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Dossier : 2001-3906(IT)G

ENTRE :

ANTONIO SANTORO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel interjeté dans l'affaire

Architectural Precast Systems Inc.(2001-3907(IT)G)

le 19 juillet 2004 à Toronto (Ontario)

Devant : L'honorable Gerald J. Rip

Comparutions :

Avocats de l'appelant :

Mes Cosimo Fiorenza et Natasha Miklaucic

Avocat de l'intimée :

Me Franco Calabrese

JUGEMENT

          L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard de l'année d'imposition 1995 est rejeté, avec dépens.


Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de novembre 2004.

« Gerald J. Rip »

Juge Rip

Traduction certifiée conforme

ce 14ejour de juillet 2005.

Sara Tasset


Dossier : 2001-3907(IT)G

ENTRE :

ARCHITECTURAL PRECAST SYSTEMS INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel interjeté dans l'affaire

Antonio Santoro (2001-3906(IT)G) le 19 juillet 2004 à Toronto (Ontario)

Devant : L'honorable Gerald J. Rip

Comparutions :

Avocats de l'appelant :

Mes Casimo Fiorenza et Natasha Miklaucic

Avocat de l'intimée :

Me Franco Calabrese

JUGEMENT

          L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard de l'année d'imposition 1995 est rejeté, avec dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de novembre 2004.

« Gerald J. Rip »

Juge Rip

Traduction certifiée conforme

ce 14 e jour de juillet 2005.

Sara Tasset


Référence : 2004CCI764

Date : 20041119

Dossier : 2001-3906(IT)G

ENTRE :

ANTONIO SANTORO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossier : 2001-3907(IT)G

ET ENTRE :

ARCHITECTURAL PRECAST SYSTEMS INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Rip

Points en litige

[1]      L'appelant Antonio Santoro est l'actionnaire unique de l'appelante Architectural Precast Systems Inc. ( « APS » ). Les appelants ont contesté leurs cotisations respectives à l'égard de leur année d'imposition 1995. Les points en litige dans le présent appel tournent autour de deux acquisitions possibles d'actions de HLE Capital Corp. ( « HLE » ). Il faut tout d'abord déterminer s'il y a eu une ou deux acquisitions d'actions de HLE par un des appelants puis décider lequel des appelants a fait l'acquisition des actions et enfin établir si les pertes subies à la disposition des actions sont imputables au revenu ou au capital[1]. Si je parviens à la conclusion que c'est M. Santoro qui a acquis les actions de HLE, alors je dois aussi déterminer si un montant doit être inclus dans son revenu à titre d'avantage à un actionnaire visé au paragraphe 15(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Les appels ont été entendus sur preuve commune.

[2]      Les appelants prétendent qu'APS a acquis des actions de HLE en janvier 1995 pour la somme de 125 000 $ et en février 1995 pour la somme de 150 000 $. Ils affirment aussi que les 125 000 $ provenaient d'argent emprunté par APS et que les 150 000 $ étaient tirés des propres fonds d'APS dans le calcul de son revenu. APS a déduit une perte de 278 000 $ découlant de la disposition des actions et les intérêts versés sur les fonds empruntés en 1995. La Couronne nie que l'un ou l'autre des appelants ait fait l'acquisition d'actions de HLE pour 125 000 $ mais concède que M. Santoro a personnellement acheté des actions de HLE pour la somme de 150 000 $ en février 1995.

Faits

[3]      Avant 1995, M. Santoro travaillait comme vice-président de l'entreprise E & M Precast Ltd. jusqu'à ce qu'elle cesse ses activités en 1994. M. Santoro a constitué APS en société en avril 1994. Il a commencé à faire l'acquisition d'actions de sociétés ouvertes en février 1993 lorsqu'il a été présenté à M. Eric West, représentant de Scotia McLeod.

[4]      M. Santoro se rappelle que ses premiers placements étaient « petits » , la source de ses fonds étant son salaire chez E & M Precast. Toutefois, entre février 1993 et 1995, il s'est lancé activement dans l'achat et la vente d'actions. Dans sa déclaration de revenus de 1995, par exemple, il a mentionné plus de 45 dispositions d'actions, toutes imputées au capital. Il se fiait à M. West, qui lui recommandait des placements à court terme et des REER à long terme. Il a effectué tous ses placements par l'entremise de M. West.

[5]      À toutes les dates pertinentes, APS exerçait des activités de construction de systèmes de murs extérieurs de bâtiments.

[6]      À la fin de l'été 1995, un dénommé Pino Guido a proposé à M. Santoro d'acheter des actions de HLE. M. Guido avait travaillé avec M. Santoro chez E & M Precast. Ils avaient été présentés l'un à l'autre par Danny Delmedico, un des fils du principal actionnaire d'E & M Precast. M. Guido était vice-président du McCauley Club de la Sun Life Insurance Company. M. Santoro a précisé que le McCauley Club était formé des gens qui réalisaient un gros volume de ventes à la Sun Life.

[7]      M. Guido a fait valoir à M. Santoro que le titre de HLE se négociait hors bourse et que l'entreprise tentait de s'inscrire à la cote de la NASDAQ, à New York. M. Santoro serait en mesure d'acheter des actions non émises à un prix variant entre 10 et 20 cents par action. HLE emploierait les fonds pour acquérir des technologies. HLE [TRADUCTION] « avait beaucoup de relations » , elle obtiendrait de bons résultats et ses titres [TRADUCTION] « étaient censés bouger énormément d'ici deux ans » . M. Guido a précisé que le cours des actions pourrait atteindre 2,00 $ dans un délai relativement court. Il faisait la promotion de ces titres auprès d'entreprises, aux dires de M. Santoro, tentant de vendre des blocs d'actions de HLE pour 150 000 $ chacun. HLE recherchait l'investissement d'entreprises, M. Guido aurait dit à M. Santoro, pour obtenir une « stabilité » . D'après M. Santoro, M. Guido savait qu'APS était profitable et aurait de l'argent à placer.

