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Date: 19990425

Dossier: 1999-21-IT-I

ENTRE :

H.R. NIEBOER,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

(rendus oralement à l’audience à Fredericton (Nouveau-Brunswick)

le mardi 25 janvier 2000)

Le juge Hamlyn, C.C.I.

[1] La présente cause oppose Mme H. Nieboer à Sa Majesté la Reine; les avis d’appels se rapportent aux années d’imposition 1993, 1994, 1995, 1996 et 1997. La réponse modifiée à l’avis d’appel a été déposée avec le consentement de l’appelante. Celle-ci a retiré son avis d’appel pour l’année d’imposition 1993 et je crois comprendre qu’elle a accepté que le ministre modifie sa réponse à l’avis d’appel pour y ajouter l’année d’imposition 1997.[1]

[2] Dans un avis de cotisation daté du 27 juillet 1998, le ministre a établi une cotisation quant à la déclaration de l’appelante pour l’année d’imposition 1997, qui ajoutait au revenu tiré d’un travail indépendant déclaré par l’appelante la somme de 2 920 $ versée par le Royal Conservatory of Music.

[3] Dans des avis de nouvelles cotisations datés du 18 novembre 1997, le ministre a établi de nouvelles cotisations à l’égard des déclarations de l’appelante pour les années d’imposition 1994, 1995 et 1996 afin de rejeter des montants totaux respectifs de 9 995 $, de 13 995 $ et de 3 586 $, que l’appelante avait déduits de son revenu de travail indépendant.

[4] L’appelante a déposé un avis d’opposition valide à l’encontre des cotisations visant les années 1994, 1995 et 1996 et, dans des avis de nouvelles cotisations datés du 15 septembre 1998, le ministre a modifié les cotisations pour les années 1994, 1995 et 1996 pour permettre la déduction des montants respectifs de 2 840 $, 4 532 $ et 2 391 $, qui avaient été refusés auparavant.

[5] Le 9 novembre 1998, l’appelante a déposé un avis d’opposition valide relativement à l’année d’imposition 1997, auquel le ministre n’a pas répondu. En réponse à cette opposition, le ministre a reconnu les faits et a indiqué qu’il avait erré en ajoutant, dans les conclusions de sa réponse à l'avis d'appel, la somme de 2 920 $ au revenu d’entreprise de 1997 de l’appelante puisque celle-ci avait déjà inclus ce montant dans le rapport de revenu brut d’entreprise de la déclaration qu’elle a produite en 1997.

L’appel

[6] En réponse aux nouvelles cotisations ayant fait suite à l’avis d’opposition pour 1994, 1995 et 1996, l’appelante a déposé auprès de la présente cour un bref document daté du 14 octobre 1998 et qui se lit en partie comme suit : “ Objet : nouvelles cotisations de l’impôt pour 1993 et 1994 et appel interjeté à l’encontre des nouvelles cotisations de l’impôt pour 1995, 1996 et 1997. ”

[7] Il s’agissait d’un “ appel auprès de la Cour canadienne de l’impôt. ” ... “ J’interjette appel principalement au motif que Revenu Canada rejette mes dépenses d’entreprise sous prétexte qu’elles seraient des dépenses personnelles. ” Dans le document déposé auprès de la Cour sous la cote R-2, l’appelante a détaillé, dans une lettre adressée à Revenu Canada, son point de vue quant aux nouvelles cotisations et aux dépenses dont il est question dans ses pièces déposées sous les cotes A-1, A-2 et A-3.

Hypothèses du ministre

[8] Les hypothèses du ministre se retrouvent dans son acte de procédure. Ces hypothèses ont été examinées avec l’appelante et je vais lire les hypothèses a) à u) ainsi que les réponses qu’a données l’appelante au cours des plaidoiries.

[TRADUCTION]

(a) l’appelante était un professeur de musique indépendant au cours des années d’imposition 1994, 1995 et 1996;

Selon l’appelante, en plus d’être un professeur de musique, elle était interprète, chef d’orchestre, membre de jurys et examinatrice.

