Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

2001-2615(IT)I

ENTRE :

GEORGIA PANAGAKOS,

appelante,

et

 

Sa Majesté La Reine,

 

intimée.

 

Appels entendus sur preuve commune avec les appels de Jimmy Panagakos (2001‑2620(IT)I) le 11 septembre 2002, à Montréal (Québec), par

 

l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

 

Comparutions

 

Représentant de l'appelante :                         Tony Soares

 

Avocat de l'intimée :                                     Me Simon-Nicolas Crépin

 

 

JUGEMENT

 

          Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu à l’égard des années d’imposition 1997 et 1998 sont admis et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation conformément aux motifs du jugement ci-joints.

 

 


Signé à Ottawa, Canada, ce 1er jour de novembre 2002.

 

 

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.


 

 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

 

2001-2620(IT)I

ENTRE :

JIMMY PANAGAKOS,

appelant,

et

 

Sa Majesté La Reine,

 

intimée.

 

Appels entendus sur preuve commune avec l'appel de Georgia Panagakos (2001‑2615(IT)I) le 11 septembre 2002, à Montréal (Québec), par

 

l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

 

Comparutions

 

Représentant de l'appelante :                         Tony Soares

 

Avocat de l'intimée :                                     Me Simon-Nicolas Crépin

 

 

JUGEMENT

 

          Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu à l’égard des années d’imposition 1997 et 1998 sont admis et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation conformément aux motifs du jugement ci-joints.

 

 


Signé à Ottawa, Canada, ce 1er jour de novembre 2002.

 

 

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.


 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

Date: 20021101

Dossier: 2001-2615(IT)I

ENTRE :

GEORGIA PANAGAKOS,

appelante,

et

 

Sa Majesté La Reine,

 

intimée,

et

 

Dossier: 2001-2620(IT)I

ENTRE :

JIMMY PANAGAKOS,

appelant,

et

 

Sa Majesté La Reine,

 

intimée.

 

 

Motifs Du Jugement

 

 

La juge Lamarre Proulx, C.C.I.

 

[1]     Ces appels ont été entendus sur preuve commune sous le régime de la procédure informelle. La cotisation des appelants avait été établie en fonction d’un état de la valeur nette préparé par un vérificateur du ministre du Revenu national (le « ministre »).

 

 

[2]     Les hypothèses de fait considérées par le ministre au moment d’établir la nouvelle cotisation à l’endroit de l’appelant Jimmy Panagakos sont énumérées au paragraphe 14 de la réponse à l’avis d’appel (la « réponse ») comme suit :

 

[TRADUCTION]

 

a)         l’appelant et sa conjointe, Mme Georgia Panagakos (ci-après la « conjointe ») étaient propriétaires d’une entreprise dénommée « Fifth Avenue Restaurant Reg'd » (ci-après l'« entreprise »);

 

b)         l’appelant et sa conjointe partageaient les bénéfices tirés de l’entreprise;

 

c)         étant donné qu’une estimation de la provenance et de l’utilisation des fonds indiquait que les dépenses étaient supérieures au revenu, le vérificateur du ministre a demandé à l’appelant et à sa conjointe de préparer un bilan personnel;

 

d)         le bilan du restaurant ne correspondait pas au passif, pour lequel l’appelant et sa conjointe ne pouvaient présenter de justificatifs pour les montants;

 

e)         étant donné que le bilan du restaurant n’était pas correct, le vérificateur a établi une évaluation de la valeur nette (voir les pièces ci-jointes);

 

f)          sur la base de l’évaluation de la valeur nette, le vérificateur du ministre a calculé un montant additionnel s’établissant comme suit :

 

                          1997                                        1998

 

                        12 705 $                                  15 540 $

 

[3]     Le paragraphe 14 de la réponse pour l'appelante Georgia Panagakos est identique, sauf pour les différences du fait qu’elle est la conjointe de M. Jimmy Panagakos.