[8]      M. Santoro a expliqué dans son témoignage que, selon M. Guido, HLE avait fait l'achat d'une technologie liée aux puissances de crête d'un laser et qu'elle faisait affaire avec les forces militaires américaines.

[9]      Lorsque M. Santoro à demandé pour la première fois à M. West s'il avait entendu parler de HLE, M. West lui a répondu qu'il ne connaissait pas l'entreprise. M. West a par la suite découvert que HLE possédait un siège social à Montréal et qu'elle avait ouvert un bureau à Toronto à la fin de 1994. M. Santoro a raconté que M. Guido l'avait présenté au président de HLE en novembre ou en décembre 1994 aux bureaux de HLE, au 48e étage, selon ses souvenirs, de BCE Place, à Toronto. M. Santoro a expliqué que le président de HLE, M. Joe Perolini, lui avait dit que HLE avait payé un an d'avance de loyer pour 10 000 pieds carrés d'espace à BCE Place. M. Perolini avait fait valoir que HLE était une bonne entreprise avec de bonnes perspectives d'avenir. Le lendemain, M. West a visité M. Perolini et, selon M. Santoro, il a eu [TRADUCTION] « le sentiment que quelque chose se préparait... »

[10]     M. Santoro n'a consulté aucun contrat de HLE ni examiné les autres biens de l'entreprise. HLE lui a quand même fait part de ses plans et expliqué ce qu'était la technologie liée aux puissances de crête d'un laser. M. Santoro a parlé à des gens avec qui HLE faisait affaire. Parmi ces gens, a-t-il précisé, il y avait MM. Guido, Perolini, Delmedico et West.

[11]     Durant son interrogatoire préalable, M. Santoro a déclaré qu'il faisait confiance à M. Guido parce qu'il lui avait vendu son assurance-vie : [TRADUCTION] « il connaissait toutes mes affaires bancaires et j'ai fait des placements avec la Sunlife ... je lui faisais confiance. »

Paiement fait en janvier 1995

[12]     M. Santoro a déclaré qu'APS avait investi une première fois dans HLE en janvier 1995 lorsqu'elle a fait l'acquisition d'un bloc d'actions pour la somme de 125 000 $.

[13]     D'après M. Santoro, M. Guido l'aurait informé qu'un bloc d'actions de HLE était disponible chez les courtiers Thomson & Kernaghan et qu'il pourrait l'acheter et le revendre immédiatement; il ne serait pas tenu de détenir les actions pendant un délai minimum. Cependant, dans son interrogatoire préalable, M. Santoro a déclaré que les actions faisaient partie d'un placement privé et qu'il ne pouvait les vendre avant trois à six mois.

[14]     APS n'avait pas les fonds pour acheter les actions de HLE. En janvier 1995, APS commençait à avoir des liquidités, mais M. Santoro a précisé qu'il n'avait pas de marge de manoeuvre à cause de certains projets en cours, alors il ne pouvait retirer de fonds d'APS. Par conséquent, a-t-il expliqué, il a demandé à deux amis d'investir et de l'aider à investir.

[15]     Aux paragraphes 4. b. de leurs avis d'appel, les appelants affirment ce qui suit :

[TRADUCTION]

... APS a conclu deux arrangements avec des partenaires d'affaires, suivant lesquels les partenaires faisaient l'acquisition d'actions de HLE - pour 100 000 $ dans un cas et 25 000 $ dans l'autre. Les partenaires ont accepté de négocier ces actions uniquement en suivant les conseils d'APS. APS a convenu de leur garantir un rendement de 30 % pour leur placement initial. En contrepartie de cette garantie, APS s'arrogeait toute plus-value des investissements dans HLE en sus du rendement garanti. D'après l'historique de négociation du titre de HLE, il était plus que raisonnable pour APS de s'attendre à tirer un profit de cette entente.

[16]     Au procès, M. Santoro a expliqué qu'il avait emprunté de l'argent auprès de Rocco Liscio, un ami de longue date qui était associé dans une firme de consultants en génie et avec qui il avait travaillé chez E & M Precast, et de Vince Persico, le directeur général d'APS[2]. Il leur a dit qu'en contrepartie de leur prêt, il leur garantissait qu'ils seraient remboursés dans un délai de six mois plus 30 % et qu'APS leur verserait l'argent. Durant l'interrogatoire préalable. M. Santoro a précisé que le prêt était pour trois à six mois. Il était persuadé que la valeur des actions augmenterait, de sorte qu'il ne s'inquiétait pas vraiment du taux d'intérêt.

