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Dossier : 2014-79(GST)G

ENTRE :

GEM HEALTH CARE GROUP LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Appels entendus les 26 et 27 janvier 2016, à Halifax (Nouvelle‑Écosse).

Devant : L’honorable juge Don R. Sommerfeldt


Comparutions :

Avocats de l’appelante :

Me Bruce Russell, c.r.

Me Brian Awad

Avocat de l’intimée :

Me Martin Hickey

 

JUGEMENT MODIFIÉ

Les appels sont accueillis et les nouvelles cotisations (les « nouvelles cotisations ») visées par les appels sont renvoyées au ministre du Revenu national (le « ministre ») pour qu’il procède à nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations conformément aux motifs ci‑joints et, en particulier, compte tenu du fait que, durant la période allant du 1er janvier 2009 au 30 septembre 2011 :

  • a) l’appelante est intervenue comme mandataire de Heart of the Valley Long Term Care Centre Limited, de Whitehills Long Term Care Centre Limited et d’Admiral Long Term Care Centre Limited (collectivement, les « propriétaires »), relativement à l’aménagement et à la construction des maisons de retraite appartenant aux propriétaires respectives, de sorte qu’elle n’a assuré des services de construction à aucune de ces dernières et que, par conséquent, elle n’était pas tenue de percevoir ou de verser la taxe sur les produits et services et la taxe de vente harmonisée (la « TPS/TVH ») relativement aux services de construction allégués;

  • b) les services de gestion que l’appelante a assurés à Melville Ridge Holdings Limited (« Melville Ridge ») n’incluaient nul service assuré par Syed Hussain et, par conséquent, l’appelante a calculé et facturé correctement le montant de contrepartie approprié concernant ces services et a perçu et versé le montant exact de TPS/TVH à l’égard de ces services.

À tous autres égards, les nouvelles cotisations sont confirmées. En particulier :

  • a) l’appelante n’avait pas droit à des crédits de taxe sur les intrants à l’égard de la réduction, à compter du 31 décembre 2009, du montant des honoraires de gestion facturés à Melville Ridge et à la propriétaire de la maison de retraite North Hills;

  • b) le ministre a établi à juste titre de nouvelles cotisations de TPS/TVH à l’égard de l’appelante relativement aux frais de stationnement que cette dernière a facturés aux visiteurs du Garden Inn.

Les dépens, auxquels s’ajoutent les honoraires pour la présence d’un second avocat à l’audience, sont adjugés à l’appelante conformément au tarif B de l’annexe II des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale).

Le présent jugement modifié remplace le jugement daté du 25 janvier 2017.

Signé à Ottawa, Canada, ce 6e jour de février 2017.

« Don R. Sommerfeldt »

Juge Sommerfeldt

Traduction certifiée conforme

ce 7e jour de novembre 2018.

François Brunet, réviseur


Référence : 2017 CCI 13

Date : 20170125

Dossier : 2014-79(GST)G

ENTRE :

GEM HEALTH CARE GROUP LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 [TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Sommerfeldt

I. INTRODUCTION

[1]  Les présents motifs concernent les appels que GEM Health Care Group Limited (« GEM ») a interjetés de diverses nouvelles cotisations (les « nouvelles cotisations ») que l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») a établies le 1er juin 2012 pour le compte du ministre du Revenu national (le « ministre ») au titre de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise [1] . Les nouvelles cotisations ont été établies en deux séries. L’une a été établie à l’égard de GEM relativement à son numéro d’entreprise 88325 9038 RT0001 (qui était le numéro d’entreprise des établissements de soins de longue durée de GEM) et couvrait les périodes de déclaration mensuelles allant du 1er janvier 2009 au 30 septembre 2011 [2] . L’autre a été établie à l’égard du numéro d’entreprise 88325 9038 RT0002; elle couvrait les périodes de déclaration mensuelles pour décembre 2009, décembre 2010, janvier à juin 2011 et août et septembre 2011, et se rapportait aux activités commerciales de Mahpal Developments (« Mahpal »), une division de GEM non constituée en société [3] .

[2]  Malgré le fait que Mahpal soit une division de GEM, et fait donc partie de la même entité juridique que cette dernière, une distinction entre Mahpal et GEM a été opérée dans les actes de procédure, tout comme dans la majeure partie des éléments de preuve qui ont été présentés. Par conséquent, dans les présents motifs, il sera question à la fois de Mahpal et de GEM, mais il faut se rappeler que Mahpal fait légalement partie de GEM.

II. QUESTIONS EN LITIGE

[3]  Les nouvelles cotisations, dans la mesure où elles sont visées par les présents appels, soulevaient quatre questions :

  • a) par certaines nouvelles cotisations, la taxe sur les produits et services et la taxe de vente harmonisée (la « TPS/TVH ») a été imposée dans le cadre de services de construction qui auraient été assurés par Mahpal à trois filiales en propriété exclusive de GEM relativement à trois nouvelles maisons de retraite;

  • b) par certaines nouvelles cotisations, la TPS/TVH a été imposée à l’égard d’une prestation de services de gestion par GEM à une autre filiale dont elle a la propriété exclusive;

  • c) par certaines nouvelles cotisations, des crédits de taxe sur les intrants (les « CTI ») relatifs à une réduction en 2009 des honoraires de gestion que GEM avait facturés à deux filiales ont été refusés;

  • d) par certaines nouvelles cotisations, la TPS/TVH a été imposée à l’égard de frais de stationnement que GEM facturait aux visiteurs du Garden Inn que GEM possédait et exploitait.

Par son avis d’appel et par son avis d’appel modifié, GEM a contesté le bien‑fondé des nouvelles cotisations, dans la mesure où celles-ci se rapportaient aux questions susmentionnées.

[4]  Au début de l’audience, les avocats de GEM ont informé la Cour qu’étant donné que le montant de TPS/TVH concernant les frais de stationnement imposés aux visiteurs du Garden Inn était relativement petit, GEM renonçait à plaider cette question.

III. CONTEXTE

A. GEM Health Care Group Limited

[5]  Le 1er janvier 2000, les sociétés GEM Management Holdings Limited, Gables Lodge Limited, Mahpal Developments Limited et 3001889 Nova Scotia Limited ont fusionné pour former une société appelée « GEM Health Care Group Limited ». Cette société fusionnée (ou sa remplaçante) a ensuite pris part à deux autres fusions, le 1er janvier 2014 et le1er janvier 2015. Dans chaque cas, la nouvelle société issue de la fusion a conservé le nom de « GEM Health Care Group Limited [4]  ».

B. Mahpal Developments

[6]  Après la fusion qui a pris effet le 1er janvier 2000, le nom « Mahpal Developments » a servi à désigner la division de construction de chacune des trois sociétés fusionnées successives qui sont susmentionnées. Quand les trois maisons de retraite ont été aménagées et construites, la plupart des travaux ont été effectués sous le nom de Mahpal Developments [5] . Il n’est pas controversé entre les parties que Mahpal Developments était une division ou une succursale non constituée en société de GEM, de sorte que toutes les activités effectuées par Mahpal étaient, concrètement, effectuées par GEM. Cependant, Mahpal et GEM avaient des comptes bancaires et des numéros d’entreprise distincts.

C. La structure organisationnelle

[7]  Monsieur Syed Hussain et son épouse, Gloria, sont les seuls actionnaires et administrateurs de GEM. M. Hussain est le président-directeur général (le « PDG ») de GEM. Gloria, qui est infirmière autorisée, est secrétaire et directrice des soins infirmiers de GEM. Cette dernière, ainsi que diverses sociétés affiliées ou filiales, ont toutes été constituées en société (ou créées par fusion) en vertu de la loi néo-écossaise.

[8]  Pendant les périodes pertinentes particulières, GEM détenait la totalité des actions émises du capital‑actions de diverses personnes morales (les « filiales »), dont Melville Ridge Holdings Limited (« Melville Ridge ») [6] , Heart of the Valley Long Term Care Centre Limited (« HOTV Ltd. »), Whitehills Long Term Care Centre Limited (« Whitehills Ltd. ») et Admiral Long Term Care Centre Limited (« Admiral Ltd. »). M. Hussain était administrateur et PDG de chacune de ces quatre filiales. Il intervenait pour le compte de chaque filiale qui concluait une entente avec une autre filiale faisant partie du groupe de sociétés (le « groupe de sociétés »). M. Hussain a déclaré que, selon la pratique du groupe de sociétés, on ne mettait pas par écrit les ententes intersociétés et intra‑groupe. Elles étaient plutôt conclues verbalement. On suivait cette pratique parce qu’il était le décideur des deux côtés de l’opération.

[9]  GEM assurait divers services à chacune des filiales, dont des services de paie, des services de consultation et de négociation syndicales, des services d’achat, des services de TI ainsi que des services de planification stratégique et de ressources humaines (y compris l’embauche et le congédiement) concernant la haute direction de chaque filiale. Les filiales respectives se chargeaient de l’embauche et du congédiement du personnel d’échelons inférieurs.

[10]  M. Hussain était l’employé de GEM qui effectuait un grand nombre des activités constituant les services assurés aux filiales par GEM. Celle‑ci versait une rémunération à M. Hussain pour les services qu’il assurait à GEM ainsi que pour ceux qu’il assurait aux filiales pour le compte de GEM.

[11]  Pendant les périodes pertinentes particulières, le groupe de sociétés possédait et exploitait douze ou treize maisons de retraite. GEM possédait elle‑même quelques-unes de ces maisons. M. Hussain assurait des services concernant ces maisons de retraite. De plus, pour le compte de GEM, il assurait à la plupart des filiales des services qui étaient semblables à ceux qu’il assurait aux maisons de retraite appartenant à GEM. Les honoraires que GEM facturait habituellement à une filiale (à l’exception de Melville Ridge) pour les services de gestion qu’elle assurait représentaient 5 % des revenus bruts de la filiale.

D. Nouvelles maisons de retraite

[12]  En 2008, le gouvernement néo-écossais s’est lancé dans un projet de remplacement de diverses maisons de retraite de la province, dont deux que GEM possédait et exploitait à cette époque. L’une de ces maisons devait être remplacée par deux autres, situées dans des lieux différents. C’est ainsi que, pendant un certain temps, GEM a pris part à l’aménagement de trois nouvelles maisons de retraite, appelées Heart of the Valley Long Term Care Centre (le « centre HOTV »), Whitehills Long Term Care Centre (le « centre Whitehills ») et The Admiral Long Term Care Centre (le « centre Admiral »). De pair avec l’aménagement des nouvelles maisons de retraite, GEM a fait en sorte que trois nouvelles filiales soient constituées en société, une pour chaque maison de retraite. Les trois nouvelles filiales (qui seront parfois désignées ci‑après comme les « propriétaires ») étaient, comme cela a été précisé et défini plus tôt, HOTV Ltd., Whitehills Ltd. et Admiral Ltd., respectivement. M. Hussain a pris les dispositions nécessaires pour que la parcelle de terrain particulière pour chaque maison de retraite soit cédée :

  • a) par lui seul à HOTV Ltd.;

  • b) par son épouse et lui à Admiral Ltd.;

  • c) par Melville Ridge à Whitehills Ltd. [7] ,

au moyen de trois contrats bilatéraux, chacun daté du 2 juin 2009 et signé par les cédants respectifs ou pour leur compte. Les contrats bilatéraux n’ont pas été signés pour le compte des cessionnaires respectifs (mais je ne crois pas que cela ait une incidence quelconque).

E. Aménagement et construction des maisons de retraite

[13]  Pour établir le cadre contractuel d’aménagement et de construction des trois nouvelles maisons de retraite, Sa Majesté la Reine du chef de la province de Nouvelle‑Écosse (le « gouvernement néo-écossais ») a conclu une entente d’aménagement et une entente de service avec les trois sociétés HOTV Ltd., Whitehills Ltd. et Admiral Ltd., respectivement. L’entente d’aménagement et l’entente de service conclues entre le gouvernement néo-écossais et HOTV Ltd. ont été signées par un représentant de HOTV Ltd., le 14 avril 2009, ainsi que par un représentant du gouvernement néo-écossais, le 20 mai 2009. GEM était partie aux ententes d’aménagement et aux ententes de service conclues entre le gouvernement néo-écossais et Whitehills Ltd., ainsi qu’entre le gouvernement néo-écossais et Admiral Ltd., respectivement (mais pas aux ententes conclues entre le gouvernement néo-écossais et HOTV Ltd.). Les ententes d’aménagement et les ententes de service conclues entre le gouvernement néo-écossais, GEM et Whitehills Ltd. ainsi qu’entre le gouvernement néo-écossais, GEM et Admiral Ltd. ont été signées par des représentants de GEM et de Whitehills Ltd. ou d’Admiral Ltd. (selon le cas) le 19 novembre 2009, ainsi que par des représentants du gouvernement néo-écossais le 24 novembre 2009.

