Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

2001-4244(IT)G

 

ENTRE :

 

INTERNATIONAL COLIN ENERGY CORPORATION,

 

appelante,

 

et

 

Sa Majesté La Reine,

 

intimée.

 

Appel entendu le 31 juillet et le 1er août 2002, à Edmonton (Alberta), et

le 6 septembre 2002, à Toronto (Ontario), par

 

l'honorable juge en chef adjoint D. G. H. Bowman

 

 

Comparutions

 

Avocats de l'appelante :             Me Al Meghji

                                                Me Edward C. Rowe

 

Avocats de l'intimée :                Me J.E. (Ted) Fulcher

                                                Me David I. Bessler

                                                Me Mark Hesseltine

 

JUGEMENT

 

          La Cour ordonne que l'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1996 soit admis, avec dépens, et que la cotisation soit déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant compte du fait que les honoraires de 1 223 598 $ (y compris la taxe sur les produits et services y afférente) versés à ARC Financial Corporation peuvent être déduits lors du calcul du revenu de l'appelante.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de novembre 2002.

 

 

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de septembre 2004.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur


 

 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Date : 20021104

Dossier : 2001-4244(IT)G

 

ENTRE :

 

INTERNATIONAL COLIN ENERGY CORPORATION,

 

appelante,

 

et

 

Sa Majesté La Reine,

 

intimée.

 

Motifs Du Jugement

 

Le juge en chef adjoint Bowman, C.C.I.

 

[1]     Le présent appel est interjeté à l'encontre d'une cotisation émise à l'égard de l'appelante pour l'année d'imposition 1996. Le litige porte sur la déduction d'honoraires de 1 223 598 $ versés à des conseillers financiers, PowerWest Financial Ltd., qui a ensuite changé sa raison sociale à ARC Financial Corporation (« ARC »). Le refus de la déduction était fondé principalement sur l'hypothèse que le montant n'a pas été dépensé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien et que, par conséquent, l'alinéa 18(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu interdit qu'il soit déduit.

 

[2]     Je désignerai l'appelante sous le nom de ICEC. L'entreprise d'ICEC au cours de la période pertinente au présent appel en était une de forage et d'exploration pétrolière et gazière. La saison de forage de 1993, qui était en hiver, a connu un rendement raisonnable, alors que la saison de 1994 n'a pas été rentable en raison du dépassement des coûts et des résultats médiocres du forage, qui n'a pas produit les niveaux prévus de réserve et de production.

 

[3]     Les réserves des sites Kidney et Panny, lesquels étaient contigus, étaient en baisse en 1994. Ils correspondaient à environ 60 % du total des sites de ICEC. Cela signifiait une diminution des flux de trésorerie et des problèmes potentiels avec la banque, la Banque de Montréal (« BMO »). En 1990, ICEC avait une marge de crédit de 100 millions de dollars auprès de la BMO et, au cours de cette année, elle avait utilisé 90 millions de dollars de cette marge. En 1993, ICEC produisait l'équivalent de plus de 9 500 barils de pétrole par jour, mais la production diminuait en raison des pertes de pression, principalement aux sites Kidney et Panny.

 

[4]     On a tenté d'améliorer la situation de l'appelante. Sur le plan technique, on a retenu les services d'une firme d'ingénieurs indépendante. La firme a élaboré un concept d'injection d'eau conçu pour stabiliser et accroître la pression.

 

[5]     Sur le plan financier, le vice-président responsable des finances, M. Paul David Wright, a converti en 1994 une partie de la marge de crédit de BMO en billet à long terme en empruntant d'une société d'assurances américaine. Le produit du prêt à long terme américain a été utilisé afin de réduire la dette à court terme auprès de la BMO. Monsieur Wright s'inquiétait qu'ICEC pourrait manquer à certaines des modalités du prêt à long terme américain et, par conséquent, il a renégocié les modalités de ce prêt.

 

[6]     Étant donné la diminution des flux de trésorerie et des revenus, le budget d'exploration devait être réduit. En bref, la diminution des revenus a donné lieu à une réduction de l'exploration qui, à son tour, a donné lieu à une diminution des revenus : un cercle vicieux classique.

 

[7]     De plus, le président et chef de la direction a été congédié et remplacé.

 

[8]     Certains éléments d'actif, comme les usines à gaz, ont été vendus afin de tenter de redresser la situation financière, qui se détériorait. Cela a mené à une réduction de la marge de crédit de la société d'environ 4,7 millions de dollars par trimestre.

 

[9]     Au printemps 1995, le conseil d'administration a été, pour employer les termes utilisés par le témoin M. Wright, vivement critiqué par les actionnaires. Cela n'est pas surprenant. De toute évidence, la société connaissait d'importantes difficultés.

 

[10]    C'est environ à ce moment que le conseil d'administration a reçu une offre d'achat des actions de l'appelante de la part de PetroCorp Incorporated. Le conseil a décidé de refuser l'offre. Je cite ci-dessous un passage du procès-verbal de la réunion du conseil d'administration tenue les 2 et 3 mai 1995, car il démontre l'état d'esprit qui a mené à l'opération avec ARC dont il est question en l'espèce.

 

[traduction]

4.         Proposition de PetroCorp

 

Le président du conseil nous a informés qu'il avait reçu une autre offre de la part de PetroCorp Incorporated et a distribué des copies de l'offre. Une longue discussion a suivi et il a été décidé à l'unanimité de rejeter l'offre. La décision du conseil était fondée notamment sur le fait que l'offre était trop basse étant donné la valeur de l'actif à court terme par action de la société, que la société avait investi dans une nouvelle équipe de gestion, dans un plan de mise en valeur des principaux éléments d'actif et dans un programme d'aliénation qui permettraient d'augmenter la valeur de la société, que le cours actuel des actions de la société est bas de façon artificielle et que PetroCorp tente de tirer profit du cours peu élevé, que ni l'offre de PetroCorp ni ses états financiers n'indiquent qu'elle aurait les fonds nécessaires pour financer son offre et que l'offre de PetroCorp ne présente aucun autre avantage, par exemple un projet de forage et d'exploration ou une équipe de direction. Pour ces motifs, le conseil a également déterminé qu'il ne désirait pas poursuivre les négociations avec PetroCorp afin d'obtenir une meilleure offre. Le secrétaire a reçu pour instructions de rédiger, aux fins d'examen, une lettre de refus de l'offre.

 

[11]    La prochaine étape dans cette histoire a été une réunion du conseil tenue le 31 juillet et le 1er août 1995. Le point 3 du procès-verbal se lit comme suit :

 

[traduction]

 

3.         Rencontres avec les actionnaires

 

Le président du conseil a fait rapport des rencontres avec les actionnaires que lui‑même et messieurs Mann, Wright et Ibach ont récemment eues à Chicago, Boston et New York. Il a informé le conseil qu'ils avaient rencontré plusieurs actionnaires à Chicago qui détenaient au total environ 24 % des actions en circulation. Deux actionnaires, qui détenaient respectivement environ 4 % et 1,5 % des actions, étaient très mécontents et n'étaient pas réceptifs au point de vue de la direction. Ils ont conseillé vivement à la direction de retenir les services d'un placeur afin de vendre la société ou de trouver un partenaire de fusion, ce qui permettrait de remplacer la direction actuelle. Les autres actionnaires présents étaient préoccupés par le plan de la direction qui proposait un apport de nouveaux capitaux et, bien qu'ils ne semblent pas accorder autant d'importance à la vente, ils ont appuyé cette idée. Le président du conseil a informé le groupe de Chicago que la société serait mise en vente si c'était ce que la majorité des actionnaires désiraient. Il a également demandé ce qu'ils désiraient obtenir d'une telle vente et, suite à des discussions, on a proposé le montant de 8,00 $ US par action, selon qu'il s'agissait d'une opération au comptant ou d'une opération en actions et selon l'identité de l'acheteur. Les actionnaires présents aux réunions de Boston et de New York détenaient au total environ 21 % des actions en circulation. Ils étaient plus ouverts au point de vue de la direction. Ni les actionnaires ni la direction n'ont évoqué l'idée de vendre la société. Ils avaient également l'intention de rencontrer un autre actionnaire à New York qui détient 5 % des actions et de tenir une autre réunion à Toronto avec un actionnaire qui détient 9 % des actions, mais ils n'ont pas été en mesure de fixer une date. Une discussion a suivi.