[17]     Les liquidités d'APS garantissaient les prêts de MM. Liscio et Persico, peu importe la valeur réelle du titre, a affirmé M. Santoro avec insistance. M. Persico lui a prêté 25 000 $ et M. Liscio, 100 000 $. Le chèque de M. Liscio daté du 27 janvier 1995 est libellé à l'intention de Thomson & Kernaghan. [TRADUCTION] « Nous avons remis l'argent à Pino, et c'est passé par Thomson & Kernaghan. » (Il n'y a aucune preuve de la façon dont M. Persico a avancé les 25 000 $ ni de la date de cette avance.) M. Santoro croyait qu'APS achetait des actions de HLE en janvier à un prix allant de 10 à 20 cents par action et croit que, plus tard, le prix d'achat a été établi à 20 cents l'action. Il prévoyait qu'APS revendrait les actions dans un délai de six à huit mois. On lui avait affirmé que le cours des actions pouvait atteindre les 9,00 $. Il semble que seulement 125 000 $ d'actions ont été achetées, indépendamment de l'affirmation de M. Guido indiquant qu'un bloc coûterait 150 000 $. L'avocat de l'intimée a demandé, puisqu'il s'agissait apparemment d'un placement privé et que seule une partie du bloc d'actions a été acquise, si M. Santoro avait contrevenu ou non à l'alinéa 72(1)d) de la Loi sur les valeurs mobilières de l'Ontario[3].

[18]     Les accords de prêt conclus avec MM. Liscio et Persico n'ont pas été mis par écrit puisque, comme l'a expliqué M. Santoro, [TRADUCTION] « il s'agissait d'amis que je connaissais depuis longtemps, et je crois qu'ils me faisaient confiance » . Il a rappelé son époque chez E & M Precast, où des contrats étaient conclus avec une poignée de mains.

[19]     Dans sa déclaration de revenus de 1995, M. Santoro a inscrit un revenu personnel de 70 682 $. Il ne croyait pas que les prêts seraient un engagement financier important, comme l'a laissé entendre l'avocat de l'intimée, car en 1995, croyait M. Santoro, APS avait connu un chiffre d'affaires brut oscillant entre 6 000 000 $ et 9 000 000 $ et qui avait atteint, en 1996, à sa deuxième année d'existence, entre 12 000 000 $ et 15 000 000 $. De fait, le chiffre d'affaires brut est ressorti à 2 389 611 $ en 1994 et à 10 780 385 $ en 1995. APS a déclaré un bénéfice net en 1995 de 481 506 $, déduction faite du montant de 278 000 $, qui est en litige, à titre de perte sur des placements à court terme. L'exercice financier d'APS prend fin le 31 août.

[20]     M. Santoro a confirmé que les garanties mentionnées au paragraphe 4 b. des avis d'appel avaient été données par APS à ses partenaires, MM. Liscio et Persico. APS effectuait le placement et MM. Liscio et Persico avaient reçu chacun la garantie d'un rendement de 30 %. M. Santoro a insisté pour dire qu'APS avait fait l'acquisition des actions, pas MM. Liscio et Persico, malgré ce que laisse entendre le paragraphe 4 b. Il a déclaré que MM. Liscio et Persico n'avaient pas investi en bourse et qu'ils ne savaient pas qu'il était sur le point d'acheter des actions de HLE Capital Corp.

[21]     L'avocat de l'intimée a demandé à M. Santoro pourquoi il était prêt à verser à MM. Liscio et Persico des intérêts de 60 %, puisque les prêts étaient pour six mois, alors qu'il aurait pu obtenir un taux d'intérêt beaucoup moins élevé chez Scotia McLeod ou à une banque à charte. Il a éprouvé des difficultés à répondre à la question, affirmant d'abord qu'APS avait emprunté l'argent et que les prêteurs avaient confiance qu'APS les rembourserait dans six mois, pour répondre finalement qu'il aurait peut-être pu négocier un emprunt à la banque mais qu'APS n'avait pas de marge de crédit et qu'il n'avait donc même pas pensé à se tourner vers la banque.

[22]     M. Santoro a déclaré qu'il était toujours en contact avec MM. Liscio et Persico mais qu'il ne les ferait pas témoigner.

[23]     À l'été 1995, M. Liscio a commencé à demander le remboursement de son prêt à M. Santoro. Ce dernier lui a demandé de patienter quelques mois, mais à la fin de l'année, M. Liscio avait besoin de son argent. L'entreprise entamait sa troisième année d'exploitation en septembre et avait besoin de toutes ses ressources pour ses activités. Elle ne pouvait rembourser le prêt. Le 20 décembre 1995, M. Santoro a remis à M. Liscio un chèque de 127 800 $ tiré sur son compte personnel Powerline chez Canada Trust. M. Santoro croit que l'intérêt sur le compte Powerline se chiffrait à 1 ½ ou 2 % au-dessus du taux préférentiel. Il a déclaré dans son témoignage que l'argent a été retiré de son compte personnel plutôt que de celui d'APS parce qu'il ne voulait pas affaiblir la position d'APS[4].

[24]     En date du 31 août 1995, une écriture de redressement de 128 000 $[5] a été effectuée par les experts-comptables de HLE entre le compte de prêts de l'actionnaire et le compte de placements à court terme d'APS. Le redressement visait supposément à comptabiliser des montants supplémentaires au titre des placements à court terme payés directement par M. Santoro au moyen d'un chèque personnel. M. Santoro a obtenu un crédit de 128 000 $ sur son compte de prêt, paiement qui ne figurait pas auparavant dans les livres d'APS.

[25]     Lorsqu'elle a produit sa déclaration de revenus de 1995, APS a déclaré une perte de 278 000 $ imputable au revenu. Cette perte comprenait les 128 000 $ initialement portés au crédit du compte de prêts de M. Santoro puis affectés au compte de placements à court terme. (La différence de 150 000 $ est examinée plus loin dans les présents motifs.) Le ministre a ajouté la somme de 278 000 $ au revenu de M. Santoro en 1995 conformément au paragraphe 15(1) de la Loi parce qu'APS avait conféré un avantage de 278 000 $ à M. Santoro en sa qualité d'actionnaire d'APS.

