : « a) électricité, gaz et vapeur; b) toute chose, à l’exception du carburant destiné aux moteurs à propulsion, qui peut servir à produire de l’énergie : (i) soit par combustion ou oxydation, (ii) soit par suite d’une réaction nucléaire dans un réacteur servant à la production d’énergie (specified energy) ».

[17]         Le paragraphe 31(1) du Règlement recense les définitions suivantes en vue de l’application de la formule susmentionnée qui, d’après le ministre, exclut Triple M :

personne désignée Personne autre que les suivantes :

a) les institutions financières;

b) les hôtels, bars, cafés et restaurants;

c) les ateliers de réparation d’automobiles;

d) les commerçants en ferraille. (selected person)

énergie déterminée pour la production La partie d’une forme d’énergie déterminée qui est acquise ou transférée dans une province déterminée par une personne désignée en vue d’être consommée ou utilisée par celle‑ci dans la production de biens meubles corporels destinés à la vente ou dans la production de matériel de production servant à produire de tels biens. En est exclue la partie de la forme d’énergie déterminée qui est acquise ou transférée dans la province déterminée en vue d’être consommée ou utilisée par la personne désignée dans le matériel de climatisation, d’éclairage, de chauffage ou de ventilation des lieux de production ou dans d’autre matériel, si cette consommation ou utilisation ne fait pas partie intégrante de cette production. (énergie déterminée pour la production)

[18]         Le mot « production » est défini à l’article 26 du Règlement :

production Les activités ci‑après, sauf celles qui consistent à assembler, à transformer ou à fabriquer des biens meubles corporels dans un établissement de détail ou à entreposer des produits finis :

a) l’assemblage, la transformation ou la fabrication d’un bien meuble corporel donné en vue d’en créer un autre qui est différent du bien donné par sa nature ou ses propriétés;

[…]

b)    L’Entente intégrée globale de coordination fiscale (l’« Entente »)

[19]         L’Entente est un exemple d’« accord d’harmonisation de la taxe de vente » que visent le paragraphe 123(1) de la LTA et le paragraphe 2(1) de la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, L.R.C. (1985), c. F‑8.

[20]         Les dispositions pertinentes de l’Entente sont les suivantes :

PARTIE I

Définitions et interprétation

1.      Les définitions qui suivent s’appliquent à l’Entente :

[…]

« TVAP » S’entend, relativement à une province participante, de la composante provinciale de la taxe payable en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise qui est imposée, en plus de la TVAC, relativement à la Province.

[…]

3. Les documents suivants sont joints à l’Entente et en font partie intégrante :

Annexe A – Répartition des revenus

Annexe B – Marge de manœuvre provinciale en matière de remboursements

Annexe C – Mesures transitoires relatives à la Province

PARTIE II

Mise en œuvre

 

4. Sous réserve des approbations législatives nécessaires, les parties conviennent :

a) de travailler en collaboration et de façon opportune en vue de l’imposition de la TVAP relative à la Province[3];

b) que le Canada fera de son mieux pour déposer, au plus tard le 31 mars 2010, les modifications législatives nécessaires visant à donner effet à l’Entente;

c) que la TVAP relative à la Province sera mise en œuvre le 1er juillet 2010;

[…]

PARTIE XVII

Mesures propres à la Province et mesures transitoires

55. L’accord des parties concernant l’aide de transition figure à l’annexe C.

56. L’accord des parties concernant la récupération des crédits de taxe sur les intrants au titre de la TVAP relative à la Province, y compris les revenus transitoires tirés de cette récupération, et d’autres mesures transitoires figure à l’annexe C.

[…]

ANNEXE C

MESURES TRANSITOIRES RELATIVES À LA PROVINCE

[…]

Récupération du crédit de taxe sur les intrants au titre de la TVAP relative à la Province

17. Lorsque la Province remet au Canada, avant la date de conclusion de l’Entente, l’énoncé d’une catégorie de personnes déterminées, ainsi qu’une liste de biens déterminés et de services déterminés, à l’égard desquels elle désire obtenir, de chacune des personnes déterminées, le paiement d’un montant égal aux crédits de taxe sur les intrants de la personne, à un pourcentage déterminé, au titre de la TVAP relative à la Province qui s’applique aux biens déterminés et aux services déterminés, les parties conviennent que, pendant une période de cinq ans commençant à la date de mise en œuvre (appelée « période de restitution des CTI »), un montant égal à ces crédits de taxe sur les intrants sera payé au pourcentage déterminé de 100 % par les personnes en cause relativement aux biens et services en cause si, compte tenu des modifications nécessaires, l’étendue de ces personnes, biens et services, établie pendant la période de restitution des CTI, n’excède pas celle des personnes, biens et services qui se voient refuser des remboursements de taxe sur les intrants au titre de la taxe de vente du Québec, conformément à la Loi sur la taxe de vente du Québec, L.R.Q., ch. T‑0.1, en son état le 10 mars 2009.

[…]

22. À compter de la date de mise en œuvre, sous réserve des définitions convenues d’un commun accord entre les parties et sauf modification contraire apportée conformément à l’Entente, les parties conviennent que, en termes généraux, la liste des biens déterminés et des services déterminés sera constituée des éléments suivants :

a) l’énergie, sauf si elle est achetée par des exploitations agricoles ou sert à produire des produits destinés à la vente;

b) les services de télécommunication, à l’exception de l’accès Internet et des numéros sans frais;

c) les véhicules routiers d’un poids inférieur à 3 000 kg (ainsi que les pièces et certains services) et le carburant qui sert à les faire fonctionner;
d) les aliments, boissons et divertissements.

23. À compter de la date de mise en œuvre, sous réserve des définitions convenues d’un commun accord entre les parties et sauf modification contraire apportée conformément à l’Entente, les parties conviennent que, en termes généraux, la catégorie des personnes déterminées sera composée des entreprises dont les ventes taxables annuelles excèdent 10 millions de dollars et des institutions financières.

c)     Le régime de restriction des RTI du Québec

[21]         Les dispositions concernant la restriction des RTI, comme il est indiqué à l’article 17 de l’annexe « C » de l’Entente, précitée, se trouvent dans la partie V, Loi sur la taxe de vente du Québec, L.R.Q., ch. T‑0.1, (la « LTVQ ») telle qu’elle était formulée le 10 mars 2009. En particulier, l’article 206.1 de la LTVQ[4] indique la restriction applicable :

206.1. Dans le calcul du remboursement de la taxe sur les intrants d’un inscrit, aucun montant ne doit être inclus à l’égard de la taxe payable par celui‑ci relativement à la fourniture, ou à l’apport au Québec, des biens ou des services suivants :

[…]

(3) l’électricité, le gaz, le combustible ou la vapeur;

[…]

[22]         Cependant, l’article 206.3 de la LTVQ prévoit certaines exemptions de la restriction prescrite au paragraphe 3 susmentionné de l’article 206.1 :

206.3   Le paragraphe 3 de l’article 206.1 ne s’applique pas à l’égard des biens visés à ce paragraphe, dans le cas où l’exemption prévue au paragraphe aa de l’article 17 de la Loi concernant l’impôt sur la vente en détail (L.R.Q., chapitre I‑1) s’appliquerait relativement à ces biens, si ce n’était de l’article 49 de cette loi.

Pour l’application du premier alinéa, les expressions « la vente d’électricité, de gaz ou de combustible » et « autres que les repas et les services dont celui du téléphone » prévues au paragraphe aa de l’article 17 de la Loi concernant l’impôt sur la vente en détail (L.R.Q., chapitre I‑1), doivent se lire « la vente d’électricité, de gaz, de combustible ou de vapeur » et « autres que les repas, les maisons mobiles et les services dont celui du téléphone ».