[TRADUCTION]

(b) la plus grande partie du revenu d’entreprise de l’appelante déclaré pour les années d’imposition 1994, 1995 et 1996 provenait de leçons privées et d’un contrat conclu avec la St. Andrews Church à titre de directrice de chorale et d’organiste;

L’appelante a ajouté qu’elle tirait également un revenu de ses fonctions d’interprète, de chef d’orchestre, de membre de jurys et d’examinatrice.

[TRADUCTION]

(c) le contrat de l’appelante avec la St. Andrews Church a pris fin en 1996;

L’appelante a précisé que le contrat a pris fin en janvier 1996.

[TRADUCTION]

(d) l’appelante a déclaré des montants, pour les années d’imposition 1994 et 1995, à titre de dépenses d’entreprises bien qu’elle ne pouvait fournir de reçus pour soutenir que les montants avaient été engagés pour tirer un revenu d’une entreprise;

Elle a énergiquement répondu : “ Non, ce n’est pas vrai ”. Elle a indiqué avoir justifié les reçus et avoir développé des documents de travail fondés sur ces reçus.

[TRADUCTION]

(e) les montants auxquels il est fait référence au paragraphe d) et que réclame l’appelante n’ont pas été engagés par celle-ci afin de tirer un revenu d’une entreprise;

Selon l’appelante, ses annexes prouvent qu’ils ont été engagés à cette fin.

[TRADUCTION]

(f) Pour les années d’imposition 1994 et 1995, l’appelante a demandé la déduction, à titre de dépenses d'entreprise et d'acquisitions d'immobilisations, de ses dépenses personnelles;

L’appelante a soutenu qu’il ne s’agissait pas de dépenses personnelles et elle est en désaccord quant aux acquisitions d’immobilisations.

[TRADUCTION]

(g) les montants auxquels il est fait référence au paragraphe f) et que l’appelante a déclarés n’ont pas été acquittés par cette dernière afin de tirer un revenu d’une entreprise, mais représentaient plutôt des dépenses personnelles de l’appelante.

L’appelante a soutenu que : “ Non, il ne s’agissait pas de dépenses personnelles ”.

[TRADUCTION]

(h) pour les années d’imposition 1994 et 1995, l’appelante a déclaré des montants relatifs à des acquisitions d’immobilisations pour sa résidence personnelle, et à de l’équipement de studio ou d’enregistrement, en tant que dépenses d’entreprise courantes;

L’appelante n’est pas d’accord avec cette hypothèse et indique que les dépenses étaient reliées à des réparations et à de l’entretien.

[TRADUCTION]

(i) les montants auxquels il est fait référence au paragraphe h) se rapportent à un débours de capital et sont par conséquent considérés être des ajouts au coût en capital de l’actif;

Elle a indiqué dans sa réponse que la réponse donnée au paragraphe h) s’appliquait également au paragraphe i).

[TRADUCTION]

(j) l’appelante était en droit de déclarer des dépenses courantes relativement à ces débours de capital, jusqu’à concurrence du montant calculé au taux prescrit et du pourcentage de leur utilisation professionnelle, conformément à l’article 13 et au règlement 1100 de la Loi, et elle a choisi de ne pas les déclarer;

Elle a confirmé cette hypothèse.

[TRADUCTION]

(k) l’appelante a résidé dans un appartement sis au 267, rue St. George, à Toronto (“ app. 1 ”) de janvier 1993 à août 1993;

Elle a précisé, même si elle croyait que l’année d’imposition 1993 était prescrite, qu’elle utilisait également ce logement pour des fins professionnelles et qu’elle avait par conséquent déclaré des frais pour l’usage de son domicile à des fins professionnelles.

[TRADUCTION]

(l) l’appelante a résidé dans un appartement sis au 19, rue Forest Hill, à Fredericton (“ app. 2 ”) d’août 1993 à août 1994;

Elle a confirmé y avoir résidé mais, à son avis, ce logement servait également à des fins professionnelles.

[TRADUCTION]

(m) l’appelante a résidé dans une maison sise au 184, rue Forest Hill, à Fredericton (la “ maison ”), de septembre 1994 à au moins décembre 1996;

Elle a confirmé cette hypothèse, mais a également soutenu que cette maison servait à des fins professionnelles.