 

Le président du conseil était d'avis que ce n'était pas la bonne période pour vendre la société afin d'obtenir la valeur maximale pour les actionnaires, qu'il n'était pas réaliste de tenter d'obtenir le prix de 8,00 $ US à ce moment et que la vente ne correspondait peut-être pas au choix de la majorité des actionnaires. Par conséquent, il a proposé de rencontrer de nouveau les participants à la réunion de Chicago séparément afin de les convaincre qu'une vente pourrait ne pas être avantageuse pour eux en ce moment. Il a demandé au conseil de considérer ce plan d'action au cours de la soirée et d'en discuter demain à la reprise de la présente réunion.

 

[12]    Le 11 août 1995, le conseil a tenu une autre réunion. Il semble évident d'après le témoignage de M. Wright que ce n'était que les petits actionnaires, qui détenaient environ 4 % et 1,5 % des actions, qui demandaient que la société soit vendue. Au cours de cette réunion, le conseil a convenu de donner suite à son plan d'affaires afin de tenter d'augmenter au maximum la valeur de l'investissement des actionnaires. Il a été décidé de retenir les services de Sproule & Associates, une firme d'ingénieurs, afin de préparer un rapport sur les réserves futures d'ICEC.

 

[13]    Les 30 et 31 octobre 1995, une autre réunion du conseil a été tenue. Le point 4 du procès-verbal se lit comme suit :

 

[traduction]

 

4.         Point sur la fusion d'entreprises

 

Le président du conseil a informé le conseil que National Energy Group Inc. et Arch Petroleum Inc. avaient communiqué avec lui et qu'elles sont toutes deux intéressées à étudier la possibilité d'acheter la société. Le président du conseil a rencontré la direction de NEG, qui a indiqué que NEG a acheté un peu moins de 5 % des actions de la société et qu'elle a discuté avec d'autres actionnaires qui détiennent ou qui ont acheté un total d'environ 30 % des actions, et il a distribué une lettre d'intention de la part de NEG qui a demandé à la société de la signer. Miles Bender, président et chef de la direction de NEG, a demandé de rencontrer le conseil et de faire une présentation, et il a été convenu de le rencontrer à 11 h le 31 octobre.

 

Une longue discussion a suivi à propos des perspectives d'avenir de la société et il a été convenu que sans la capacité d'obtenir un financement additionnel par emprunt ou par actions, la société devra faire un achat d'actions ou fusionner avec une autre société. Par conséquent, il a été convenu que la direction discuterait avec Peters & Co. en vue de retenir les services de cette société pour obtenir de l'aide à trouver des occasions de fusion ou d'acquisition, quoique Arch a été présentée à la société par Peters et qu'ils peuvent être en conflit d'intérêts s'ils ont été engagés par Arch. De plus, il a été convenu de ne communiquer avec aucune autre société d'une quelconque façon qui laisserait entendre que la société est à vendre et que, en tout état de cause, toute discussion relative à cette question sera entreprise uniquement par le président du conseil. Il a également été convenu que NEG et Arch pouvaient accéder à la salle des données après avoir signé l'entente de confidentialité type de la société, mais que la société ne signerait pas la lettre d'intention de NEG.

 

[14]    Les 11 et 12 décembre 1995, une réunion a été tenue au cours de laquelle le conseil a été avisé que le rapport préliminaire de Sproule & Associates concluait que les réserves de l'appelante étaient encore plus basses que prévues. Le conseil a également été avisé que la direction avait décidé de conclure un contrat de mission avec PowerWest Financial Ltd. (ARC).

 

[15]    ARC a été préférée à deux autres conseillers financiers potentiels, car ceux‑ci ne voulaient que vendre la société alors qu'ARC était disposée à étudier toutes les solutions de rechange. La proposition d'ARC comprenait ce qui suit :

 

[traduction]

 

C.        SERVICES PROPOSÉS

 

PowerWest se propose de fournir les services de conseils financiers à Colin en trois étapes, telles que décrites ci-après :

 

Première étape

 

a)         PowerWest préparera une évaluation préliminaire de la société fondée sur le rapport préliminaire de Sproule et sur d'autres renseignements disponibles le 15 décembre 1995;

 

b)         PowerWest résumera ce qui précède sous forme de présentation, vous le remettra et, sur demande, présentera les résultats au conseil d'administration de Colin.

 

Deuxième étape

 

Si le conseil d'administration de Colin détermine qu'il souhaite procéder à l'examen des solutions de rechange stratégiques, PowerWest offrira les services de conseils suivants à Colin :

 

a)         PowerWest préparera : (i) une mise à jour de l'évaluation préliminaire en consultant le rapport final de Sproule; (ii) une analyse de la position stratégique de Colin en tenant compte des facteurs d'exploitation et des facteurs financiers. L'objectif de l'analyse sera d'établir si une activité précise sous le contrôle de Colin pourrait avoir une incidence importante sur les perspectives de croissance ou de valeur de Colin;

 

b)         PowerWest préparera un examen des solutions de rechange stratégiques qui évaluera les avantages respectifs de donner suite à d'autres plans d'affaires ou à d'autres opérations;

 

c)         PowerWest résumera ce qui précède sous forme de présentation, vous le remettra et, sur demande, présentera les résultats au conseil d'administration de Colin.

 

Troisième étape

 

Si le conseil d'administration de Colin reçoit une proposition d'acquisition ou de fusion qui semble intéressante et à laquelle il souhaite donner suite avant la mise en œuvre ou l'achèvement de la deuxième étape, nous pouvons aller directement au paragraphe e) ci-dessous. Sinon, la troisième étape sera mise en œuvre après la deuxième étape, si le conseil d'administration de Colin décide de donner suite à la troisième étape, comme suit :

 

a)         si Colin reçoit une offre d'acquisition ou de fusion de l'une des trois parties ayant exprimé leur intérêt, PowerWest aidera Colin à négocier les conditions de l'opération et à les rendre aussi favorables que possible;

 

b)         si le conseil d'administration de Colin décide de donner suite à la fusion ou à la vente, PowerWest mettra en œuvre un programme en vue d'atteindre l'objectif du conseil, y compris soit (i) d'assurer que Colin obtienne la valeur la plus élevée possible lors d'une vente ou d'une fusion avec une société plus grande, (ii) d'assurer que les incidences d'une fusion avec une société plus petite ou d'un achat d'une telle société soient aussi favorables que possible pour Colin;

 

c)         si le conseil décide de procéder au financement, PowerWest conseillera le conseil d'administration à l'égard des modalités du financement. Si PowerWest est d'avis qu'il serait plus avantageux pour Colin de faire de la sorte, elle agira à titre de mandataire de Colin; sinon, PowerWest recommandera de retenir les services d'une firme de courtage;

 

d)         si le conseil d'administration décide de vendre des éléments d'actif, PowerWest agira à titre de mandataire de Colin dans le cadre de la vente, sauf si PowerWest est d'avis qu'il serait préférable qu'il y ait un mandataire différent;

 

e)         si le conseil d'administration de Colin demande une opinion sur l'équité d'une opération, laquelle serait remise aux actionnaires de Colin, PowerWest fournira ladite opinion.

 

[16]    Les honoraires étaient de 35 000 $ pour la première étape, de 35 000 $ pour la deuxième étape et, si le conseil décidait de procéder à la troisième étape, de 25 000 $ par mois, plus des frais d'opération supplémentaires si une fusion ou une acquisition était réalisée. De façon générale, les frais d'opération correspondaient à un pourcentage de la « valeur totale » de Colin (telle que définie). J'énoncerai plus loin dans les présents motifs le calcul précis des frais d'opération supplémentaires.

 

[17]    La lettre de mission qui a suivi la proposition intégrait les première et deuxième étapes dans la première étape et des honoraires de 60 000 $ ont été payés pour le travail effectué par ARC relativement à la première étape.