[23]         L’alinéa aa) de l’article 17 de la Loi concernant l’impôt sur la vente en détail, c I‑1 (la « LIVD »)[5] prévoit une exemption de la taxe de vente au détail à l’égard de l’acquisition de certaines formes d’énergie utilisées dans la production de biens mobiliers destinés à la vente (l’« exemption relative à la TVD ») :

17. La taxe prévue par le présent chapitre ne s’applique pas :

[…]

aa) […] à la vente d’électricité, de gaz ou de combustible qu’une personne d’une catégorie autre que celles que détermine le ministre en vertu de l’article 20 utilise à la production de biens mobiliers, autres que les repas et les services dont celui du téléphone, destinés à la vente ou à la conception ou à la production de matériel de production ou de matières de conditionnement utilisés à la production de tels biens mobiliers, soit comme agent de production, soit pour actionner du matériel de production; cette exemption ne s’applique pas à la vente d’électricité, de gaz ou de combustible utilisé à l’alimentation du matériel de climatisation, d’éclairage, de chauffage ou de ventilation des lieux de production;

[…]

[24]         L’article 20 de la LIVD dispose en outre :

20. Aux fins des paragraphes z et aa de l’article 17, les catégories de personnes que le ministre peut déterminer sont celles dont les activités consistent principalement :

a) à rendre des services personnels ou professionnels, ou

b) à vendre des biens mobiliers qu’elles n’ont pas produits mais auxquels elles peuvent avoir apporté certaines modifications avant la livraison au consommateur.

La détermination prévue au premier alinéa se fait au moyen de la publication d’un avis dans la Gazette officielle du Québec et prend effet le jour de telle publication.

[25]         Les « marchands de ferraille » [expression synonyme de « commerçants en ferraille – pour plus d’explications, voir le paragraphe 73 du présent jugement] ont été considérés par le ministre du Revenu comme une entité qui entre dans les prévisions de l’alinéa b) de l’article 20 de la LIVD, conformément à un avis publié dans la Gazette officielle du Québec en 1983 (l’« Avis de 1983 »)[6] :

Avis

Catégories de personnes dont l’activité principale consiste à fournir des services ou à vendre des biens mobiliers

Loi concernant l’impôt sur la vente en détail (L.R.Q., ch. I‑1, art. 20)

Conformément à l’article 20 de la Loi concernant l’impôt sur la vente en détail, le ministre du Revenu détermine :

(1)  que les catégories de personnes dont les activités consistent principalement à rendre des services personnels ou professionnels sont les suivants :

[…]

institutions financières;

[…]

(2)  que les catégories de personnes dont les activités consistent principalement à vendre des biens mobiliers qu’elles n’ont pas produits, mais auxquels elles peuvent avoir apporté certaines modifications avant la livraison au consommateur sont les suivantes :

les exploitants d’établissement au sens de la Loi concernant la taxe sur les repas et l’hôtellerie (L.R.Q., chap. T‑3);

[…]

les garagistes;

[…]

les marchands de ferraille;

[…]

En conséquence, une personne qui appartient à l’une ou l’autre de ces catégories ne peut bénéficier de l’exemption prévue par les paragraphes z et aa de l’article 17 de la Loi concernant l’impôt sur la vente en détail.

[26]         Conformément au paragraphe 23 de l’article 2 de la LIVD, le mot « consommateur », tel qu’il figure dans cette Loi, a le même sens que celui que lui attribue l’article 123 de la LTA :

« Consommateur » Particulier qui acquiert ou importe un bien ou un service, à ses frais, pour sa consommation ou son utilisation personnelles ou pour celles d’un autre particulier. La présente définition exclut le particulier qui acquiert ou importe le bien ou le service pour consommation, utilisation ou fourniture dans le cadre de ses activités commerciales ou d’activités dans l’exercice desquelles il effectue des fournitures exonérées.

IV. Les positions des parties

a)     L’intimée

[27]         L’intimée soutient que Triple M était tenue, aux termes du paragraphe 236.01(2) de la LTA, de récupérer ou de rembourser la totalité de la fraction provinciale des CTI, soit 8/13 de la TVH payée à l’égard des coûts d’électricité engagés dans le cadre de ses activités de transformation de ferraille, et ce, pour les raisons suivantes :

[traduction]
a.         L’Entente conclue entre le Canada et l’Ontario, province participante au titre de la TVH, est un « accord d’harmonisation de la taxe de vente […] [qui] permet la récupération de crédits de taxe sur les intrants »[7], conformément à l’article 56 de l’Entente ainsi que de l’annexe « C » de cette dernière.

b.         Triple M est une « grande entreprise » au sens des paragraphes 236.01(1) et (2) de la LTA puisque la « totalité des contreparties qui ont été payées ou qui sont devenues dues à Triple M au cours de l’année financière se terminant avant les périodes en litige pour la vente de ferraille est supérieure à 10 millions de dollars » et, de ce fait, Triple M satisfaisait au montant seuil de récupération des crédits de taxe sur les intrants qui étaient requis pour l’application de la définition de la « grande entreprise » que contient le Règlement.

c.         L’électricité que Triple M a acquise et utilisée en Ontario répond à la définition du « bien ou service déterminé » qui figure au paragraphe 236.01(1) de la LTA[8].

d.         La fraction provinciale des CTI demandés par Triple M à l’égard de l’électricité acquise en Ontario ou attribuable à cette dernière est un CTIPD selon les critères du paragraphe 236.01(1) de la LTA et du paragraphe 29(1) du Règlement.

[28]         Par conséquent, conformément au paragraphe 236.01(2) de la LTA, le CTIPD à l’égard des CTI que Triple M a demandés en lien avec ses coûts d’électricité en Ontario « doit » être ajouté ou récupéré par elle dans le cadre de la détermination de sa taxe nette pour les périodes de déclaration en question.

[29]         L’article 31 du Règlement disposait que Triple M devait ajouter dans sa taxe nette le montant intégral du CTIPD à l’égard de ses coûts d’électricité, comme suit :

[traduction]

a.         […] le montant du CTIPD relatif à l’utilisation d’électricité qui doit être ajouté est déterminé par la formule définie à l’alinéa 31(3)d) du Règlement. Cette formule est A x B,A est le montant du CTIPD lié à une forme d’énergie déterminée qui n’inclut pas l’« énergie déterminée pour la production » et B est le taux de récupération qui s’appliquait au moment déterminé relativement au CTIPD, soit 100 %, comme il est indiqué à l’article 26 du Règlement.

b.         Aux termes du paragraphe 31(1) du Règlement, l’« énergie déterminée pour la production », qui réduit l’élément A dans la formule susmentionnée, est « la partie d’une forme d’énergie déterminée qui est acquise […] par une personne désignée en vue d’être consommée ou utilisée par celle‑ci dans la production de biens meubles corporels destinés à la vente […] » (la « réduction du CTIPD »).

c.         Vu sa définition même, seule une « personne » peut profiter des avantages de la réduction du CTIPD à l’égard de l’« énergie déterminée pour la production ». Aux termes du paragraphe 31(1) du Règlement, la personne désignée s’entend de la « personne autre que les suivantes : a) les institutions financières; b) les hôtels, bars, cafés et restaurants; c) les ateliers de réparation d’automobiles; d) les commerçants en ferraille ».

d.         Étant donné que Triple M est un commerçant en ferraille, elle n’est pas une « personne désignée » au sens du paragraphe 31(1) du Règlement, et elle ne pouvait donc pas utilement invoquer de la réduction du CTIPD à l’égard de l’« énergie déterminée pour la production ». Autrement dit, Triple M doit inclure ou récupérer le plein montant du CTIPD à l’égard de ses coûts d’électricité.

[30]         Les mots « commerçant en ferraille » ne sont définis ni dans la LTA ni dans le Règlement. Pour alléguer que Triple M est un « commerçant en ferraille », et donc pas une « personne désignée », l’intimée se fonde sur la définition ordinaire de cette expression et elle formule les hypothèses de fait suivantes à propos des activités commerciales qu’exerce Triple M à titre de « commerçant en ferraille » :

[traduction]

d) Triple M exploite de nombreux parcs à ferraille en Ontario;

e) dans le cadre de ses activités, Triple M achète de la ferraille;

f) la ferraille est habituellement transformée (déchiquetée, mise en paquets ou cisaillée) avant d’être revendue à titre de ferraille;

g) le processus de déchiquetage, de mise en paquets et de cisaillage fait partie des activités ordinaires du commerçant en ferraille.