[14]  Lors de la discusion portant sur les trois ententes d’aménagement, M. Hussain a déclaré que chacune d’elles stipulait que GEM devait assumer la responsabilité de la construction de la maison de retraite donnée. Cette condition s’expliquait par le fait que, à ce moment‑là, les trois propriétaires étaient de nouvelles sociétés qui ne détenaient que des actifs minimes et qui n’avaient aucun employé à leur service. Le gouvernement néo-écossais a donc voulu que GEM soit responsable des travaux d’aménagement.

[15]  Je ne suis pas convaincu que la disposition décrite au paragraphe précédent figurait dans l’entente d’aménagement conclue avec HOTV. L’entente d’aménagement concernant le centre HOTV (pièce R‑1, onglet 2) a été conclue entre le gouvernement néo-écossais et HOTV Ltd. GEM n’est pas partie à cette entente. J’ai examiné l’entente d’aménagement de HOTV et je n’y relève aucune mention de GEM ni aucune stipulation portant que GEM était chargée de la construction du centre HOTV.

[16]  Les deux autres ententes d’aménagement (pièce A‑1, onglets 11 et 13) comportent chacune trois parties : les deux premières sont le gouvernement néo-écossais et GEM et la troisième est Whitehills Ltd. ou Admiral Ltd., selon le cas. La Couronne a produit en preuve une copie complète de l’entente d’aménagement concernant le centre HOTV (pièce R‑1, onglet 2). GEM a produit en preuve des copies d’extraits (contenant la première page et la page de signature) de chaque entente d’aménagement (pièce A‑1, onglets 9, 11 et 13). Il ne m’a pas été produit de copies complètes des ententes d’aménagement conclues entre le gouvernement néo-écossais, GEM et Whitehills Ltd. ou Admiral Ltd., selon le cas. La première page et la page de signature de l’entente d’aménagement de Whitehills et de l’entente d’aménagement d’Admiral semblent être similaires aux pages correspondantes de l’entente d’aménagement de HOTV, hormis le fait que les ententes d’aménagement de Whitehills et d’Admiral font également état de GEM à titre de partie. L’entente d’aménagement de Whitehills et l’entente d’aménagement d’Admiral définissent les mots [traduction] « fournisseurs de services » comme désignant à la fois GEM et la propriétaire en question. Dans ces ententes, il semble que l’on n’ait fait aucun effort pour opérer une distinction entre GEM et la propriétaire en question, notamment en ce qui concerne les fonctions respectives de chacune. Si l’on suppose que les pages 2 à 23 de l’entente d’aménagement de Whitehills et de l’entente d’aménagement d’Admiral sont identiques aux pages correspondantes de l’entente d’aménagement de HOTV, je ne crois pas qu’il y ait quoi que ce soit dans ces ententes dont il ressort que GEM doit être traitée différemment de la propriétaire en question pour ce qui est des responsabilités prévues dans l’entente correspondante.

[17]  Il ne semble pas que l’on ait établi des documents au moment de l’aménagement ou de la construction des maisons de retraite de façon à délimiter, d’une part, les responsabilités respectives de GEM et, d’autre part, celles de chacune des trois propriétaires. Au vu des preuves, il ne semble pas qu’au moment de la rédaction et de la signature des ententes d’aménagement les parties aient songé de quelque manière que ce soit à la relation entre GEM et les trois propriétaires ou à la qualité en laquelle chacune exercerait ses fonctions pendant l’aménagement et la construction des maisons de retraite.

[18]  Aux premiers stades de l’aménagement et de la construction des maisons de retraite, les trois propriétaires étaient de nouvelles sociétés qui n’avaient pas d’actifs importants ni d’employés à leur service (à part les cadres désignés). Par conséquent, une bonne part du travail concernant l’aménagement et la construction des maisons de retraite a donc été faite par des employés de GEM. Cependant, il est important de souligner que les cadres supérieurs de GEM étaient aussi des cadres supérieurs des trois propriétaires.

[19]  Pour chaque maison de retraite, GEM (y compris Mahpal) a conclu des contrats avec un architecte et avec un entrepreneur général, qui a conclu divers contrats de sous‑traitance avec les fournisseurs qui ont apporté la main‑d’œuvre et les matériaux pour la conception et la construction des maisons de retraite. L’une des questions fondamentales soulevées en l’espèce est de savoir si GEM a conclu ces contrats en son propre nom ou si elle est intervenue à titre de mandataire des trois propriétaires.

F. Financement

[20]  M. Hussain a expliqué que, contrairement aux projets antérieurs de maison de retraite, dans le cadre desquels le promoteur était tenu d’obtenir son propre financement sur le marché, en 2007, lorsque le gouvernement néo-écossais a proposé sa Continuing Care Strategy (stratégie de soins continus) en vue de renouveler ou de remplacer certains établissements de soins de longue durée, il était disposé à financer les coûts de construction. Par conséquent, de concert avec les prêts proposés :

  • a) le 17 août 2009, HOTV Ltd. et la Housing Development Corporation (la « HDC ») de la Nouvelle‑Écosse ont conclu une convention hypothécaire et une convention de garantie concernant un prêt de 16 271 963 $, en vue d’assurer le financement de la construction et de l’équipement du centre HOTV;

  • b) le 15 décembre 2009, Whitehills Ltd. et HDC ont conclu une convention hypothécaire et une convention de garantie concernant un prêt de 19 550 936 $, en vue d’assurer le financement de la construction et de l’équipement du centre Whitehills;

  • c) le 15 décembre 2009, Admiral Ltd. et HDC ont conclu une convention hypothécaire et une convention de garantie concernant un prêt de 23 841 719 $, en vue d’assurer le financement de la construction et de l’équipement du centre Admiral.

Il est important de préciser que, pour chacun des trois prêts, l’emprunteur était la propriétaire en question, et non GEM ou Mahpal.

IV. ANALYSE

A. La construction des maisons de retraite

[21]  GEM soutient que, dans la mesure où des activités relatives à la construction des maisons de retraite ont été exercées au nom de GEM (y compris Mahpal), ces activités ont été exercées par GEM (y compris Mahpal) à titre de mandataire des propriétaires respectives. En revanche, l’ARC soutient que les propriétaires ont retenu les services de GEM (dont la division de la construction était Mahpal) pour procéder à la construction des maisons de retraite, et que GEM, en son propre nom, a fourni des services de construction aux propriétaires.

[22]  Il n’y a pas eu de convention de mandat écrite stipulant expressément que GEM intervenait comme mandataire de l’une quelconque des propriétaires. Cependant, étant donné qu’une relation mandant‑mandataire peut être expresse ou implicite, il est également nécessaire de déterminer s’il existait une relation mandant‑mandataire implicite entre, d’une part, GEM, et, d’autre part, une propriétaire ou toutes les propriétaires.

1) Les principes juridiques

[23]  Comme l’ont fait observer Hogg, Magee et Cook, il faut examiner le droit général ainsi que le droit fiscal pour régler les présents appels :

[traduction
La Loi de l’impôt sur le revenu se fonde implicitement sur le droit commun et plus particulièrement sur le droit des contrats et le droit des biens […] Qu’une personne soit employée, entrepreneur indépendant, associé, mandataire, la bénéficiaire d’une fiducie ou l’actionnaire d’une société par actions, cela a généralement une incidence sur l’obligation fiscale et dépend de notions du droit commun, soit généralement du droit provincial [8] .

En l’espèce, il est nécessaire d’examiner non seulement le droit des contrats et le droit des biens, mais aussi le droit du mandat.

[24]  Avant de mettre l’accent sur les principes juridiques applicables à la relation mandant‑mandataire implicite, il est utile de passer en revue quelques principes fondamentaux concernant le mandat en général. Par l’arrêt Canada c Merchant Law Group [9] , la Cour d’appel fédérale a consacré le principe suivant :

Il est bien établi en common law qu’une relation de mandataire exige que le mandataire puisse influer sur la situation juridique du mandant à l’égard des tiers, en concluant des contrats pour le compte du mandant ou en disposant des biens du celui‑ci. […]

La Cour a déjà reconnu que l’une des conditions essentielles d’une relation de mandataire est le pouvoir du mandataire d’influer sur la situation juridique du mandant. […]

[…] une condition essentielle de la relation de mandataire […] [est] la capacité d’influer sur la situation juridique du mandant relativement à l’opération en cause [10] .

Ce principe a son importance dans le cadre des présents appels, comme nous le verrons plus loin.

[25]  Pour ce qui est de la notion de mandat implicite en particulier, le point de vue de l’ARC sur cette notion est exposé dans un énoncé de principe de la manière suivante :

Il y a mandat lorsqu’une personne (le mandant) en autorise une autre (le mandataire) à la représenter et à prendre certaines mesures pour son compte. L’autorisation donnée par le mandant peut être explicite ou implicite. Autrement dit, une relation de mandat peut être créée lorsqu’une personne consent de façon explicite à ce qu’une autre personne agisse pour son compte ou lorsqu’elle se comporte d’une manière telle que le consentement est implicite. […]

Bien que deux parties puissent convenir qu’une partie doit agir à titre de mandataire relativement aux opérations réalisées pour le compte de l’autre partie, l’absence d’une telle convention n’est pas suffisante pour que l’on puisse conclure qu’il n’y a pas de relation de mandat.

Même si l’intention des parties est un facteur important permettant de déterminer la nature de la relation entre les parties, la jurisprudence soutient la possibilité que deux parties peuvent être engagées dans une relation de mandat sans qu’elles le sachent, dans la mesure où leurs actes indiquent qu’une partie agit à titre de mandataire pour le compte de l’autre partie. En d’autres mots, l’existence d’un mandat est généralement évidente d’après le comportement des parties [11] .

[26]  Un traité qui fait autorité intitulé Canadian Agency Law, discute la question de la création d’une relation mandant‑mandataire par un contrat implicite de la manière suivante :

[traduction]

Comme pour les autres types de contrats, le mandat peut résulter implicitement de la conduite des parties, sans que ces dernières se soient expressément entendues sur les conditions d’emploi, sur la rémunération, et ainsi de suite. […] L’assentiment du mandataire peut s’entendre du fait que celui‑ci est intervenu intentionnellement pour le compte d’une autre personne. Toutefois, en général, c’est l’assentiment implicite du mandant auquel il sera probablement conclu. […] Un tel assentiment peut être implicite lorsque les circonstances indiquent de façon claire que le mandataire a donné l’autorité à une autre personne d’intervenir en son nom, ce qui peut être le cas même si le mandataire ne connaissait pas véritablement la situation. Le simple silence n’est pas suffisant. Il doit exister une ligne de conduite indiquant l’acceptation du mandat. Une telle implication a pour effet de mettre les parties dans la même situation que celle qui existerait si le mandat avait été expressément créé [12] . [Renvois omis.]

[27]  À l’occasion de l’affaire Kinguk Trawl, la Cour d’appel fédérale a cité la définition classique suivante du mot « mandat » :

[traduction] [...] la relation fiduciaire entre deux personnes par laquelle l’une consent expressément ou tacitement à ce que l’autre accomplisse en son nom des actes qui modifient ses rapports avec des tiers, et l’autre consent à accomplir ces actes ou les accomplit [13] .

[28]  Dans l’affaire Kinguk Trawl, les relations entre deux sociétés de pêche canadiennes d’une part, et, d’autre part, une société de commercialisation de poisson danoise étaient régies par des ententes commerciales respectives concernant les crevettes pêchées par les sociétés canadiennes et livrées à la société danoise. Il n’y avait aucune convention de mandat écrite entre les parties respectives, pas plus que l’une ou l’autre entente commerciale ne désignait la société danoise comme mandataire de la société canadienne en cause. La Cour d’appel fédérale, après avoir interprété les ententes commerciales comme un tout et tenu compte des circonstances, a conclu que les sociétés canadiennes conservaient la propriété effective des crevettes jusqu’à leur vente par la société danoise, d’où il s’ensuivait que cette dernière intervenait pour le compte des sociétés canadiennes lorsqu’elle exerçait les activités exposées dans les ententes commerciales et était leur mandataire [14] . Il ressort donc de la jurisprudence Kinguk Trawl qu’il possible de constater l’existence d’un mandat, selon les circonstances (y compris toute entente pertinente), dans une situation où deux parties ne qualifient pas concrètement leur relation de relation mandant‑mandataire et où nulle personne n’est expressément désignée à titre de mandataire de l’autre.