Opération de février 1995

[26]     Un mois plus tard, en février 1995, un deuxième bloc d'actions de HLE a été acquis pour la somme de 150 000 $. Cette fois, parce qu'APS disposait de liquidités provenant de projets terminés, a expliqué M. Santoro, APS a émis à l'intention de HLE,le 28 février 1995, un chèque de 150 000 $ qui a été remis à M. Guido. APS affirme qu'elle a acheté le bloc d'actions de HLE, le ministre prétend que c'est M. Santoro qui a acheté les actions de HLE avec de l'argent prêté par APS.

[27]     Apparemment, lorsqu'APS a émis le chèque de 150 000 $ en février 1995, le comptable externe de l'entreprise, Samuel Stern, avait enjoint au teneur de livres d'APS d'affecter la somme à un compte en lui disant qu'il passerait le tout en revue lorsqu'il préparerait les livres de l'entreprise à la fin de l'exercice. Il semble que M. Stern n'ait pas discuté à ce moment-là de l'utilisation prévue des 150 000 $ avec M. Santoro, l'administrateur d'APS. Le teneur de livres interne de l'entreprise, M. George Sebastien, a affecté le chèque au compte de prêts de l'actionnaire.

[28]     M. Santoro s'est fait demander par son avocat pourquoi il avait acheté des actions de HLE. Il a répondu qu'il souhaitait « renforcer » la position d'APS. [TRADUCTION] « J'avais des contrats en vue et je ne possédais aucune marge de crédit à la banque, alors je voulais m'assurer d'avoir des réserves liquides pour financer des projets plus gros. » M. Santoro a affirmé que M. Perolini ou M. Guido lui avait dit que le premier bloc d'actions pourrait être vendu dans l'année suivant l'achat et le deuxième bloc, un an plus tard.

[29]     Les actions de HLE se négociaient en 1995. Même s'il ne pouvait préciser la période, M. Santoro a expliqué que le cours des actions progressait rapidement, passant à 1,00 $, 2,00 $ et 3,00 $. À 3,00 $, les gestionnaires de fonds de retraite commençaient à acheter, a-t-il précisé. Il a vu le cours grimper à 4,00 $ puis à 4,40 $. Il a dit que la négociation des actions avait été interrompue à plusieurs reprises en raison des augmentations rapides. Cependant, il ne pouvait se souvenir des dates où les opérations sur les actions de HLE ont été suspendues; l'interdiction permanente d'opérations sur valeurs aurait été donnée à l'automne 1995. Il croit que le cours de l'action à cette période s'établissait à 3,30 $. Par la suite, HLE a fermé ses portes, dit-il, et il a perdu son placement.

[30]     M. Santoro s'est plaint qu'il ne pouvait plus joindre M. Perolini et qu'il lui était difficile de parler à M. Guido une fois que le cours des actions de HLE a dépassé 4,00 $. Il a finalement a réussi à joindre M. Guido, qui l'a avisé qu'une société s'apprêtait à prendre le contrôle de HLE. Peu de temps après, le nom de HLE avait été remplacé par « Worldtec Sciences Incorporated » . M. Santoro a informé M. Guido qu'il avait besoin des certificats d'actions représentant les actions de HLE, mais M. Guido lui a répondu qu'il ne pouvait pas l'aider parce que lui-même ne pouvait joindre M. Perolini.

[31]     Les gens qui travaillaient au dossier d'APS étaient M. Stern et Nagli Dawji, un associé. Le cabinet comptable dressait les états financiers aux fins fiscales et bancaires et offrait tous les services comptables dont avait besoin APS. Il rédigeait un rapport de mission d'examen qui nécessitait, selon la description de M. Stern, de recueillir des renseignements, de passer en revue ces renseignements avec le client, d'examiner les dossiers, de comprendre le client et son entreprise puis de réunir tous les faits dans le but de dresser un état raisonnable de l'exercice financier. Il n'y a pas de vérification en tant que telle.

[32]     L'avocat de l'appelant a montré à M. Stern le compte de prêts de l'actionnaire d'APS pour la période terminée le 31 août 1995. Le relevé du compte de prêt a été établi par le teneur de livres d'APS, George Sebastien. Un des éléments figurant sur le relevé daté du 28 février est la somme de 150 000 $ versée à HLE. La mention « out » est inscrite sur le relevé de la main de M. Stern ou de son associé. M. Stern a expliqué qu'en examinant le compte de prêts de l'actionnaire avec son client, il avait demandé quel était le but des 150 000 $ et qu'on lui avait répondu qu'il s'agissait d'un achat pour APS dans une société de placement privé appelée HLE. Il a demandé des précisions sur la nature du placement, se rappelle-t-il, et on lui a répondu qu'il s'agissait d'actions cotées en cents, [TRADUCTION] « que ça serait un placement à court terme. Nous avons conclu que l'écriture n'avait pas été portée au bon compte et nous avons transféré le montant dans les placements à court terme » . D'après ses discussions avec M. Santoro, M. Stern a conclu que les 150 000 $ constituaient un placement de l'entreprise. Une écriture de redressement a été faite en date du 31 août 1995 entre le compte de prêts de l'actionnaire et le compte de placements à court terme pour une somme de 150 000 $ afin de corriger l'écriture erronée du teneur de livres, selon M. Stern. Cette correction, a affirmé M. Stern, [TRADUCTION] « fait partie du travail normal de préparation des états financiers et de nos feuilles de travail » .

