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Date: 19981002

Dossier: 97-3484-IT-I

ENTRE :

MICHAEL G. SACCO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge en chef adjoint Christie, C.C.I.

[1] Cet appel est régi par la procédure informelle prévue par l'article 18 et des dispositions suivantes de la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt. C'est l'année 1994 qui est en cause.

[2] L'avis d'appel se lit comme suit :

[TRADUCTION]

Je désire interjeter appel sous le régime de la procédure informelle contre un avis de nouvelle cotisation, initialement daté du 2 février 1996 et par la suite modifié par une lettre datée du 5 août 1997, pour l'année d'imposition 1994.

À la suite de mon avis initial d'opposition daté du 26 février 1996, Revenu Canada a admis toutes les déductions, mais continue à me refuser un crédit d'impôt pour personnes handicapées pourtant justifié. Étant donné mon état de santé au moment pertinent, le docteur Selwyn Smith était d'avis que j'avais droit au crédit d'impôt pour personnes handicapées pour l'année 1994, comme cela avait été le cas pour l'année d'imposition 1993.

Je crois que Revenu Canada rejette mon certificat pour le crédit d'impôt pour personnes handicapées daté du 19 février 1996 en raison des procédures judiciaires que j'ai engagées contre le gouvernement fédéral par suite du harcèlement dont j'ai été victime à mon lieu de travail au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux du Canada.

[3] Le paragraphe introductif et les paragraphes 1 à 12 inclusivement de la réponse à l'avis d'appel se lisent comme suit :

[TRADUCTION]

En réponse à l'avis d'appel relatif à l'année d'imposition 1994, déposé le 22 octobre 1997, le sous-procureur général du Canada déclare ce qui suit :

A. EXPOSÉ DES FAITS

1. Il admet les faits énoncés dans la première phrase du deuxième paragraphe non numéroté de l'avis d'appel, mais il ne sait rien concernant les déclarations faites dans le reste dudit paragraphe et affirme que ces déclarations constituent principalement de l'argumentation et il n'admet aucune allégation de fait qui y figure d'une façon accessoire.

2. Il nie les faits allégués au troisième paragraphe non numéroté de l'avis d'appel.

3. Il ne peut voir dans le reste de l'avis d'appel aucune allégation de fait qu'il pourrait admettre, ne pas admettre ou nier.

4. Par un avis de cotisation daté du 23 mai 1995, le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) a établi la cotisation fiscale de l'appelant pour l'année d'imposition 1994.

5. Dans le calcul de son impôt payable pour l'année d'imposition 1994, l'appelant a notamment inclus dans ses crédits d'impôt non remboursables un montant de 4 233 $ au titre du crédit d'impôt pour déficience mentale ou physique pour lui-même.

6. Par un avis de nouvelle cotisation daté du 2 février 1996, le ministre a établi la nouvelle cotisation fiscale de l'appelant pour l'année d'imposition 1994 en lui refusant le crédit d'impôt pour déficience mentale ou physique mentionné ci-dessus au paragraphe 5 ainsi que d'autres choses qui ne sont pas ici en litige.

7. L'appelant a signifié au ministre un avis d'opposition daté du 8 juillet 1996 à l'égard de l'année d'imposition 1994, mais ledit avis d'opposition a été déposé après l'expiration du délai imparti par le paragraphe 165(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”).

8. Par une lettre également datée du 8 juillet 1996, l'appelant a demandé au ministre une prorogation du délai pour déposer un avis d'opposition à l'égard de l'année d'imposition 1994.

9. Par une lettre datée du 9 septembre 1996, l'appelant a obtenu une prorogation du délai pour déposer un avis d'opposition à l'égard de l'année d'imposition 1994 et l'avis a été considéré comme ayant été déposé à la date de ladite lettre.

10. Par un avis de nouvelle cotisation daté du 5 août 1997, le ministre a établi une nouvelle cotisation fiscale à l'égard de l'appelant pour l'année d'imposition 1994 en admettant des points qui ne sont pas ici en litige et en concluant que la nouvelle cotisation refusant le crédit pour déficience mentale ou physique pour ladite année d'imposition avait été établie conformément aux dispositions de la Loi.

