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Date: 20000713

Dossier: 98-9051-GST-I

ENTRE :

O'CONNOR GROUP REALTY INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge McArthur, C.C.I.

[1] Dans le présent appel, il s'agit de savoir si l'appelante devrait se voir fixer de la taxe sur les produits et services (“ TPS ”) en vertu des dispositions de la Loi sur la taxe d'accise pour la période allant du 1er mars 1993 au 31 décembre 1995. L'entreprise exploitée par l'appelante était une entreprise de courtage immobilier, à une différence près, c'est-à-dire que, outre l'entreprise traditionnelle de vente d'immeubles, l'appelante exploitait une autre entreprise, qui fait l'objet du présent appel.

[2] Pour être accommodante envers des agents immobiliers qui désiraient conserver simplement leur permis de vendeur d'immeubles (le tenir à jour) mais n'entendaient pas vendre activement d'immeubles, l'appelante, soit un courtier immobilier inscrit, remplissait les formalités requises pour que les agents soient inscrits en vertu de la Loi sur le courtage commercial et immobilier. Pour ce service, elle demandait 150 $ à l'agent immobilier. Durant les années pertinentes, l'appelante a annuellement fait inscrire plus de 150 agents inactifs. Elle n'a pas perçu ni versé de la TPS sur les frais d'adhésion, soit :

Fin d'année civile

Fournitures taxables

TPS

31 décembre 1993

25 448,27 $

1 781,38 $

31 décembre 1994

28 490,65 $

1 994,35 $

31 décembre 1995

29 558,41 $

2 069,09 $

Total

83 497,33 $

5 844,35 $

[3] La position de l'appelante énoncée dans la pièce A-1 est la suivante :

[TRADUCTION]

1. Premièrement, ces “ cotisations ” concernent seulement l'inscription auprès du courtier [...] et n'incluent aucun service de la part d'O'Connor Group. Aucun formulaire, matériel de bureau, pupitre, espace de bureau ou téléphone n'est inclus. Nous considérons que ces vendeurs sont non pas des employés mais des sous-traitants et qu'ils sont ainsi responsables de leurs propres dépenses.

2. Deuxièmement, les “ cotisations ” représentent essentiellement une façon pour ces vendeurs de conserver leur permis pendant qu'ils sont inactifs. S'ils deviennent actifs dans la vente ou la location d'immeubles, c'est-à-dire s'ils gagnent des commissions, le montant intégral des droits est remboursé lorsque la “ fiche de données commerciales ” est traitée aux fins du paiement de commissions gagnées [...] Normalement, les agents actifs ne paient pas ces “ cotisations ”, mais un agent inactif se remet occasionnellement à vendre activement des immeubles.

3. Troisièmement, pour conserver leur permis de vendeur d'immeubles, les agent immobiliers doivent être inscrits auprès d'un courtier conformément à la Loi sur le courtage commercial et immobilier de l'Ontario. L'acquisition d'un permis de vendeur d'immeubles est coûteuse et demande du temps, de sorte que ces agents inactifs considèrent le permis comme un atout valant la peine d'être maintenu. En vertu de l'alinéa 189c), ces cotisations seraient exonérées d'après le par. 16-150 de C.C.H., qui dit : [TRADUCTION] “ [...] l'exonération s'applique à des cotisations qui sont payées à un comité paritaire ou consultatif et dont la législation provinciale prévoit le paiement relativement à l'emploi d'un particulier. L'article 18 de la partie VI de l'annexe V (p. 108-455) traite d'un droit d'adhésion qui est payé à une organisation et qui est nécessaire pour conserver un statut professionnel reconnu par la loi ” (les caractères gras sont de moi). Dans la décision qu'elle a rendue sur l'avis d'opposition, la division des appels a rejeté l'opposition en faisant valoir que, bien que la Loi sur le courtage commercial et immobilier puisse exiger l'adhésion auprès d'un courtier inscrit, elle n'exige pas le paiement d'un droit d'adhésion. Nous soutenons que dans le passage en caractères gras aucune mention n'est faite quant à savoir si le paiement des droits est requis et que l'exonération s'applique aux droits si l'adhésion à l'organisation est requise.

Il y a d'autres questions en litige, par exemple concernant la définition de “ service ” et concernant le fait que nous n'avons pas été autorisés à réduire la TPS exigible de manière à tenir compte des cotisations qui avaient été remboursées. Je voudrais aborder ici une autre considération. O'Connor Group Realty a soutenu depuis le début que ces cotisations étaient exonérées, tout comme dans le cas de la Légion royale canadienne, et qu'aucun montant n'a donc jamais été perçu. À l'époque de la vérification initiale, Revenu Canada (soit maintenant ADRC) a tout considéré en sa faveur et a ainsi fixé de la TPS, des pénalités et des intérêts sans aucune réduction. C'est pour que cela soit redressé que nous demandons à votre cour de rendre une décision en notre faveur.

