Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 19980924

Dossier: 96-2633-IT-I

ENTRE :

DAVID H. BURSTOW,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs de l'ordonnance

(Rendus oralement à l'audience à Toronto (Ontario) le 31 juillet 1998.)

Le juge Sarchuk, C.C.I.

[1] L'appelant avait interjeté appel des cotisations d'impôt relatives à ses années d'imposition 1989, 1990, 1991 et 1992. Le 13 juin 1997, l'appel a été accueilli, avec frais et dépens. Le 28 novembre 1997, le greffier de la Cour, Raymond P. Guenette, a taxé le mémoire de frais de l'appelant, sur lequel ne figurait qu'un montant de 6 955 $ au titre des « autres débours » . Ce montant correspond aux services que la firme de comptables agréés Rennie & Company a facturés à l'appelant pour la recherche effectuée à l'égard des questions soulevées par les appels.

[2] Le 22 décembre 1997, le greffier a signé un certificat de taxation qui se lisait comme suit :

[TRADUCTION]

J'atteste avoir taxé les dépens entre parties à l'égard de l'appelant en vertu du paragraphe 13(1) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure informelle). Aucun montant n'est accordé.

Par avis écrit daté du 4 février 1998, l'appelant a demandé l'autorisation d'interjeter appel de la taxation. Le 24 mars 1998, le juge Mogan, de cette cour, a ordonné que le délai pour interjeter appel soit prolongé jusqu'au 17 mars 1998, en vertu du paragraphe 14(2) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure informelle), et que l'avis écrit de l'appelant du 4 février 1998 tienne lieu d'avis d'appel à l'encontre du certificat de taxation.

[3] L'appel de la taxation a été entendu le 11 juin 1998. Le litige porte uniquement sur la question de savoir si le greffier a légitimement exercé son pouvoir discrétionnaire en refusant d'adjuger à titre de débours selon le paragraphe 12(3) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt le montant versé par l'appelant à son comptable.

[4] Comme la Cour d'appel fédérale l'a récemment fait remarquer dans l'arrêt Sa Majesté la Reine c. Linda Munro (jugement inédit daté du 3 juillet 1998) :

La norme qui régit le contrôle du pouvoir discrétionnaire d'un fonctionnaire taxateur d'accorder des articles précis lors d'une taxation a été décrite dans les termes suivants par la présente cour dans IBM Canada Ltée. c. Xerox of Canada Ltd., [1977] 1 C.F. 181, 185 (C.A.F.), sous la plume du juge Urie :

[...] un tribunal ne devrait intervenir que lorsque les montants accordés sont inappropriés ou que la décision déraisonnable au point de sembler résulter d'une erreur de principe.

[5] Les arguments qui ont été présentés à notre cour ne sont fondamentalement pas différents de ceux que M. Burstow avait présentés au greffier. M. Burstow réitère que les appels, par essence, et les questions qui y ont été soulevées étaient complexes et extrêmement circonstanciés et qu'il lui avait été nécessaire d'obtenir l'aide professionnelle de Rennie & Company, ajoutant que cette aide avait été essentielle à la conduite des appels qui ont, en bout de ligne, été tranchés en sa faveur. L'appelant fait en outre valoir qu'il réclamait le remboursement des honoraires du comptable à titre de débours et non d'honoraires d'avocat. Le fait que les honoraires ont été engagés après le dépôt de l'avis d'appel et qu'ils se rapportaient uniquement à la remise par Rennie & Company de renseignements et de documents permettant à l'appelant de faire valoir sa position à l'instruction n'est pas et n'a pas été contesté; le greffier a tiré la même conclusion à cet égard.

[6] La question que le greffier s'est posée est celle-ci : « Les honoraires du comptable peuvent-ils être considérés comme des débours « essentiels » ou sont-ils des honoraires qui portent sur le même type de services que ceux habituellement fournis par un avocat et qu'on pourrait simplement appeler débours? » Le greffier a reporté la Cour aux commentaires qui suivent du juge Bowman dans la décision Munro c. La Reine (inédite, 95-2267(IT)I) :

Adjuger à titre de débours en vertu du paragraphe 12(3) les honoraires versés aux comptables ou à d'autres personnes qui ne sont pas des avocats, mais qui représentent un contribuable à l'audience mènerait à un résultat anormal; en effet, les honoraires d'un avocat qui sont taxés entre parties seraient limités aux montants fixés à l'article 11, mais les honoraires d'un comptable qui fait essentiellement la même chose pourraient être beaucoup plus élevés s'ils étaient adjugés à titre de débours.