11. En établissant ainsi la nouvelle cotisation de l'appelant pour l'année d'imposition 1994, le ministre s'est fondé sur les hypothèses de fait suivantes :

a) l'appelant est atteint d'un trouble dépressif majeur et d'un trouble d'anxiété généralisée;

b) le certificat pour le crédit d'impôt pour personnes handicapées, formulaire T2201, rempli par le docteur Selwyn M. Smith et signé le 19 février 1996, n'attestait pas que l'appelant avait une déficience mentale ou physique grave et prolongée qui, pendant l'année d'imposition 1994, limitait de façon marquée sa capacité d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne;

c) l'appelant n'avait pas une déficience mentale ou physique grave et prolongée qui, pendant l'année d'imposition 1994, limitait de façon marquée sa capacité d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne;

d) l'appelant n'a pas droit au crédit pour déficience mentale ou physique dans le calcul de ses crédits d'impôt non remboursables et de son impôt payable pour l'année d'imposition 1994.

B. LA QUESTION À TRANCHER

12. Il s'agit de savoir si l'appelant a droit à un crédit d'impôt non remboursable pour déficience mentale ou physique en vertu du paragraphe 118.3(1) de la Loi dans le calcul de son impôt payable pour l'année d'imposition 1994.

[4] Les paragraphes 118.3(1) et 118.4(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”) sont ainsi libellés :

118.3 (1) Le produit de la multiplication de 4 118 $ par le taux de base pour l'année est déductible dans le calcul de l'impôt payable par un particulier en vertu de la présente partie pour une année d'imposition, si les conditions suivantes sont réunies :

a) le particulier a une déficience mentale ou physique grave et prolongée;

a.1) les effets de la déficience sont tels que la capacité du particulier d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne est limitée de façon marquée;

a.2) un médecin en titre ou, s'il s'agit d'une déficience visuelle, un médecin en titre ou un optométriste atteste, sur formulaire prescrit, que le particulier a une déficience mentale ou physique grave et prolongée dont les effets sont tels que sa capacité d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne est limitée de façon marquée;

b) le particulier présente au ministre l'attestation visée à l'alinéa a.2) pour une année d'imposition;

c) aucun montant représentant soit une rémunération versée à un préposé aux soins du particulier, soit des frais de séjour du particulier dans une maison de santé ou de repos, n'est inclus par le particulier ou par une autre personne dans le calcul d'une déduction en application de l'article 118.2 pour l'année (autrement que par application de l'alinéa 118.2(2)b.1)).

118.4 (1) Pour l'application du paragraphe 6(16), des articles 118.2 et 118.3 et du présent paragraphe:

a) une déficience est prolongée si elle dure au moins 12 mois d'affilée ou s'il est raisonnable de s'attendre à ce qu'elle dure au moins 12 mois d'affilée;

b) la capacité d'un particulier d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne est limitée de façon marquée seulement si, même avec des soins thérapeutiques et l'aide des appareils et des médicaments indiqués, il est toujours ou presque toujours aveugle ou incapable d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne sans y consacrer un temps excessif;

c) sont des activités courantes de la vie quotidienne pour un particulier:

(i) la perception, la réflexion et la mémoire,

(ii) le fait de s'alimenter et de s'habiller,

(iii) le fait de parler de façon à se faire comprendre, dans un endroit calme, par une personne de sa connaissance,

(iv) le fait d'entendre de façon à comprendre, dans un endroit calme, une personne de sa connaissance,

(v) les fonctions d'évacuation intestinale ou vésicale,

(vi) le fait de marcher,

d) il est entendu qu'aucune autre activité, y compris le travail, les travaux ménagers et les activités sociales ou récréatives, n'est considérée comme une activité courante de la vie quotidienne.

[5] Dans son bref témoignage en interrogatoire principal, l'appelant a déclaré qu'il se fondait sur un certificat pour le crédit d'impôt pour personnes handicapées se rapportant à l'année 1994-1995 et signé par le docteur Selwyn M. Smith. Ce certificat se lit comme suit :

Revenu Canada

CERTIFICAT POUR LE CRÉDIT POUR PERSONNES HANDICAPÉES

·          Veuillez lire attentivement les instructions qui se trouvent sur la feuille de renseignements ci-jointe. Il est important que vous compreniez les critères d'admissibilité et que vous remplissiez correctement ce formulaire.

