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Date: 19960612

Dossier: 96-3382-IT-G; 96-3383-IT-G

ENTRE :

HADIKEN CONCRETE & SUPPLY LTD., LAWRENCE HADIKEN,

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Motifs du jugement

Le juge Bell, C.C.I.

QUESTION EN LITIGE

[1] La question en litige dans chacun des appels est de savoir si le gain tiré de la disposition d'un droit dans une carrière de pierre calcaire est un gain en capital ou un revenu.

FAITS

[2] Au début de ses observations, l'avocat de l'intimée a déclaré que, si la vente effectuée par Lawrence Hadiken (“ Lawrence ”) produisait un gain en capital, alors c'était le cas également de celle effectuée par Hadiken Concrete & Supply Ltd. (“ Concrete ”). Il est évident que les actions de Concrete découlaient des décisions prises par Lawrence. Il est donc nécessaire de faire l'historique des deux opérations pour arriver à une conclusion raisonnée.

[3] Les appels ont été entendus sur preuve commune.

[4] Lawrence, qui vivait à Swan River (Manitoba) avant de déménager en 1988 à East Selkirk (Manitoba), travaillait dans le domaine de la construction, du concassage de gravier et du béton prêt à l'emploi. Concrete, mise sur pied en 1978, exploitait l'entreprise. Lawrence a témoigné qu'il faisait [TRADUCTION] “ un peu de tout ”, c'est-à-dire qu'il dirigeait la compagnie, conduisait un camion et faisait fonctionner les moteurs, entre autres choses. L'entreprise effectuait principalement du concassage et du transport de gravier pour le ministère de la Voirie. Lawrence a déclaré que la compagnie avait un employé de bureau en 1978 et que sa soeur, Eileen Hadiken (“ Eileen ”), avait commencé à travailler pour la compagnie en 1979. Elle dirigeait le bureau. Lawrence a témoigné qu'ils avaient soumissionné des travaux de voirie à East Selkirk et qu'il s'était mis à chercher une source d'approvisionnement en matériaux pour ces travaux. Il a déclaré qu'il s'était promené en véhicule à la recherche d'une terre susceptible d'être transformé en carrière, et qu'il avait trouvé une ferme où poussaient des chênes rabougris, ce qui indiquait la présence de sable ou de gravier. Il était entré en contact avec le propriétaire de cette terre broussailleuse apparemment non utilisée. Il lui avait demandé la permission d'effectuer des sondages, demande à laquelle le propriétaire avait acquiescé. Lawrence a également déclaré que le propriétaire avait dit qu'il vendrait le terrain si le prix lui convenait. Lawrence a témoigné en outre qu'il avait creusé six ou sept trous avec une pelle rétrocaveuse et que, dans deux ou trois cas, il avait trouvé de la roche à sept ou huit pieds de la surface. Il avait ensuite utilisé une perceuse à main dans ces trous pour creuser encore cinq pieds dans la roche, atteignant alors le sous-sol rocheux. Il avait acheté 210 acres au prix de 63 000 $, soit 310 $ l'acre. Il a indiqué qu'il n'avait reçu aucun conseil de quelque ingénieur ou géologue que ce soit, ni l'aide de spécialistes pour effectuer les sondages. Il a déclaré qu'il faisait du concassage de pierre depuis 1978 et qu'il avait [TRADUCTION] “ glané des connaissances ” en matière de sondage.

[5] Le terrain a été acheté en juillet 1988, la translation de propriété étant fixée au 1er septembre de la même année. Lawrence a expliqué que ce laps de temps a été prévu pour lui permettre d'obtenir du financement.