 

[18]    La lettre de mission, qui était datée du 13 décembre 1995, se lit en partie comme suit :

 

[traduction]

 

PowerWest préparera une évaluation préliminaire de Colin qui sera fondée sur les renseignements fournis à PowerWest, sans effectuer une vérification diligente formelle. Ladite évaluation sera préparée en tenant compte des deux possibilités suivantes : (i) Colin reste une entreprise en exploitation œuvrant dans les domaines de l'exploration, du développement et de la production, (ii) Colin est vendue. L'évaluation sera présentée à Colin sous forme de présentation au cours de la semaine du 8 janvier 1996.

 

Les solutions de rechange stratégiques générales sont : (i) de poursuivre l'exploitation usuelle de Colin, (ii) d'améliorer l'exploitation usuelle de Colin au moyen d'un financement ou d'une vente d'éléments d'actif, (iii) d'augmenter la valeur de Colin par une fusion, (iv) de tenter d'obtenir des offres d'achat de la totalité des actions de Colin. PowerWest analysera les principales solutions de rechange sous-jacentes à chacune de ces solutions de rechange générales.

 

PowerWest évaluera chacune des solutions de rechange précitées (y compris les étapes requises pour la mise en œuvre de chacune d'elles) en tenant compte de vos objectifs et nous fournirons une analyse des principaux facteurs de risque relatifs à la mise en œuvre d'un plan donné, en vue d'obtenir la valeur la plus élevée possible pour tous les actionnaires de Colin. PowerWest présentera à Colin les conclusions de cette évaluation au cours de la semaine du 15 janvier 1996.

 

Les services décrits ci-dessus constituent la première étape (« première étape ») d'un projet qui pourrait être en deux étapes. Si Colin donne pour instructions à PowerWest de procéder à la mise en œuvre d'une vente ou d'une fusion (une « opération »), la deuxième étape (« deuxième étape ») sera alors entreprise. Sauf convention contraire, les services de PowerWest lors de la deuxième étape, à la demande de Colin, seront dans les domaines suivants :

 

a)         PowerWest assumera la gestion globale de l'opération;

 

b)         PowerWest et Colin travailleront de concert afin d'identifier et d'évaluer des tiers (les « tiers ») qui pourraient être des acheteurs potentiels ou des partenaires de fusion et qui ont la capacité de conclure l'opération;

 

c)         PowerWest préparera, avec l'aide de Colin, un ou des documents d'information relatifs à l'opération;

 

d)         PowerWest invitera des tiers à faire part de leur intérêt à participer dans une acquisition ou une fusion et, afin d'améliorer la diffusion des documents d'information de Colin, elle agira à titre de mandataire de Colin lors de la signature d'ententes de confidentialité, selon le libellé acceptable à Colin et à ses avocats, avec les tiers;

 

e)         PowerWest représentera et conseillera Colin relativement à toute question financière importante dans le cadre des discussions avec les tiers;

 

f)          PowerWest négociera avec les tiers afin que les modalités de l'opération soient aussi favorables que possible.

 

PowerWest fournira les services de conseils financiers décrits à la première étape et fournira les services de conseils financiers décrits à la deuxième étape à la demande de Colin, à titre de conseiller financier exclusif de Colin, selon les modalités et conditions énoncées ci-dessous. De plus, si Colin choisit d'obtenir du financement ou de procéder à la vente des éléments d'actif, PowerWest conseillera Colin relativement à de tels projets et pourrait agir à titre de mandataire à cet égard, selon les modalités et conditions alors convenues.

 

1.         Colin fournira (et PowerWest recevra, cela constituant une condition préalable à l'exécution de notre engagement) au plus tard le 20 décembre 1995 :

 

a)         les plus récentes évaluations techniques, internes et indépendantes, des réserves de pétrole et de gaz naturel de Colin;

 

b)         les plus récentes évaluations des sites inexploités de Colin;

 

c)         les états financiers vérifiés de Colin pour l'exercice terminé le 31 décembre 1994, les états financiers pour la période terminée le 30 novembre 1995 et, dès qu'ils seront disponibles, les états financiers vérifiés pour l'exercice terminé le 31 décembre 1995;

 

d)         une évaluation des comptes fiscaux des biens amortissables dont dispose Colin en date du 31 décembre 1995;

 

e)         sur demande, les consultations avec la haute direction de Colin que PowerWest peut raisonnablement exiger afin d'exécuter ses obligations en vertu du présent engagement;

 

f)          tout autre renseignement ou toute autre donnée supplémentaire relatifs à Colin que PowerWest peut raisonnablement exiger afin d'exécuter ses obligations en vertu du présent engagement, y compris tout renseignement supplémentaire requis afin de mettre en œuvre la deuxième étape.

 

PowerWest sera en droit de se fier à la véracité, à l'exactitude et à l'exhaustivité de tel renseignement, à tous égards importants, à la date où ils sont fournis à PowerWest (sauf dans la mesure où un renseignement est mis à jour par une autre information fournie par écrit à PowerWest par Colin) et elle ne sera aucunement tenue de vérifier l'exactitude ou l'exhaustivité de tel renseignement ni de telle mise à jour.

 

2.         Colin convient d'aviser PowerWest sans délai de tout changement important à l'égard de l'entreprise, de l'actif ou des activités de Colin pendant la durée de l'engagement de PowerWest.

 

3.         En contrepartie des services de conseils financiers fournis par PowerWest en vertu des présentes, Colin versera à PowerWest les honoraires suivants :

 

a)         les honoraires (les « honoraires ») de 60 000 $ pour les services de conseils financiers fournis dans le cadre de la première étape, le premier versement de 25 000 $ devant être versé lors de la signature par Colin de la présente entente et le versement final de 35 000 $ devant être payé lors de la présentation des conclusions de PowerWest relatives à la première étape;

 

b)         si Colin demande à PowerWest de fournir ses services de conseils financiers pour la deuxième étape, Colin versera à PowerWest un acompte pour les services de conseils financiers de la deuxième étape selon le montant convenu par Colin et PowerWest, le premier versement devant être effectué lors de la confirmation de la demande à PowerWest relativement à la deuxième étape, calculé au prorata des jours qui restent au mois pendant lequel cette demande est faite, et les versements ultérieurs devant être effectués le premier jour de chaque mois par la suite jusqu'à la conclusion de l'opération ou l'annulation de la présente entente, tel que prévu ci‑après;

 

c)         si une opération est conclue, Colin versera, au moment de la clôture, une prime (la « prime ») à PowerWest. Sous réserve de l'alinéa 3d) ci-dessous, la prime versée à l'égard de l'opération sera calculée conformément à la formule suivante :

 

(i)         si l'opération est conclue avec l'une des parties indiquées à l'annexe « A » des présentes sans la mise en œuvre par PowerWest d'un processus de gestion concurrentielle de la vente ou de la fusion, la prime sera de 0,2 % de la valeur totale (telle que définie ci‑après),

 

(ii)        si l'opération a lieu après que PowerWest ait mis en œuvre un processus de gestion concurrentielle de la vente, la prime sera de 0,7 % de la valeur totale.

 

La « valeur totale » correspond au prix d'acquisition de l'ensemble des capitaux propres de Colin, plus toute dette à long terme et le fonds de roulement négatif de Colin, si le fonds de roulement est négatif, et moins le fonds de roulement positif, si le fonds de roulement est positif. Si la contrepartie de l'acquisition comprend des titres cotés en bourse d'une autre société, la valeur de ceux-ci aux fins du calcul des capitaux propres sera le cours moyen pondéré des titres au cours de la période débutant immédiatement après l'annonce de l'opération et se terminant cinq jours avant la conclusion de l'opération. Si la contrepartie de l'acquisition n'est pas entièrement composée d'espèces ou de titres cotés en bourse, Colin et PowerWest conviendront de la valeur de celle-ci à cette fin, à défaut de quoi les parties soumettront l'évaluation à l'arbitrage en vertu de la loi intitulée Arbitration Act (Loi sur l'arbitrage) de l'Alberta;

 

d)         si l'on exige que PowerWest fournisse une opinion sur l'équité des modalités d'une opération et que PowerWest fournit une telle opinion, Colin versera à PowerWest des honoraires de 85 000 $ payables lors de la présentation de l'opinion;

 

e)         la taxe sur les produits et services (« TPS ») sera ajoutée à tous les montants facturés en vertu des présentes au taux prescrit par la loi. Le numéro d'inscription de PowerWest aux fins de la TPS est le R122195555.