·          Revenu Canada ou Développement des ressources humaines Canada pourrait demander plus de renseignements au sujet de cette demande.

·          Les frais pour un examen médical et pour faire remplir la partie B de ce formulaire sont à la charge du demandeur ou de son représentant. Les régimes médicaux provinciaux ne couvrent pas ces frais.

Partie A — À remplir par le demandeur ou son représentant

·          Pour plus de renseignements, lisez la brochure intitulée Renseignements fiscaux à l'intention des personnes handicapées. Vous pouvez obtenir un exemplaire à l'un des bureaux d'impôt de Revenu Canada. Vous devez remplir cette partie avant de demander au médecin de remplir la partie B.

Nom de la personne qui demande ce crédit Numéro d'assurance sociale de la 713 Lien entre la personne

                personne qui demande ce crédit    handicapée et celle qui

                             demande ce crédit

SACCO, MICHAEL         440-481-489         1. d Soi 2. Conjoint

                            3. Autre (indiquez le lien)

Date de naissance de la Nom de jeune fille de la Nom de la personne 714 Numéro d'assurance sociale de la personne handicapée personne handicapée    à charge handicapée personne à charge handicapée

      

29-04-1943       SACCO, MICHAEL

Si vous demandez le crédit

pour une personne à charge,    Oui Non Si non, veuillez indiquer l'adresse de cette personne.

est-ce que cette personne

demeure avec vous?

Veuillez indiquer le nom, l'adresse et le numéro de téléphone de tous les médecins ou optométristes qui sont au courant de la ou des déficiences de la personne. Annexez une feuille distincte si vous manquez d'espace.

Nom         Adresse                Numéro de téléphone

SMITH, SELWYN      155 Queen                  786-3172

J'autorise tout médecin, hôpital, optométriste ou autre organisme médical ayant des dossiers médicaux au sujet de la personne handicapée à divulguer les renseignements qui s'y trouvent à Revenu Canada ou à Développement des ressources humaines Canada dans le but de déterminer si la personne a droit au crédit pour personnes handicapées.

“ Michael G. Sacco ”         821-1535         19 février 1996

________________________________ _________________ ________________________

Signature de la personne handicapée ou Numéro de téléphone        Date

de son mandataire

Partie B — À remplir par le médecin ou l'optométriste

·          Remplir les cases appropriées.

715 Date du début de la       716 La limitation est :

limitation de l'activité      1.  Permanente Temporaire/ Année Veuillez indiquer l'année où

essentielle de la vie quotidienne :         Indéfinie 1994/1995 la limitation a cessé ou

Mois    Année                      devrait être réévaluée.

______    _____                        

717 Veuillez indiquer quelle activité essentielle de la vie quotidienne est limitée de façon marquée :

1. o Vision 2 . o Marcher 3. o Élocution 4. d Facultés mentales 6. o Ouïe 7. o Se nourrir et s'habiller

8. o Élimination

718 o N'INSCRIVEZ RIEN ICI

Partie B — Suite (À être complétée par le médecin ou l'optométriste.)

Indiquez le diagnostic médical relatif à la déficience et décrivez l'aide utilisée, s'il y a lieu :

- Dépression majeure

- Généralisée

Cochez les cases appropriées.

1. Vue

Votre patient peut-il voir, à l'aide de lentilles correctives si nécessaire? Oui    Non

(Acuité visuelle de 20/200 ou plus dans un des yeux, et champ visuel

de 20 degrés ou plus dans le meilleur oeil, après correction.) No. de l'INCA d    

2. Marcher

Votre patient peut-il marcher, à l'aide d'un appareil si nécessaire? Oui    Non

(Par exemple, au moins 50 mètres sur un terrain plat.) d    

3. Élocution

Votre patient peut-il parler de manière à se faire comprendre dans un Oui    Non

environnement calme, à l'aide d'un appareil si nécessaire? (Excluez les

différences entre les langues.) d    

4. Facultés mentales

Votre patient est-il capable de réfléchir, de percevoir et de se souvenir, Oui    Non

à l'aide de médicaments ou d'une thérapie si nécessaire? (Par exemple,

peut gérer ses affaires personnelles ou s'occuper de ses soins personnels

sans supervision.) d    

5. Ouïe

Votre patient peut-il entendre de manière à comprendre une conversation Oui    Non

orale dans un environnement calme, à l'aide d'un appareil si nécessaire?