[29]  À l’occasion de l’affaire Fourney c La Reine [15] , le juge Hogan a formulé les observations suivantes : « le critère permettant de conclure à l’existence d’un mandat, en l’absence d’une entente écrite, est un critère restrictif qui exige la preuve de la conduite nécessaire [16]  ». Il a cité des passages tirés des commentaires formulés par le professeur Fridman sur le mandat implicite, lesquels commentaires figuraient dans une édition antérieure du traité susmentionné sur le droit du mandat, et il a énoncé quelques principes applicables au mandat implicite. On peut paraphraser de ces principes sont paraphrasés ainsi :

  • a) en l’absence d’une convention de mandat écrite, le juge doit examiner minutieusement la conduite des parties afin de determiner s’il existait une intention implicite de créer un mandat [17] ;

  • b) lorsqu’il s’agit d’examiner la conduite du mandant prétendu et du mandataire prétendu, un élément crucial consiste à établir le degré de contrôle que le premier exerçait sur le second [18] ;

  • c) le contrôle des actes du mandataire prétendu par le mandant prétendu peut se manifester dans l’autorisation que le second donne au premier. Autrement dit, les notions d’autorisation et de contrôle se recoupent parfois [19] ;

  • d) lorsqu’il est allégué qu’une société intervient comme mandataire de ses actionnaires, un niveau élevé de preuve est nécessaire [20] .

2) L’application aux faits : la conduite des parties

[30]  Après avoir examiné la conduite de GEM et des propriétaires, à la lumière des témoignages et des preuves documentaires, comme cela est expliqué dans les paragraphes qui suivent, je conclus que, en ce qui concerne l’aménagement et de la construction des trois maisons de retraite, GEM est intervenue à titre de mandataire des propriétaires. J’analyserai maintenant les facteurs qui m’ont amené à tirer cette conclusion.

a) Une interprétation incomplète des relations juridiques

[31]  Je ne puis conclure que M. Hussain avait une parfaite compréhension des relations juridiques qui liaient les diverses sociétés du groupe. Par exemple, lors de son interrogatoire principal, il a semblé incertain ou embrouillé quant à la distinction entre une filiale et une division, et quant à la question de savoir si Mahpal était une filiale ou une division de GEM. Il a finalement rendu un témoignage qui concordait avec la preuve documentaire (laquelle établissait que Mahpal était une division de GEM), mais il lui a fallu plusieurs faux départs et un peu de temps avant d’arriver à cette conclusion [21] . Cependant, plus tard, en contre‑interrogatoire, il a déclaré : [traduction] « Mahpal n’est qu’une filiale [22]  ».

[32]  Dans le même ordre d’idées, M. Hussain a initialement déclaré que ni Mahpal ni GEM n’avaient le pouvoir de lier les propriétaires [23] . Plus tard, vers la fin de son interrogatoire principal, il a déclaré que GEM avait le pouvoir de lier les propriétaires [24] .

[33]  Mon intention, en formulant les observations qui précèdent, n’est pas de critiquer M. Hussain. Au contraire, je souligne simplement que, même s’il était sans aucun doute hautement qualifié et qu’il gérait avec succès des maisons de retraite, sa compréhension des notions juridiques et des relations juridiques était parfois incomplète et peut‑être même inexacte. Cependant, le fait d’avoir une compréhension incomplète ou inexacte d’une relation juridique n’écarte pas l’existence de la relation.

b) L’absence d’une convention de mandat ou d’une entente de construction écrite

[34]  GEM n’a pas conclu de convention de mandat formelle avec l’une quelconque des propriétaires. Cependant, il convient aussi de noter que, selon les éléments de preuve produits, GEM n’a conclu aucune convention formelle avec l’une quelconque des propriétaires aux termes de laquelle (comme l’allègue la Couronne) elle a accepté de lui assurer des services de construction. Par conséquent, pour pouvoir déterminer la relation qui existait entre GEM et chacune des propriétaires, il est nécessaire d’examiner la conduite des parties.

c) La propriété des terrains

[35]  Comme il en a été fait mention au paragraphe 12 qui précède, le 2 juin 2009, les terrains sur lesquels chaque maison de retraite devait être construite ont été cédés à la filiale qui devait en être propriétaire et exploitant. Dans chaque cas, le cédant (ou l’auteur du transfert) du terrain était une personne ou des personnes autres que GEM. À part certains documents semblables à des factures (qui revêtent une importance cruciale pour la thèse de la Couronne au sujet de l’affaire, et que j’analyserai plus loin), il ne ressortait d’aucune preuve que GEM, à un moment quelconque, avait fourni un terrain à HOTV Ltd., à Whitehills Ltd. ou à Admiral Ltd.

[36]  Après le 2 juin 2009, étant donné que HOTV Ltd., Whitehills Ltd. et Admiral Ltd. possédaient chacune le terrain sur lequel leur maison de retraite était bâtie, chacune de ces trois propriétaires était visés par l’alinéa a) de la définition du terme « constructeur » que donne le paragraphe 123(1) de la LTA.

d) L’architecte, l’entrepreneur général et le consultant

[37]  SP Dumaresq Architect Ltd. (« Dumaresq ») a été désignée comme architecte chargé de la conception du centre HOTV, du centre Whitehills et du centre Admiral. De plus, Dumaresq passait en revue et approuvait le paiement pour chaque facturation progressive que présentaient les entrepreneurs généraux [25] .

[38]  Les services d’un entrepreneur général ont été retenus pour la construction de chacune des trois maisons de retraite. En particulier, les sociétés suivantes ont été retenues à titre d’entrepreneur général : Roscoe Construction Limited pour la construction du centre HOTV [26] , Pomerleau Inc. pour la construction du centre Whitehills [27] et Maxim 2000 Inc. pour la construction du centre Admiral [28] .

[39]  Le ministère de la Santé (« MS ») néo-écossais a exigé que l’on nomme un consultant pour chacun des projets de construction. C’est ainsi que la firme Costello Fitt Limited a été désignée comme consultante afin d’assurer des services de gestion de projet relativement au centre HOTV, au centre Whitehills et au centre Admiral [29] .

[40]  Compte tenu de l’ensemble des services relatifs aux travaux de construction assurés par l’architecte, les entrepreneurs généraux et le consultant, si GEM avait été engagée pour assurer des services de construction aux propriétaires, comme l’a allégué la Couronne, il est difficile de savoir avec précision de quels services il s’agissait. M. Hussain a expliqué que deux employés de GEM, George Oickle et Colin Bagnell, ont pris part à la construction des maisons de retraite. M. Oickle supervisait les projets de construction, et M. Bagnell était gestionnaire de projet. Nul élément de preuve ne tendait à établir si GEM, en sa qualité d’employeur de M. Oickle et de M. Bagnell, intervenait à titre de mandant pour son propre compte ou à titre de mandataire pour le compte des propriétaires. La Couronne a fait valoir que les services de construction qu’assurait GEM consistaient à regrouper les services et les matériaux dont on avait besoin et à gérer ensuite les projets de construction jusqu’à leur achèvement. Cependant, nul élément de preuve n’a confirmé que GEM exerçait ces activités à titre de mandant, plutôt qu’à celui de mandataire.

e) Les permis de construction et autres permis

[41]  Le 27 juin 2008, GEM a présenté à l’Annapolis District Planning Commission une demande de permis de construction pour le centre HOTV, qui devait être construit à Middleton (Nouvelle‑Écosse). La demande indiquait que GEM était la demandeuse du permis et Syed Hussain le propriétaire inscrit [30] . La demande de permis de construction contenait cette déclaration solennelle de la demanderesse : [traduction] « Je suis le propriétaire/mandataire autorisé du propriétaire nommé dans la présente demande […] ». Il était évident que GEM n’était pas la propriétaire du terrain, de sorte que l’extrait qui précède devait indiquer que GEM déclarait qu’elle était la mandataire autorisée du propriétaire (qui était alors M. Hussain, mais qui est devenu par la suite HOTV Ltd.). GEM reconnaissait donc dans la demande qu’elle intervenait à titre de mandataire lorsqu’elle avait présenté la demande de permis de construction. La demande comportait une annotation indiquant que le permis n’était demandé que pour les fondations et les travaux préparatoires à la construction et qu’une autre demande de permis de construction du bâtiment serait présentée en juillet.

[42]  Il semble que la demande de permis suivante n’ait été présentée à l’Annapolis District Planning Commission que le 8 décembre 2008, date à laquelle une demande de permis de construction et de permis d’aménagement a été présentée [31] . La demande contenait aussi la même déclaration que la première, à savoir que GEM déclarait solennellement être la mandataire autorisée de M. Hussain. Le 15 juin 2009, la Commission a donné l’autorisation de poursuivre les travaux au‑delà de l’étape des fondations. À ce moment‑là, HOTV Ltd. était devenue propriétaire du terrain sur lequel le centre HOTV devait être construit.

[43]  Le 19 octobre 2009, la Municipalité régionale d’Halifax a accordé un permis de construction, un permis d’aménagement et un permis relatif à la chaussée et aux services pour le centre Whitehills [32] . Il ressort de ces permis, qui figurent dans un document unique, que la demandeuse est Mahpal et que la propriétaire du bien est Whitehills Ltd. Rien dans les permis ne définit la relation entre la demandeuse et la propriétaire du bien ou y renvoie expressément. Étant donné que GEM est intervenue à titre de mandataire autorisée du propriétaire du terrain dans le contexte de la demande de permis de construction et de permis d’aménagement concernant le centre HOTV, il est concevable que Mahpal est aussi intervenue à titre de mandataire autorisée de Whitehills Ltd. lorsqu’elle a demandé le permis de construction, le permis d’aménagement et le permis relatif à la chaussée et aux services relativement au centre Whitehills. De plus, en demandant et en obtenant les permis susmentionnés, Mahpal a influé sur la situation juridique de Whitehills Ltd. (l’une des caractéristiques d’une relation mandant‑mandataire est la capacité du mandataire d’influer sur la situation juridique du mandant [33] ). Les permis contiennent les mentions suivantes :

[traduction]

Le numéro municipal doit être affiché avant la délivrance d’un permis d’occupation […] Ce ou ces permis ont été délivrés en fonction de plans que le demandeur a produits. La construction doit être strictement conforme aux plans approuvés […] Il incombe au constructeur d’éviter toute accumulation de boue dans la rue et les propriétés adjacentes [34] .

Les mentions qui précèdent énoncent les obligations imposées à Whitehills Ltd. par la Municipalité régionale d’Halifax, et traduisent la manière dont Mahpal, en demandant les permis, a influé sur la situation juridique de Whitehills Ltd. vis‑à‑vis de la Municipalité régionale d’Halifax.

[44]  Le 20 avril 2010, la Municipalité régionale d’Halifax a délivré un document d’une page intitulé [traduction] « Permis », qui contenait un permis de construction, un permis d’aménagement et un permis relatif à la chaussée et aux services concernant le centre Admiral [35] . Ce document indique qu’Admiral Ltd est aussi bien l’auteur de la demande et la propriétaire du bien.

f) L’acquisition de matériaux ou l’accès à ceux‑ci

[45]  Pendant que les divers entrepreneurs généraux et sous‑traitants (collectivement, les « entrepreneurs ») s’occupaient de la construction des maisons de retraite, ils ont fourni le travail et les matériaux, et ces derniers ont été intégrés aux diverses maisons de retraite ou posés sur elles. À la conclusion de l’audience, j’ai demandé aux avocats de présenter des observations afin d’expliquer comment la propriété des matériaux intégrés dans une maison de retraite particulière était transféré d’un entrepreneur donné à la propriétaire de cette maison (c.‑à‑d., HOTV Ltd., Whitehills Ltd. ou Admiral Ltd., selon le cas).

[46]  Les avocats de GEM ont soutenu que la propriété des matériaux était transmise par accession, au moment où les biens en question étaient affectés au contrat et livrés à une maison de retraite particulière ou installés dans cette dernière. En ce qui concerne l’affectation, les avocats de GEM m’ont cité le traité de Fridman intitulé Sale of Goods in Canada, notamment les observations suivantes :

[traduction

 […] à la condition que les biens répondant à la description contenue dans le contrat soient dans un état livrable, l’élément essentiel du transfert de la propriété de ces biens est l’« affectation au contrat » (sous réserve du consentement des deux parties à cette affectation) […].

[Fridman discute ensuite une jurisprudence concernant un contrat de construction et de vente d’un navire, qui précisait que la propriété devait être transférée dans des articles « affectés » au navire une fois que le premier versement du prix d’achat serait effectué.] Le mot « affecté » a été qualifié de « terme juridique consacré » ayant un certain sens précis. Pour qu’il y ait affectation, il fallait qu’il y ait un acte déterminé, comme l’adjonction des biens au navire lui‑même dans l’affaire en question, ou une entente déterminée entre les parties qui était assimilable à un consentement à ce que la propriété des matériaux soit transmise d’une partie, c’est-à-dire, dans le cas présent, les constructeurs, à l’autre, soit les acheteurs [36] .