 

[19]    Les 12 et 13 février 1996, une réunion du conseil a été tenue au cours de laquelle il a été décidé d'entreprendre la deuxième étape. Les dirigeants d'ARC ont présenté leur rapport intitulé « Évaluation préliminaire des solutions de rechange stratégiques » le 5 février 1995. Ce rapport consistait en une analyse assez complète de la situation économique dans le secteur de l'énergie et de la position de l'appelante dans cette industrie.

 

[20]    Plusieurs solutions de rechange ont été envisagées, comme la vente d'éléments d'actif, l'émission d'actions ordinaires, l'émission de droits, un important placement privé et, en outre, de simplement poursuivre les activités comme avant (la « continuité de l'exploitation »).

 

[21]    Sous le titre « Fusion », le rapport souligne les points suivants :

 

[TRADUCTION]

 

¾         Avantages potentiels généraux d'une fusion :

 

         création d'une société plus grande et plus forte

         amélioration potentielle du cours en bourse

         amélioration potentielle du bilan et de la capacité d'obtenir du financement

         synergies potentielles de l'actif et coûts d'exploitation moins élevés

         efficacité générale et administrative accrue potentielle

         nouveaux secteurs fondamentaux potentiels et programme d'investissement amélioré

         augmentation du flottant afin d'améliorer les liquidités et l'accès aux marchés financiers

 

¾         Candidat de fusion idéal pour International Colin :

 

         bilan solide

         éléments d'actif complémentaires

•           risques moins élevés

•           secteurs d'exploitation durant toute l'année

         capacité technique éprouvée aux yeux des investisseurs

         capitalisation boursière de 100 millions à 200 millions de dollars

         bon rendement de la « continuité de l'exploitation »

         appui des actionnaires

 

¾         L'objectif d'une fusion idéale serait de créer une société dont les données fondamentales placent le rendement futur dans le premier quartile

 

[22]    Le rapport traitait également de la possibilité de vendre la société. Voici les commentaires d'ARC à cet égard :

 

[traduction]

 

¾         De manière générale, nous faisons preuve d'un optimisme prudent à l'égard des résultats escomptés de la vente de la société

 

         la concentration, la direction et les intérêts directs sont excellents, mais le rendement instable des sites Kidney et Panny cause une certaine incertitude

         le rapport de Sproule semble optimiste à l'égard des volumes de production de Kidney pour 1996

 

¾         Notre conclusion à l'égard de la soumission gagnante la plus probable dans le cadre de la vente de la société est de 6,50 $ à 8,50 $ l'action

 

[23]    Lorsqu'elle parlait de la « vente de la société », il semble qu'ARC faisait référence à une vente des actions en contrepartie d'espèces. Le terme « fusion » semble signifier la fusion de l'appelante avec une autre entité. Toutefois, la distinction entre la « vente de la société » et la « fusion » est quelque peu floue. On peut lire ce qui suit dans les conclusions préliminaires d'ARC :

 

[traduction]

 

une fusion devrait être considérée comme une variante de la vente de la société

 

[24]    Dans ses conclusions et ses recommandations préliminaires, ARC n'a retenu aucune des solutions de rechange, sauf la vente de la société et la fusion. ARC affirmait ce qui suit :

 

[traduction]

 

ARC recommande que Colin entreprenne de vendre la société

 

         il s'agit de la solution comportant probablement le risque le moins élevé et l'avantage à court terme le plus élevé pour les actionnaires

         rechercher des offres sous forme d'une vente au comptant ou une fusion avec une autre société en contrepartie de titres solides.

 

[25]    Le 14 février 1996, l'appelante a diffusé un communiqué de presse dans lequel elle avisait avoir retenu les services d'ARC :

 

[traduction]

 

afin d'examiner les solutions de rechange stratégiques dont dispose la société afin d'augmenter au maximum la valeur de l'investissement des actionnaires.

 

[26]    Également le 14 février 1996, l'appelante et ARC ont modifié la lettre de mission afin qu'une prime soit versée à ARC non seulement en cas de vente ou de fusion, mais également en cas de refinancement.

 

[27]    En mars 1996, ARC a fait parvenir une notice d'offre confidentielle aux partenaires potentiels. Dans l'annexe « A » de cette note, intitulée « Procédures relatives à l'offre », sous le titre « Structure de l'opération », on peut lire ce qui suit :

 

[traduction]

 

Le conseil d'administration de Colin est disposé à étudier de nombreuses propositions différentes, notamment une vente en contrepartie d'espèces ou d'actions, une fusion ou une restructuration importante du capital de la société et un changement de contrôle. On évaluera les offres qui dépendent de l'obtention de financement si la capacité d'obtenir le financement est clairement démontrée et que la période nécessaire pour obtenir le financement est raisonnable. Aucun engagement ne sera exigé de l'acquéreur éventuel à l'égard de l'emploi de tout employé actuel de Colin. Toutefois, Colin, et donc l'entité permanente, sera responsable de toute indemnité de cessation d'emploi.

 

[28]    Le 18 avril 1996, les dirigeants d'ARC ont rapporté au conseil d'administration d'ICEC qu'ils avaient reçu sept offres et qu'ils recommandaient de donner suite à seulement deux d'entre elles, soit celles de Cabre Exploration Ltd. et de Morgan Hydrocarbons Inc. ARC a reçu pour instructions d'entreprendre des négociations avec ces deux sociétés. Il est important de souligner que la direction de l'appelante a agi avec diligence à l'égard des deux sociétés. Je considère ce point important car il indique que le conseil ne recherchait pas simplement à vendre les actions; il recherchait plutôt une association avec une société qui serait avantageuse pour l'entreprise de l'appelante. L'interrogatoire principal de M. Wright à ce sujet est instructif. L'avocat lui a demandé de se reporter au passage du procès-verbal concernant la vérification diligente que la direction devait entreprendre, et la discussion suivante a eu lieu :

 

[traduction]

 

Q.        Étiez-vous impliqué dans la vérification diligente dont il est question ici?

 

R.         Oui.

 

Q.        Et, Monsieur, pourriez-vous décrire à la Cour la nature de la vérification diligente de Cabre et de Morgan?

 

R.         Nous avons effectué un examen des opérations et un examen technique et financier des deux sociétés, à la fois séparément et dans le contexte de l'intégration de celles-ci à l'actif de Colin, et nous avons tenté d'évaluer où se situeraient les entités fusionnées relativement aux problèmes auxquels Colin faisait face.

 

Q.        D'accord. Alors, quels types d'éléments auriez-vous étudiés?

 

R.         Eh bien, du point de vue financier, on regarde la santé financière de la société, sa réputation dans le marché, et la direction elle-même. D'un point de vue opérationnel, on examine les sites, la nature de leur exploitation, ce qu'on prévoit en termes de réserve et de production à l'égard de ces sites, leurs plans et leurs possibilités d'exploration. On effectue un examen complet de tous les aspects de la société.

 

Q.        Et les éléments que vous aviez étudiés, comment répondaient-ils aux problèmes de la société?

 

R.         Certains secteurs de Colin posaient définitivement problème, et nous recherchions — par exemple, nous observions une baisse marquée dans le plus important champ de pétrole, ainsi nous examinions le profil de production des deux sociétés en question afin de voir où étaient leurs secteurs en baisse et quels étaient leurs plans à cet égard. Alors on est toujours — où se situait leur bilan, en ce qui a trait au ratio des dettes par rapport aux flux de trésorerie, où ils se situent en termes de ratio de levier financier, et ainsi de suite.

 

[…]

 

Q.        Maintenant, Monsieur Wright, vous avez témoigné plus tôt que lorsque vous avez procédé à la vérification diligente de Morgan et de Cabre, vous avez examiné leurs actifs et toutes ces autres choses, pour voir à quel point elles répondaient aux problèmes de la société. Si les actions d'International Colin n'étaient que vendues à une autre société, pourquoi s'enquérir des détails de ces sociétés? Pourquoi ne pas simplement se demander qui offrirait le plus d'argent? Pourquoi cela vous préoccupait‑il?