[33]     La somme de 150 000 $ n'était qu'une des quelque 30 écritures « erronées » qui ont été réaffectées en 1995, a précisé M. Stern. En interrogatoire principal, M. Stern a déclaré que le nombre d'écritures de redressement dans le dossier était [TRADUCTION] « un peu élevé » , mais qu'il s'agissait de la première année où il examinait le compte. Par la suite, il y a eu un nombre semblable de corrections.

Dépréciation des actions

[34]     À la fin de l'exercice 1995 d'APS, un autre redressement est effectué par les comptables de HLE afin de radier le placement de 278 000 $ dans HLE. M. Stern explique : [TRADUCTION] « Lorsque nous nous sommes rendus compte, à la fin du mois d'août et durant notre examen, en décembre, que les actions ne se négociaient pas ou qu'il y avait peu d'opérations sur ces actions, nous avons conclu que le placement était un échec, et nous l'avons alors radié, aux fins comptables et aux fins fiscales également. » M. Stern a passé en revue les notes prises lors d'une rencontre avec M. Santoro le 13 février 1996. Ces notes comprennent de nombreux redressements concernant l'exercice financier 1995 d'APS. Dans une section des notes, on peut voir ce qui ressemble à [TRADUCTION] « R ® Prêts act. » , inscription suivie du calcul d'une perte sur les placements à court terme totalisant 278 000 $, évaluée comme suit : 150 000 $ + 100 000 $ + 28 000 $. Il y est fait aussi mention de crédits portés à certains comptes qui semblent être un compte de l'actionnaire.

[35]     Les décisions d'apporter des écritures de redressement au compte de prêts de l'actionnaire et de radier le placement de 278 000 $ dans HLE ont été prises en décembre 1995 ou au début de 1996.

[36]     C'est le montant de 278 000 $ que le ministre a inclus dans le revenu de M. Santoro pour 1995 comme avantage conféré à l'actionnaire par APS.

[37]     Dans sa déclaration de revenus de 1995, M. Santoro a inscrit deux dispositions d'actions de HLE[6]; la première était une disposition de 6 000 actions (supposément acquises le 2 janvier 1995) donnant lieu à un gain en capital de 5 679 $. La deuxième était en réalité une passation en charges du coût (216 071,83 $) de 20 700 actions supposément acquises le 1er janvier 1995. M. Santoro a déclaré dans son témoignage qu'il avait personnellement acheté, durant l'année 1995, des actions supplémentaires de HLE par l'entremise de Scotia McLeod, et je présume qu'il s'agissait de ces actions-là. Je ne sais pas non plus à quelles dates ces actions ont effectivement été achetées par M. Santoro. [Les dates d'acquisition du 1er et du 2 janvier 1995 sont les dates inscrites dans sa déclaration de revenus. Puisque le 1er janvier 1995 est un jour férié, je doute que ce soit la date de l'ordre d'achat des actions ou la date de clôture.] Apparemment, M. Santoro avait personnellement commencé à acheter des actions de HLE avant la date où APS affirme l'avoir fait. Les dispositions personnelles ont été imputées au compte de capital.

[38]     Aucun certificat d'action n'a jamais été délivré par HLE à M. Santoro ou à APS. Les appelants n'ont pas été capables d'obtenir le registre des actionnaires de HLE.

[39]     En 1996 ou 1997, selon M. Santoro, la Gendarmerie royale du Canada et la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario ont lancé une enquête sur les activités de HLE. Les agents de la GRC et les responsables de la CVMO ont interviewé M. Santoro. Il a déclaré avoir donné des documents aux enquêteurs, notamment les chèques relatifs au prêt de M. Persico, et ces documents ne lui ont pas été retournés.

Conclusions

[40]     Aucune preuve n'a été présentée au procès afin d'appuyer la thèse des appelants suivant laquelle les cotisations établies par le ministre pour 1995 étaient erronées. J'examinerai chaque opération séparément.

[41]     La première concerne l'acquisition supposée d'actions de HLE en janvier 1995 pour la somme de 125 000 $. Selon les appelants, les actions ont été achetées avec des fonds empruntés. Les faits invoqués au paragraphe 4 b. des avis d'appel des appelants ainsi que le témoignage de M. Santoro au sujet de l'opération de janvier se contredisent. Dans leurs avis d'appel, les appelants mentionnent que MM. Liscio et Persico ont acheté des actions de HLE et accepté de négocier les actions en suivant les conseils d'APS. Il n'est pas question de prêts consentis par MM.    Liscio et Persico à l'un ou l'autre des appelants. Ces deux hommes ont reçu la garantie d'un rendement de 30 % pour leur investissement; APS devait toucher tout ce qui dépassait ces 30 %. Dans son témoignage, cependant, M. Santoro a déclaré qu'APS avait acheté les actions de HLE pour la somme de 125 000 $ avec de l'argent emprunté à MM. Liscio et Persico. Il a également précisé que les deux hommes ne savaient pas à quel placement leurs fonds étaient destinés.

[42]     En outre, au paragraphe 4 b. des avis d'appel, les appelants font valoir que, d'après l'historique de négociation des titres de HLE, [TRADUCTION] « il était plus que raisonnable pour APS de s'attendre à tirer un profit de cette entente » . Les appelants n'ont présenté aucune preuve de l'historique de négociation des titres de HLE avant janvier 1995.

[43]     Selon les auteurs Williston et Rolls[7], le rôle des actes de plaidoirie se divise en quatre :

                   [TRADUCTION]

1.          Définir avec clarté et précision la question qui donne lieu à un litige entre les parties.

2.          Prévenir honnêtement la partie adverse des arguments qui seront invoqués contre elle, afin qu'elle puisse faire porter sa preuve sur la question controversée. Un défendeur est en droit de savoir ce que le demandeur affirme contre lui. Le demandeur est en droit de connaître la nature de la défense qui lui sera opposée.