[47]  Pour ce qui est du concept d’accession, les avocats de GEM m’ont cité deux décisions, la première étant Crown Tire Service Ltd. c La Reine [37] , où on lit les observations suivantes :

Dans Benjamin’s Sale of Goods (Londres, 1974), on dit relativement à la distinction entre un contrat de vente de marchandises et un contrat de fourniture d’ouvrage et de matériaux:

[traduction] Lorsqu’un bien, meuble ou immeuble, de l’employeur doit faire l’objet de travaux comportant l’utilisation ou l’adjonction de matériaux appartenant à la personne engagée à cet effet, il s’agira normalement d’un contrat de fourniture d’ouvrage et de matériaux, la propriété de ceux‑ci passant alors à l’employeur par accession et non pas en vertu d’un contrat de vente [38] .

L’autre décision qu’ont citée les avocats de GEM est Will‑Kare Paving, qui fait référence à la décision Crown Tire et où le passage qui précède est cité [39] .

[48]  L’avocat de la Couronne a soutenu que les matériaux utilisés dans les maisons de retraite étaient réputés, selon le paragraphe 191(3) de la LTA, avoir été transférés de GEM aux propriétaires respectives une fois que les travaux de construction des maisons de retraite étaient achevés en grande partie [40] . Plus précisément, il a été soutenu que le transfert de propriété avait eu lieu quand les maisons de retraite avaient été achevées en grande partie et que GEM avait envoyé des factures détaillées aux propriétaires respectives [41] . Il en ressort que la propriété des matériaux destinés à une maison de retraite particulière n’a été transmise qu’une fois que la construction de cette dernière a été achevée en grande partie. Cependant, ailleurs dans ses observations, l’avocat de la Couronne a soutenu que GEM avait assuré des services de construction aux propriétaires, que ces services de construction englobaient de multiples fournitures de biens et de services et que la fourniture des matériaux était accessoire à celle de ces services de construction [42] . Cette thèse semble vouloir dire que la propriété des matériaux aurait été transmise de GEM aux propriétaires par étapes, à mesure que les travaux de construction avançaient. Il semble donc y avoir une certaine incohérence dans la thèse de la Couronne. Par ailleurs, l’avocat de la Couronne n’a pas expliqué comment GEM a censément pu acquérir la propriété des matériaux avant de la transférer aux propriétaires.

[49]  L’avocat de la Couronne a soutenu que le transfert de propriété des matériaux découlait des dispositions déterminatives figurant au paragraphe 191(3) de la LTA. Cependant, il ressort de l’analyse du paragraphe 191(3) de la LTA que cette disposition ne joue qu’aux fins de la partie IX de la LTA, et donc non pas aux fins du droit général, y compris le droit des biens. En conséquence, la disposition déterminative figurant au paragraphe 191(3) de la LTA ne saurait constituer le fondement en vertu duquel la propriété des matériaux a été transmise des divers entrepreneurs à HOTV Ltd., à Whitehills Ltd. ou à Admiral Ltd., selon le cas. Le fondement du transfert de propriété doit plutôt découler des principes applicables du droit général, dont le droit des contrats, le droit des biens et le droit du mandat [43] .

[50]  Même s’il était possible de surmonter la limite que comportent les premiers mots du paragraphe 191(3) de la LTA, selon cette disposition, le constructeur particulier (et non une autre personne) est réputé avoir effectué et reçu une fourniture taxable par la vente de l’immeuble d’habitation à logements multiples en question. Autrement dit, le paragraphe 191(3) suppose que, au moment où la disposition déterminative joue, le constructeur est déjà propriétaire de l’immeuble. Le paragraphe 191(3) ne prévoit nul transfert réputé d’un bien d’une personne à une autre, mais considère plutôt que la même personne (c.‑à‑d. le constructeur) effectue et reçoit une fourniture taxable par vente. Le paragraphe 191(3) ne peut donc pas constituer le fondement selon lequel un constructeur acquiert la propriété des matériaux qui entrent dans la construction d’un immeuble d’habitation à logements multiples. Par conséquent, cette disposition ne peut pas être le moyen par lequel la propriété des matériaux a été transférée des divers entrepreneurs à HOTV Ltd., à Whitehills Ltd. ou à Admiral Ltd., selon le cas.

[51]  L’avocat de la Couronne a soutenu que GEM a assuré aux propriétaires des services de construction comprenant le regroupement des matériaux et des services nécessaires ainsi que la gestion du projet de construction particulier jusqu’à son achèvement et, en outre, que la fourniture des matériaux serait de peu d’utilité pour les propriétaires sans les services de construction correspondants que GEM fournissait. Selon lui, GEM a effectué une fourniture unique de services de construction aux propriétaires et, dans le cadre de cette fourniture, GEM leur a également transféré les matériaux, et ce, au moment prévu par le paragraphe 191(3) de la LTA [44] .

[52]  Quand un propriétaire foncier et un entrepreneur concluent un contrat de fourniture d’ouvrage et de matériaux du genre défini par Benjamin’s Sale of Goods, pour ce qui est de l’application de la LTA, la fourniture de l’ouvrage et des matériaux peut fort bien constituer une fourniture unique. Toutefois, cette analyse ne répond pas à la question de savoir comment, en l’espèce, la propriété des matériaux en question a été transmise d’un entrepreneur à une propriétaire. Il semble logique que cette transmission de propriété ait été effectuée dans le cadre d’un processus à une seule étape dans lequel GEM était la mandataire de la propriétaire. S’il avait fallu que la transmission de la propriété des matériaux se fasse au moyen d’un processus à deux étapes, GEM aurait eu besoin d’acquérir tout d’abord la propriété des matériaux de l’entrepreneur avant de la transférer à la propriétaire.

[53]  Je n’ai vu, ni dans les observations des avocats des deux parties ni dans les éléments de preuve que j’ai examinés, nul élément dont il ressort que les entrepreneurs ont d’abord transféré la propriété des matériaux respectifs à GEM et que GEM l’a par la suite transférée aux trois propriétaires. Il me semble plutôt que la transmission de la propriété des matériaux a été effectuée directement des entrepreneurs aux propriétaires respectives, conformément au principe de l’accession, lorsque ces matériaux ont été affectés et intégrés dans les maisons de retraite respectives. Il semble donc que GEM ait influé sur la situation juridique des propriétaires vis‑à‑vis des entrepreneurs.

[54]  Aux fins des présents appels, je ne pense pas qu’il faille me prononcer de manière définitive sur la question de savoir si la propriété des matériaux qui ont servi à la construction de chaque maison de retraite a été transmise des entrepreneurs concernés à la propriétaire de la maison selon un contrat de fourniture d’ouvrage et de matériaux ou un contrat de vente de marchandises. Je conclus que, d’une manière ou d’une autre, la propriété de ces matériaux a été transmise des entrepreneurs à HOTV Ltd., à Whitehills Ltd. ou à Admiral Ltd., selon le cas. Les avocats de GEM ont soutenu qu’étant donné que GEM était la mandataire de chacune des propriétaires, la propriété des matériaux qu’un entrepreneur particulier avait fournis pour la construction d’une maison de retraite particulière avait été transmise directement de l’entrepreneur à la propriétaire de cet établissement. Ils ont ajouté que si GEM était intervenue à titre de mandant, plutôt que comme mandataire, la propriété de ces matériaux aurait dû être transmise d’abord de l’entrepreneur à GEM, et ensuite de GEM à la propriétaire de l’établissement [45] . Rien dans la preuve documentaire que j’ai examinée ne m’a donné à penser qu’il y avait deux étapes contractuelles (c.‑à‑d., un contrat par lequel la propriété des matériaux a été transmise d’un entrepreneur à GEM et un contrat subséquent par lequel la propriété a été transmise de GEM à une propriétaire).

[55]  En résumé, je préfère la thèse des avocats de GEM selon laquelle elle a facilité le transfert de la propriété des matériaux directement des entrepreneurs aux propriétaires, plutôt que la thèse de l’avocat de la Couronne selon laquelle le transfert de la propriété des matériaux a eu lieu par application des dispositions déterminatives du paragraphe 191(3) de la LTA. Je suis donc d’avis que GEM a influé sur la situation juridique des propriétaires, vis‑à‑vis des entrepreneurs, en faisant en sorte que la propriété des matériaux soit transmise des entrepreneurs aux propriétaires. Comme cela a déjà été relevé [46] , c’est là une caractéristique essentielle d’une relation mandant‑mandataire.

g) Les questions relatives au privilège du constructeur

[56]  À mesure qu’avançaient les travaux de construction des trois maisons de retraite, et que divers entrepreneurs [47] fournissaient de l’ouvrage ou des matériaux, les entrepreneurs acquéraient de façon générale un privilège sur le terrain visé par l’ouvrage ou les matériaux fournis. Ce privilège grevait le droit que possédait la propriétaire sur ce bien‑fonds [48] . Ainsi, dans la mesure où GEM a pris les dispositions nécessaires pour la fourniture d’ouvrage ou de matériaux à la maison de retraite d’une propriétaire particulière, GEM a influé sur la situation juridique de cette propriétaire vis-à-vis de l’entrepreneur qui avait fourni l’ouvrage ou les matériaux en question. Comme cela été relevé plus tôt, il s’agit là de l’une des caractéristiques d’une relation mandant‑mandataire.

h) Les factures et les demandes de paiement proportionnel des entrepreneurs

[57]  De temps à autre, pendant la construction d’une maison de retraite particulière, les entrepreneurs ont établi des factures pour l’ouvrage et les matériaux qu’ils fournissaient. Selon les spécimens de facture qui ont été produits en preuve, il ne semble pas que les factures aient été adressées de manière strictement uniforme. Toutefois, il semble que la plupart des factures ont été adressées à GEM ou à Mahpal. Quelques‑unes d’entre‑elles ont été adressées à une propriétaire particulière. Dans son témoignage, M. Hussain a déclaré que, de temps à autre, certains entrepreneurs adressaient leurs factures à M. Oickle, l’ingénieur qui supervisait les divers projets de construction.

[58]  Les entrepreneurs envoyaient généralement les factures au 1046, rue Barrington, Halifax, soit l’adresse de GEM. Il s’agissait aussi de l’adresse du siège social de chacune des trois sociétés, à savoir HOTV Ltd., Whitehills Ltd. et Admiral Ltd. [49] . M. Hussain a expliqué que les factures ne pouvaient être envoyées qu’à cette adresse-là ou, sinon, au chantier de construction, ce qui n’était pas recommandé parce qu’il arrivait que les factures disparaissent si elles était envoyées vers ce lieu.

[59]  De temps à autre, GEM présentait des demandes de paiement proportionnel au MS, de pair avec un tableau dans lequel étaient énumérées les factures visées par la demande de paiement proportionnel en question, ainsi que la copie de ces factures. Des échantillons de demandes de paiement proportionnel ont été produits en preuve [50] . Ces échantillons ont été établis sur un formulaire uniformisé, prescrit par le MS. La rubrique de chaque demande de paiement proportionnel était la suivante : [traduction] « Objet : Demande de paiement proportionnel no [le numéro de la demande particulière était inscrit] pour GEM – [le nom et l’emplacement de la maison de retraite en particulier étaient indiqués] ». Le premier paragraphe de chaque demande de paiement proportionnel commençait par la phrase suivante : [traduction] « Vous trouverez ci-jointe une demande de paiement de la part de [le nom et l’emplacement de la maison de retraite particulière étaient inscrits] pour les travaux accomplis dans le cadre du projet de construction susmentionné jusqu’à [la date limite concernant la demande était inscrite] ». L’expéditeur de la demande de paiement proportionnel était le suivant : « GEM – [le nom de la maison de retraite particulière était inscrit] ». Chaque demande de paiement proportionnel portait la signature de Colin Bagnell, le gestionnaire de projet.