[31]         Enfin, en réponse à la thèse de Triple M, exposée ci‑après, à savoir que l’Entente intégrant le régime de la LTVQ joue dans le présent contexte, l’intimée exprime l’avis que les modalités de l’Entente étaient « sous réserve d’approbation législative », ce qui figure dans les dispositions de la Loi de l’Ontario et du Règlement, et que l’Entente elle‑même ne peut l’emporter sur le texte de la LTA et du Règlement, dans la mesure où ces modalités particulières de l’Entente n’ont pas été adoptées.

b)    L’appelante

[32]         Il convient de signaler que Triple M ne soulève nulle controverse quant à la manière dont les dispositions de la LTA et du Règlement jouent de manière à exiger la récupération temporaire des CTI dans le cas d’une grande entreprise. La principale question en litige est la qualification factuelle, par le ministre, de Triple M de « commerçant en ferraille » à l’égard de ses activités de transformation, ce qui fait donc qu’elle n’est pas une « personne désignée », au sens du paragraphe 31(1) du Règlement, qui peut utilement invoquer de la réduction qu’autorise le CTIPD à l’égard du coût de l’« énergie déterminée pour la production ».

[33]         Triple M se fonde sur la limite d’interprétation qui figure dans l’Entente, qui intègre par renvoi le régime énoncé dans la LTVQ. Elle soutient qu’aux termes de l’article 17 de l’annexe « C » de l’Entente, l’étendue de la « personne déterminée », des « biens déterminés » et des « services déterminés » qui sont assujettis à la récupération intégrale et temporaire des CTI pour la fraction ontarienne de la TVH [traduction] « ne peut excéder l’étendue des personnes, des biens et des services qui ne peuvent se prévaloir d’un remboursement de la taxe sur les intrants (« RTI »), relativement à la LTVQ, telle qu’elle était formulée le 10 mars 2009 ». C’est donc dire que l’appelante ne sera assujettie à la pleine récupération que prévoit le paragraphe 236.01(2) de la LTA que si elle se faisait refuser de la même façon des RTI à l’égard de ses coûts d’électricité en vertu de la LTVQ, telle qu’elle était formulée le 10 mars 2009.

[34]         Aux termes du paragraphe 3 de l’article 206.1 de la LTVQ, l’inscrit qui est une grande entreprise se verra normalement refuser des RTI à l’égard de la fourniture d’électricité, de gaz, de combustible ou de vapeur.

[35]         Cependant, conformément à l’article 206.3 de la LTVQ, la restriction susmentionnée, qui s’applique aux RTI dans le cas d’une grande entreprise à l’égard de ses coûts d’électricité, ne s’applique pas si ce même inscrit peut utilement invoquer d’une exemption de la taxe sur la vente au détail du Québec (l’« exemption relative à la TVDQ »), comme le prévoit l’alinéa aa) de l’article 17 de la LIVD.

[traduction]

L’exemption relative à la TVDQ que prévoit l’alinéa aa) de l’article 17 de la LIVD vise :

aa) […] la vente d’électricité, de gaz ou de combustible qu’une personne d’une catégorie autre que celles que détermine le ministre en vertu de l’article 20 utilise à la production de biens mobiliers, autres que les repas et les services dont celui du téléphone, destinés à la vente ou à la conception ou à la production de matériel de production ou de matières de conditionnement utilisés à la production de tels biens mobiliers, soit comme agent de production, soit pour actionner du matériel de production; cette exemption ne s’applique pas à la vente d’électricité, de gaz ou de combustible utilisé à l’alimentation du matériel de climatisation, d’éclairage, de chauffage ou de ventilation des lieux de production; […]

[Non souligné dans l’original.]

[36]         Autrement dit, peuvent se prévaloir de l’exemption relative à la TVDQ à l’égard de l’utilisation d’électricité ou d’énergie dans le cadre d’une activité de production les personnes qui : i) produisent des biens mobiliers destinés à la vente, et ii) n’entrent pas dans les prévisions de l’article 20 de la LIVD, ainsi que l’a déterminé le ministre du Revenu du Québec.

[37]         En l’espèce, Triple M soutient que, conformément à une ordonnance ministérielle émanant du ministre du Revenu, il a été déterminé par ce dernier que les « marchands de ferraille » entraient dans les prévisions de l’alinéa b) de l’article 20 de la LIVD à titre de personnes « dont les activités consistent principalement à […] b) vendre des biens mobiliers qu’elles n’ont pas produits, mais auxquels elles peuvent avoir apporté certaines modifications avant la livraison au consommateur » (« agrégateurs »).

[38]         C’est donc dire que le « marchand de ferraille » ou le simple agrégateur ne peut pas se prévaloir de l’exemption relative à la TVDQ que prévoit l’article 17 de la LIVD, qu’il se verrait refuser des RTI en application du paragraphe 3 de l’article 206.1 de la LTVQ et qu’il serait donc assujetti à la pleine récupération des CTIPD en vertu de l’article 17 de l’annexe « C » de l’Entente et de l’article 236.01 de la LTA.

[39]         Triple M soutient toutefois qu’à titre de recycleur elle n’entre pas dans la catégorie des agrégateurs car :

[traduction]

a. Triple M est recycleur dans la mesure où elle exécute des tâches de mise en paquets et de déchiquetage (activités de « transformation »). Par ces deux étapes, Triple M produit du métal recyclé, un produit dont la forme et la nature ont nettement changé par rapport au métal qu’elle a acheté. Les observations exactes que Triple M a formulées sont les suivantes :

i) pour être assujettie aux restrictions, Triple M doit vendre des biens mobiliers qu’elle n’a pas produits, et elle doit livrer ces biens à des consommateurs (c.‑à‑d., un agrégateur);

ii) les produits métalliques recyclés que Triple M vend aux aciéries et aux fonderies sont des biens mobiliers produits, par opposition à des biens simplement modifiés;

iii) les biens mobiliers ne sont pas envoyés aux aciéries sous la forme dans laquelle Triple M les a achetés. Grâce au processus de déchiquetage et de mise en paquets, c’est un bien mobilier nettement différent qui est créé, un produit qui est à ce moment, mais qui ne l’était pas auparavant, utilisable par les aciéries;

iv) les activités qu’exerce Triple M sont importantes et modifient la nature de la ferraille mélangée, et elle produit des produits nettement différents qu’elle vend à deux groupes distincts de consommateurs.

b. Triple M ne livre pas ses produits à un « consommateur », au sens de l’article 123 de la LTA. Elle ne vend qu’à des aciéries et à des fonderies le long de la chaîne d’approvisionnement, ou elle vend les matériaux rejetés à d’autres entreprises de fabrication.

[40]         Triple M soutient que, à titre de recycleur, elle aurait par ailleurs droit à l’exemption relative à la TVD que prévoit l’article 17 de la LIVD. On ne lui refuserait donc pas les RTI relatifs aux coûts d’électricité relatifs à ses activités de transformation dans le cadre du régime de la LTVQ. Vu l’incorporation par renvoi de cette limite d’étendue, à l’article 17 de l’annexe « C » de l’Entente, Triple M est exclue du groupe des personnes tenues de récupérer 100 % des CTIPD. Elle est donc une « personne désignée » au sens du paragraphe 31(1) du Règlement, et n’est donc pas tenue de récupérer 100 % des CTIPD en vertu de l’article 236.01 de la LTA car elle a droit à la réduction des CTIPD qui vise l’« énergie déterminée pour la production », de la manière prescrite à l’article 31 du Règlement.

V. Analyse et décision

Triple M est-elle un commerçant en ferraille?

[41]         Les mots « commerçant en ferraille » comportent d’emblée une part d’ambiguïté; ni la LTA ni le Règlement ne les définissent. À titre d’aide, l’approche  moderne et générale en matière d’interprétation des lois est consacrée par l’arrêt Hypothèques Trustco Canada c Canada[9]. Précisément, au paragraphe 10, la Cour a observé:

Il est depuis longtemps établi en matière d’interprétation des lois qu’« il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur » : voir 65302 British Columbia Ltd. c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 804, par. 50. L’interprétation d’une disposition législative doit être fondée sur une analyse textuelle, contextuelle et téléologique destinée à dégager un sens qui s’harmonise avec la Loi dans son ensemble. Lorsque le libellé d’une disposition est précis et non équivoque, le sens ordinaire des mots joue un rôle primordial dans le processus d’interprétation. Par contre, lorsque les mots utilisés peuvent avoir plus d’un sens raisonnable, leur sens ordinaire joue un rôle moins important. L’incidence relative du sens ordinaire, du contexte et de l’objet sur le processus d’interprétation peut varier, mais les tribunaux doivent, dans tous les cas, chercher à interpréter les dispositions d’une loi comme formant un tout harmonieux.