[6] Concrete avait soumissionné en vue d'obtenir un important contrat du ministère de la Voirie et, entre l'offre d'achat et la translation de propriété, elle a appris que sa soumission avait été écartée. Lawrence a déclaré qu'il avait toujours voulu avoir une carrière et que le rejet de la soumission ne l'avait pas fait changer d'avis. Il a témoigné qu'après avoir effectué le sondage il n'avait jamais discuté avec quiconque, avant ou après l'opération d'achat, de la vente du terrain à un tiers. Il a en fin de compte approvisionné en gravier l'entrepreneur qui avait obtenu le contrat ainsi que d'autres entrepreneurs. Il a également déclaré qu'il n'avait jamais eu l'intention d'acheter une carrière ou un terrain dans le but de le revendre à profit. Il n'avait jamais acheté ni vendu de carrière avant l'opération en cause. Concrete avait, dans le passé, acheté deux gravières qu'elle utilisait dans le cadre de son entreprise. Lawrence a indiqué qu'on les avait achetées à seule fin de les exploiter et que ni l'une ni l'autre gravière n'avait été revendue. Lawrence a témoigné que Concrete n'était propriétaire d'aucune autre carrière lorsque celle qui est en cause en l'espèce avait été achetée et, en outre, que la carrière la plus rapprochée se trouvait à Stonewall (Manitoba), à 20 milles environ du terrain acheté. Concrete a présenté à la municipalité une demande d'utilisation conditionnelle et a obtenu un permis après avoir satisfait aux exigences établies par la municipalité. Cela s'est passé en septembre 1988. Concrete a commencé à aménager la carrière immédiatement : elle a construit une voie d'accès, aménagé le carreau de la carrière, enlevé le mort-terrain et construit une berme. Lawrence a décrit le dynamitage effectué pour créer des rampes, la construction de chemins et l'utilisation du concasseur. Il a déclaré qu'entre le 1er septembre 1988 et la fin de 1988, Concrete avait vendu une certaine quantité de matériaux et en avait utilisé aussi pour ses propres contrats. Il a déclaré que, en ce qui concerne les ventes, la pierre concassée était pesée à la carrière et les données étaient ensuite transmises à Swan River, où sa soeur établissait les factures et s'occupait de leur envoi.

[7] Lawrence a indiqué qu'il n'avait jamais communiqué avec quiconque en vue de vendre la carrière et qu'il n'avait dit à personne qu'il voulait [TRADUCTION] “ s'en débarrasser ”, car il avait toujours eu l'intention de l'exploiter.

[8] Le 1er mai 1991, Lawrence a vendu à Concrete la partie nord-ouest de la propriété en cause, à un prix de base rajusté de 10 000 $ et pour une contrepartie totale de 400 000 $. Il s'agissait d'un transfert libre d'impôt effectué conformément à l'article 85 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la “ Loi ”). Le même jour, Concrete a revendu cette propriété à Selkirk Quarries Inc. (“ Selkirk Quarries ”) au prix de 400 000 $. Également le 1er mai 1991, Lawrence a vendu le reste de la propriété, la partie nord-est, à Selkirk Quarries à un prix de base rajusté de 50 000 $ et pour une contrepartie totale de 150 000 $.

[9] Concrete a publié des annonces dans un certain nombre de revues sous le nom de Selkirk Limestone Quarries, indiquant son adresse, ses numéros de téléphone et ses heures d'ouverture, et faisant la mention suivante : POUR PRENDRE OU POUR LIVRAISON. Ces annonces ont été publiées en 1989, 1990 et 1991.