[60]  Les demandes de paiement proportionnel n’indiquaient ni de manière explicite ni en détail qui les envoyait au MS. D'autres documents produits en preuve (comme les feuillets T4) indiquent que les mots [traduction] « GEM – [nom abrégé] » servaient à désigner une personne morale particulière. Par exemple, sur les feuillets T4 que GEM a délivrés à M. Hussain, le nom de l’employeur était « GEM – GEM Healthcare » et sur les feuillets T4 que Melville Ridge a délivrés à M. Hussain, le nom de l’employeur était « GEM – Melville Ridge ». Si c’est la même terminologie que l’on avait envisagé d’utiliser dans les demandes de paiement proportionnel, le libellé de la rubrique figurant dans chaque demande et le nom de l’expéditeur de cette dernière donnaient à penser que les demandes étaient envoyées par HOTV Ltd., Whitehills Ltd. ou Admiral Ltd., selon le cas. En revanche, il se pouvait que l’expéditeur de chaque demande de paiement proportionnel soit GEM elle‑même, et non l’une des propriétaires, étant donné surtout que la personne qui signait chaque demande, Colin Bagnell, était un gestionnaire de projet au service de GEM [51] . Chaque demande de paiement proportionnel envoyée au MS relative au projet d’une propriétaire avait une incidence sur la responsabilité de cette propriétaire au titre de la convention d’hypothèque et de la convention de garantie qu’elle avait conclues avec HDC. À mesure que l’on présentait des demandes de paiement proportionnel, et que HDC avançait des fonds à une propriétaire selon les documents de prêt en question, l’endettement de la propriétaire augmentait. Ainsi, si c’était GEM qui présentait les demandes de paiement proportionnel au MS, je conclus qu’étant donné que cela influait sur la situation juridique de la propriétaire vis-à-vis de son endettement envers HDC, cela concordait avec le fait que GEM intervenait à titre de mandataire de la propriétaire.

i) Les mouvements de fonds

[61]  Dans son témoignage, M. Hussain a déclaré que si le MS était satisfait d’une demande de paiement proportionnel qui lui était présentée, il autorisait le Department of Housing [52] néo-écossais à émettre un chèque de paiement. Il a également indiqué que [traduction] « le chèque [était] libellé au nom de l’établissement [53]  », ce qui signifie, selon moi, que chaque chèque était payable à la propriétaire en question.

[62]  Après avoir reçu un chèque de HDC, la propriétaire le déposait dans son compte bancaire, à partir duquel des fonds étaient transférés à GEM, qui s’en servait ensuite pour régler les factures présentées par les entrepreneurs. M. Hussain a déclaré que GEM n’avait adressé aucune demande de paiement écrite à une propriétaire particulière; les fonds étaient plutôt transférés simplement par la propriétaire à GEM au moyen d’un [traduction] « transfert interne par chèque [54]  ».

[63]  M. Hussain a également affirmé dans son témoignage que, même si les propriétaires avaient leurs propres comptes bancaires, elles ne payaient pas directement les entrepreneurs généraux, car elles n’avaient pas le personnel de bureau qu’il fallait pour vérifier les paiements. Par conséquent, GEM a assumé la charge du traitement des paiements, car, comme M. Hussain l’a expliqué [traduction] « dans l’ensemble GEM est chargée de tout ce que font les autres établissements [55]  ». Étant donné que GEM, pour payer les entrepreneurs généraux, se servait de fonds provenant des propriétaires, je suis d’avis que GEM, ce faisant, intervenait à titre de mandataire des propriétaires.

Les documents semblables à une facture

[64]  Pendant que chacune des trois maisons de retraite était en construction, GEM a consigné l’acquisition de l’ouvrage et des matériaux dans ses registres. GEM a soutenu qu’elle le faisait pour le compte de chacune des trois propriétaires. L’ARC a soutenu que GEM intervenait pour son propre compte.

[65]  À mesure que chacun des trois projets de construction tirait à sa fin, GEM et chaque propriétaire ont décidé que le coût de l’ouvrage et des matériaux (ou, comme John Yuan l’a appelé, la [traduction] « valeur de l’actif ») qui se rapportaient à la maison de retraite en question devait être consigné dans les registres de la propriétaire concernée. À cette fin, Mahpal a établi un document, revêtant la forme d’une facture, qui contenait diverses inscriptions, dont trois définies ainsi : [traduction] « Adresse de facturation », [traduction] « Date de la facture » et [traduction] « No de la facture », respectivement, pour chacune des trois maisons de retraite. Selon l’ARC, ces documents étaient des factures au sens ordinaire du terme. GEM a exprimé l’avis selon lequel il ne s’agissait que de simples documents comptables destinés à déplacer la valeur de l’actif des registres de GEM vers les registres des propriétaires, et qu’ils n’étaient ni des demandes de paiement ni des factures dans le sens ordinaire du terme [56] .

[66]  John Yuan, le directeur financier de GEM, a déclaré dans son témoignage que la raison pour laquelle les valeurs de l’actif avaient été initialement consignées dans les registres de GEM était la suivante : lorsque la construction des maisons de retraite avait commencé, HOTV Ltd., Whitehills Ltd. et Admiral Ltd. n’avaient pas encore d’employés pouvant se charger de la comptabilité ou traiter les paiements destinés aux entrepreneurs. Il a expliqué qu’en raison du grand nombre d’entrepreneurs et du nombre considérable de rajustements qu’il fallait prévoir à mesure que les travaux de construction avançaient, à cause des commandes en souffrance, des demandes de modification, etc., la comptabilité était une tâche assez considérable et il était plus facile de [traduction] « tout mettre ensemble [57]  » (ce qui signifiait vraisemblablement centraliser la comptabilité chez GEM). De plus, M. Yuan a déclaré qu’il était ainsi plus facile de gérer les coûts et la comptabilité.

[67]  Il est curieux que chacun des documents semblables à une facture contienne une rubrique intitulée [traduction] « Conditions » et, sous celle-ci, les mots [traduction] « Net 30 jours », ce qui pourrait vouloir dire que l’on s’attendait à ce qu’un paiement soit effectué dans les 30 jours. Toutefois, on ne s’attendait réellement à aucun paiement, et aucun n’a été effectué. Comme l’ont expliqué M. Hussain et M. Yuan, chaque fois qu’il était nécessaire de régler une demande de paiement proportionnel présentée par l’un des entrepreneurs généraux, les avances sur prêt hypothécaire étaient payées par la propriétaire concernée à GEM. C’est donc dire que la majeure partie, sinon la totalité, des coûts de construction avaient été payés par les propriétaires à GEM et par GEM aux entrepreneurs généraux longtemps avant que Mahpal n’établisse et ne délivre les documents ressemblant à une facture.

[68]  Le document ressemblant à une facture que Mahpal a adressé à HOTV Ltd. était daté du 28 février 2011 [58] et donnait le détail des montants suivants :

[traduction]

[EN BLANC]

Coûts de construction

12 286 733,62 $

Mobilier et équipement

783 852,35

Lits non taxables

150 000,00

Asphaltage

230 471,53

Ordinateurs

 24 178,01

Total partiel

13 475 235,51 $

Le document contenait aussi l’inscription [traduction] « Total taxable », d’un montant de 13 325 235,51 $, qui représentait le total des coûts de construction et d’équipement, moins le coût des lits, qui n’étaient pas assujettis à la TPS/TVH. Sous l’inscription « Total taxable » figurait une inscription pour la TVH, au taux de15 %, et d’un montant de 1 998 785,33 $, ce qui donnait un total général de 15 474 020,84 $.

[69]  Le 30 juin 2011, Mahpal a établi un document semblable à une facture pour le centre Whitehills [59] . Il convient de signaler que ce document était adressé au centre Whitehills et non à Whitehills Ltd. Les montants énumérés dans ce document sont les suivants :

[traduction]

[EN BLANC]

Terrain

498 300,00 $

Bâtiment

12 903 015,49

Mobilier et équipement (lits non taxables : 174 000 $)

1 222 853,29

Asphaltage et aménagement paysager

393 456,08

Ordinateurs

31 409,44

Logiciels

 23 472,02

Total partiel

15 072 506,32 $

[70]  Dans ce document, une caractéristique curieuse est l’inclusion du coût du terrain, car le terrain servant au centre Whitehills a été acquis par Whitehills Ltd. de Melville Ridge, et non de Mahpal ou de GEM. Ce fait tend à confirmer la thèse selon laquelle chaque document ressemblant à une facture avait pour objet de consigner le coût de la maison de retraite en question dans les registres de la propriétaire concernée, et non de documenter une vente de la part de GEM à cette propriétaire. Autrement dit, les documents ressemblant à une facture n’étaient pas représentatifs des opérations réelles effectuées entre GEM et les propriétaires.

[71]  Le 2 août 2012, Mahpal a établi un document ressemblant à une facture pour le centre Admiral [60] . À l’instar du document relatif à Whitehills, ce document était adressé au centre Admiral et non à Admiral Ltd. Les montants recensés dans ce document étaient les suivants :

[traduction]

 

Bâtiment

16 715 517,15 $

Équipement et mobilier

455 797,56

Mobilier – Lits (sans -TVH)

195 000,00

Matériel informatique

38 532,45

Logiciels

28 687,07

Stocks (fournitures pour soins infirmiers)

14 970,91

Terrain

 1 193 029,20

Total partiel

18 641 534,34 $

[72]  À l’instar du document relatif à Whitehills, le document concernant Admiral contenait une inscription relative au terrain, et ce, même si Admiral Ltd. avait acquis son terrain de M. et de Mme Hussain, et non de GEM ou de Mahpal. Je considère donc que ce document (à l’instar des deux autres dont il a été question plus tôt) jouait un rôle comptable, plutôt que transactionnel.

[73]  Le document que Mahpal a établi à l’égard du centre Admiral indiquait la TVH à trois taux différents, en reconnaissance du fait que le gouvernement néo-écossais haussait le taux de TVH sur une base annuelle. Les montants de TVH inscrits sont les suivants :

TVH (13 %)

463 085,36 $

TVH (14 %)

12 459,90

TVH (15 %)

 2 219 301,00

Total

2 694 846,26 $

[74]  M. Yuan a expliqué que le montant total indiqué au bas de chacun des documents ressemblant à une facture représentait le montant total du financement fourni par HDC à la propriétaire particulière et payé aux divers entrepreneurs généraux, de pair avec les demandes de paiement proportionnel traitées de temps à autre [61] . Autrement dit, il n’y avait aucune marge bénéficiaire relativement aux montants figurant sur les documents ressemblant à une facture. Si GEM ou Mahpal avaient assuré des services de construction en son propre nom (c.‑à‑d., à titre de mandant) à chaque propriétaire, comme la Couronne l’allègue, on se serait attendu à ce que GEM ou Mahpal inclue dans ces documents une marge bénéficiaire ou un autre élément de profit.

[75]  Si les documents ressemblant à une facture sont véritablement des factures, comme la Couronne l’allègue, il semble en ressortir que GEM a vendu, à chacune des propriétaires, une maison de retraite construite dans son intégralité, ensemble avec (suivant le document en question) le terrain (dans le cas du centre Whitehills et du centre Admiral), l’asphaltage (dans le cas du centre HOTV et du centre Whitehills), l’aménagement paysager (dans le cas du centre Whitehills), le mobilier (lits inclus), l’équipement et les ordinateurs. Autrement dit, ces trois documents ressemblant à une facture ne donnent pas à penser que les services de construction ont été fournis par GEM aux propriétaires. S’il faut assimiler ces documents à de véritables factures, ils donnent à penser que les maisons de retraite construites et meublées ont été vendues par GEM aux propriétaires respectives; toutefois, ce n’est manifestement pas ce qui s’est passé.

[76]  À mon avis, l’établissement des documents semblables à une facture n’a peut‑être pas été le meilleur moyen de transférer la prétendue valeur de l’actif concernant les trois maisons de retraite des registres de GEM vers ceux des propriétaires, d’autant plus que ces documents semblent avoir induit en erreur l’ARC. Néanmoins, pour les motifs qui précèdent, j’ai conclu que les trois documents ressemblant à une facture ont été établis par GEM dans le but de consigner le coût de chaque maison de retraite dans les registres de la propriétaire concernée. Autrement dit, les documents semblables à une facture jouaient un rôle comptable, et non transactionnel [62] .

j) L’absence de demandes de CTI par GEM ou Mahpal

[77]  Pendant que GEM ou Mahpal traitait de temps à autre les demandes de paiement proportionnel et faisait des paiements aux entrepreneurs généraux pour le compte des trois propriétaires, ni GEM ni Mahpal n’ont demandé de CTI pour la TPS/TVH qu’elles avaient payée aux entrepreneurs généraux pour le compte des propriétaires [63] . Le fait de ne pas demander de CTI concorde avec la thèse de GEM selon laquelle elle intervenait à titre de mandataire des propriétaires.

k) Les déclarations de TPS/TVH

[78]  Comme il en a été question plus tôt, l’avocat de la Couronne a soutenu que le paragraphe 191(3) de la LTA jouait de telle sorte que la propriété des divers matériaux était réputée avoir été transférée aux propriétaires respectives au moment où la construction des maisons de retraite particulières avait été achevée en grande partie et où GEM avait envoyé des factures détaillées aux propriétaires. Je reconnais que le paragraphe 191(3) de la LTA était applicable, mais pas de la manière évoquée par l’avocat de la Couronne.