 

R.         Eh bien, en fin de compte, les actionnaires de Colin devenaient les actionnaires de la nouvelle entité.

 

Q.        Oui.

 

R.         Alors on revient, on revient à la prémisse de base, l'objet était, vous savez, de choisir un plan d'action et une solution qui répondraient aux problèmes de la société, et, en fin de compte, cela était notre principale préoccupation, de s'assurer que l'entité connue sous le nom de Colin serait en mesure de survivre et de prospérer dans la nouvelle organisation. Et pour que — vous savez, nous arrivions à — vous savez, à la fin de notre processus à cet égard.

 

[29]    Le 25 avril 1996, ARC a fait rapport au conseil et a recommandé d'accepter la proposition de Morgan. Le point 3 du procès‑verbal de cette réunion se lisait comme suit :

 

[traduction]

 

3.         Examen interne

 

Le président du conseil a demandé à la direction de faire rapport au conseil au sujet de leur analyse des deux sociétés. Monsieur Mann a parlé de l'examen technique de l'actif de Cabre et de Morgan effectué par la société et a affirmé que, du point de vue technique, la direction était d'avis que l'actif de Morgan était plus intéressant que celui de Cabre. Monsieur Wright a traité de la situation financière et de la situation des deux sociétés à la bourse. Il est d'avis que la situation financière de Cabre est plus solide mais il est plus probable que la valeur des actions de Morgan augmente.

 

[30]    En fin de compte, le conseil a approuvé la proposition de Morgan Hydrocarbons Inc. d'acheter toutes les actions émises et en circulation de l'appelante pour une contrepartie minimale en actions ordinaires de Morgan sur la base de 1,975 action de Morgan pour chaque action de l'appelante. Le communiqué de presse qui annonçait l'opération décrivait celle-ci comme étant un « regroupement commercial » conclu par l'appelante et Morgan. Il contenait la déclaration suivante :

 

[traduction]

 

Monsieur P. David Williams, président et chef de la direction d'International Colin, a affirmé que « les actionnaires d'International Colin ont l'occasion de participer à une société plus grande et ayant une meilleure capacité financière, qui produit environ 23 000 barils de pétrole par jour, partagés également entre le pétrole léger, le pétrole lourd et le gaz naturel ». Les actionnaires d'International Colin détiendront environ 32 % de l'entité regroupée.

 

[31]    La Cour du Banc de la Reine de l'Alberta a approuvé le plan d'arrangement en vertu de la loi intitulée Business Corporations Act (Loi sur les sociétés par actions) de l'Alberta. Les actionnaires l'ont approuvé par un vote de 99,6 % en faveur lors d'une assemblée des actionnaires de l'appelante tenue le 27 juin 1996.

 

[32]    L'opération a été conclue par voie d'un échange d'actions; les actionnaires de l'appelante sont devenus des actionnaires de Morgan, et l'appelante continue d'exister.

 

[33]    L'appelante a versé une prime de 1 057 694 $ à ARC. Cette prime correspondait à 0,7 % de la valeur totale, selon la définition dans la lettre de mission. Le calcul s'établissait comme suit :

 


La valeur totale est égale au prix des capitaux propres de l'appelante, plus les dettes à long terme, moins le fonds de roulement.

 

Le cours moyen pondéré des actions de Morgan était de 4,17 $ par action.

 

La valeur des capitaux propres était :

4,17 x 1,975 action de Morgan x 12 868 021 actions de Colin =                  105 977 804 $

 

Plus la dette à long terme                                                                             63 310 000 $

Moins le fonds de roulement                                                                         3 903 000 $

                                                          Valeur totale                                    165 384 804 $

                                                          x 0,7 % =                                           1 157 694 $

 

                             Moins les honoraires versés

                             à l'égard de la deuxième étape

                             en février, mars et avril                                                  100 000 $

                                                                                                                    1 057 694 $

 

[34]    La TPS de 74 039 $ a été ajoutée à ce montant, pour un total de 1 131 733 $. De plus, la somme de 60 000 $ a été versée pour le travail effectué lors de la première étape, ainsi que la somme de 5 903 $ à titre de débours. Le total, y compris les honoraires de la deuxième étape versés en février, mars et avril, était de 1 223 598 $.

 

[35]    L'appelante a réclamé 1 223 598 $ (ainsi que la TPS, je suppose) dans le calcul de son revenu pour l'année d'imposition 1996. Elle a ensuite demandé que ce montant soit considéré comme une dépense en immobilisations admissible et, par la suite, elle a encore une fois demandé qu'il soit considéré comme une dépense courante. Le ministre a refusé cette demande parce qu'il estimait que le montant n'avait pas été versé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien et que la déduction n'est pas permise en vertu de l'alinéa 18(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Le ministre ne s'est pas appuyé sur l'alinéa 18(1)b) pour établir la cotisation ou pour la ratifier. L'intimée a reconnu au procès que les honoraires de 60 000 $ relatifs à la première étape étaient déductibles.

 

[36]    Il est quelque peu difficile de savoir si la réponse à l'avis d'appel soulève clairement la question de l'alinéa 18(1)b). Dans la réponse à l'avis d'appel initiale, la Couronne ne s'appuyait que sur l'alinéa 18(1)a).

 

[37]    Une réponse modifiée a été déposée et bien qu'aucun fait supplémentaire n'ait été allégué à l'appui de l'affirmation que le paiement était une dépense en immobilisations, d'importantes modifications ont été apportées aux sections B, C et D, comme suit :

 

[traduction]

 

B.        POINTS EN LITIGE

 

9.         Les points en litige sont les suivants :

 

a)         les versements à ARC sont-ils des dépenses en immobilisations ou des dépenses courantes?

 

b)         s'ils sont des dépenses en immobilisations, constituent-ils :

 

i)          une « dépense … à titre de capital » de l'entreprise d'International Colin (alinéa 18(1)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e supp.), telle que modifiée (la « Loi »))?

 

ii)         une « dépense de capital engagée ou effectuée par [International Colin] […] en vue de tirer un revenu de l'entreprise » d'International Colin (paragraphe 14(5) de la Loi — définition de « dépense en capital admissible »)?

 

iii)         des « frais d'emprunt » visés à l'alinéa 20(1)e) de la Loi?

 

c)         s'ils sont des dépenses courantes, constituent-ils :

 

i)          des dépenses devant être déduites dans la détermination du revenu que International Colin « tire d'une entreprise » pour 1996 (paragraphe 9(1) de la Loi)?

 

ii)         des « dépenses […] engagées ou effectuées par [International Colin] en vue de tirer un revenu de l'entreprise » d'International Colin (alinéa 18(1)a) de la Loi)?

 

C.        DISPOSITIONS LÉGISLATIVES INVOQUÉES

 

10.       Le Sous‑procureur général du Canada invoque les articles 2, 3, 4, 9, 14, 18, 20 et 248 de la Loi et l'article 1210 du Règlement de l'impôt sur le revenu.

 

D.        MOYENS ET CONCLUSIONS RECHERCHÉES

 

11.       Il soutient que les versements à ARC étaient des dépenses en immobilisations effectuées pour le compte des actionnaires de l'appelante et qu'ils n'étaient pas effectués pour que l'appelante puisse tirer un revenu. Par conséquent, les versements à ARC ne sont pas une « dépense [...] à titre de capital » de l'entreprise d'International Colin visée à l'alinéa 18(1)b) de la Loi, et aucune déduction n'est permise.

 

12.       De plus, même si les versements à ARC étaient effectués pour le compte de l'entreprise d'International Colin — ce qui n'est pas admis, mais est plutôt nié — ils ne sont pas une « dépense […] engagée ou effectuée par [International Colin] en vue de tirer un revenu de l'entreprise » d'International Colin et, par conséquent, ils ne constituent pas une « dépense en capital admissible » visée au paragraphe 14(5) de la Loi et aucune déduction n'est permise.

 

13.       Il soutient en outre qu'en raison de la nature des versements à ARC, ils ne constituent pas des « frais d'emprunt » visés à l'alinéa 20(1)e) de la Loi.

 

14.       Subsidiairement, si la Cour conclut que les versements à ARC sont des dépenses courantes, alors il prétend qu'ils ne sont pas des dépenses pouvant être déduites dans la détermination du revenu que International Colin « tire d'une entreprise » en 1996 conformément au paragraphe 9(1) de la Loi.