 

 

[4]     Au début de l’audience, la Cour a noté avec étonnement l’absence du vérificateur qui avait préparé l’état de la valeur nette. L’avocat de l'intimée a expliqué qu’il estimait que sa présence serait superflue, puisque le fardeau de la preuve reposait sur les appelants. J’ai été plutôt étonnée de cette absence, car le vérificateur se présente généralement au procès pour expliquer à la Cour et à la partie adverse les différents éléments de l’état de la valeur nette qu’il a préparé. À un certain moment pendant l’audience, après que l’avocat de l'intimée s'est opposé à la production d’un document parce que le signataire n’était pas disponible pour un contre-interrogatoire, le représentant des appelants a demandé que l’on ne tienne pas compte de l’état de la valeur nette, puisque le vérificateur n’était pas disponible pour un contre-interrogatoire.

 

 

[5]     Conformément au paragraphe 152(8) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), qui prévoit qu’une cotisation est réputée être valide et exécutoire sous réserve des modifications qui peuvent y être apportées ou de son annulation lors d'une opposition ou d'un appel, j’ai demandé au représentant des appelants de continuer à présenter sa preuve. J’ai demandé à l’avocat de l’intimée d’aborder la question de la preuve dans sa plaidoirie.

 

 

[6]     Les deux appelants ont témoigné. Le premier point soulevé par le représentant des appelants est exposé à l’annexe I des réponses. Il concerne les « prélèvements sur le restaurant » aux montants de 16 101 $ pour l’année 1997 et de 17 277 $ pour l’année 1998. Les appelants ont produit, sous la cote A‑1, des extraits du grand livre général faisant état de ces prélèvements.

 

 

[7]     L’explication des appelants pour justifier les retraits était similaire à l’explication donnée aux paragraphes 13 à 18 de leur avis d’appel. Je renvoie ici aux paragraphes 15 à 18 :

 

[TRADUCTION]

 

15)       Le Skylark 1996 ainsi que le Pontiac Bonneville 1996 qui l’a remplacé servaient essentiellement à des fins professionnelles, notamment pour aller acheter des aliments frais sept jours sur sept. Les achats quotidiens nécessitaient des déplacements au marché, à la boucherie, à la boulangerie, chez Club Price, etc.

 

16)       Les prélèvements de 1998 comprenaient des versements sur les véhicules loués. Pour le Pontiac Bonneville, un versement de 625,20 $ et onze versements de 631,06 $, totalisant 7 566,86 $, ont été effectués à GMAC. Les versements enregistrés dans le compte de prélèvements proviennent directement des relevés de comptes bancaires et sont indiqués comme suit : 883,15 $ (625,20 $ + 257,95 $) et 889,01 $ (631,06 $ + 257,95 $). Les versements font l’objet d’un léger rajustement, mais il s’agit de la même voiture. Les versements de 257,95 $ concernent le Pontiac Grand Prix 1994 utilisé à des fins personnelles. En ce qui concerne le compte de prélèvements pour 1997, quatre versements de 599,37 $ pour le Buick Skylark et sept de 625,20 $ pour le Pontiac Bonneville, totalisant 6 773,88 $, ont également été faits à GMAC (voir la pièce 4 – Contrats de location et la pièce 2 – Comptes de prélèvements).

 

17)       Ont été inscrits au compte de prélèvements des versements à Gestion D'Assurance R.B. Inc. totalisant 2 939,70 $ pour l’exercice 1998. Ces montants représentent les versements d’assurance sur les voitures. Sur le total, la somme de 988 $ correspond au Pontiac Bonneville. Le montant facturé ne concorde pas avec les montants figurant dans le compte de prélèvements car les versements étaient échelonnés (voir la pièce 5 – Assurance automobile et la pièce 2 – Comptes de prélèvements).

 

18)       Ces prélèvements comprenaient des versements à la Ville de Montréal pour 2 262,63 $ relativement à l’exercice 1997. Ces montants correspondent aux impôts fonciers sur le triplex dont M. et Mme Panagakos sont propriétaires et occupants. Le montant doit être rajusté de 1 509 $ (2/3 x 2 263 $) pour les deux logements locatifs (voir la pièce 6 – Impôts fonciers et la pièce 2 – Comptes de prélèvements).