[79]  Les dispositions pertinentes du paragraphe 191(3) de la LTA, pendant les périodes de déclaration en cause, se lisent ainsi :

191(3)  Pour l’application de la présente partie, lorsque les conditions suivantes sont réunies :

  • a) la construction […] d’un immeuble d’habitation à logements multiples sont [est achevée] en grande partie,

  • b) le constructeur, selon le cas :

(i)  transfère à une personne, qui n’est pas l’acheteur en vertu du contrat de vente visant l’immeuble, la possession ou l’utilisation d’une habitation de celui‑ci aux termes d’un bail, d’une licence ou d’un accord semblable conclu en vue de l’occupation de l’habitation à titre résidentiel,

[…]

  • c) […] tout particulier […] est le premier à occuper une telle habitation à titre résidentiel après que les travaux sont achevés en grande partie,

le constructeur est réputé :

  • d) avoir effectué et reçu, par vente, la fourniture taxable de l’immeuble le jour où les travaux sont achevés en grande partie ou, s’il est postérieur, le jour où la possession ou l’utilisation de l’habitation est transférée à la personne ou l’habitation est occupée par lui;

  • e) avoir payé à titre d’acquéreur et perçu à titre de fournisseur, au dernier en date de ces jours, la taxe relative à la fourniture, calculée sur la juste valeur marchande de l’immeuble ce jour‑là.

[80]  L’avocat de la Couronne a soutenu que chaque propriétaire était un « constructeur » et que chaque maison de retraite était un « immeuble d’habitation » au sens de la définition de ces expressions figurant au paragraphe 123(1) de la LTA. J’abonde dans son sens.

[81]  C’est donc dire que, vu le paragraphe 191(3) de la LTA, lorsque la construction d’une maison de retraite était achevée en grande partie et que le premier occupant s’était installé dans l’une des habitations de celle‑ci, la disposition déterminative figurant à l’alinéa 191(3)d) de la LTA jouait, de sorte que la propriétaire de cette maison de retraite était réputée avoir effectué et reçu, par vente, la fourniture taxable de l’immeuble le jour où les travaux de construction ont été achevés en grande partie ou, s’il était postérieur, le jour où le premier occupant a pris possession de l’habitation. De plus, en raison de la disposition déterminative figurant à l’alinéa 191(3)e) de la LTA, la TPS/TVH était réputée avoir été payée et perçue, au dernier en date de ces jours, à l’égard de ce qui est appelé une fourniture à soi‑même de la maison de retraite. Conformément à la règle relative à la fourniture à soi‑même figurant au paragraphe 191(3) de la LTA, chaque propriétaire a produit une déclaration de TPS/TVH [64] .

[82]  En particulier, le 31 mars 2011, HOTV Ltd. a produit une déclaration de TPS/TVH pour la période commençant le 1er février 2011 et se terminant le 28 février 2011, relativement à la fourniture taxable réputée par vente du centre HOTV, en application de l’alinéa 191(3)d) de la LTA [65] . Dans cette déclaration, HOTV Ltd. a fait état de recettes de ventes de 12 557 205 $ (c.‑à‑d., le montant total approximatif du coût du bâtiment, soit 12 286 733,62 $, et le coût de l’asphaltage, soit 230 471,53 $) [66] . Dans la même déclaration de TPS/TVH, HOTV Ltd. a inclus un paiement de TPS/TVH de 1 877 580,77 $ (c.‑à‑d., 15 % de 12 517 205,15 $) [67] . De plus, HOTV Ltd. a déclaré avoir perçu un montant de TPS/TVH de 1 883 580,77 $, soit 6 000 $ de plus que le montant de TPS/TVH déclaré avoir été payé. La différence de 6 000 $ représente 15 % de 40 000 $, soit la valeur du terrain que M. Hussain avait fourni à HOTV Ltd. (voir le paragraphe 12 qui précède). Cependant, comme HOTV Ltd. n’a pas payé 40 000 $ à M. Hussain pour le terrain, elle n’a pas demandé de CTI à l’égard de ce montant [68] .

[83]  De même, le 31 août 2011, Whitehills Ltd. a produit, pour la période du 1er juillet 2011 au 31 juillet 2011, une déclaration de TPS/TVH dans laquelle elle a fait état de recettes de ventes d’un montant de 13 794 722 $ [69] . Bien que les témoignages n’aient pas fourni autant de précisions sur Whitehills Ltd. que sur HOTV Ltd., je crois comprendre que les recettes de ventes déclarées de 13 794 772 $ représentaient le montant total approximatif du coût du terrain, soit 498 300 $, du coût du bâtiment, soit 12 903 015,49 $ et du coût de l’asphaltage et de l’aménagement paysager, soit 393 456,08 $. Ces éléments figuraient dans le document ressemblant à une facture daté du 30 juin 2011 et faisaient l’objet de la fourniture taxable par vente qui était réputée avoir eu lieu en vertu de l’alinéa 191(3)d) de la LTA. Dans la déclaration de TPS/TVH, Whitehills Ltd. a précisé qu’elle avait à la fois payé et perçu une TPS/TVH de 2 069 215,74 $ (qui représentait 15 % de la somme de 13 794 771,57 $ et qui était vraisemblablement la TPS/TVH qui était réputée avoir été payée et perçue en application de l’alinéa 191(3)e) de la LTA).

[84]  De la même manière, le 28 septembre 2012 ou vers cette date, Admiral Ltd. a produit, pour la période allant du 1er août 2012 au 31 août 2012, une déclaration de TPS/TVH dans laquelle elle a fait état de ventes et d’autres recettes d’un montant de 17 923 839 $. Je crois comprendre que le total du coût du terrain (c.‑à‑d., 1 193 029,20 $) et du coût du bâtiment (c.‑à‑d., 16 715 517,15 $) s’élevait à 17 908 546,35 $, ce qui était légèrement inférieur au montant des recettes qui avaient été déclarées. La différence était de 15 292,65 $ (c.‑à‑d., 17 923 839 $ – 17 908 546,35 $), et était due semble‑t‑il au fait qu’Admiral Ltd. avait considéré qu’une petite partie du coût du mobilier et de l’équipement faisait partie des biens immobiliers visés par la règle de la fourniture à soi‑même [70] . Dans la déclaration de TPS/TVH, Admiral Ltd. a précisé qu’elle avait perçu un montant de TPS/TVH de 2 688 575,95 $, soit 15 % de 17 923 839 $. Admiral Ltd. a aussi déclaré avoir payé un montant de TPS/TVH de 2 617 439,60 $ [71] .

[85]  Bien qu’il semble y avoir eu quelques divergences ou erreurs concernant les trois déclarations de TPS/TVH qui ont été produites, je suis d’avis que HOTV Ltd., Whitehills Ltd. et Admiral Ltd. ont produit leurs déclarations respectives dans l’intention de se conformer à la règle de la fourniture à soi‑même qui figure au paragraphe 191(3) de la LTA. Si les trois propriétaires avaient acheté les maisons de retraite respectives auprès de GEM, les déclarations relatives à la fourniture à soi‑même n’auraient pas été nécessaires. Je conclus donc que la préparation et la production de ces déclarations par les propriétaires concordent avec la position qu’elles ont défendue, à savoir que GEM était leur mandataire et qu’elles avaient acquis l’ouvrage et les matériaux fournis pour ces maisons de retraite à titre de mandants, conformément aux contrats que GEM avait conclus, pour leur compte et en tant que mandataire, avec les divers entrepreneurs.

l) Les demandes de remboursement pour immeubles locatifs

[86]  HOTV Ltd., Whitehills Ltd. et Admiral Ltd. ont présenté chacune à l’ARC une demande de remboursement de la TPS/TVH pour immeubles d’habitation locatifs neufs (formulaire TPS524) (dans chaque cas, une « demande de RIHLN »). Les demandes de RIHLN que HOTV Ltd. et Admiral Ltd. ont présentées ont été produites en preuve [72] . À la section C des demandes de RIHLN respectives, HOTV Ltd. et Admiral Ltd. [73] se sont chacune présentées comme étant constructrice et locatrice, plutôt que comme acheteuse et locatrice. Cela semble concorder avec la thèse de GEM, à savoir qu’elle était mandataire des propriétaires, et non vendeuse des maisons de retraite.

[87]  La demande de RIHLN de Whitehills Ltd. n’a pas été produite en preuve, mais il m’a été remis la copie d’une lettre datée du 22 mai 2013, que l’ARC a adressée à Whitehills Ltd., par laquelle l’ARC reconnaissait qu’elle avait procédé à la vérification des déclarations de TPS/TVH ainsi que de la demande de RIHLN de Whitehills Ltd. Dans cette lettre, l’ARC a relevé diverses erreurs contenues dans la demande de RIHLN de Whitehills Ltd. et a également souligné que cette dernière avait demandé le remboursement à deux reprises. L’ARC reconnaissait qu’il y avait eu fourniture à soi‑même du centre Whitehills; cependant, elle était d’avis que la fourniture à soi‑même avait été effectuée le 29 juin 2011, plutôt que le 1er juillet 2011, comme l’aurait mentionné Whitehills Ltd. dans sa demande de RIHLN.

3) Sommaire

[88]  Compte tenu des facteurs qui précèdent, je conclus que, dans la mesure où GEM a supervisé ou géré l’aménagement et la construction des maisons de retraite, elle l’a fait à titre de mandataire pour le compte des trois propriétaires. Par conséquent, je conclus également que GEM, à titre de mandant, n’a pas assuré de services de construction aux propriétaires.

B. Honoraires de gestion facturés à Melville Ridge

[89]  En 2009, en 2010 et en 2011, M. Hussain était à la fois employé de GEM et de Melville Ridge [74] . Pendant les périodes de déclaration pertinentes, GEM a assuré divers services de gestion à Melville Ridge (conformément à l’arrangement général décrit plus tôt aux paragraphes 9 et 11). Cependant, comme les services que GEM assurait aux autres filiales comprenaient les services assuré par M. Hussain, et comme ce dernier était employé par Melville Ridge (de même qu’un employé de GEM), GEM n’a pas assuré les services de M. Hussain à Melville Ridge. En conséquence, GEM a soustrait des honoraires de gestion facturés à Melville Ridge un montant correspondant au salaire payé à M. Hussain par Melville Ridge. GEM a perçu la TPS/TVH à l’égard du montant réduit des honoraires de gestion seulement.

[90]  Selon l’ARC, l’arrangement conclu entre GEM et Melville Ridge constituait deux fournitures distinctes, l’une étant une fourniture de services (y compris les services fournis par M. Hussain en sa qualité d’employé de GEM) de GEM à Melville Ridge, et l’autre étant une fourniture de services (y compris les services fournis par M. Hussain en sa qualité d’employé de Melville Ridge) de Melville Ridge à GEM [75] . L’ARC était également d’avis que la contrepartie fournie par Melville Ridge à GEM pour les services rendus par cette dernière comportait à la fois un élément en espèces (soit 5 % des recettes brutes du mois en question, moins le salaire payé par Melville Ridge à M. Hussain ce mois‑là) et un élément autre qu’en espèces (soit la valeur des services fournis par Melville Ridge à GEM) [76] .

[91]  La démarche que l’ARC a suivie repose sur la prémisse selon laquelle les services de M. Hussain étaient fournis dans les deux sens (c.‑à‑d. que GEM fournissait les services de M. Hussain à Melville Ridge, et Melville Ridge fournissait les services de M. Hussain à GEM), et elle semble évoquer un caractère circulaire. De plus, cette démarche semble particulière, en ce sens que, comme M. Hussain était l’employé de GEM, Melville Ridge n’avait aucune raison de mettre les services de M. Hussain à la disposition de GEM de la manière avancée par l’ARC et, comme M. Hussain était l’employé de Melville Ridge, GEM n’avait aucune raison de mettre les services de M. Hussain à la disposition de Melville Ridge.

[92]  Il ne ressort de nul élément de preuve que Melville Ridge avait fourni des services quelconques (notamment les services de M. Hussain) à GEM. En particulier, M. Hussain a déclaré dans son témoignage que Melville Ridge n’avait fourni aucun service de gestion à GEM [77] . Je conclus donc que les services de gestion que GEM a fournis à Melville Ridge n’incluaient aucun service fourni par M. Hussain et que GEM a calculé et facturé comme il faut le montant de contrepartie approprié pour ces services de gestion. De même, je conclus que GEM a perçu et versé le montant approprié de TPS/TVH à l’égard de cette contrepartie.