 

15.       De plus, même si l'on pouvait affirmer que les versements à ARC devaient être considérés pour établir le revenu d'entreprise de l'appelante, ces dépenses ne sont pas des « dépenses […] engagées ou effectuées par [International Colin] en vue de tirer un revenu de l'entreprise » d'International Colin et les versements à ARC « ne sont pas déductibles » en vertu de l'alinéa 18(1)a) de la Loi.

 

16.       Il soutient en outre que tout montant admis à titre de déduction pour l'appelante nécessite un rajustement correspondant de la déduction relative à des ressources de l'appelante en vertu de l'alinéa 20(1)v.1) de la Loi et de l'article 1210 du Règlement de l'impôt sur le revenu.

 

17.       Il demande que l'appel soit rejeté avec dépens.

 

[38]    Il était encore incertain au procès si l'intimée alléguait subsidiairement que le paiement était à titre de capital. J'ai invité l'avocat de l'intimée à modifier la réponse à nouveau afin de faire ressortir clairement ce que l'intimée allait plaider. Il a modifié le paragraphe 11 afin de supprimer les mots « en immobilisations » à la première ligne. Le paragraphe 11 de la réponse modifiée modifiée se lit maintenant comme suit :

 

[traduction]

 

11.       Il soutient que les versements à ARC étaient des dépenses en immobilisations effectuées pour le compte des actionnaires de l'appelante et qu'ils n'étaient pas effectués pour que l'appelante puisse tirer un revenu. Par conséquent, les versements à ARC ne sont pas des « dépenses […] engagées ou effectuées par [International Colin] en vue de tirer un revenu de l'entreprise » d'International Colin (alinéa 18(1)a) de la Loi) et ne sont pas une « dépense [...] à titre de capital » de l'entreprise d'International Colin visée à l'alinéa 18(1)b) de la Loi, et aucune déduction n'est permise.

 

[39]    Le paragraphe 12 a également été modifié et se lit comme suit :

 

12.       Si la Cour conclut que les versements à ARC étaient à titre de capital pour l'entreprise d'International Colin conformément à l'alinéa 18(1)b) de la Loi, ils ne sont pas une « dépense […] engagée ou effectuée par [International Colin] en vue de tirer un revenu de l'entreprise » d'International Colin et, par conséquent, ils ne constituent pas une « dépense en capital admissible » visée au paragraphe 14(5) de la Loi et aucune déduction n'est permise.

 

[40]    Je ne crois pas que l'intimée puisse soutenir, sur la base de la réponse modifiée modifiée, que le versement est à titre de capital, bien que ce soit ce que l'avocat a tenté de faire dans son argumentation écrite. Au paragraphe 33 de son argumentation écrite, il affirme ce qui suit :

 

[traduction]

 

Essentiellement, la question devient : quel était l'effet escompté du versement d'un point de vue pratique et commercial? Sous cet angle, la prime devait augmenter au maximum la valeur de l'investissement des actionnaires en obtenant le prix le plus élevé possible lors de la disposition des actions d'ICEC. Le paiement est à titre de capital et la déduction est interdite en vertu de l'alinéa 18(1)b).

 

[41]    Même si l'intimée pouvait soutenir que le paiement était à titre de capital, contrairement à la déclaration contenue au paragraphe 11 de la réponse modifiée modifiée selon laquelle les versements n'étaient pas des « dépenses à titre de capital de l'entreprise d'International Colin », je ne crois pas que la conclusion énoncée dans la dernière phrase de ce paragraphe découle de la prémisse énoncée dans l'avant-dernière phrase. Cette déclaration, même si elle était vraie, n'appuie pas la position que les versements étaient à titre de capital. Elle semble plutôt appuyer l'argument qu'ils n'étaient pas engagés en vue de tirer un revenu de l'entreprise de l'appelante.

 

[42]    L'approche que j'ai toujours trouvée utile pour des affaires similaires se trouve dans la décision du juge Abbott dans l'arrêt British Columbia Electric Railway Company Limited v. M.N.R., [1958] S.C.R. 133, 58 D.T.C. 1022, aux pages 1027 et 1028 (D.T.C.) :

 

[traduction]

 

Le présent appel soulève deux questions : (1) la dépense de 220 000 $ de l'appelante a-t-elle été faite en vue de gagner ou produire un revenu?, (2) si elle a été faite à cette fin, ce paiement était-il une dépense de revenu admissible ou une dépense en capital?

 

La réponse à ces deux questions dépend de l'interprétation des alinéas 12(1)a) et b) de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.C. 1948, ch. 52, telle que modifiée, qui se lisent comme suit :

 

12.(1)   Dans le calcul du revenu, il n'est opéré aucune déduction à l'égard 

 

a)         D'une mise de fonds ou d'une dépense, sauf dans la mesure où elle a été faite par le contribuable en vue de gagner ou de produire un revenu tiré de biens ou d'une entreprise du contribuable;

 

b)         D'une mise de fonds, d'une perte ou d'un remplacement de capital, d'un paiement à compte de capital ou d'une allocation à l'égard de dépréciation, désuétude ou d'épuisement sauf ce qui est expressément permis par la présente Partie;

 

(Je souligne.)

 

Les alinéas 12(1)a) et b) ont d'abord été adoptés en 1948 et ils remplaçaient les alinéas 6a) et b) de la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu, qui se lisaient comme suit :

 

Art. 6.  Déduction non admise.

 

6(1) Dans le calcul de la somme des profits ou gains à imposer, il ne doit pas être accordé de déduction en ce qui concerne

 

a)         Dépenses non nécessaires pour produire revenu. — Les déboursés ou dépenses qui ne sont pas totalement, exclusivement et nécessairement faites en vue de la production du revenu;

 

b)         Déboursés ou perte de capital, etc. — Tout déboursé, perte ou remplacement de capital ou tout paiement à compte du capital ou toute dépréciation, diminution ou mise au rancart, sauf dispositions expressément contraires de la présente loi;

 

(Je souligne.)

 

À mon avis, lorsque l'on examine des décisions fondées sur les anciennes dispositions, on devrait tenir compte des dispositions moins rigoureuses de la nouvelle loi.

 

Puisque le principal objectif de toute entreprise est présumément de réaliser un bénéfice, toute dépense faite « en vue de gagner ou de produire un revenu » est visée par les dispositions de l'alinéa 12(1)a), qu'elle soit traitée comme une dépense de revenu ou une dépense en capital.

 

Une fois qu'il est établi qu'une dépense donnée a été effectuée pour gagner un revenu, il faut, aux fins du calcul de l'obligation fiscale, déterminer ensuite si cette dépense représente une dépense de revenu ou une dépense en capital. Le principe qui sous-tend une telle distinction est évidemment celui selon lequel, comme le revenu est déterminé sur une base annuelle aux fins de l'impôt, une dépense de revenu est une dépense engagée pour gagner le revenu de l'année dans laquelle cette dépense a été engagée et doit pouvoir être déduite du revenu brut de cette année-là. La plupart des dépenses en capital, par contre, peuvent être amorties sur un certain nombre d'années, selon que l'élément d'actif à l'égard duquel la dépense a été effectuée relève ou non du règlement en matière de déduction pour amortissement pris en vertu de l'alinéa 11(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

 

[43]    L'approche adoptée par le juge Abbott a traditionnellement été suivie. On se pose d'abord la question : « Le versement a-t-il été effectué en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien? » Si la réponse est négative, la question de savoir s'il était à titre de capital n'est pas pertinente. Si la réponse est positive, on doit déterminer si l'alinéa 18(1)b) s'applique. Si la déduction du versement n'est pas interdite en vertu de l'alinéa 18(1)a) mais est néanmoins visée par l'alinéa 18(1)b), on doit alors déterminer si l'une des dispositions précises de la Loi de l'impôt sur le revenu qui permettent les dépenses en immobilisations dans le cadre d'une entreprise (comme les alinéas du paragraphe 20(1)) s'applique. En fait, le paragraphe 20(1) s'applique même si la dépense est visée tant par l'alinéa 18(1)a) que par l'alinéa 18(1)b).