[42]         Pour ce qui est des lois de nature fiscale, l’enseignement de l’arrêt Hypothèques Trustco Canada a été repris à l’occasion de l’affaire Placer Dome Canada Ltd. c Ontario (Ministre des Finances)[10], où la Cour a observé :

23 Le degré de précision et de clarté du libellé d’une disposition fiscale influe donc sur la méthode d’interprétation. Lorsque le sens d’une telle disposition ou son application aux faits ne présente aucune ambiguïté, il suffit de l’appliquer. La mention de l’objet de la disposition [traduction] « ne peut pas servir à créer une exception tacite à ce qui est clairement prescrit » : voir P. W. Hogg, J. E. Magee et J. Li, Principles of Canadian Income Tax Law (5e éd. 2005), p. 569; Shell Canada Ltée c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 622. Lorsque, comme en l’espèce, la disposition peut recevoir plus d’une interprétation raisonnable, il faut accorder plus d’importance au contexte, à l’économie et à l’objet de la loi en question. Par conséquent, l’objet d’une loi peut servir non pas à mettre de côté le texte clair d’une disposition, mais à donner l’interprétation la plus plausible à une disposition ambiguë.  [Non souligné dans l’original.]

[43]         La Cour a de plus fait état de l’examen obligatoire des dispositions législatives sous cet angle quand elle a observé :

Tout doute concernant le sens d’une loi fiscale doit être raisonnable et la présomption ne peut être invoquée que si l’application des règles d’interprétation habituelles n’a pas permis de déterminer le sens de la disposition en cause[11].

(i) Le sens textuel de « commerçant en ferraille »

[44]         La définition la plus favorable est celle que l’on trouve dans le Webster’s Third New International Dictionary, où le mot « dealer » (commerçant ou marchand) est défini en ces termes :

[traduction]
[…] personne qui divise, distribue ou livre; négociateur, mandataire, intermédiaire; personne qui agit ou se comporte d’une manière précisée envers autrui; personne faisant des affaires : NÉGOCIANT, INTERMÉDIAIRE : personne dont l’entreprise consiste à acheter et à vendre des biens surtout sans en modifier l’état.

[Non souligné dans l’original.]

De concert avec les définitions que l’on trouve dans d’autres dictionnaires, le dénominateur commun de ces sources est que le commerçant ou négociant doit avoir pour activité d’acheter ou de vendre des biens, mais non d’en modifier l’état. Le commerçant en ferraille doit donc avoir pour activité d’acheter et de vendre de la ferraille sans modifier de manière importante l’état de celle qu’il achète.

[45]         Cela dit, ces définitions du dictionnaire ne résolvent pas forcément l’ambiguïté intrinsèque de ce mot. Premièrement, selon la définition même du dictionnaire Webster qui est reproduite au paragraphe précédent, le mot « commerçant » peut être interprété de manière étroite ou de manière assez large comme étant la personne qui « divise, distribue ou livre », ou la personne qui fait simplement « des affaires ». Il reste à rechercher quelle est la définition qu’il convient d’utiliser en matière de régime de récupération des CTIPD. Deuxièmement, si on met l’accent uniquement sur le mot « commerçant », il y a de nettes différences entre les activités du commerçant dans une industrie particulière, comparativement à une autre. Chaque industrie est différente. Il se peut qu’un commerçant en ferraille soit tenu de faire nettement plus que d’acheter et de vendre simplement de la ferraille en vue d’être concurrentiel dans cette industrie en particulier. Ces définitions du dictionnaire, où figurent des interprétations à la fois larges et étroites, ne peuvent pas résulter en une réponse claire et nette.

[46]         Plusieurs sources auxquelles les parties ont fait référence avaient trait à des industries et à des activités différentes de celles des commerçants en ferraille ou des recycleurs. A l’occasion de l’affaire Canbra Foods Ltd c Westersund (1977)[12], la Section d’appel de la Cour suprême de l’Alberta a examiné, notamment, le sens des mots « grain dealer » (négociant en grains) au regard des obligations de licence dont il était question dans la Loi sur les grains du Canada (« LGC »)[13]. Selon la LGC, le « négociant en grains » était tenu d’obtenir une licence avant de conclure un contrat quelconque concernant l’achat et la vente de grains. La Cour s’est servie d’une définition étroite semblable à celle que donne le Webster pour conclure que le sens ordinaire du mot « négociant » jouait dans ce cas. Le négociant en grains était simplement une entité qui avait pour activité d’acheter et de vendre des produits, mais non d’en modifier l’état. Cela dit, la Cour a conclu que la contribuable, qui utilisait un élévateur de conditionnement, un concasseur et d’autres machines industrielles pour transformer des pépins de raisin en huile végétale, en margarine et en d’autres produits dérivés, n’était pas un simple « négociant en grains » parce qu’elle achetait des pépins de raisin comme matière première en vue de les transformer en divers autres produits.

[47]         À l’occasion de l’affaire Vancouver Art Metal Works Ltd. c Canada[14], la Cour d’appel fédérale a examiné les mots « un commerçant ou un courtier en valeurs mobilières » au regard de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.), dans sa forme modifiée, et elle a conclu que le sens ordinaire de ces mots devait jouer. Non seulement est‑il question en l’espèce d’une industrie tout à fait différente, mais il n’est pas non plus controversé entre les parties que c’est le sens ordinaire des mots « commerçant en ferraille » qui doit jouer, mais uniquement dans la mesure où il est possible de discerner un sens ordinaire dénué d’ambiguïté.

[48]         Malheureusement, même une jurisprudence plus pertinentes sur le plan factuel de la présente affaire ne nous éclaire pas. Triple M a cité deux autres décisions à l’appui de la thèse selon laquelle il y avait lieu de faire une distinction entre un « recycleur » de ferraille et un « commerçant » en ferraille, en faisant valoir qu’elle est en fait un commerçant. Aucune des deux décisions ne porte sur la question qui est en litige en l’espèce. A l’occasion de l’affaire SNF L.P. c R[15], le juge Rip (plus tard juge en chef) a fait mention d’une distinction entre les recycleurs de ferraille et leurs fournisseurs, dont les colporteurs, les colporteurs‑négociants, les négociants et les fournisseurs industriels. Cependant, le juge Rip citait tout simplement un témoin qui avait opéré cette distinction lors de sa déposition[16]. La principale question qui était en litige dans cette affaire consistait à savoir si SNF L.P. avait le droit de demander des CTI si ces fournisseurs ne versaient pas la TPS et, dans cette mesure, la déposition du témoin était sans rapport avec la question de savoir si un « commerçant » en ferraille devait faire l’objet d’une distinction, sur le plan juridique, d’un « recycleur » de ferraille au regard du régime de récupération des CTIPD.

[49]         Dans le même ordre d’idées, dans l’affaire Budget Steel Limited c Canada[17], la contribuable exploitait une entreprise de recyclage de ferraille. La principale question en litige était de savoir si la ferraille d’automobile constituait un élément de « stock » au sens de l’alinéa 120(3)b) de la LTA, dans sa forme modifiée. Dans l’affirmative, la contribuable avait droit aux CTI à l’égard de l’acquisition de cette ferraille dans le cadre de ses activités commerciales. La Cour d’appel fédérale a confirmé la conclusion de fait du juge du procès, à savoir que la ferraille qu’achetait la contribuable était distincte de ce que celle-ci produisait :

[…] [les carcasses d’automobile] n'étaient pas destinées à la vente « en unités séparées », mais en tant que matières premières destinées à la fabrication de produits finals complètement différents, savoir du métal ferreux et du métal non ferreux, visiblement en demande aux États-Unis. Nous convenons encore avec le juge de première instance que la conversion de ces carcasses d'automobile en une masse de métal ferreux et non ferreux déchiqueté signifiait la transformation d'automobiles mises à la ferraille et non pas leur revente telles quelles. Dans ce processus, elles cessent d'être des carcasses distinctes composées de différents matériaux[18].

La conclusion de fait au sujet des éléments de stock n’est donc que d’une utilité restreinte pour la Cour en l’espèce.

[50]         Triple M a également fait valoir que l’on s’entend généralement pour dire dans l’industrie de la ferraille que le commerçant en ferraille est différent du recycleur de ferraille. La preuve à cet égard n’est pas convaincante.