3.          Aider la cour à déterminer la véracité des allégations faites par les parties en litige.

4.          Constituer un dossier des points en litige soulevés dans la cause, de manière à prévenir de futurs procès sur les questions sur lesquelles on aura statué.

[44]     Les actes de plaidoirie visent donc à informer les parties de la preuve qu'elles doivent réfuter au procès. Chacune énonce les faits qui sous-tendent sa thèse dans un acte de plaidoirie de manière à ce que sa preuve soit bien définie et que les éléments de preuve pertinents puissent être présentés. Il n'est pas loisible au juge de première instance de se prononcer sur un point s'il n'a pas été soulevé dans un acte de plaidoirie et qu'aucune preuve n'a été présentée à l'égard de ce point spécifiquement[8].

[45]     Dans les présents appels, il semble que les appelants aient laissé de côté leurs propres actes de plaidoirie et présenté des éléments de preuve contraires aux faits plaidés au paragraphe 4 b. de leurs plaidoiries. Ces faits ont une importance capitale pour les appelants. Les faits qui sont allégués dans un acte de plaidoirie sont des aveux et peuvent être une preuve contre la partie qui les invoque. C'est seulement s'il peut être prouvé que l'allégation était une erreur de fait qu'elle peut être révoquée. Dans la réponse à une question que je lui ai posée, l'avocat des appelants a décrit la mention de la garantie, au paragraphe 4 b. comme [TRADUCTION] « un fait erroné [...] les preuves montreront qu'il y avait un prêt et que nous avons ici, en fait, des achats d'actions, rien de plus. » Si l'avocat croit que les faits plaidés sont erronés, alors il devrait présenter une requête pour modifier les plaidoiries et prouver que le fait était une erreur, pour faire en sorte que les actes de plaidoirie ne contiennent aucun « fait erroné » [9]. D'après les éléments de preuve portés à ma connaissance, il n'est pas ressorti qu'il y avait un prêt.

[46]     Par conséquent, je suis pris avec les témoignages contradictoires des appelants qui ne sont ni l'un ni l'autre corroborés par des personnes qui auraient pu témoigner.

[47]     Je ne suis pas prêt à accepter le témoignage de M. Santoro de préférence à ce qui a été énoncé initialement dans les avis d'appel. Le taux d'intérêt que M. Santoro était prêt à verser à MM. Persico et Liscio était excessif, pour ne pas dire déraisonnable. Il était prêt à payer, dit-il, un taux de 60 % par année sans même faire des démarches auprès d'une banque ou de son courtier pour obtenir un taux d'intérêt moindre. Le fait qu'APS n'ait pas possédé de marge de crédit n'est ni une excuse ni une raison.

[48]     MM. Liscio et Persico auraient pu tous deux, ou un des deux, être convoqués par les appelants afin de corroborer le témoignage de M. Santoro. Parce qu'ils n'ont pas témoigné, même si M. Santoro est toujours en relation avec eux, je dois en tirer une conclusion défavorable, soit que leurs deux témoignages n'auraient pas appuyé celui de M. Santoro[10].

[49]     Quant à l'opération de janvier 1995 et, plus particulièrement, le paiement de M. Liscio, le ministre a soutenu que la somme versée par M. Liscio à Thomson & Kernaghan n'a pas servi à acquérir des actions de HLE pour M. Santoro ou APS. Aucune action n'a été émise à l'un ou l'autre des appelants. Ni le reçu du courtier pour l'argent versé, ni la demande de fonds du courtier ou l'avis de celui-ci confirmant l'achat d'actions de HLE n'ont été présentés en preuve. La position du ministre n'est pas déraisonnable dans les circonstances.

[50]     Non seulement MM. Persico et Liscio n'ont-ils pas été assignés comme témoins, mais M. Guido n'a pas témoigné non plus; aucune raison n'a été donnée pour expliquer cette absence. M. West, à qui M. Santoro se fiait pour les questions d'investissement, n'a pas non plus témoigné. M. Guido aurait pu corroborer le témoignage de M. Santoro indiquant que M. Guido souhaitait qu'une personne morale achète le bloc d'actions et que l'argent versé à Thomson & Kernaghan était destiné à l'achat d'actions de HLE. Les appelants ont présenté une copie d'une lettre datée du 18 janvier 1999 envoyée par Worldtec Services Incorporated à Revenu Canada, Douanes et Accise, confirmant « [TRADUCTION] qu'en août 1995, HLE a conclu une entente visant la vente de 1 375 000 million [sic] d'actions à APS. HLE a reçu le solde de 150 000 $ d'APS directement. En outre, HLE a reçu la somme de 125 000 $ de tierces parties. » La lettre a été signée par P. Guido[11]. Le fait que des actions de HLE ont pu être achetées en août 1995 contredit également le témoignage de M. Santoro. Encore une fois, M. Guido n'a pas témoigné.

[51]     En supposant que les courtiers Thomson & Kernaghan exercent toujours leurs activités - et il n'y a aucune preuve que ce ne soit pas le cas - un employé aurait pu venir témoigner au sujet de la somme de 100 000 $ reçue de M. Liscio et préciser si les fonds ont servi ou non à acquérir des actions de HLE. Aucun élément de preuve ne corrobore le témoignage de M. Santoro quant à l'emploi des fonds de M. Liscio. Aucune action n'a été émise et il n'y a aucune preuve que cet argent a servi à acheter des actions de HLE.

[52]     La deuxième opération, celle de février 1995, est aussi préoccupante.