[TRADUCTION]

(n) l’appelante a déclaré des montants pour l’“ usage du domicile à des fins professionnelles ” pour les années d’imposition 1994, 1995 et 1996 selon les pourcentages d’utilisation professionnelle suivants : 100 p. 100 pour les app. 1 et 2 en 1993; 50 p. 100 pour l’app. 2 en 1994 et 50 p. 100 pour la maison en 1994, 1995 et 1996;

Elle a dit qu’il y avait erreur puisqu’elle n'avait déclaré que 50 p. 100. La Cour se penchera sur cette question plus loin dans le présent jugement.

[TRADUCTION]

(o) le pourcentage d’utilisation professionnelle réel, fondé sur la superficie et l’utilisation servant exclusivement à tirer un revenu d’une entreprise, est de : 5 p. 100 pour l’app. 1; 25 p. 100 pour l’app. 2 et 40 p. 100 pour la maison;

L’appelante conteste ces pourcentages

[TRADUCTION]

(p) certains montants ont été déclarés par l’appelante à titre de dépenses d’entreprise pour les années d’imposition 1994 et 1995 quant à l’app. 2 et à la maison;

Elle a confirmé l’hypothèse.

[TRADUCTION]

(q) les montants auxquels il est fait référence au paragraphe p) n’étaient pas intégralement déductibles à titre de dépenses d’entreprise; ils étaient néanmoins déductibles à titre de dépenses pour “ utilisation du domicile à des fins professionnelles ”, calculées selon le pourcentage applicable d’utilisation réelle du domicile à des fins professionnelles;

Elle a confirmé ce paragraphe.

[TRADUCTION]

(r) les montants relatifs à “ l’utilisation du domicile à des fins professionnelles ” qu’a déclarés l’appelante pour les années d’imposition 1994, 1995 et 1996 n’étaient pas tous déductibles et, par conséquent, des montants réduits ont été admis selon les nouveaux calculs effectués en appliquant aux montants révisés les pourcentages réels d’utilisation du domicile à des fins professionnelles;

L’appelante accepte cet énoncé et ses conséquences.

[TRADUCTION]

(s) pour l’année d’imposition 1995, l’appelante a demandé un report prospectif du montant pour l’“ utilisation du domicile à des fins professionnelles ” se rapportant à l'année 1993;

Elle dit que c’est en effet ce qu’elle avait compris et elle pense que cela s'appuie sur un concept appelé “ solde de roulement ”.

[TRADUCTION]

(t) pour l’année d’imposition 1995, le report pour l’appelante du montant prospectif de l’“ utilisation de la résidence à des fins professionnelles ” de l’année d’imposition 1993 n’est pas permis selon l’alinéa 18(12)c) de la Loi, qui exige que ce montant soit reporté au cours de l’année d’imposition qui suit immédiatement l’année d’imposition au cours de laquelle il existe un revenu d’entreprise duquel il peut être déduit;

Les commentaires relatifs au paragraphe précédent s’appliquent à nouveau ici.

[TRADUCTION]

(u) en 1997, l’appelante a omis de déclarer un revenu de travail indépendant de 2 920 $ versé par le Royal Conservatory of Music.

Les parties ont convenu que cette question avait été réglée et que la Cour en tiendrait compte dans sa décision.

Les questions soulevées dans les actes de procédure

[9] Les questions en litige ont été soulevées dans la réponse modifiée. La première question consiste à savoir si les montants non justifiés que l’appelante déclare à titre de dépenses d’entreprise pour les années d’imposition 1994 et 1995 ont été rejetés à bon droit puisqu’ils ne semblaient pas avoir été acquittés dans le but de tirer un revenu d’une entreprise.

[10] Ensuite, il faut examiner si les montants relatifs aux dépenses personnelles qu’a déclarés l’appelante à titre de dépenses d’entreprise, et les acquisitions d’immobilisations des années d’imposition 1994 et 1995, ont été rejetés à bon droit au motif qu'ils n’auraient pas été engagés aux fins de tirer un revenu d’une entreprise, mais qu'ils constituaient plutôt des dépenses personnelles ou de subsistance.

[11] Troisièmement, il faut décider si c'est à bon droit que les montants relatifs aux immobilisations déclarés à titre de dépenses courantes pour les années d’imposition 1994 et 1995 ont été rejetés et immobilisés en tant que dépenses en immobilisations.