[51]         Tout d’abord, le vice-président des Services techniques de Triple M, M. Anderson, a déclaré qu’il existe une distinction, applicable à l’industrie toute  entière, à laquelle souscrit l’Association canadienne des industries du recyclage (« ACIR »). Le commerçant en ferraille est différent du recycleur de ferraille. Le commerçant en ferraille achète, trie et vend de la ferraille, mais ne se livre à nulle tâche de transformation. En revanche, le recycleur de ferraille transforme la ferraille en une forme plus vendable qu’utilisent les aciéries en aval pour la transformer davantage. Cependant, nulle publication ou revue professionnelle de l’ACIR n’a été produite à l’appui de cette distinction afin de montrer que celle-ci était bien connue ou courante. Il semble plus probable, selon les dépositions de M. Anderson et aussi du témoin dans l’affaire SNF L.P., qu’il y a peut-être bien une connaissance tacite et informelle d’une telle distinction au sein de l’industrie, mais le fait d’y attribuer un poids considérable surestime son importance dans la détermination d’une forme d’énergie déterminée, car la distinction entre le négociant et le recycleur est liée, de manière tout aussi vraisemblable, à la taille et à l’ampleur des activités, plutôt qu’à des activités nettement différentes.

[52]         Deuxièmement, Triple M a signalé dans sa déclaration de revenus que le code du Système de classification des industries de l’Amérique du Nord (« SCIAN ») qu’elle utilisait dans les déclarations de renseignements destinées à l’ARC correspondait à « première transformation des métaux ». Cette classification, là encore, n’est pas déterminante. Il ne ressort de quelque élément de preuve produit n’a montré comment cette classification avait été établie ou s’il existait même d’autres classifications précises, comme « recyclage de métaux » ou « commerce de ferraille ». Il ne ressort de nul élément de preuve que ce soit que cette classification n’était autre chose qu’une catégorie auto-sélectionnée à partir d’un menu informatique déroulant. Même la partie qui la sélectionnerait demeure incertaine. On ne peut y accorder que peu de poids.

[53]         Enfin, Triple M a indiqué dans ses déclarations de revenus ainsi qu’à de nombreux endroits dans son site Web qu’elle se qualifiait de « recycleur » de ferraille. Fondamentalement, la distinction entre le recycleur de ferraille et le commerçant n’est pas particulièrement utile, à défaut d’une ligne de démarcation définitive et officielle. Aucune ligne jaune n’interdit à Triple M de remplir ces deux fonctions, ni ne l’autorise à le faire, pas plus que de dire simplement qu’elle le fait. Comme il ressort des éléments de preuve, une entreprise telle que Triple M doit forcément se livrer à des activités de colporteur/commerçant de même qu’à des activités de transformation. Pour l’entreprise de Triple M, les activités d’achat‑vente sont un élément tout aussi intrinsèque que les activités de transformation. En fait, sans les premières, Triple M manquerait de matériaux pour ses activités de transformation.

[54]         Selon une interprétation textuelle des mots « commerçant en ferraille », conformément au sens ordinaire que l’on trouve dans les définitions du dictionnaire, la jurisprudence et les descriptions disponibles au sein de l’industrie, il est possible de dégager un dénominateur commun particulier. C’est‑à‑dire que la commerçant en ferraille, ou le commerçant en n’importe quel type de produits, exécute peu d’activités de transformation et de production dans le cadre ordinaire de ses activités d’achat et de vente. Mais ces distinctions ne résolvent pas de manière concluante l’ambiguïté inhérente à ces mots au regard du contexte et de l’économie du régime de récupération des CTIPD. La question qui se pose en l’espèce demeure : Triple M, qui a pour entreprise de recycler de la ferraille, est‑elle aussi un « commerçant en ferraille », comme l’envisage le paragraphe 31(1) du Règlement? Le législateur fédéral et le législateur ontarien entendaient‑ils opérer cette distinction subtile en employant le mot « commerçant » plutôt que « recycleur », en ne donnant pas de définition et en structurant par ailleurs la loi de la manière choisie? Une simple lecture de la disposition appelle deux interprétations raisonnables, l’une stricte et l’autre large. Pour résoudre cette ambiguïté, il faut examiner le contexte et l’objet des dispositions applicables.

(ii) Le contexte du régime législatif et l’exception relative aux « commerçants en ferraille »

[55]         Les dispositions concernant l’exemption relative à l’« énergie déterminée pour la production », dont il est question au paragraphe 31(1) du Règlement, éclairent le contexte législatif. L’énergie déterminée pour la production est une forme d’énergie acquise dans le cadre de la « production de biens meubles corporels destinés à la vente ».

[56]         Aux fins du présent appel, la définition de l’« énergie déterminée pour la production » fait ressortir deux caractéristiques principales : (i) il doit y avoir une « personne désignée » qui utilise l’énergie, et (ii) l’énergie doit être utilisée dans le cadre de la « production de biens meubles corporels destinés à la vente ». Il est nécessaire de remplir ces deux conditions avant que la réduction des CTIPD joue. L’une de ces conditions est axée sur la personne ou l’entité qui utilise la forme d’énergie. L’autre est axée sur la fonction ou l’activité qu’exécute l’utilisateur au moyen de cette forme d’énergie.

[57]         Pour ce qui est de la première qualité, les mots « personne désignée » sont définis de manière négative, de façon à exclure les « commerçants en ferraille »[19]. À l’exception des « institutions financières »[20], aucune de ces entités énumérées n’est définie ailleurs dans le Règlement ou dans la LTA.

[58]         Quant à la seconde, le mot « production » est défini à l’article 26 du Règlement et il englobe les activités consistant « à assembler, à transformer ou à fabriquer » un bien en vue d’en « créer un autre qui est différent » de l’original. Bien qu’il s’agisse là du contexte législatif général dans lequel s’inscrit l’exclusion des « commerçants en ferraille » de la réduction du CTIPD, il n’aide pas à déterminer le sens de cette exclusion.

[59]         En ce qui conerne l’analyse contextuelle, il est nécessaire de tenir compte de la présomption d’absence de tautologie, dans la mesure où les mots « commerçant en ferraille » deviendraient redondants ou seraient dépouillés de leur sens au regard des dispositions législatives connexes. Bien que ce soit peut-être vrai dans le cas présent, cette présomption peut être réfutée lorsqu’on se sert partout de définitions tautologiques pour donner plus de clarté et de certitude aux exclusions.

[60]         A l’occasion de l’affaire Placer Dome[21], précité, le juge Lebel a observé :

45. Selon la présomption d’absence de tautologie, [traduction] « [c]haque mot d’une loi est présumé avoir un sens et jouer un rôle précis dans la réalisation de l’objectif du législateur » : voir R. Sullivan, Driedger on the Construction of Statutes (3e éd. 1994), p. 159. Dans la mesure du possible, les tribunaux devraient éviter d’adopter des interprétations qui dépouillent une partie d’une loi de tout son sens ou qui la rendent redondante : Hill c. William Hill (Park Lane) Ld., [1949] A.C. 530 (H.L.), p. 546, le vicomte Simon.

46. […] la présomption [est] réfutable lorsqu’on peut démontrer que les mots en question possèdent une utilité quelconque ou qu’ils ont été ajoutés par souci de précision […][22].

[61]         L’intégration de la définition ordinaire, comme il semble ressortir de  l’alinéa b) de l’article 20 de la LIVD, à la définition du « commerçant en ferraille » créerait une redondance dans la loi et semblerait contraire à la présomption d’absence de tautologie. N’importe quel « commerçant en ferraille » qui ne fait qu’acheter ou vendre de la ferraille sans en modifier l’état (définition du dictionnaire) ou dont les « activités consistent principalement […] b) à vendre des biens mobiliers [qu’il n’a pas] produits mais auxquels [il peut] avoir apporté certaines modifications avant la livraison au consommateur » ne peut donc pas se livrer au genre d’activités de « production » admissibles qui créent un « bien meuble corporel […] différent »[23] de la ferraille qu’il acquiert. En fait, selon les témoignages, il s’agit là de la distinction précise entre le commerçant et le recycleur qui est tacitement admise dans l’industrie de la ferraille, en ce sens que le commerçant n’exécute que des activités d’agrégation.