C. Réduction des honoraires de gestion facturés à certaines filiales

[93]  Comme il en a été fait mention plus tôt [78] , GEM a fourni divers services à chacune de ses filiales, et elle facturait habituellement des honoraires de gestion correspondant à 5 % des recettes brutes de la filiale en question (sauf dans le cas de Melville Ridge, où le salaire que Melville Ridge payait à M. Hussain était déduit des honoraires). En 2009, quatre des maisons de retraite ont vu leurs recettes diminuer en raison d’un faible taux d’occupation [79] et leur niveau de rendement était faible à cause des coûts d’entretien élevés [80] . La direction de GEM a donc décidé de réduire les honoraires de gestion facturés en lien avec ces maisons de retraite. C’est ainsi qu’à compter du 31 décembre 2009, on a retranché les montants suivants des honoraires de gestion facturés relativement aux maisons de retraite citées ci‑dessous [81]  :

Melville Lodge

78 829,00 $

Melville Heights

29 631,00

Melville Gardens

81 541,00

North Hills

 146 000,00

Total

336 001,00 $

[94]  Conjointement à ces réductions d’honoraires, GEM a fait les inscriptions suivantes en date du 31 décembre 2009 [82]  :

Honoraires de gestion (réduction des honoraires de gestion) [83]

297 346,00 $

TPS perçue (réduction des
honoraires de gestion)

 38 655,00

Total

336 001,00 $

[95]  Pendant toute l’année 2009, GEM avait envoyé à titre provisoire des factures à Melville Ridge (qui possédait et exploitait les maisons de retraite Melville Lodge, Melville Heights et Melville Gardens) ainsi qu’à l’entité qui possédait la maison de retraite North Hills. Apparemment, GEM avait perçu et versé la TPS sur les frais de gestion tels qu’ils avaient été initialement calculés. Quand la réduction des honoraires de gestion a été mise en œuvre à compter du 31 décembre 2009, plutôt que recourir à la procédure prévue par l’article 232 de la LTA, GEM a demandé un CTI supplémentaire qui correspondait au montant de TPS/TVH calculé en fonction du montant de la réduction des honoraires de gestion.

[96]  Aux termes du paragraphe 232(2) de la LTA, la personne qui exige ou perçoit d’une autre personne la TPS/TVH calculée sur la contrepartie d’une fourniture, laquelle contrepartie est par la suite réduite, pour une raison quelconque, peut, si la taxe est exigée mais non perçue, la redresser ou, si la taxe est perçue, rembourser à l’autre personne la partie de taxe excédentaire ou la porter à son crédit. Si cela est fait, la personne remet à l’autre personne, selon l’alinéa 232(3)a) de la LTA, une note de crédit contenant les renseignements réglementaires, à moins que cette dernière ne lui remette une note de débit contenant les renseignements réglementaires. De plus, selon l’alinéa 232(3)b) de la LTA, un montant correspondant à la taxe excédentaire est déductible dans le calcul de la taxe nette de la personne pour sa période de déclaration au cours de laquelle elle remet la note de crédit ou reçoit la note de débit.

[97]  Comme cela a été précisé plus tôt, GEM ne s’est pas prévalue de la procédure prévue par l’article 232 de la LTA; elle a plutôt demandé un CTI, vraisemblablement en vue de recouvrer un montant de TPS/TVH calculé en fonction de la réduction des honoraires de gestion. Le fait de demander un CTI dans ce contexte n’était pas conforme au paragraphe 169(1) de la LTA, qui prévoit qu’une personne peut demander un CTI relativement à un bien ou à un service qu’elle acquiert, importe ou transfère dans une province participante. Le paragraphe 169(1) ne permet pas de demander un CTI dans le cas où la contrepartie d’une fourniture est réduite par la suite.

[98]  À mon avis, l’article 232 de la LTA définit la procédure que GEM aurait dû suivre pour redresser le montant de TPS/TVH correspondant aux honoraires de gestion qui ont été réduits en fin de compte en 2009 [84] . Nul élément de preuve ne permettait d’établir que GEM avait remis des notes de crédit ou que Melville Ridge et la propriétaire de la maison de retraite North Hills avaient remis des notes de débit. À mon avis, dans une situation comme celle‑ci, la remise d’une note de crédit par un fournisseur est cruciale, car cela permet au bénéficiaire de déterminer si le fournisseur réduira ou remboursera (selon le cas) la TPS/TVH, ou s’il sera nécessaire que le bénéficiaire demande le remboursement de taxe au titre de l’article 261 de la LTA. La remise d’une note de crédit, dans les cas où l’alinéa 232(3)a) de la LTA l’exige, n’est pas une simple formalité procédurale dont on peut faire abstraction. Les avocats de GEM ont soutenu que les écritures de régularisation en fin d’année qui figuraient dans les comptes de GEM constituaient l’équivalent d’une note de crédit; cependant, comme ces écritures de régularisation ne contenaient pas les renseignements réglementaires prescrits par le Règlement sur les renseignements à inclure dans les notes de crédit et les notes de débit (TPS/TVH), elles n’étaient pas suffisantes pour répondre à l’exigence imposée par l’alinéa 232(3)a) de la LTA [85] . Par conséquent, je suis d’avis que GEM n’avait pas le droit de demander un CTI relativement à un montant de TPS/TVH calculé en fonction du montant de la réduction des honoraires de gestion.

V. Conclusion

[99]  Les appels sont accueillis et les nouvelles cotisations sont renvoyées au ministre pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations conformément aux présents motifs et, en particulier, compte tenu du fait que, durant la période allant du 1er janvier 2009 au 30 septembre 2011 :

  • a) GEM est intervenue à titre de mandataire pour le compte des propriétaires relativement à l’aménagement et à la construction des trois maisons de retraite, de sorte que GEM n’a fourni des services de construction à nulle des propriétaires et que, par conséquent, elle n’était pas tenue de percevoir ou de verser la TPS/TVH à l’égard des services de construction allégués;

  • b) les services de gestion que GEM a fournis à Melville Ridge n’incluaient aucun service fourni par M. Hussain et, par conséquent, GEM a calculé et facturé correctement le montant de contrepartie approprié concernant ces services et a perçu et versé le montant exact de TPS/TVH à l’égard de ces services.

[100]  À tous autres égards, les nouvelles cotisations sont confirmées. En particulier :

  • a) GEM n’avait pas droit à des CTI à l’égard de la réduction, à compter du 31 décembre 2009, du montant des honoraires de gestion facturés à Melville Ridge et à la propriétaire de la maison de retraite North Hills;

  • b) le ministre a établi à juste titre de nouvelles cotisations de TPS/TVH à l’égard de GEM relativement aux frais de stationnement que cette dernière a facturés aux visiteurs du Garden Inn.

[101]  Étant donné que GEM a essentiellement obtenu gain de cause en l’espèce, les dépens, auxquels s’ajoutent les honoraires pour la présence d’un second avocat à l’audience, sont adjugés à GEM conformément au tarif B de l’annexe II des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale).

Signé à Ottawa, Canada, ce 25e jour de janvier 2017.

« Don R. Sommerfeldt »

Juge Sommerfeldt

Traduction certifiée conforme

ce 7e jour de novembre 2018.

François Brunet, réviseur


RÉFÉRENCE :

2017 CCI 13

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2014-79(GST)G

INTITULÉ :

GEM HEALTH CARE GROUP LIMITED ET SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Halifax (Nouvelle‑Écosse)

DATE DE L’AUDIENCE :

Les 26 et 27 janvier 2016

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Don R. Sommerfeldt

DATE DU JUGEMENT MODIFIÉ :

Le 6 février 2017

COMPARUTIONS :

Avocats de l’appelante :

Me Bruce Russell, c.r., Me Brian Awad

Avocat de l’intimée :

Me Martin Hickey

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

Nom :

Bruce Russell, c.r.

 

Cabinet :

McInnes Cooper

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 



[1]   Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. 1985, c. E‑15, partie IX, édictée par L.C. 1990, c. 45, et avec ses modifications subséquentes (la « LTA »).

[2]   Cette série de nouvelles cotisations est reproduite sous l’onglet 20, à la pièce R‑2.

[3]   Cette série de nouvelles cotisations est reproduite sous l’onglet 14, à la pièce R‑1.

[4]   Dans les présents motifs, j’utiliserai, selon le contexte et la chronologie, le terme « GEM » pour désigner chacune des trois sociétés fusionnées, qui ont été constituées le 1er janvier 2000, le 1er janvier 2014 et le 1er janvier 2015, respectivement; ces sociétés ont toutes été nommées « GEM Health Care Group Limited ».

[5]   L’une des questions importantes en l’espèce est de savoir si les sociétés qui ont effectué des travaux au nom de Mahpal Developments, et au nom de GEM, sont intervenus à titre de mandant ou de mandataire.

[6]   Melville Ridge était une société remplacée (au sens du paragraphe 87(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu) relativement à la fusion qui a eu lieu le 1er janvier 2014, comme cela est mentionné au paragraphe 5 qui précède.

[7]   Voir la pièce A‑1, aux onglets 15 à 17.

[8]   P.W. Hogg, J.E. Magee et T. Cook, Principles of Canadian Income Tax Law, 3e éd. (Toronto : Carswell, 1999), à la page 2; extrait cité dans l’arrêt Will‑Kare Paving & Contracting Ltd. c Canada, 2000 CSC 36, au paragraphe 31.

[9]   Canada c Merchant Law Group, 2010 CAF 206.

[10]   Ibidem, aux paragraphes 17, 22 et 28.

[11]   Agence du revenu du Canada, Du mandat, Énoncé de politique sur la TPS/TVH P-182R, aux pages 2 et 4. Dans l’arrêt Merchant Law Group, précité à la note 9, la Cour d’appel fédérale a fait observer, au paragraphe 15, que même si l’Énoncé de politique P‑182R n’a pas de force obligatoire, il « constitue un instrument utile pour se prononcer sur l’existence d’une relation de mandataire ». Voir aussi The Queen v Glengarry Bingo Association, [1999] GSTC 15 (CAF), au paragraphe 31. Dans l’Énoncé de politique P‑182R, l’ARC déclare que les qualités essentielles d’une relation de mandat sont les suivantes :

(i)  consentement du mandant et du mandataire;

(ii)  pouvoir du mandataire d’influer sur la situation juridique du mandant;

(iii)  contrôle par le mandant des actes du mandataire.

Les principes qui précèdent sont vraisemblablement tirés de la décision Royal Securities Corp. Ltd. v Montreal Trust Co. et al., [1967] 1 OR 137, 59 DLR (2d) 666 (HC Ont.), et ont aussi été énoncés dans l’arrêt Kinguk Trawl Inc. c Canada, 2003 CAF 85, au paragraphe 36.

[12]   G.H.L. Fridman, Canadian Agency Law, 2e éd. (Markham : LexisNexis Canada Inc., 2012), aux pages 40 et 41.

[13]   Kinguk Trawl, précité, à la note 11, au paragraphe 35, citant Bowstead & Reynolds dans Agency, 17éd. (London : Sweet & Maxwell, 2001).

[14]   Ibidem, aux paraphes 25, 33, 34 et 38.

[15]   Fourney c La Reine, 2011 CCI 520.

[16]   Ibidem, au paragraphe 39.

[17]   Ibidem, aux paragraphes 43 et 44. Au paragraphe 43, le juge Hogan a cité un extrait de la décision Avotus Corp. c La Reine, 2006 CCI 505, rendue par le juge Paris : « [c]e n’est qu’en l’absence d’une convention écrite qu’il faut examiner la conduite des parties afin de déterminer s’il est possible de conclure à l’existence d’une convention implicite de mandataire ».

[18]   Ibidem, au paragraphe 45.

[19]   Ibidem, au paragraphe 36. Voir aussi l’arrêt Kinguk Trawl, précité, à la note 11, au paragraphe 36.

[20]   Ibidem, au paragraphe 47. En l’espèce, l’appelante a fait valoir qu’elle intervenait à titre de mandataire des propriétaires, et non de ses actionnaires.

[21]   Témoignage de Syed Hussain, Transcription, le mardi 26 janvier 2016, de la page 44, ligne 15, à la page 46, ligne 6.

[22]   Ibidem, à la page 72, lignes 14 à 15.

[23]   Ibidem, à la page 55, lignes 12 à 23.

[24]   Ibidem, à la page 66, lignes 7 à 9.

[25]   Ibidem, à la page 76, lignes 2 à 12. Voir aussi la pièce R‑1, onglets 4 à 6.

[26]   Ibidem, à la page 76, lignes 16 à 18. Voir aussi la pièce R‑1, onglet 4.

[27]   Ibidem, à la page 77, lignes 15 à 19. Voir aussi la pièce R‑1, onglet 5.

[28]   Ibidem, à la page 78, lignes 2 à 9. Voir aussi la pièce R‑1, onglet 6.

[29]   Ibidem, de la page 76, ligne 19 à la page 77, ligne 1. Voir aussi la pièce R‑1, onglets 4 à 6.

[30]   La demande est reproduite sous l’onglet 18 de la pièce A‑1. M. Hussain n’a cédé le terrain en question à HOTV Ltd. que le 2 juin 2009.