[12] Quatrièmement, il faut décider si les montants relatifs à l’“ utilisation de la résidence à des fins professionnelles ”, acceptés pour les années d’imposition 1994, 1995 et 1996 et calculés en utilisant le pourcentage réel d’utilisation des résidences de l’appelante à des fins professionnelles, ont été réduits correctement pour refléter la portion de ces résidences utilisée exclusivement pour tirer un revenu d’une entreprise.

[13] Cinquièmement, il faut décider si le report prospectif à l'année d'imposition 1995 du montant relatif à l’“ utilisation de la résidence à des fins professionnelles ” de l’année d’imposition 1993 a été rejeté à juste titre et accepté à juste titre pour l’année d’imposition 1994.

[14] Finalement, il faut voir s’il était adéquat d’ajouter le montant de 2 920 $ au revenu d’entreprise net de l’appelante pour 1997 (cette question est maintenant résolue).

Point central de l’analyse

[15] Le point central du présent appel, selon la façon dont l’a formulé l’appelante, se fonde sur les dépenses déductibles et sur la question de savoir si ces dépenses étaient des dépenses à titre de capital ou des dépenses courantes.

[16] De façon générale, si une dépense peut être déduite pour fins comptables, elle sera déductible pour fins fiscales, à moins qu’une disposition fiscale précise ne rende cette déduction inadmissible.

[17] Si une dépense est acquittée par un contribuable conformément aux principes commerciaux ou aux pratiques commerciales acceptées, et est engagée aux fins de tirer un revenu de son entreprise, le montant de cette dépense est déductible aux fins de l’impôt sur le revenu.

[18] Par conséquent, pour être déductible, une dépense doit respecter deux critères : 1) elle doit être engagée en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’une propriété; 2) elle doit être une dépense courante plutôt qu’une dépense en immobilisation.

Dépense en immobilisation et dépense courante

[19] Quelle est la différence entre une dépense en immobilisation et une dépense courante? Il n’existe aucun critère absolu ou définitif pour déterminer qu’une dépense est une dépense en immobilisation ou une dépense courante. Néanmoins, en général, les dépenses engagées dans le but de créer des biens d’une valeur durable sont des dépenses en immobilisation.

Documents

[20] On a demandé à la Cour de se pencher sur la question relative aux documents. L’intimée soutient que l’appelante n’a pas fourni aux autorités fiscales les documents nécessaires pour justifier ses allégations à l’effet que les montants avaient été engagés pour tirer un revenu d’une entreprise.

[21] Une des caractéristiques fondamentales du système d’imposition canadien consiste à se fier aux contribuables canadiens pour rapporter volontairement leur revenu pour chaque année d’imposition, et pour évaluer l’impôt qu’ils devront payer sur ce revenu. Ce système d’autocotisation a notamment pour résultat de donner au contribuable le fardeau de prouver qu’une cotisation est erronée puisqu’on tient pour acquis que le contribuable dispose de toutes les données de base à partir desquelles une cotisation exacte peut être établie.

[22] Cette règle est renforcée par le paragraphe 230(1) de la Loi, qui stipule clairement que :

Quiconque exploite une entreprise et quiconque est obligé, par ou selon la présente loi, de payer ou de percevoir des impôts ou autres montants doit tenir des registres et des livres de comptes (y compris un inventaire annuel, selon les modalités réglementaires) à son lieu d’affaires ou de résidence au Canada ou à tout autre lieu que le ministre peut désigner, dans la forme et renfermant les renseignements qui permettent d’établir le montant des impôts payables en vertu de la présente loi, ou des impôts ou autres sommes qui auraient dû être déduites, retenues ou perçues.

Analyse

[23] Quant à l’analyse de la question portant sur les documents, j’arrive à la conclusion que, de façon générale, l’appelante dispose de documents suffisants pour justifier les dépenses qu’elle a déclarées, à quelques exceptions près. Néanmoins, la question de savoir si les dépenses ont été déclarées conformément aux dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu (la “ Loi ”) reste à trancher.

Repas et spectacles

[24] Tout d’abord, quant aux dépenses de l’appelante déclarées au titre des repas, spectacles et frais de promotion pour les années d’imposition 1994 et 1995, le ministre a rejeté certaines de ces dépenses puisque, selon lui, elles n’avaient pas été engagées en vue de tirer un revenu d’une entreprise et qu’il s’agissait de dépenses personnelles de l’appelante.