[...]

Une chose m'inquiète, à savoir la possibilité que les honoraires qu'un comptable exige pour représenter un contribuable, s'ils sont adjugés à titre de débours en vertu du paragraphe 12(3), excèdent les honoraires adjugés à l'égard d'un avocat en vertu de l'article 11 ou le montant des honoraires d'un témoin expert si ce même comptable a témoigné à tire d'expert.

Le greffier a conclu que les honoraires du comptable dans l'affaire Munro se rapportaient à la comparution de ce dernier à titre de représentant de Mme Munro (ce qui n'était pas le cas dans l'appel de M. Burstow). Le principe énoncé par le juge Bowman était toutefois applicable aux faits dont il disposait.

[7] La décision rendue par le juge Bowman dans l'affaire Munro a été portée en appel devant la Cour d'appel fédérale. Dans ses motifs, le juge Décary a fait les remarques suivantes :

La procédure informelle énoncée dans la Loi traite précisément à l'article 18.14 de la représentation par une personne autre qu'un avocat; pourtant, le Comité des règles a expressément restreint les honoraires taxables à ceux qui ont trait aux « services d'un avocat » . Cela va à l'encontre de l'intention très claire de la règle 11 qui restreint les honoraires aux services d'un avocat que de suggérer que les mots « les autres débours » à la règle 12(3) peuvent être interprétés de façon à inclure les frais pour les services de représentants, et en outre, d'autoriser ces représentants à réclamer des honoraires supérieurs à ceux que les avocats sont autorisés à réclamer. Les représentants ne devraient pas être autorisés à réclamer indirectement en vertu de la règle 12(3) ce qui leur est expressément refusé à la règle 11.

[8] Les débours en cause correspondent à la facturation par le comptable des services suivants : a) examen des nouvelles cotisations relatives aux années d'imposition 1989, 1990, 1991 et 1992; b) recherche sur la déductibilité du coût en capital dans les années visées par les nouvelles cotisations et, en particulier, sur l'application des paragraphes 1100(15) et (17) du Règlement de l'impôt sur le revenu et des dispositions relatives aux droits acquis en ce qui concerne les navires achetés avant 1986; c) recherche sur la définition d'opérations d'affrètement de « navire coque nue » et sur ses incidences quant à l'application du paragraphe 1100(17); d) toute autre recherche ou discussion avec M. Burstow, portant sur les questions susmentionnées. À mon avis, ces services ne peuvent se rapporter qu'à la préparation de l'instruction. Il est clair que si ces services avaient été fournis par un avocat, les honoraires de ce dernier plafonneraient à cet égard à 200 $ en vertu de l'alinéa 11b) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure informelle).

[9] J'ai conclu que la décision du greffier était légitime. Si le paragraphe 12(3) ne doit pas être interprété de façon à viser les frais pour les services de représentants, c'est-à-dire de l'avocat comparaissant en justice pour le compte du contribuable, il semble tout aussi opportun de conclure, en procédant par analogie, que les mots « les autres débours » figurant à ce paragraphe ne devraient pas être interprétés de façon à viser les frais des services correspondant à la « préparation de l'instruction » ou à permettre aux représentants de réclamer, pour reprendre les termes du juge Décary, « des honoraires supérieurs à ceux que les avocats sont autorisés à réclamer. » Puisque les représentants ne peuvent se prévaloir de l'article 10 des Règles pour réclamer des honoraires relativement à la préparation de l'instruction, ils ne peuvent davantage se prévaloir du paragraphe 12(3) pour réclamer indirectement ces mêmes honoraires à titre de débours.

[10] Malgré la remarque du greffier portant que l'appelant devrait avoir droit à une forme quelconque d'indemnisation à l'égard de ses débours, fait sur lequel ce dernier s'est appuyé, il m'est impossible de conclure que le greffier a rendu une décision déraisonnable au point qu'elle semble résulter d'une erreur de principe. L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 24e jour de septembre 1998.

« A. A. Sarchuk »

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 22e jour d'avril 1999.

Mario Lagacé, réviseur

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