[4] La position de l'intimée est que l'appelante a omis de déclarer et d'inclure 5 844,35 $ de taxe nette. La pénalité pour versement tardif ainsi que les intérêts ont à bon droit été fixés sur ce montant que l'appelante a omis de verser. L'intimée estime que les droits d'adhésion représentent des fournitures taxables.

Analyse

[5] Je n'ai aucun mal à conclure que la position du ministre est exacte. Des droits d'adhésion ne sont pas requis par la Loi sur le courtage commercial et immobilier pour que l'agent conserve son permis. Cette loi exige notamment que les agents soient titulaires d'un permis en vigueur. L'appelante s'occupait qu'il soit satisfait à cette exigence moyennant des frais de service de 150 $. Il ne s'agit pas d'une fourniture exonérée en vertu de l'article 18 de la partie VI de l'annexe V de la Loi sur la taxe d'accise. Cette partie énonce des exonérations pour des fournitures effectuées par des organismes du secteur public. L'appelante n'entre pas dans le cadre de la définition d'“ organisme du secteur public ”[1], qui inclut des gouvernements et des organismes de bienfaisance. Le service fourni par l'appelante est une “ activité commerciale ”[2]. L'article 18 se lit comme suit :

18. La fourniture, effectuée par une organisation, d'un droit d'adhésion qui est nécessaire pour conserver un statut professionnel reconnu par la loi, sauf si le fournisseur a fait un choix selon le présent article en la forme déterminée par le ministre et contenant les renseignements requis.

[6] D'après l'appelante, un faible pourcentage des agents (peut-être 4 ou 5 p. 100) deviennent actifs et, sur paiement d'une commission à l'appelante, cette dernière rembourse les droits de 150 $ à l'agent. Le remboursement possible de droits d'adhésion à un agent ne représente pas des arrhes remboursables en vertu du paragraphe 168(9). Je conviens avec l'intimée qu'il s'agit d'une opération distincte donnant lieu à une moindre commission pour l'appelante sur l'opération particulière entre l'appelante et son agent.

[7] Pour que les cotisations ou paiements soient exonérés de la taxe sur les produits et services, le montant payé doit être versé à une organisation décrite à l'article 189, qui se lit en partie comme suit :

189 Pour l'application de la présente partie, une organisation est réputée effectuer une fourniture exonérée au profit de la personne qui lui verse un montant – réputé contrepartie de la fourniture – à titre, selon le cas :

a) de cotisation d'adhésion versée [...] à un syndicat [...]

b) de cotisation qui, conformément aux dispositions d'une convention collective, [...]

c) de cotisation [...] dont la législation provinciale prévoit le paiement [...]

Le paiement de 150 $ en question n'a pas été fait à une organisation décrite à l'article 189, ce qui est requis aux fins d'une exonération de TPS.

[8] J'estime que cette affaire peut être résumée simplement de la manière suivante. En vertu du paragraphe 165(1) de la Loi, de la TPS est payable par l'acquéreur d'une “ fourniture taxable ”, soit une fourniture effectuée dans le cadre d'une activité commerciale. L'opération entre les agents et l'appelante entre dans le cadre de la définition d'“ activité commerciale ”. L'appelante offrait aux agents une fourniture ou un service qui les aidait à conserver leur permis. Le paiement fait par les agents à l'appelante est assujetti à la TPS, sauf s'il est expressément exonéré en vertu de la Loi. Il est clair qu'aucune exonération ne s'applique.

[9] Je conclus que l'appelante a omis de déclarer des fournitures taxables et de verser de la TPS comme l'exigent les paragraphes 165(1) et 221(1) de la Loi, comme l'indique l'alinéa 6g) de la réponse à l'avis d'appel. Le ministre a à bon droit fixé une pénalité et des intérêts en vertu de l'article 280 de la Loi. L'appelante ne peut se prévaloir d'une défense de diligence raisonnable, soit une défense décrite dans l'affaire Pillar Oilfield Projects Ltd. c. La Reine[3]. L'appelante n'a pas fait d'efforts ou a fait des efforts insuffisants pour déterminer si de la TPS s'appliquait. Par l'intermédiaire de son teneur de livres, elle a décidé d'elle-même qu'aucune TPS ne s'appliquait. L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de juillet 2000.

“ C. H. McArthur ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 12e jour de janvier 2001.

Mario Lagacé, réviseur



[1]               Expression définie à l'article 123 de la Loi.

[2]               Expression également définie à l'article 123 de la Loi.

[3]               C.C.I., no 93-614(GST)I, 19 novembre 1993 (1993 G.S.T.C. 49).

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