[25] La preuve de l’appelante démontre que chaque dépense peut être rapportée à ses activités professionnelles, peut être identifiée et peut être liée à des clients ou des groupes de clients précis. De plus, ses dépenses visaient des organismes avec lesquels elle travaillait, comme le Royal Conservatory of Music et une église particulière.

[26] Plusieurs documents me permettent d’arriver à la conclusion que les dépenses étaient justifiées par des documents et que, même si elles étaient parfois élevées, elles ont été engagées afin de permettre à l’appelante de tirer un revenu de son entreprise. La Cour se penchera sur les montants précis qui doivent être admis dans la conclusion des présents motifs.

Vêtements

[27] Quant aux autres dépenses relatives aux costumes, aux vêtements, à la coiffure, aux produits de beauté, aux bas et aux lunettes pour les années d’imposition 1994 et 1995, l’appelante soutient qu’elles sont toutes reliées à ses activités professionnelles à titre d’interprète ou d’arbitre et qu’elles ne visaient pas des vêtements qu’elle portait ou des objets qu’elle utilisait quotidiennement. Néanmoins, j’ai examiné les dépenses et les documents qui ont été déposés. Les dépenses détaillées sont de nature très personnelle et j’en arrive à la conclusion qu’il s’agit, dans chaque cas, d’articles choisis de façon personnelle; de plus, les détails des achats que l’on retrouve à la pièce R-4 ne portent pas la Cour à accepter les arguments de l’appelante. Je considère que ces dépenses sont de nature personnelle. Les chaussures spéciales pour jouer de l’orgue font exception mais la preuve ne me permet pas d’établir avec certitude les dépenses reliées à ces chaussures; ces dépenses sont donc rejetées.

Perfectionnement professionnel et billets de concert

[28] L’appelante a soutenu qu’elle devait assister à des concerts et participer à des séminaires pour des raisons de perfectionnement professionnel. Cette partie de la déclaration me gêne. Les détails des dépenses rejetées qui avaient trait aux éléments de la déclaration non précisés ou obscurs, et qui n’ont pas fait l’objet d’un témoignage direct de la part de l’appelante, me portent à conclure que ces dépenses n’étaient pas déductibles pour l’année d’imposition 1994.

[29] Pour l’année d’imposition 1994, la question des billets de concert se pose. L’appelante a indiqué que ces billets représentaient des dépenses visant des étudiants qui assistaient à des concerts dans le cadre d’études suivies auprès de l’appelante; ces étudiants discutaient ensuite de ces concerts avec elle. Je considère que cette dépense, au montant de 117 $, est une dépense d’entreprise.

Dépenses reliées à la musique

[30] Les dépenses reliées à la musique pour les années d’imposition 1994 et 1995 visaient des partitions musicales, des baguettes, des tuyaux, des cassettes, des disques compacts, etc. L’appelante soutient que ces dépenses étaient liées à ses activités professionnelles et, de façon générale, l’intimée n’a pas contesté cela. Néanmoins, l’appelante soutient également que les dépenses reliées à la musique avaient une vie utile maximum de un an et que ces achats étaient consommés de façon courante. L’intimée soutient quant à elle que ces objets avaient une vie plus longue et constituaient un bénéfice durable, et que ces dépenses devaient par conséquent être considérées comme des débours de capital selon la Loi.

[31] Je précise encore une fois que ma tâche consiste à examiner la preuve qui m’a été soumise. La Cour arrive à la conclusion que les dépenses regroupées sous le titre de musique étaient des dépenses en immobilisation. Elles font partie de l’actif de l’appelante et doivent donc être immobilisées selon la Loi.

Dépenses de studio et d’enregistrement

[32] L’appelante a cherché à déduire certaines dépenses pour son studio tels des sapins de Noël, des décorations de Noël, des cassettes, des batteries rechargeables, des rideaux, etc., en indiquant que ces dépenses avaient été engagées au bénéfice exclusif de ses clients d’affaires.