 

[44]    Le principe fondamental sur lequel se fonde la cause de l'intimée n'est pas que les versements étaient à titre de capital, mais plutôt qu'ils avaient été effectués en vue d'augmenter la valeur des actions d'ICEC et que, par conséquent, ils n'étaient aucunement liés aux activités productives de revenu d'ICEC. En d'autres termes, les activités d'ARC à l'égard desquelles les versements ont été effectués étaient analogues à un dividende ou à un avantage conféré à un actionnaire.

 

[45]    L'une des principales préoccupations d'un conseil d'administration et de la haute direction d'une société ouverte est de prendre des mesures afin d'augmenter le cours des actions. Pourtant, à ma connaissance, on n'a jamais soutenu que le salaire du chef de la direction constitue un avantage non déductible conféré à un actionnaire tout simplement parce qu'il consacre la plupart de son temps au travail à trouver des façons d'augmenter le cours des actions.

 

[46]    Considérons, de façon réaliste, ce qui s'est produit en l'espèce. ICEC traversait une période difficile. Les réserves étaient en baisse. Les revenus et les flux de trésorerie diminuaient, et cela nuisait à sa capacité d'effectuer de l'exploration, ce qui aurait pu augmenter ses réserves. La banque avait diminué la marge de crédit. Il a fallu vendre des éléments d'actif afin de réduire le montant du prêt et, par conséquent, la capacité de la société de produire des revenus s'en trouvait diminuée. La société risquait de manquer à certains de ses engagements envers ses créanciers à long terme. Les actionnaires avaient démontré leur mécontentement à l'égard du rendement de la société. Par conséquent, le conseil devait prendre des mesures. Il a considéré des solutions de rechange et a finalement décidé de retenir les services d'ARC et de lui donner un mandat large afin d'évaluer toutes les solutions possibles. C'est ce qu'elle a fait, et la meilleure solution était de fusionner avec Morgan. La Couronne a considéré les honoraires versés à ARC comme une sorte de commission de vente ayant avantagé uniquement les actionnaires — des frais pour avoir augmenté le prix des actions. De toute évidence, ce n'était ni l'objectif ni le résultat. Il n'y a aucune preuve que le prix reçu par les actionnaires lors de l'échange d'actions avec Morgan (1,975 action de Morgan pour une action de Colin) a été amélioré par un acte quelconque posé par ARC, ou que ARC ait même tenté d'obtenir un prix plus élevé. Les actionnaires ont eu ce qu'ils ont eu. La tâche d'ARC consistait à trouver un bon candidat pour la fusion. Dans son argumentation écrite, l'avocat de l'intimée a posé la question de savoir [TRADUCTION] « Quel était l'effet escompté du versement d'un point de vue pratique et commercial? » (le juge Dixon dans l'arrêt Hallstroms Pty. Ltd. v. Federal Commissioner of Taxation (1946), 72 C.L.R. 634, à la page 648). Il a été fait dans le but d'améliorer la capacité de l'appelante de gagner des revenus en fusionnant ses ressources avec celles d'une autre entité. Si la valeur du placement des actionnaires a augmentée du fait qu'ils détenaient des actions dans une société plus grande et plus solide, cela découlait d'une amélioration de la capacité de l'appelante de gagner des revenus à l'intérieur d'une société fusionnée plus grande. De toute évidence, l'augmentation des revenus augmente le prix des actions et la valeur du placement des actionnaires. Le fait de dire, par contre, qu'une dépense effectuée en vue d'améliorer la capacité d'une société de gagner des revenus constitue en quelque sorte un dividende déguisé ou un avantage conféré à un actionnaire parce qu'elle pourrait augmenter la valeur des actions et que, par conséquent, elle n'est pas déductible en vertu de l'alinéa 18(1)a) me semble équivaloir à mettre la charrue devant les bœufs.

 

[47]    De toute évidence, les services rendus par ARC avaient pour but d'augmenter les revenus de l'appelante et les honoraires versés ont été engagés en vue de tirer un revenu de l'entreprise de l'appelante. Par conséquent, l'hypothèse factuelle et juridique principale sur laquelle se fonde la cause de la Couronne a été démolie.

 

[48]    Je traiterai brièvement de l'argument selon lequel le paiement était à titre de capital, même si je suis d'avis que la Cour n'a pas été correctement saisie de cette question. Il n'est pas nécessaire de passer en revue les innombrables arrêts. Ils sont bien connus et ont été longuement examinés dans l'arrêt Johns‑Manville Canada Inc. c. La Reine, [1985] 2 R.C.S. 46. En l'espèce, aucune immobilisation n'a été acquise, aucun avantage durable n'a été créé et aucune immobilisation n'a été conservée.

 

[49]    Si j'étais déterminé à trouver une excuse pour rejeter l'appel, je pourrais sans doute tenter d'établir un lien entre la présente affaire et l'une des multiples expressions bien choisies qui ont été utilisées afin de décrire les dépenses en capital. Le juge Estey, dans l'arrêt Johns‑Manville, précité, à la page 59, et le vicomte Radcliffe, dans l'arrêt Commissioner of Taxes v. Nchanga Consolidated Copper Mines Ltd., [1964] A.C. 948, à la page 959 (cité par le juge Estey), ont mis en garde à l'encontre d'une interprétation de telles expressions comme étant définitives plutôt que descriptives. La tâche qui incombe à la Cour est de rendre une décision fondée sur les faits qui ont été présentés en preuve, en tenant compte des besoins commerciaux qui ont rendu le versement nécessaire et des objectifs commerciaux qu'il devait servir.

 

[50]    Comme l'a affirmé le juge Fauteux dans l'arrêt M.N.R. v. Algoma Central Railway, [1968] R.C.S. 447, 68 D.T.C. 5096, à la page 5097 :

 

[traduction]

 

Le législateur n'a pas défini les expressions « dépenses en immobilisations » ou « paiement à titre de capital ». Comme il n'y a pas de critère légal, l'application ou la non-application de ces expressions à des dépenses particulières doit dépendre des faits propres à chaque affaire. Nous ne pensons pas qu'un seul et unique critère s'applique aux fins de cette détermination et souscrivons au point de vue exprimé par lord Pearce dans une décision récente du Conseil privé, B.P. Australia Ltd. v. Commissioner of Taxation of the Commonwealth of Australia, [1966] A.C. 224. Au sujet de la question de savoir si une dépense était une dépense en immobilisations ou une dépense de revenu, il disait, à la page 264 :

 

La solution du problème ne réside pas dans l'application d'un critère ou d'une définition rigides. Elle découle des nombreux aspects de l'ensemble des circonstances, dont certains amènent à conclure dans un sens, et certaines, dans un autre. Il se peut qu'un facteur ressorte de façon tellement évidente qu'il domine d'autres indices plus vagues qui indiquent une solution contraire. C'est une appréciation conforme au bon sens de tous les éléments directeurs qui permettra d'obtenir la réponse finale.

 

[51]    L'avocat de l'intimée a appelé Kay Holgate, une comptable agréée et une spécialiste en juricomptabilité, à titre de témoin expert. Voici ses conclusions :

 

[traduction]

 

2.1 Honoraires relatifs à la première étape

 

À notre avis, le traitement approprié, en vertu des principes comptables généralement reconnus, des honoraires relatifs à la première étape, selon les circonstances et les faits particuliers, est le suivant :

 

1.         si le principe de la « continuité de l'exploitation » est appliqué à ICEC, les services de la première étape, qui consistaient en une étude de la valeur et des solutions de rechange stratégiques, correspondraient à une planification périodique à long terme et, par conséquent, les honoraires relatifs à la première étape seraient considérés comme une dépense d'ICEC;

 

2.         si le principe de la « continuité de l'exploitation » ne s'appliquait pas à l'égard d'ICEC et que les services offerts faisaient partie des responsabilités des dirigeants et des administrateurs d'ICEC, les honoraires relatifs à la première étape seraient considérés comme une dépense d'ICEC;

 

3.         si le principe de la « continuité de l'exploitation » ne s'appliquait pas à ICEC et que les services fournis ne faisaient pas partie des responsabilités des administrateurs et des dirigeants, les honoraires relatifs à la première étape ne seraient pas une opération liée à l'entité comptable d'ICEC. Dans ce cas, ICEC agirait à titre de mandataire pour le compte des actionnaires et les honoraires relatifs à la première étape seraient considérés comme une distribution prélevée sur les capitaux propres d'ICEC.