[53]     Lorsque le chèque de 150 000 $ a été émis, le comptable d'APS a donné pour instruction au teneur de livres de l'entreprise d'affecter le montant à un compte en précisant qu'il passerait l'affaire en revue lorsque les livres d'APS seraient préparés pour la fin de l'exercice. Le teneur de livres a donc affecté le chèque au compte de prêts de M. Santoro, ce qui, selon l'analyse de M. Stern effectuée près d'un an plus tard, était une erreur; M. Stern a donc réaffecté les 150 000 $ à un compte de placements à court terme d'APS. Il n'était pas inhabituel pour APS de payer des dépenses au nom de M. Santoro; ces dépenses étaient ensuite affectées au compte de prêts de M. Santoro. Ici, encore une fois, M. Sebastien n'a pas été convoqué pour expliquer sa façon de tenir les livres d'APS et les instructions qu'il aurait reçues de M. Santoro.

[54]     Ce sont les administrateurs de l'entreprise qui déterminent la nature d'une opération, pas les comptables. M. Santoro, et non M. Stern, aurait dû donner des instructions à M. Sebastien. Le comptable ne fait que consigner l'opération. Les comptables ne possèdent pas de baguette magique qui, à leur convenance, transforme le noir en blanc, le blanc en noir, un prêt à l'actionnaire en un placement à court terme.

[55]     Les comptables corrigent souvent les comptes ou transfèrent des fonds entre les comptes après la fin d'exercice d'une entreprise. De fait, des redressements devraient être apportés pour corriger les erreurs comptables, y compris lorsqu'une opération est inscrite dans le mauvais compte. Toutefois, au moment de l'opération, les administrateurs de l'entreprise doivent en identifier la nature et l'affecter à un compte de la manière la plus appropriée. Cette démarche nécessite l'exercice de jugement pour ce qui est de choisir à quel compte porter le débit ou le crédit. À la fin de la période comptable, il faut faire preuve de jugement pour relever les erreurs et les corriger au besoin[12]. Un redressement vise à corriger, pas à créer.

[56]     Lorsqu'il examine les comptes, le comptable devrait avoir accès aux registres de l'entreprise indiquant la véritable nature de l'événement ou de l'opération avant de procéder à des redressements ou à des réaffectations. Comme ces redressements peuvent parfois avoir lieu après coup, tant le client que le comptable peuvent être tentés d'agir irrégulièrement et doivent s'en prémunir. Par exemple, les actions d'une entreprise acquises durant l'année peuvent perdre leur valeur avant la fin d'exercice. Il pourrait être tentant de transférer la propriété des actions d'un contribuable qui gagne un petit revenu à un contribuable qui touche un gros revenu de manière à ce que ce soit ce dernier qui subisse la perte; on pourrait aussi reclasser les actions afin qu'elles soient imputées non plus au capital mais au revenu. Dans ces exemples, il n'y a rien de mal à ce que le comptable réaffecte les montants s'il a de bonnes preuves qu'une erreur a été commise au sujet de la personne qui a réellement acheté les actions. Mais lorsqu'il n'y a aucune preuve permettant de réfuter l'écriture portée initialement aux livres, le comptable ne devrait pas procéder au transfert entre des comptes. Le comptable a pour tâche de consigner, pas de prendre des décisions.

[57]     Dans les appels dont je suis saisi, M. Stern n'a fait réellement aucun effort en janvier 1995 pour déterminer la nature et l'utilisation prévue des prêts de MM. Liscio et Persico. Et en février 1995, il n'a rien fait non plus pour déterminer qui achetait le bloc d'actions de HLE pour 150 000 $. En fait, dans ce dernier cas, il a décidé qu'il attendrait jusqu'à la préparation des états financiers de l'entreprise pour l'exercice. Au début de 1995, il n'aurait pas dû discuter avec M. Sebastien mais bien avec M. Santoro. M. Stern a simplement dit au teneur de livres d'inscrire un montant dans un compte - apparemment n'importe quel compte aurait été acceptable - puis qu'il procéderait à un redressement par la suite. À ce moment-là, il ne semble y avoir eu aucune discussion entre M. Santoro et M. Stern concernant l'identité de l'acquéreur des actions.

[58]     Ça ne suffit pas. L'opération s'est déroulée en février 1995 lorsque tous les espoirs étaient permis face aux actions de HLE. La discussion relative aux redressements a eu lieu en décembre 1995 et au début de 1996, lorsque les actions de HLE n'avaient aucune valeur. Aucun document n'a été préparé en février 1995 et aucune instruction n'a été consignée afin de décrire l'opération et les intentions des parties intéressées. Tout ce que M. Stern avait en main au procès, c'était ses notes concernant ses discussions avec M. Santoro à la fin 1995 et au début 1996, lorsque l'issue de l'opération était connue. Il n'y a absolument aucune preuve datant du moment de l'émission du chèque de 150 000 $ par APS ou de l'achat d'actions de HLE en février 1995 qu'APS devait être le bénéficiaire des actions de HLE. Par exemple, il n'y a aucun procès-verbal de réunion des administrateurs d'APS autorisant l'émission du chèque ou l'achat des actions. Il n'y a aucune confirmation de l'achat des actions par APS émanant du courtier ni de relevé mensuel d'un compte d'APS chez un courtier indiquant que des actions de HLE étaient détenues en son nom. Tout ce que nous avons, c'est la décision de M. Stern de réaffecter les fonds en s'appuyant sur des discussions qu'il avait eues avec M. Santoro près d'un an après l'événement. M. Stern n'a pas décrit ces discussions, mais je remarque que le bénéfice d'APS en 1995, avant la déduction de la perte supposée de 278 000 $, se chiffrait à 759 506 $ et que le revenu imposable de M. Santoro en 1995 s'élevait à 32 478 $. Je ne peux me convaincre que l'écriture initiale de 150 000 $ dans le compte de prêts de l'actionnaire était erronée. L'acquisition du bloc d'actions de HLE en février 1995 visait à conférer un avantage à M. Santoro. Il a imputé ses autres acquisitions et dispositions personnelles d'actions de HLE en 1995 au capital[13]; je n'ai aucune raison de conclure que l'acquisition du bloc d'actions de HLE n'est pas aussi imputable au compte de capital.