 

[8]     Les appelants ont déclaré qu’une bonne partie des prélèvements visaient des versements sur la location des voitures, et que ces véhicules étaient largement utilisés dans le cadre de l’exploitation de leur restaurant. L’avocat de l'intimée a décidé de ne pas procéder à un contre-interrogatoire des appelants sur ces aspects. Dans sa plaidoirie, il a expliqué qu’à son avis, il n’était pas pertinent que ces prélèvements soient faits à des fins professionnelles ou autres.

 

 

[9]     Les appelants ont annexé à l’avis d’appel les différents rajustements qu’ils proposent à l’état de la valeur nette.

 

 

[10]    D’après ces rajustements, la portion des versements de location de voiture pour 1997 ayant trait à l'entreprise serait de 6 774 $, et celle pour 1998 serait de 7 567 $. En 1998, il faudrait y ajouter un montant de 988 $ pour l’assurance automobile. Ces montants doivent être déduits des montants des prélèvements.

 

 

[11]    D’après les rajustements proposés, pour l’année 1997, un montant de 1 509 $, déterminé par la répartition des impôts fonciers, doit également être déduit des montants de prélèvements, pour le motif mentionné au paragraphe 18 susmentionné de l’avis d’appel, nommément que cette dépense a été engagée pour l'entreprise de location des logements.

 

 

[12]    Le deuxième point soulevé par les appelants concerne les éléments de passif décrits à l’annexe III des réponses. Ils proposent que les éléments de passif pour l’année 1998 soient accrus d’un montant de 5 000 $ afin de tenir compte d’un prêt qui leur avait été fait par l’un de leurs fils, M. George Panagakos. Un document en date du 5 juillet 2001 et signé par M. George Panagakos a été produit sous la cote A‑3 à titre de preuve de ce prêt. L’avocat de l'intimée s’est opposé à la production de ce document car M. George Panagakos n’était pas présent pour un contre-interrogatoire. J’ai accepté le document en déclarant que je lui accorderais le poids approprié en fonction des autres preuves documentaires ou des circonstances mises en lumière par les témoignages.

 

 

[13]    Pendant leurs témoignages, M. et Mme Panagakos ont mentionné que leurs enfants et eux-mêmes avaient l’habitude de se consentir des prêts les uns aux autres, car le restaurant était une entreprise commune, mais ils ont également expliqué que les prêts étaient généralement remboursés.

 

 

[14]    Le troisième point soulevé concerne l’annexe IV des réponses, où sont calculées les dépenses personnelles. Cela concerne plus particulièrement les versements hypothécaires au montant de 3 540 $ en 1997 et en 1998. Les appelants ont expliqué qu’ils étaient propriétaires d’un triplex dont deux logements sont loués. Par conséquent, la somme de 2 360 $ devrait être déduite du montant de 3 540 $, car seulement le tiers des versements hypothécaires avait été effectué à des fins personnelles.

 

 

[15]    Le quatrième point soulevé concerne les versements d’impôt sur le revenu. Le montant de l’impôt fédéral n’était pas une estimation, contrairement à celui de l’impôt provincial. Celui-ci était estimé au même montant que l’impôt fédéral. D’après moi, la différence entre le montant estimé et le montant proposé par l’appelant sans aucune preuve documentaire à l’appui est trop minime pour mériter que l’on en discute plus longuement.

 

 

[16]    Un cinquième point soulevé par les appelants concerne le fait que le revenu supplémentaire devrait être divisé entre eux et leurs trois fils parce que ces derniers ont aidé leurs parents à exploiter le restaurant. Les fils n’ont pas produit de déclarations de revenu, et ils n’ont pas reçu de salaires.