(Excluez les différences entre les langues.) d    

6. Se nourrir et s'habiller Oui    Non

a) Votre patient peut-il se nourrir lui-même, à l'aide d'un appareil si nécessaire? d    

b) Votre patient peut-il s'habiller lui-même, à l'aide d'un appareil si nécessaire? d    

7. Élimination

Votre patient peut-il contrôler et s'occuper lui-même de ses fonctions intestinales Oui    Non

et urinaires, à l'aide d'un appareil si nécessaire?

(Par exemple, a une stomie simple ou utilise un cathéter.) d    

Oui    Non

8. La déficience a-t-elle duré, ou devrait-elle durer au moins 12 mois consécutifs?    d

9. La déficience est-elle suffisamment grave pour limiter en tout temps ou presque,

l'activité essentielle de la vie quotidienne même en utilisant des appareils

appropriés, des prothèses, en prenant des médicaments ou en suivant une thérapie?    d

Ayant lu la feuille de renseignements et les renseignements contenus dans ce formulaire, j'atteste qu'au meilleur de ma connaissance, ceux-ci sont vrais et complets.

“ Selwyn M. Smith ”

__________________________________________________

Signature du médecin ou de l'optométriste

Nom (en lettres majuscules)                      Date

   SELWYN M. SMITH M.D.                19-2-96

   900-155, rue Queen

   Ottawa (Ontario)                   Numéro de téléphone

   Canada K1P 6L1

   (613) 786-3172

[6] Il incombe à l'appelant d'établir selon la prépondérance des probabilités que la nouvelle cotisation est erronée. L'appelant ne s'est pas acquitté de cette obligation. L'examen du certificat ne montre pas que le cas de l'appelant relève des dispositions législatives citées. L'appelant a été contre-interrogé au sujet de ses facultés mentales, mais à cet égard il importe particulièrement de noter la réponse que le docteur Smith a donnée à la quatrième question. Le certificat est certes sur formulaire prescrit, mais il ne contient pas l'attestation qu'exige l'alinéa 118.3(1)a.2) de la Loi.

[7] En réponse à une question de la Cour, l'appelant a dit avoir travaillé de façon ininterrompue au ministère fédéral des Travaux publics et des Services gouvernementaux depuis 1980.

[8] Pendant les débats, l'appelant s'est référé au certificat sur lequel il s'était fondé avec succès à l'égard de son année d'imposition 1993 et il a produit ce certificat, également signé par le docteur Smith. Il renferme ces déclarations : [TRADUCTION] “ Trouble dépressif majeur. Trouble d'anxiété généralisée. ” Il a été signalé à l'appelant que même s'il s'était vu accorder un crédit pour déficience mentale ou physique en 1993, cela ne veut pas nécessairement dire qu'il a automatiquement droit au crédit en 1994. L'année d'imposition 1994 doit être examinée selon les faits qui lui sont propres.

[9] Les remarques suivantes sont faites dans la décision Luxton v. The Queen, [1996] T.C.J. No. 848, et sont réitérées dans la décision Nayar v. The Queen, [1996] T.C.J. No. 1243 :

Dans l'affaire Parsons, [[1996] A.C.I. no 880] le juge Bowie, de la C.C.I., a indiqué, en faisant allusion aux paragraphes 118.3(1) et 118.4(1), que, pour être admissible à un crédit pour personnes handicapées, le contribuable devait satisfaire à des critères rigoureux : “[...] le législateur souhaitait que seules les personnes dans un état extrêmement invalidant puissent se prévaloir de la déduction”. Il a ajouté : “Je souscris également à l'avis du juge Bowman [dans l'affaire Lawlor, [1996] A.C.I. no 58], suivant lequel la disposition législative devrait être interprétée “[...] avec une certaine compassion et une certaine compréhension répondant à l'objectif visé par cet article”.” La disposition en question était l'article 118.4 de la Loi.

[10] L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour d'octobre 1998.

“ D. H. Christie ”

J.C.A.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 26e jour d'avril 1999.

Erich Klein, réviseur

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