[62]         Par ailleurs, la présomption d’absence de tautologie a peu de poids en l’espèce. Elle est réfutée, car il semble que le législateur fédéral entendait à la fois clarifier avec insistance ceci : certaines entités exclues ne peuvent se prévaloir de l’exemption relative à l’« énergie déterminée pour la production », même lorsqu’elles entreprennent des activités de transformation. Dans cette mesure, le fait que les définitions tautologiques semblent être délibérément utilisées dans le présent contexte législatif aide à réfuter la présomption[24]. Ainsi, il est indiscutable que d’autres entités exclues par la définition de la « personne désignée », comme les hôtels, les bars, les cafés et les restaurants, ou les ateliers de réparation d’automobiles, sont des « établissements de détail » qui vendent des biens meubles corporels (p. ex., du café, de la nourriture, des consommations ou des réparations d’automobile) directement à des clients. Cependant, la définition du mot « production », à l’article 26 du Règlement, exclut expressément de la production admissible l’activité consistant « à assembler, à transformer ou à fabriquer des biens meubles corporels dans un établissement de détail ». Dans la mesure où de grandes chaînes nationales et multinationales de cafés engagent des coûts d’électricité dans le cadre de la confection de café et d’aliments à vendre directement à des clients, la fraction provinciale des CTI à l’égard des coûts d’électricité doit être récupérée car ces activités ne sont pas assimilées à la « production » au sens de l’article 26 du Règlement. On pourrait soutenir que cette règle joue même si, hypothétiquement, il n’y avait pas d’exclusion d’un café en vertu de la définition de la « personne désignée » que l’on trouve au paragraphe 31(1) du Règlement. Là encore, la rédaction tautologique est courante.

[63]         Cet accent que l’on met délibérément sur les entités exclues, malgré un libellé tautologique clair, en lien avec les exceptions à la réduction des CTIPD à l’égard de l’« énergie déterminée pour la production », peut être mis en contraste avec l’autre exemption relative à la récupération des CTIPD qui concerne l’« énergie déterminée pour la recherche »[25]. Ces mots sont aussi définis au paragraphe 31(1) du Règlement, mais sans faire référence à une entité exclue quelconque. En fait, cette énergie est mise à la disposition de n’importe quelle « personne », à condition de remplir d’autres conditions :

*       énergie déterminée pour la recherche

a)      S’agissant d’une forme d’énergie déterminée acquise ou transférée en Ontario par une personne, la partie de celle-ci devant être consommée ou utilisée par la personne dans le cadre d’activités en Ontario qui sont des activités admissibles de recherche scientifique et de développement expérimental pour l’application de la Loi de 2007 sur les impôts, L.O. 2007, ch. 11, ann. A, et au titre desquelles elle déduit un montant dans le calcul de son impôt payable en vertu de cette loi;

[…]

[Non souligné dans l’original.][26]

[64]         Dans le contexte législatif, plusieurs autres observations peuvent être faites à l’appui de la conclusion selon laquelle le législateur fédéral n’a pas implicitement entendu que : i) les réserves prévues à l’alinéa b) de l’article 20 de la LIVD soient intégrées à la définition d’un « commerçant en ferraille » et ii) que la LTA et le Règlement en soi constitueraient un code complet par lequel le législateur fédéral a donné effet à l’Entente. Premièrement, de nombreux mots, autres que le « commerçant en ferraille », sont définis dans toute la LTA. En particulier, aux articles 26 et 31 du Règlement, ces mots ont une incidence sur la récupération temporaire de CTI, comme il a été convenu entre l’Ontario et le Canada par l’Entente. Deuxièmement, lorsqu’il a été nécessaire de faire référence aux dispositions législatives en vigueur dans le Règlement, le législateur fédéral n’a pas hésité à le faire. Par exemple, l’article 8 du Règlement dispose : « f) [p]our l’application de l’alinéa d) de la définition de taxe provinciale déterminée à l’article 220.01 de la Loi, est prévue, dans le cas d’un véhicule immatriculé en Ontario, la taxe prévue par la Loi sur la taxe de vente au détail, L.R.O. 1990, ch. R.31, et ses modifications successives ». [Non en italiques dans l’original]

[65]         Cette analyse contextuelle législative au sujet des mots non définis « commerçant en ferraille » ne résout pas comme il faut l’ambiguïté qui est en cause, car la présomption d’absence de loi tautologique est fort probablement réfutée compte tenu de son utilisation délibérée dans le même contexte immédiat. Le libellé redondant est vraisemblablement une technique de rédaction destinée à mettre en lumière et à clarifier les entités exclues dans la définition de la « personne désignée », même si elle est parfaitement inutile au vu de la définition de la « production ».

(iii) L’analyse téléologique de la loi dans son ensemble et l’exception relative au « commerçant en ferraille »

[66]         Même si l’Entente, la LTVQ et la LIVD ne font pas partie du contexte législatif de la disposition du Règlement qui est en cause, elles constituent assurément des éléments extrinsèques qui aident à interpréter l’objet ou la justification de l’exclusion du « commerçant en ferraille » par rapport à l’exemption relative à l’« énergie déterminée pour la production ». Cela est particulièrement vrai à la lumière du texte du paragraphe 236.01(2) de la LTA, qui fait expressément mention d’« un accord d’harmonisation de la taxe de vente conclu avec le gouvernement d’une province participante relativement au nouveau régime de la taxe à valeur ajoutée harmonisée [qui] permet la récupération de crédits de taxe sur les intrants […] ». Dans l’Entente dont il est question en l’espèce, l’article 17 de l’annexe « C » autorise expressément la récupération des CTI, dans la même mesure que les restrictions relatives aux RTI que prévoyait la LTVQ, telle qu’elle était formulée le 10 mars 2009.

[67]         Considérée sous l’angle du régime québécois, et notamment sous l’angle de l’Avis de 1983, l’ambiguïté entourant les mots « commerçant en ferraille » peut être résolue.

[68]         Au vu des preuves, Triple M ne peut pas être une entité qui est englobée par la notion de « marchand de ferraille » sous le régime de la LIVD et, par conséquent, du Règlement qui se rapporte à la récupération des CTIPD. À l’article 20 de la LIVD ainsi que dans l’Avis de 1983 connexe, les « marchands de ferraille » sont explicitement recensés comme une catégorie de personnes qui ne sont pas admissibles à l’exemption relative à la TVD concernant l’acquisition d’énergie à utiliser dans le cadre de la production de « biens mobiliers […] destinés à la vente », comme il est indiqué à l’alinéa aa) de l’article 17 de la LIVD. Il semble que la justification de cette exception relative au marchand de ferraille soit le fait que ces personnes exploitent des activités qui « consistent principalement […] à vendre des biens mobiliers qu’elles n’ont pas produits mais auxquels elles peuvent avoir apporté certaines modifications avant la livraison au consommateur ». Les marchands de ferraille sont exclus parce qu’ils ne sont pas  fabricants ou producteurs, mais plutôt agrégateurs ou entités qui apportent des modifications peu importantes à la ferraille avant de la revendre. D’un point de vue factuel, cela ne décrit pas les activités de transformation qu’exécute Triple M, mais vraisemblablement ses activités d’agrégation. D’un point de vue factuel toujours, Triple M, par l’entremise de ses activités de transformation, recycle en une forme utilisable de la ferraille mise au rebut ou inutilisable qu’elle acquiert, et ce, grâce à ses activités de transformation : la mise en paquets et le déchiquetage. Les activités de transformation sont nécessaires pour que ses clients – des aciéries – intègrent la ferraille utilisable dans la production d’acier, de fer ou d’un autre type de produit de métal utilisable. Ces activités ont, pour les produits, des conséquences transformatrices.

[69]         L’Avis de 1983, qui vise non seulement les « marchands de ferraille » mais aussi toutes les autres entités qui sont exclues du champ d’application de la « personne désignée » au sens du paragraphe 31(1) du Règlement, est important pour cette détermination. Aux termes de la Gazette officielle du Québec de 1983, les institutions financières sont exclues car leur activités « consistent principalement à rendre des services personnels ou professionnels ». Les « exploitants d’établissements au sens de la Loi concernant la taxe sur les repas et l’hôtellerie (L.R.Q., chap. T-3) », lesquels incluraient les hôtels, les bars, les cafés et les restaurants, de même que les « garagistes »[27], lesquels, à leur tour, incluraient les ateliers de réparation d’automobiles, et les « marchands de ferraille », ont tous été exclus aussi parce que leurs activités « consistent principalement à vendre des biens mobiliers [qu’ils] n’ont pas produits mais auxquels [ils] peuvent avoir apporté certaines modifications avant la livraison au consommateur ».