[31]   Cette demande est reproduite sous l’onglet 19 de la pièce A‑1.

[32]   Ce document d’une page est reproduit sous l’onglet 20 de la pièce A‑1.

[33]   Voir le paragraphe 24, précité.

[34]   Pièce A‑1, onglet 20.

[35]   Ce document d’une page est reproduit sous l’onglet 21 de la pièce A‑1.

[36]   G.H.L. Fridman, Sale of Goods in Canada, 6e éd. (Toronto : Carswell, a Division of Thomson Reuters Canada Limited, 2013), à la page 81.

[37]   Crown Tire Service Ltd. c La Reine, [1984] 2 CF 219 (CF 1re inst.).

[38]   Ibidem, à la page 223.

[39]   Will‑Kare Paving, précité à la note 8, au paragraphe 21.

[40]   Observations supplémentaires de l’intimé datées du 30 mars 2016 et déposées le même jour, aux paragrapehs 3 et 5.

[41]   Observations supplémentaires de l’intimé, aux paragraphes 5, 18 et 19. L’avocat de la Couronne faisait référence aux documents ressemblant à une facture qui sont reproduits aux onglets 40, 41 et 42 de la pièce A‑1.

[42]   Observations supplémentaires de l’intimé, au paragraphe 11.

[43]   Au pararagraphe 17 des observations supplémentaires de l’intimé, l’avocat de la Couronne a soutenu ce qui suit : [traduction] « Pour ce qui est du moment du transfert des biens meubles de l’appelante aux filiales respectives, la Loi [c.‑à‑d. la LTA] a préséance sur les dispositions qui peuvent se trouver dans le Sales of Goods Act ». Cependant, si l’avocat de la Couronne soutenait par là qu’il y a conflit ou incompatibilité entre la LTA fédérale et le Sales of Goods Act provinciale, il n’en a pas expliqué la nature. En particulier, il n’a pas signalé de conflit d’application entre les deux lois (parce qu’il est impossible de se conformer aux deux), pas plus qu’il n’a soutenu que, bien qu’il soit possible de se conformer aux deux lois, l’application de la loi provinciale ferait obstacle à la réalisation du but de la loi fédérale. Voir Alberta (Procureur général) c Moloney, 2015 CSC 51, aux paragraphes 16 et 18, et Banque canadienne de l’Ouest c Alberta, 2007 CSC 22, au paragraphe 75. L’avocat de la Couronne n’a pas énoncé les fondements de la doctrine de la prépondérance fédérale, pas plus qu’il ne m’a invité à l’appliquer. Je suis personnellement d’avis qu’il n’y a pas conflit entre le paragraphe 191(3) de la LTA et le Sales of Goods Act de la Nouvelle‑Écosse, car le préambule du paragraphe 191(3) de la LTA indique que cette disposition s’applique à la partie IX de la Loi. Comme rien dans la LTA ne donne à penser que le pararagraphe 191(3) s’applique à d’autres fins, je ne crois pas qu’il soit en conflit avec la loi provinciale.

[44]   Observations supplémentaires de l’intimé, aux paragraphes 6, 13 et 14. Lors de son contre‑interrogatoire, Barbara Power, la vérificatrice de l’ARC dont le travail a mené à l’établissement des nouvelles cotisations, a décrit ainsi les services que GEM avait censément fournis aux propriétaires : [traduction] « Il y a eu fourniture d’un service, une fourniture d’un service de gestion et de construction d’un immeuble d’habitation ». Voir le témoignage de Barbara Power, Transcription, mercredi 27 janvier 2016, à la page 35, lignes 1 à 3. À part cette déclaration de Mme Power, aucun élément de preuve n’a donné à penser que c’était GEM qui avait construit les maisons de retraite.

[45]   Observations supplémentaires de l’appelante, datées du 29 février 2016 et déposées le même jour, au paragraphe 15. Lors de son contre‑interrogatoire, quand il lui a été demandé si l’ARC était d’avis qu’il y avait eu une nouvelle fourniture de produits et de services par GEM en faveur des propriétaires, Mme Power n’a pas reconnu qu’il y avait eu nouvelle fourniture; elle a plutôt déclaré ceci : [traduction] « Il y a eu fourniture de service. Les produits et les services que Mahpal ou GEM a engagés dans le contexte de la fourniture de ce service constituaient des intrants pour la fourniture du service qu’elles offraient. Elles ont fourni des services de construction ». Voir la Transcription, mercredi 27 janvier 2016, de la page 34, ligne 20, à la page 35, ligne 9. Mme Power n’a pas expliqué comment, à son avis, Mahpal ou GEM avait engagé des produits et des services (ou ce qu’elle voulait dire en s’exprimant ainsi), pas plus qu’elle n’a expliqué ce qu’elle voulait dire par le mot « intrant ». Il semble qu’elle laissait peut-être entendre que GEM avait fait l’acquisition de produits et de services qui l’autorisaient à demander des CTI. Si c’est le cas, il semble que l’ARC était d’avis qu’il y avait un mécanisme en deux étapes par lequel GEM faisait tout d’abord l’acquisition de produits (c.‑à‑d., des biens) qu’elle transférait ensuite aux propriétaires (Mme Power n’a toutefois pas reconnu qu’il y avait eu une nouvelle fourniture de produits et de services).

[46]   Voir le paragraphe 24, précité.

[47]   Comme je l’ai précisé plus tôt, j’ai défini le mot « entrepreneurs » de façon à ce qu’il englobe les entrepreneurs généraux et les sous‑traitants.

[48]   Builders’ Lien Act, RSNS, 1989, c. 277, aux par. 6(1) et 8(1).

[49]   Voir les adresses indiquées à la première page des ententes d’aménagement et des ententes de service respectives qui sont reproduites à la pièce A‑1, onglets 9 à 14.

[50]   Voir la pièce A‑1, onglet 31, et la pièce R‑1, onglets 4 à 6.

[51]   Témoignage de Syed Hussain, Transcription, mardi 26 janvier 2016, à la page 41, lignes 18 et 19.

[52]   Ibidem, à la page 52, lignes 15 à 17. Je suppose que M. Hussain voulait dire la Housing Development Corporation (définie plus tôt comme étant « HDC ») de la Nouvelle‑Écosse, car HDC était l’entité qui s’était engagée à prêter des fonds à chacune des trois propriétaires.

[53]   Ibidem, à la page 52, lignes 19 à 20.

[54]   Ibidem, à la page 53, lignes 10 à 11. Mme Power a reconnu que les fonds circulaient de la manière générale exposée plus tôt; voir la Transcription, mercredi 27 janvier 2016, à la page 41, lignes 12 à 21.

[55]   Témoignage de Syed Hussain, Transcription, mardi 26 janvier 2016, à la page 53, lignes 22 et 23.

[56]   Témoignage de John Yuan, Transcription, mardi 26 janvier 2016, de la page 97, ligne 24, à la page 100, ligne 11, et de la page 104, ligne 23, à la page 106, ligne 2.

[57]   Ibidem, à la page 99, lignes 6 à 28.

[58]   Ce document est reproduit à l’onglet 40 de la pièce A‑1.

[59]   Ce document est reproduit sous l’onglet 41 de la pièce A‑1.

[60]   Ce document est reproduit sous l’onglet 42 de la pièce A‑1.

[61]   Témoignage de John Yuan, Transcription, mardi 26 janvier 2016, à la page 105, lignes 15 à 18.

[62]   Dans la décision Otte & Associates Contractors Inc. c La Reine, 2016 CCI 162, au paragraphe 43, j’ai formulé les observations suivantes : « [u]ne facture est toutefois un document comptable et non un document transactionnel, qui reflète une opération, mais ne la crée pas. » Voir aussi le paragraphe 39 de cette décision.

[63]   Témoignage de Barbara Power, Transcription, mercredi 27 janvier 2016, à la page 18, lignes 26 et 27.

[64]   Ces déclarations sont reproduites aux onglets 37, 38 et 39 de la pièce A‑1.

[65]   Bien qu’il n’y ait eu aucun élément de preuve précis à cet égard, il semble que HOTV Ltd. s’efforçait de se conformer à l’obligation de déclarer la fourniture à soi‑même du centre HOTV, en application du paragraphe 191(3) de la LTA.

[66]   Le montant total exact du coût du bâtiment, soit 12 286 733,62 $, et du coût de l’asphaltage, soit 230 471,53 $, est de 12 517 205,15 $. La différence entre 12 557 205 $ (le montant des ventes et des autres recettes figurant dans la déclaration de TPS/TVH) et 12 517 205,15 $ est de 39 999,85 $, un chiffre qui, une fois arrondi au dollar près, s’élève à 40 000 $, ce qui représenterait la valeur du terrain que M. Hussain a fourni à HOTV Ltd. Voir les observations supplémentaires de l’appelante, au paragraphe 29.

[67]   Témoignage de John Yuan, Transcription, mardi 26 janvier 2016, à la page 115, lignes 7 à 25.

[68]   Je ne suis pas certain que HOTV Ltd. a traité comme il faut le montant réputé de TPS/TVH concernant le terrain. L’alinéa 191(3)e) de la LTA dispose qu’un constructeur est réputé avoir payé la TPS/TVH sur la juste valeur marchande de l’immeuble en cause. Autrement dit, c’est le montant réputé de TPS/TVH, et non le montant réel de TPS/TVH, qui doit être déclaré à l’égard de la fourniture à soi‑même qui est réputée avoir eu lieu en vertu du paragraphe 191(3) de la LTA.

[69]   Témoignage de John Yuan, Transcription, mardi 26 janvier 2016, de la page 115, ligne 26, à la page 116, ligne 11.

[70]   Observations supplémentaires de l’appelante, au paragraphe 24.

[71]   La raison qui a été donnée pour expliquer pourquoi le montant de TPS/TVH payé était inférieur au montant de TPS/TVH perçu est que, pendant que l’on construisait le centre Admiral en 2010, la TPS/TVH était payée au taux de 13 % et que, en 2011, le taux applicable était de 14 %. Le montant inscrit dans la déclaration de TPS/TVH était donc le montant de TPS/TVH réellement payé, plutôt que le montant réputé avoir été payé selon l’alinéa 191(3)e) de la LTA. Ce n’était peut‑être pas la bonne manière de traiter la TPS/TVH; voir la note de bas de page 68.

[72]   Voir les onglets 10 et 12 de la pièce A‑2.

[73]   Dans la case prévue pour le nom légal du demandeur à la section A de chaque demande de RIHLN, les demandeurs qui y figurent sont le centre HOTV et le centre Admiral, respectivement. Cependant, comme les numéros d’entreprise de HOTV Ltd. et d’Admiral Ltd. étaient également inscrits à la section A de chacune des demandes de RIHLN, il semble que l’on voulait que les demandeurs soient les personnes morales (et non les maisons de retraite).

[74]   Voir les états de la rémunération payée (formulaires T4) que Melville Ridge et GEM ont délivrés à M. Hussain pour les années allant de 2006 à 2013; ces états sont reproduits aux onglets 6 et 7, respectivement, de la pièce A‑2.

[75]   Lettre datée du 9 février 2012 que l’ARC a adressée à GEM Management Group Ltd. [sic], aux pages 2 à 4; cette lettre est reproduite à l’onglet 18 de la pièce R‑2.

[76]   Témoignage de Barbara Power, Transcription, mercredi 27 janvier 2016, à la page 27, lignes 4 à 8.

[77]   Témoignage de Syed Hussain, Transcription, mardi 26 janvier 2016, à la page 65, lignes 2 à 4.

[78]   Voir les paragraphes 9 et 11 ci‑dessus.

[79]   Témoignage de Syed Hussain, Transcription, mardi 26 janvier 2016, de la page 83, ligne 16, à la page 85, ligne 11.

[80]   Témoignage de John Yuan, Transcription, mardi 26 janvier 2016, à la page 102, lignes 7 à 10.

[81]   Voir la pièce A‑2, onglets 2 à 5.

[82]   Voir la pièce A‑2, onglet 1.

[83]   Les mots entre parenthèses sont des inscriptions paraphrasées tirées des listes d’opération du GLG et des listes de lots du GLG.

[84]   Bien qu’elles ne portent pas directement sur cette question, il ressort des décisions Bondfield Construction Company (1983) Limited c La Reine, 2005 CCI 78, Said Joaillier Ltée c La Reine, 2006 CCI 3, et Vivaconcept International Inc. c La Reine, 2013 CCI 336, que la bonne façon de procéder dans le cas où la contrepartie d’une fourniture est réduite par la suite est de remettre une note de crédit ou une note de débit au titre de l’alinéa 232(3)a), plutôt que de demander un CTI en vertu du paragraphe 169(1).

[85]   Voir la décision Bondfield Construction, précitée à la note 84, aux paragraphes 35 et 125.

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