[59]     La somme de 150 000 $ a été versée aux fins de l'acquisition d'actions de HLE par APS au profit de M. Santoro. APS a conféré un avantage de 150 000 $ à M. Santoro en sa qualité d'actionnaire d'APS : paragraphe 15(1) de la Loi.

[60]     Les appels sont rejetés avec dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de novembre 2004.

« Gerald J. Rip »

Juge Rip

Traduction certifiée conforme

ce 14 e jour de juillet 2005.

Sara Tasset


RÉFÉRENCE :

2004CCI764

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2001-3906(IT)G & 2001-3907(IT)G

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Antonio Santoro c. La Reine

Architectural Precast Systems Inc. c.

La Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :

19 juillet 2004

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :

L'honorable Gerald J. Rip

DATE DU JUGEMENT :

19 novembre 2004

COMPARUTIONS :

Avocats de l'appelant :

Mes Cosimo Fiorenza et

Natasha Miklaucic

Avocat de l'intimée :

Me Franco Calabrese

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

Nom :

Mes Cosimo Fiorenza et

Natasha Miklaucic

Cabinet :

Goodman & Carr

Pour l'intimée :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada



[1]           Dans son avis d'appel, APS faisait valoir que, si la perte était imputée au capital, elle devenait une perte au titre d'un placement d'entreprise. L'avocat de l'appelante a laissé tomber cet argument au procès parce qu'APS n'avait pu avoir accès aux registres d'entreprise de HLE.

[2]           Dans son témoignage, M. Santoro a souvent fait référence à lui-même quand, selon lui, il faisait réellement référence à APS.

[3]           L'alinéa 72(1)d) de la Loi sur les valeurs mobilières de l'Ontario dispose qu'il y a dispense d'un prospectus dans le cas d'un placement d'actions où l'acheteur achète pour son propre compte, si l'opération porte sur des valeurs mobilières dont le coût total d'acquisition n'est pas inférieur à 150 000 $. Les actions acquises pour 125 000 $ ne seraient donc pas admissibles à la dispense relative aux placements privés. L'issue des présents appels ne dépendait pas du fait que l'opération soit conforme ou non à la Loi sur les valeurs mobilières de l'Ontario.

[4]           M. Persico semble s'être fait rembourser son prêt de 25 000 $, plus 7 500 $ représentant les intérêts de 30 %, à partir du compte bancaire personnel de M. Santoro autour du 2 février 1994. Lorsqu'ils ont établi les déclarations fiscales d'APS pour 1996, les comptables de HLE ont aussi procédé à un redressement de 32 500 $ au titre des placements à court terme payés par M. Santoro au moyen d'un chèque le 2 février 1996 à l'égard du placement dans HLE. La somme de 32 500 $ n'avait pas été inscrite précédemment dans les livres de comptes de l'entreprise. Elle avait été transférée du compte de prêts de l'actionnaire aux placements à court terme. Elle semble représenter les 25 000 $ remboursés à M. Persico plus les intérêts de 7 500 $. Aucune raison n'a été donnée pour expliquer la dépréciation de ces actions en 1996 plutôt qu'en 1995, année où les actions ont perdu toute valeur, selon M. Santoro.

[5]           Je présume que le montant de 128 000 $ représente le principal de 100 000 $ plus les intérêts de 27 800 $ versés à M. Liscio. Aucune explication n'a été donnée au sujet de la différence de 200 $.

[6]           Je désigne l'entreprise sous le nom de « HLE » même si sa raison sociale a peut-être été remplacée par « Worldtec Sciences Incorporated » .

[7]           The Law of Civil Procedure, Butterworth & Co. (Canada) Ltd., Toronto (1970), à la p. 637.

[8]           Lubrizol Corp. c. Imperial Oil Ltd. [1996] 3 C. F. 40; Voith GmbH v. Beloit Corp., (1991), 128 N.R. 54 (C.A.F.). Voir également l'ouvrage de McMechan & Bourgard, Tax Court Practice, Thomson, Carswell, aux pp. 4-62 et 4-63.

[9]           L'interrogatoire préalable des appelants, j'imagine, s'était fondé sur les faits qu'ils plaidaient. Il n'est tout simplement pas juste envers l'intimée de changer d'orientation tardivement dans le processus d'instruction.

[10]          Sopinka, John; Lederman, Sidney N. et Bryant, Alan W., The Law of Evidence in Canada, 2e éd. Butterworths, Toronto, 1999.

[11]          Il n'y a rien dans la lettre qui renseigne le lecteur sur les fonctions qu'exerçaient M. Guido chez Worldtec en 1999.

[12]          Bull, R. J. Accounting in Business, Butterworths, London, 1972.

[13]          J'ai été avisé par l'avocat de l'intimée que, dans l'avis de nouvelle cotisation délivré à M. Santoro pour 1995, le ministre lui a permis de déduire une perte en capital de 150 000 $ à l'égard de ces actions.

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