[33] Après avoir entendu l’ensemble de la preuve et examiné la pièce R-4, la Cour arrive à la conclusion que ces dépenses n’avaient pas pour but de tirer un revenu, sauf de façon très secondaire. Elles se rapportaient personnellement à l’appelante et la Cour conclut que ces dépenses devraient être qualifiées, aux fins de l’impôt sur le revenu, de dépenses personnelles et ne devraient pas être déductibles à titre de dépenses d’entreprise.

Dépenses relatives au jardin

[34] Pour l’année d’imposition 1995, le montant de 2 439,45 $ relatif à l’aménagement paysager de la propriété de l’appelante a été déclaré à titre de dépense relative à l’utilisation de la résidence à des fins professionnelles. La Cour n’est pas convaincue que ces dépenses ont été engagées afin de tirer un revenu, même si, une fois encore, l’appelante a soutenu que cela était le cas et qu’elles avaient été engagées spécialement pour sa clientèle. La Cour conclut, selon l’ensemble de la preuve, que ces dépenses étaient de nature personnelle et qu’elles ne pouvaient par conséquent être déduites.

Réparations et entretien

[35] Également pour l’année d’imposition 1995, sous la rubrique des réparations et de l’entretien (il s’agit d’une catégorie générale qui comportait plusieurs éléments), on retrouve de l’insecticide, des feutres à polir, le ramassage de la neige, des fournitures pour le nettoyage, du papier de verre, de la colle, des tringles à rideaux, des bottes de caoutchouc, etc. La Cour conclut de cette preuve et de l’ensemble de la preuve que ces dépenses étaient reliées aux frais de la vie courante et que ces dépenses étaient de nature personnelle. Néanmoins, la Cour a relevé certaines exceptions et arrive à la conclusion que l'appelante a fait la preuve que de ces dépenses, ce qui nous renvoie à la question ayant trait aux documents. Par conséquent, quant à certaines rénovations, la somme de 636 $ devrait être admise à titre de dépense à titre de capital, la somme de 30 $ engagée pour accorder le piano devrait être acceptée en tant que dépense courante; la somme de 284 $ relative à une gouttière pendante devrait être admise à titre de dépense courante; et la somme de 31,60 $ relative à une pompe de puisards devrait être acceptée à titre de dépense courante.

Utilisation de la résidence à des fins professionnelles

[36] Nous arrivons maintenant à la question de l’utilisation de la résidence à des fins professionnelles pour les années 1993, 1994, 1995 et 1996. L’année 1993 est incluse en raison des dispositions de roulement que l’on retrouve dans la Loi et qui affectent l’année 1994 et les années subséquentes.

[37] Il s’agit de savoir quel montant total et quelle superficie en pieds carrés l’appelante a utilisés à des fins professionnelles dans ses diverses résidences.

[38] En nous référant à la réponse modifiée et en interprétant la réponse à l’avis d’appel, nous concluons que l’appelante a déclaré des montants pour un espace de travail à domicile pour les années d’imposition 1994, 1995 et 1996, selon les pourcentages d’utilisation du domicile à des fins professionnelles suivants : en 1993, app. 1, 100 p. 100; app. 2, 100 p. 100. En 1994, app. 2, 50 p. 100; maison, 50 p. 100. En 1995 et 1996, maison, 50 p. 100.

[39] Le ministre a considéré que les pourcentages de la superficie totale en pieds carrés de la partie des résidences de l’appelante que celle-ci utilisait à des fins professionnelles sont les suivants : en 1993, app. 1, 5 p. 100 et app. 2, 25 p. 100. En 1994, app. 2, 25 p. 100; pour la maison 40 p. 100. En 1995 et 1996, pour la maison, 40 p. 100.

[40] Sur cette question, la preuve m’a posé quelques problèmes. Pour déterminer le pourcentage de la superficie utilisée, il s’agit d’examiner la preuve et d’arriver à une réponse. L’appartement 1, à Toronto, était semble-t-il tout petit et l’appelante avait alors peu de clients. Il semble y avoir un désaccord entre l’appelante et la Couronne sur le nombre de ces clients, mais il y en avait peu. Selon le témoignage de l’appelante et ce que j’ai vu dans la preuve documentaire qui a été déposée, l’appelante habitait carrément les pièces qu’elle utilisait pour mener son entreprise à domicile. L’appartement 2, situé à Fredericton, était plus grand et l’appelante avait beaucoup plus de clients; elle utilisait encore une fois les mêmes pièces pour vivre et pour mener son entreprise.