[70]         Il ne pourrait s’agir d’une simple coïncidence. Il faudrait plutôt considérer qu’il s’agit là d’une tentative délibérée de la part du législateur fédéral et du législateur ontarien pour exclure ces entités de la réduction des CTIPD concernant l’« énergie déterminée pour la production », et ce, pour le même motif qu’établissent l’Avis de 1983 et l’article 20 de la LIVD. Dans la présente affaire, il ressort de l’application combinée de la présomption de connaissance et de la présomption d’uniformité des expressions qu’il s’agit là de la bonne manière de procéder. La présomption de connaissance est en grande partie implicite, et le professeur Sullivan l’explique comme suit :

[traduction]

§8.9     présomption de connaissance. Le législateur est présumé connaître tout ce qui est nécessaire pour produire des lois rationnelles et efficaces. Cette présomption a une très large portée. Elle reconnaît au législateur le vaste bagage de connaissances qualifiées de faits législatifs ainsi que la maîtrise des règles de droit existantes, de la common law et du Code civil du Québec, de même que du droit législatif ordinaire et de la jurisprudence interprétant les lois. Il est présumé aussi que le législateur a connaissance des affaires pratiques. Il connaît les pratiques commerciales et le fonctionnement des institutions publiques, par exemple, et est au courant des problèmes que ses lois sont censées régler. En bref, il est présumé connaître les faits, quels qu’ils soient, qui se rapportent à la conception et à l’application de ses lois. [Renvois omis, non souligné dans l’original.][28]

[71]         La présomption d’uniformité des expressions a été expliquée ainsi :

[traduction]

§8.32   On présume que le législateur s’exprime avec soin et d’une manière uniforme, de sorte que, dans une loi ou un autre texte législatif, les mêmes termes ont le même sens et des termes différents ont des sens différents. Une autre manière de comprendre cette présomption est de dire que le législateur est présumé éviter les variations stylistiques. […]

§8.33   La présomption d’uniformité des expressions joue non seulement à l’intérieur des lois, mais également d’une loi à une autre, surtout s’il s’agit de lois ou de dispositions portant sur le même sujet. [Non souligné dans l’original.][29]

[72]         Dans le cas de la première présomption, il est présumé que le législateur fédéral et le législateur ontarien avaient les connaissances et les compétences requises au moment de conclure l’Entente qui faisait explicitement référence à la LTVQ et d’adopter, dans le Règlement, les dispositions relatives à la « personne désignée » et à l’« énergie déterminée pour la production ». C’est donc dire que toutes deux connaissaient et comprenaient : (i) les pratiques commerciales et l’entreprise qu’exécutaient les « commerçants en ferraille » et les autres entités exclues, (ii) le fait que ces entités étaient exclues du régime de RTI que prévoyait la LTVQ, laquelle faisait référence à la LIVD, (iii) les nombreuses complexités associées aux modifications législatives et aux avis publiés dans la Gazette officielle du Québec à propos de l’article 20 de la LIVD, y compris l’important Avis de 1983, et (iv) que les entités énumérées dans l’Avis de 1983 étaient exclues à cause de l’alinéa a) ou de l’alinéa b) de l’article 20 de la LIVD. Tout cela pour dire que ces entités étaient exclues parce qu’elles exécutaient principalement des activités autres que de production, qu’il s’agisse de services personnels ou de services professionnels, ou des activités de collecte importantes qui n’apportaient au produit final que des modifications superficielles ou des changements de conditionnement : des services d’agrégation. Cette présomption est implicite et, comme nul élément de preuve en sens contraire n’a été produit, elle n’est pas réfutée.

[73]         Compte tenu de cette présomption de connaissance non réfutée, il ressort de la présomption d’uniformité des expressions que le « commerçant en ferraille » exclu du champ d’application de la « personne désignée » doit avoir un sens semblable à celui du « marchand de ferraille » exclu par l’article 20 de la LIVD et de l’Avis de 1983. Ce sont les mêmes mots que l’on retrouve dans les versions anglaises du Règlement et de l’Avis de 1983. Les versions françaises ne sont pas tout à fait les mêmes, mais le sens est essentiellement identique. Dans la version française du Règlement, il est question des « commerçants en ferraille ». Dans la version française de l’Avis de 1983, il est question de « marchands de ferraille ». Tous deux sont essentiellement des marchands ou des revendeurs de ferraille[30], sans différence étymologique importante. L’Avis de 1983 n’est manifestement pas une loi, mais il est présumé que le législateur fédéral et le législateur ontarien se sont penchés sur la question de la portée pour l’application de la réduction des CTIPD. Il est présumé aussi que le législateur fédéral et le législateur ontarien, en décidant d’utiliser (en anglais) les mêmes mots – « scrap metal dealer » (en français : commerçant en ferraille ou marchand de ferraille) – pour définir une entité qui serait exclue du champ d’application de la « personne désignée », entendaient que l’on attribue le même sens, ou un sens semblable, aux mots « commerçant en ferraille » qui figurent dans le Règlement.

[74]         Les mots « commerçant en ferraille » que l’on trouve dans le Règlement peuvent avoir un sens semblable, mais non identique, à celui du « marchand de ferraille » que l’on emploie à l’article 20 de la LIVD, à cause d’une différence fondamentale entre les régimes de la LIVD et de la LTA. Dans la LIVD, il est question d’une taxe sur la vente au détail que l’on perçoit du consommateur final. Le second élément de la définition, à l’alinéa b) de l’article 20 de la LIVD,  parle de « livraison au consommateur », et les entités exclues de l’exemption relative à la TVD, conformément à l’article 20 de la LIVD et à l’Avis de 1983 fournissent directement aux consommateurs leurs produits, comme les fleuristes et les exploitants d’animalerie. Le marchand de ferraille visé par la LIVD est forcément limité à cet égard. En revanche, la LTA et, quant à cela, la LTVQ sont des régimes de taxes de vente d’une portée nettement plus large. Elles imposent chacune une taxe sur la valeur ajoutée qui est perçue à chacune des étapes de la chaîne d’approvisionnement. C’est donc dire que la notion de « commerçant en ferraille », sous le régime de la LTA et du Règlement, doit être interprétée de manière plus large, de façon à faire abstraction du second élément de l’alinéa b) de l’article 20 de la LIVD, qui, pour l’application de la LTA, est tout simplement une redondance anachronique.

[75]         De plus, il y a conciliation, qui donne une certaine cohérence à ce régime législatif fondé sur de multiples sources et de multiples autorités, et qui crée un tout harmonieux. Cela se fait grâce à : (i) l’Avis de 1983, (ii) la LIVD, qui concorde avec l’interprétation plus étroite qu’offrent les dictionnaires et (iii) la jurisprudence, dans la mesure où elle est pertinente. De plus, il y a également la notion tacite dans l’industrie, à savoir que le commerçant en ferraille se borne à acheter, vendre et trier la ferraille, ce qui constitue des activités d’agrégation, peu importe qu’il fournisse ses produits directement à des consommateurs ou à d’autres entreprises de transformation ou de production situées en aval.

[76]         Par ailleurs, cette interprétation concorde également avec l’entente bilatérale concernant la réduction des CTIPD. Elle concorde avec le « plafonnement » de l’obligation fiscale qu’impose le régime de la LTVQ/LIVD à l’égard des restrictions relatives au RTI, auxquelles fait à son tour référence l’article 17 de l’annexe « C » de l’Entente. Dans le cadre de cette interprétation, l’étendue des entités exclues du champ d’application de la « personne désignée » n’est en fait pas plus large que le nombre des entités visées par l’Avis de 1983 qui ne seraient pas admissibles à l’exemption relative à la TVD sous le régime de la LIVD et le nombre de celles qui, de ce fait, ne serait pas admissibles à l’exemption relative aux restrictions concernant les RTI, telles qu’énoncées dans la LTVQ. En fin de compte, l’incorporation par renvoi a un objet harmonieux.