 

[17]    L’avocat de l'intimée m’a renvoyé à la décision du juge Bowman, de cette cour, dans l’affaire Ramey c. Canada, [1993] A.C.I. n° 142 (Q.L.), à la page 4 :

 

[...] Estimer le revenu annuel d'un contribuable à partir de la valeur de son actif net est une méthode insatisfaisante et imprécise. C'est un instrument grossier que le ministre doit utiliser en dernier ressort. Une cotisation d'actif net repose sur une comparaison de l'actif net du contribuable, à savoir la valeur de l'actif moins le passif au début d'une année, avec son actif net à la fin de l'année. À la différence ainsi obtenue, on ajoute les dépenses qu'il a engagées pendant l'année. Le montant obtenu est réputé être le revenu du contribuable, sauf preuve contraire. Ces cotisations peuvent être inexactes dans une mesure indéterminée, mais elles sont valables jusqu'à preuve de leur inexactitude.

 

Conclusion

 

[18]    À mon avis, dans l’intérêt de la justice, il serait préférable que le vérificateur qui a préparé un état de la valeur nette, ou un autre vérificateur qui connaît ce document, soit présent à l’audience afin de l’expliquer ou de fournir des éclaircissements. Ce document constitue le fondement de la cotisation. Il n’est pas préparé par l’appelante mais par le représentant du ministre. Il est vrai qu’il appartient à l’appelant de prouver que le document est erroné, mais en l’absence de quelqu’un pour expliquer les écritures du vérificateur, l’explication de l’appelant a plus de chances d’être acceptée.

 

 

[19]    En l’espèce, relativement à la répartition des versements sur les locations de voiture, j’ai fait remarquer à l’avocat de l'intimée que l’évaluation de la valeur nette ne tenait pas compte des dépenses professionnelles, et qu’il est important de savoir si des frais sont à fins professionnelles ou personnelles quand on prépare un état de la valeur nette. L’avocat m’a alors présenté les formulaires T2124, les États des résultats des activités d’une entreprise, concernant le restaurant, qui ont été produits en même temps que les déclarations de revenus annuelles des appelants (cotes R‑1 à R‑4). Il m’a montré que ces formulaires ne faisaient pas état de frais d’automobile, ce qui signifiait, d’après lui, que l’utilisation d’une voiture n'était pas nécessaire dans le cadre de l'exploitation de l'entreprise.

 

 

[20]    Ces observations doivent être fondées sur des éléments de preuve. Puisque personne n'a demandé aux appelants si les voitures étaient ou non utiles ou utilisées dans le cadre de l’exploitation de leur entreprise, j’accepte leurs témoignages à l’effet que les voitures étaient utilisées à des fins professionnelles selon la proportion indiquée par les montants proposés dans leurs rajustements.

 

 

[21]    Dans la même veine, j’accepte les rajustements proposés par le représentant des appelants à l’égard des montants versés pour les locations de voitures. Ces rajustements sont indiqués au paragraphe 10 des présents motifs.

 

 

[22]    La répartition des impôts fonciers mentionnée au paragraphe 11 des présents motifs ne semble pas être contestée, non plus que la répartition des versements hypothécaires décrite au paragraphe 14 de ces mêmes motifs. Par conséquent, les montants ainsi déterminés sont acceptés.

 

 

[23]    En ce qui concerne le montant de 5 000 $ prétendument payable à l’un des fils, j’estime que la preuve n’a pas révélé qu’il s’agissait d’une obligation. Il ne saurait être rajouté aux éléments de passif des appelants pour l’année 1998.

 

 

[24]    La division du revenu supplémentaire avec les enfants ne peut être acceptée. Les enfants n’étaient pas propriétaires du restaurant et ils n’ont pas produit de déclarations de revenu. Les déclarations de revenu des deux appelants ont été produites sous les cotes R‑1 à R‑4. Le revenu d’entreprise a été divisé en deux entre les deux appelants. Par conséquent, le revenu supplémentaire doit être divisé entre les deux appelants, qui sont les propriétaires de l’entreprise.

 

 

[25]    Les appels sont admis sur la base des explications données aux paragraphes 21 et 22 des présents motifs.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 1er jour de novembre 2002.

 

 

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.

 

 

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