[41] La preuve de l’appelante sur cette question (la superficie utilisée) était contradictoire puisque, selon l’appelante, elle n’a déclaré avoir utilisé que 50 p. 100 de la superficie de l’app. 1 à Toronto (et de l’app. de Fredericton); pourtant, les déclarations de revenus qu’elle a produites indiquent qu’elle avait déclaré avoir utilisé 100 p. 100 de la superficie. La Cour a certaines difficultés avec cette preuve.

[42] Il existe également une certaine contradiction, pour la propriété de Fredericton (la “ maison ”), quant au montant des impôts fonciers qui ont été versés. La preuve de l’appelante indiquait un certain montant, tandis que celle de la Couronne en indiquait un autre, et je tranche la question en concluant que la thèse avancée par la Couronne n’a pas été renversée.

[43] Quant à la pièce R-5, le ministre arrive à un certain pourcentage relatif à l’utilisation de la résidence à des fins professionnelles. Il a tenu compte dans son calcul des superficies communes et de l’utilisation personnelle de l’appelante; pour l’utilisation de la maison de Fredericton au cours d’une autre année d’imposition, le ministre a également tenu compte de l’exploitation d’une autre entreprise non reliée, en l’occurrence une pension avec chambres.

[44] En somme, le ministre a conclu que pour l’appartement de Toronto (app. 1), l’utilisation de la résidence à des fins professionnelles était d’une proportion de 5 p. 100. Pour l’appartement de Fredericton (app. 2), cette proportion était de 25 p. 100 et, pour la maison de Fredericton, elle était de 40 p. 100. L’argument de l’appelante voulait que les clients de l’industrie de la musique puissent utiliser les installations commerciales de l’appelante à leur gré et que la répartition qu’elle avait avancée était correcte et qu'elle devrait être acceptée. Cependant, la Cour a dû tenir compte de toute la preuve relative à l’utilisation de ces résidences, y compris les aires communes et la preuve contradictoire. La Cour tranche la question de la preuve contradictoire en faveur de la Couronne. La Cour conclut également que le ministre s’était fondé sur des hypothèses que l’appelante avait le fardeau de renverser, et que cette dernière ne l’a pas fait. Par conséquent, la décision du ministre quant au pourcentage d’utilisation de la résidence à des fins professionnelles est exacte.

Décision

[45] Pour l’année d’imposition 1994, l’appel est admis et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour un nouvel examen et une nouvelle cotisation fondés sur le fait que l’appelante a le droit de déduire la somme de 2 588 $ pour les repas et les spectacles et la somme de 177 $ pour les billets. Le montant de 2 159 $ engagé pour la musique et les fournitures est une dépense à titre de capital.

[46] Pour l’année d’imposition 1995, l’appel est admis et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour un nouvel examen et une nouvelle cotisation fondés sur le fait que l’appelante a le droit de déduire la somme de 1 595 $ pour les repas et les spectacles, de 30 $ pour accorder le piano, de 284 $ pour l’entretien et les réparations de la gouttière et de 31,60 $ pour l’entretien et la réparation de la pompe de puisards. Le montant de 2 224 $ engagé pour la musique et les fournitures est une dépense à titre de capital. Le montant de 636 $ au titre des rénovations, des réparations et de l’entretien est une dépense à titre de capital.

[47] Pour l’année d’imposition 1996, l’appel est rejeté.

[48] Pour l’année d’imposition 1997, l’appel est admis et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour un nouvel examen et une nouvelle cotisation fondés sur le fait que le ministre a erré en ajoutant la somme de 2 920 $ au revenu d’entreprise de l’appelante pour 1997.

Signé à Ottawa, Canada,

ce 25e jour d’avril 2000

“ D. Hamlyn ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 22e jour de septembre 2000.

Mario Lagacé, réviseur



[1]               Pour l’année d’imposition 1997, il existe un vice de forme relatif au moment où la question a été portée en appel. Les parties ont néanmoins accepté de traiter de l’année d’imposition 1997 dans le cadre du présent appel.

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