[77]         En conclusion, l’Avis de 1983 et la LIVD jouent un rôle important pour ce qui est d’éclairer le but pour lequel le « commerçant en ferraille » est exclu du régime de récupération des CTIPD qui est consacré par la LTA et par le Règlement. L’ambiguïté qui subsistait après la prise en considération des définitions ordinaires de cette expression, lesquelles peuvent être étroites ou larges, est résolue si l’on privilégie l’interprétation plus étroite que contient l’Avis de 1983. Du point de vue téléologique, c’est selon toute vraisemblance ce que le législateur fédéral et le législateur ontarien entendaient pour Triple M à titre de recycleur de ferraille et pour son admissibilité à la réduction des CTIPD à cause des activités de transformation identifiables et limitées.

VI. Sommaire et conclusion

[78]         L’interprétation qui précède n’est pas sans présenter quelques difficultés,  mais, dans la mesure où elles existent, elles ne peuvent pas servir à écarter des preuves référentielles axées sur le champ d’application de la « personne désignée » au sens du Règlement, un champ d’application éclairé par les définitions ordinaires et par l’Avis de 1983, de même que par leur philosophie. Par ailleurs, toute ambiguïté non résolue et latente qui subsiste après analyse textuelle, contextuelle et téléologique qui précède, appelle la présomption résiduelle en faveur du contribuable car ni le législateur fédéral, ni le législateur ontarien, ni le ministre n’ont présenté une définition explicite de ces mots ambigus que sont le « commerçant en ferraille ». Le différend dont notre Cour est saisie est dû à cette omission dans le régime de récupération des CTIPD. Dans les circonstances, comme l’enseigne l’arrêt Placer Dome, la présomption résiduelle doit jouer en faveur d’un contribuable tel que Triple M, dans les cas où les principes d’interprétation législative ordinaires ne permettent pas de régler la question en litige[31]. Après tout, Triple M ne s’est livrée à aucune sorte de planification fiscale compliquée pour avoir accès à la réduction des CTIPD.

[79]         L’appel est donc accueilli, étant entendu que Triple M a droit à la réduction des CTIPD pour ses activités de transformation liées aux activités de mise en paquets et de déchiquetage pendant les périodes de déclaration. Cela s’explique par le fait que, au cours de ces périodes de déclaration, elle était une personne désignée au sens de l’article 236.01 de la LTA, des dispositions réglementaires applicables et des ententes mentionnées. Dans ce contexte, ses activités de transformation constituaient une activité de production utilisant une forme d’énergie déterminée pour la production, donc visée par l’exemption relative à la production qui s’applique à de telles activités de transformation.

[80]         Au vu du régime législatif complexe dans lequel s’inscrivait le droit de Triple M à la réduction des CTIPD et du fait qu’il n’y avait aucun fait important en litige, et même si Triple M devrait avoir droit à la totalité de ses dépens, la Cour recevra des observations succinctes sur la question des dépens dans les 30 jours suivant le présent jugement.

Signé à Ottawa, Canada, ce 23e jour de décembre 2016.

« R.S. Bocock »

Le juge Bocock

Traduction certifiée conforme

ce 2e jour de février 2018.

François Brunet, réviseur




 

RÉFÉRENCE :

2016 CCI 293

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2014-4563(GST)G

INTITULÉ :

TRIPLE M METAL LP et SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 5 octobre 2016

MOTIFS DU JUGEMENT :

Le juge Randall S. Bocock

DATE DU JUGEMENT :

Le 23 décembre 2016

COMPARUTIONS :

Avocates de l’appelante :

Me Louise Summerhill

Me Meghan Cowan

Avocat de l’intimée :

Me Charles Camirand

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Avocates de l’appelante :

Nom:

Me Louise Summerhill

Me Meghan Cowan

Cabinet :

Air & Berlis LLP

Pour l’intimée :

Me William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 



[1] Conformément aux paragraphes 27(3) et (4) du Règlement, le « montant seuil de récupération des crédits de taxe sur les intrants » est, en général, le total de la contrepartie qui est devenue due ou a été payée à l’inscrit dans l’année financière précédant la période de déclaration en litige qui est susceptible de récupération.

[2] Aux termes de l’article 26 du Règlement, le taux de récupération applicable aux CTIPD de l’Ontario est de 100 % pour la période du 1er juillet 2010 au 30 juin 2015.

[3] « Province » désigne la province de l’Ontario.

[4] Les articles 206.1 et 206.3 de la LTVQ ont été initialement abrogés par LQ 1995, ch. 63, art. 350 à compter du 1er août 1995. Cependant, l’abrogation n’est valable que pour les inscrits qui sont des petites et moyennes entreprises. L’abrogation des articles 206.1 et 206.3 de la LTVQ a été reportée indéfiniment pour les grandes entreprises, conformément à LQ 1997, ch. 85, art. 729. En date du 10 mars 2009, soit la date prévue dans l’Entente, les dispositions susmentionnées s’appliquaient encore aux grandes entreprises.

[5] La LIVD a été abrogée et remplacée depuis longtemps par la LTVQ, un système de taxe sur la valeur ajoutée unique, semblable à la TPS/TVH. Cependant, même si la TVD ne s’applique plus aux ventes effectuées après le 30 juin 1992, des dispositions précises de la LIVD s’appliquent toujours, dans la mesure où elles ont été intégrées dans la LTVQ.

[6] Gazette officielle du Québec, 29 juin 1983, vol. 115, n28, à la p. 2272.

[7] LTA, par. 236.01(2).

[8] Pour éviter au lecteur d’avoir à retourner sans cesse les pages du présent jugement : l’« électricité » tombe sous le coup de l’alinéa a) de la définition d’une« forme d’énergie déterminée » à l’article 26 du Règlement. La « forme d’énergie déterminée » qui est acquise dans une « province déterminée », c’est-à-dire l’Ontario, est, par ricochet, un bien ou un service « déterminé » au sens de la définition d’un« bien ou service déterminé » que l’on trouve à l’alinéa 28(1)e) du Règlement, ainsi qu’au paragraphe 236.01(1) de la LTA.

[9] 2005 CSC 54, [2005] 2 R.C.S. 601.

[10] 2006 CSC 20.

[11] Ibidem, au paragraphe 24.

[12] 80 DLR(3d) 289.

[13] LC 1970-71-72, c-7.

[14] [1993] 2 RCF 179 (CAF).

[15] 2016 CCI 12.

[16] Ibidem, au paragraphe 22.

[17] [1996] G.S.T.C. 90, [1996] FCJ No 1621 (FCA).

[18] Ibidem, au paragraphe 3.

[19] Règlement, art. 31(1).

[20] L’expression « institution financière » est définie à l’article 123 et au paragraphe 149(1) de la LTA.

[21] Placer Dome, aux paragraphes 45 et 46

[22] Placer Dome, aux paragraphes 45 et 46.

[23] Règlement, art. 26, « production ».

[24] Placer Dome, au paragraphe 46. Voir aussi Ruth Sullivan, Sullivan on the Construction of Statutes, 6e édition. (2014) LexisNexis Canada, aux paragraphes 8.30 et 8.31 (page 214 de la 5e édition).

[25] Règlement, par. 31(3).

[26] Règlement, par. 31(1), « énergie déterminée pour la recherche ».

[27] S’il y a, dans la version anglaise de la présente décision, une confusion quelconque quant au sens de l’expression « garage operator », la version française de l’Avis de 1983 résout cette ambiguïté. L’équivalent français de cette expression est « garagistes », qui se traduit directement par « car mechanics » (mécaniciens d’automobile), par opposition à ce qui pourrait être compris comme les propriétaires d’un « parking garage » (garage de stationnement) ayant pour entreprise de louer des places de stationnement.

[28] Ruth Sullivan, Sullivan on the Construction of Statutes, 6e édition. (2014) LexisNexis Canada, à §8.9 (page 205 de la 5e édition).

[29] Sullivan, à §8.32-8.33 (page 215 de la 5e Édition).

[30] Le Multidictionnaire de la langue française définit un(e) marchand(e) comme une « [p]ersonne qui fait profession d’acheter pour revendre avec bénéfice ». Là encore, cette définition renferme l’idée que l’on modifie peu les produits.

[31] Placer Dome, au paragraphe 24.

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