 

Selon notre analyse et notre compréhension des faits et des circonstances de l'espèce, à notre avis, les honoraires relatifs à la première étape devraient être considérés comme une dépense d'ICEC.

 

2.2 Honoraires relatifs à la deuxième étape

 

À notre avis, l'opération qui a donné lieu aux honoraires relatifs à la deuxième étape n'était pas liée aux activités usuelles de l'entreprise de l'entité comptable d'ICEC. De plus, puisque ICEC n'était pas directement impliquée dans l'échange d'actions sous-jacent, les honoraires y afférents n'étaient pas liés à la structure du capital ni à la structure financière d'ICEC. Par conséquent, ICEC agissait apparemment à titre de mandataire dans le cadre du contrat avec ARC et le traitement comptable approprié des honoraires relatifs à la deuxième étape, conformément aux PCGR, dépend des circonstances et des faits particuliers, comme suit :

 

1.         si ICEC agissait au nom des actionnaires d'ICEC, les honoraires relatifs à la deuxième étape seraient traités comme une distribution prélevée sur les capitaux propres pour le compte des actionnaires;

 

2.         si ICEC agissait pour le compte de Morgan Hydrocarbon Inc. (« MHI »), les honoraires relatifs à la deuxième étape seraient traités comme des frais reportés par ICEC. Lorsque l'acquisition a été conclue, les frais reportés faisaient alors partie du coût d'achat d'ICEC dans les registres comptables de MHI.

 

Quoi qu'il en soit, à notre avis, les honoraires relatifs à la deuxième étape sont liés à l'échange d'actions entre MHI et les actionnaires d'ICEC, ils ne constituent pas un coût lié aux activités productives de revenu ordinaires d'ICEC et, par conséquent, ils ne constituent pas une dépense d'ICEC.

 

[52]    Évidemment, je ne remets pas en question la compétence de Mme Holgate à titre de comptable agréée. Elle s'exprimait bien et était un témoin compétent. Toutefois, en toute déférence, je ne crois pas que les principes comptables généralement reconnus aient une quelconque incidence sur la question à trancher en l'espèce. D'une part, ni le fait présumé qu'ICEC agissait pour le compte de ses actionnaires, ni l'hypothèse subsidiaire qu'elle agissait pour le compte de Morgan, ne sont appuyés par la preuve. Le conseil d'administration agissait dans l'intérêt de l'appelante. Si cela a accordé un avantage quelconque aux actionnaires ou à Morgan, l'appelante ne devient pas pour autant leur mandataire. Madame Holgate a été incapable de citer un exemple où le traitement comptable qu'elle défendait, fondé sur un mandat hypothétique entre la société et ses actionnaires ou un acquéreur potentiel, avait été utilisé. Il existe une différence, soit dit en passant, entre les pratiques qui sont généralement reconnues par les comptables et ce qui pourrait être préférable en théorie.

 

[53]    Comme il a été souligné dans l'arrêt Ikea Limited c. La Reine, C.C.I., n92‑1804(IT)G, 31 décembre 1993, 94 D.T.C. 1112, conf. par C.A.F., no A‑4‑94, 19 septembre 1996, 96 D.T.C. 6526, conf. par [1998] 1 R.C.S. 196, 98 D.T.C. 6092, les principes comptables généralement reconnus sont d'une utilité limitée pour déterminer ce qui constitue un revenu aux fins de la Loi de l'impôt sur le revenu. La question de savoir si une dépense constitue ou non une dépense d'un contribuable particulier est une question qui doit être tranchée par la Cour si elle est pertinente, mais la question de savoir si elle est déductible est une question de droit.

 

[54]    Le président Jackett (tel était alors son titre) a affirmé ce qui suit dans l'arrêt Associated Investors of Canada Ltd. v. M.N.R., 67 D.T.C. 5096, à la page 5099 :

 

[traduction]

 

Les bénéfices d'une entreprise, sous réserve de toute directive spéciale de la loi, doivent être déterminés conformément aux principes commerciaux reconnus (Canadian General Electric Co. Ltd. v. Minister of National Revenue, [1962] R.C.S. 3 [61 D.T.C. 1300], le juge Martland à la page 12). La question est finalement « une question de droit qu'il appartient au tribunal de trancher ». On doit y répondre en tenant compte des faits de l'espèce et l'importance qui doit être accordée à une situation particulière doit dépendre des considérations pratiques. Étant donné qu'il s'agit d'une question de droit, le témoignage d'experts n'est pas concluant (voir Oxford Motors Ltd. v. Minister of National Revenue, [1959] R.C.S. 548 [59 D.T.C. 1119], le juge Abbott, à la page 553, et Strick v. Regent Oil Co. Ltd., [1965] 3 W.L.R. 636, le juge Reid, aux pages 645 et 646. Voir également Minister of National Revenue v. Anaconda American Brass Ltd., [1956] A.C. 85, à la page 102 [55 D.T.C. 1220]).

 

[55]    Par conséquent, j'ai conclu que les honoraires versés à ARC l'ont été en vue de tirer un revenu de l'entreprise de l'appelante et, si la Cour avait été correctement saisie de la question du capital, qu'ils ne sont pas des dépenses à titre de capital.

 

[56]    Je devrais mentionner brièvement un argument subsidiaire présenté par l'appelante selon lequel même si le paiement était visé par les alinéas 18(1)a) et 18(1)b), il peut néanmoins être déduit en vertu de l'alinéa 20(1)e) de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui porte que « malgré les alinéas 18(1)a), b) et h), sont déductibles dans le calcul du revenu tiré par un contribuable d'une entreprise ou d'un bien pour une année d'imposition […]

 

e)         la partie d'une dépense qui n'est pas déductible par ailleurs dans le calcul du revenu du contribuable et qui est engagée au cours de l'année ou d'une année d'imposition antérieure :

 

(i)         soit dans le cadre d'une émission ou vente d'unités du contribuable, si celui-ci est une fiducie d'investissement à participation unitaire, ou de participations dans une société de personnes ou un syndicat par cette société de personnes ou ce syndicat, ou encore d'actions du capital-actions du contribuable [...] »

 

[57]    La dépense était-elle engagée « dans le cadre d'une émission ou vente […] d'actions du capital-actions du contribuable »?

 

[58]    Le terme « émission » sous‑entend une émission par la société de ses propres actions. Évidemment, ce n'est pas ce qui s'est produit ici. La vente en l'espèce n'était pas effectuée par la société, mais plutôt par ses actionnaires. Il est possible que même si le paiement est visé par les alinéas 18(1)a) et b), il pourrait être visé de manière générale par l'objet de l'alinéa 20(1)e). Cependant, la question est de savoir si les termes « dans le cadre d'une [...] vente […] d'actions du capital‑actions du contribuable […] » doivent être limités à la vente par la société de ses propres actions.

 

[59]    Il existe des arguments valables à l'appui des deux positions. Il peut être argué que la juxtaposition des termes « vente » et « émission » signifie la vente par la société de ses propres actions et non la vente par les actionnaires de leurs actions. Il peut également être argué que « émission » pris séparément est suffisamment large pour viser la vente par une société de ses propres actions et qu'il n'était pas nécessaire d'ajouter le mot « vente » si l'on ne voulait viser que la vente par une société. Par conséquent, le terme « vente » doit viser autre chose, et la seule chose qu'il peut viser est la vente par les actionnaires dans le cadre d'une opération commerciale comme celle en l'espèce, où les intérêts de la société sont touchés. Je trouve cet argument attrayant, non seulement parce qu'il est logique d'un point de vue commercial, mais aussi parce que l'interprétation plus restrictive exige que l'on lise dans la loi des mots qui n'y sont pas. Cependant, étant donné ma conclusion à l'égard de l'argument principal invoqué en l'espèce, je n'exprime aucune opinion décisive à cet égard.

 

[60]    Par conséquent, l'appel est admis, avec dépens, et la cotisation à l'égard de l'année d'imposition 1996 est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant compte du fait que les honoraires de 1 223 598 $ (ainsi que la TPS y afférente) versés à ARC Financial Corporation peuvent être déduits lors du calcul du revenu de l'appelante.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de novembre 2002.

 

 

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de septembre 2004.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 

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