[10] À la fin de 1990 ou 1991, d'après Lawrence, un père et son fils, qui portaient le nom de famille Shabot, ont exprimé leur intérêt pour la carrière. C'étaient des entrepreneurs en concassage de Winnipeg, et ils avaient été des clients de la carrière pendant [TRADUCTION] “ une couple d'années ”. D'après Lawrence, il se sont montrés intéressés à devenir des associés ou à acheter des parts. Lawrence a déclaré que la première fois qu'ils ont fait part de leur intérêt, il les a éconduits. Cependant, Lawrence a déclaré qu'en raison de problèmes de trésorerie qui s'étaient manifestés, il avait jugé bon de prendre un associé. Il a indiqué avoir estimé que, s'il avait un associé à Winnipeg, il n'aurait plus à y effectuer des ventes ni à essayer d'y percevoir les montants dus – une source de tracas d'après lui. Il a déclaré que, dans le cadre d'une société de personnes, Concrete continuerait à diriger l'exploitation de la carrière. Il a indiqué que c'était les Shabot qui étaient entrés en contact avec lui. Il n'avait d'aucune façon cherché un associé ou un acheteur. Il a déclaré que les problèmes de trésorerie avaient commencé en 1990 et que la création d'une société de personnes, tout en permettant à l'entreprise de bénéficier d'un apport de fonds, lui ouvrirait davantage le marché de la région de Winnipeg, où, à son avis, l'entreprise ne faisait pas autant d'affaires qu'elle aurait dû. Il a déclaré que, lorsqu'il avait décidé de se joindre aux Shabot, une entité distincte appelée Selkirk Quarries avait été constituée en personne morale, les Shabot de leur côté et les Hadiken de leur côté en détenant une part égale. D'après Lawrence, ils sont devenus associés et son entreprise a reçu l'apport de fonds nécessaire. La manière dont l'apport de fonds a été effectué n'est pas en litige en l'espèce. Lawrence a témoigné que la participation de 50 p. 100 a été payée 275 000 $ et que ce montant avait en grande partie servi à rembourser une dette de quelque 250 000 $ envers Produits Shell Canada Limitée (“ Shell ”), qui avait enregistré à l'égard de la carrière une opposition relativement à une hypothèque en equity. Lawrence a déclaré qu'ils n'avaient pas engagé d'estimateur ni d'ingénieur ni aucun autre expert pour avoir une opinion sur la valeur des réserves de la carrière. Bien qu'il ait dit qu'à son avis il y avait 125 acres de pierre d'une profondeur de 24 pieds et qu'il ait discuté des redevances que chacun tirerait de l'exploitation de la carrière, le montant de 550 000 $ a été convenu du seul fait que Lawrence avait besoin de la moitié de cette somme pour remettre de l'ordre dans ses finances.

[11] En contre-interrogatoire, Lawrence a déclaré qu'il savait que la carrière valait beaucoup plus que 550 000 $. Il a indiqué qu'il ne connaissait personne d'autre qui puisse être intéressé à investir de l'argent pour venir en aide à l'entreprise, que la conjoncture économique était défavorable, qu'il avait un problème de trésorerie et des factures à payer et qu'il ne voulait pas essayer de négocier un montant supérieur de crainte de décourager le seul acheteur éventuel. En réponse à la question de l'avocat de l'intimée, qui voulait savoir pourquoi le prix de vente était presque neuf fois plus élevé que le prix d'achat, Lawrence a simplement déclaré qu'il avait acheté un pâturage et qu'il avait vendu une entreprise.

[12] Eileen a témoigné qu'elle s'occupait de presque toute la comptabilité et qu'elle supervisait l'envoi des factures, au bureau de Swan River, et ce, depuis 1979 environ. Elle a apporté à la Cour des boîtes contenant des copies de toutes les factures qui avaient été dressées. Elle a déclaré que son frère Lawrence cherchait depuis un certain temps un endroit où stationner ses concasseurs et où concasser de la pierre. Il avait vu un endroit près de Stonewall, mais les propriétaires ne voulaient pas vendre. Elle a déclaré qu'il voulait exploiter une carrière et qu'il n'avait jamais indiqué vouloir acheter la carrière pour la revendre à profit. Elle était au courant de la dette envers Shell, et elle a dit que Shell avait appelé et menacé de se prévaloir de sa garantie. Elle croyait comprendre que cela voulait dire que Shell exercerait son droit de forclusion. Elle a déclaré que Lawrence n'avait jamais dit que le prix convenu avec les Shabot était fondé sur la valeur estimée de la pierre calcaire qui se trouvait dans la carrière en 1991. Elle a dit en outre que ni Concrete ni Lawrence n'avait jamais exploité une entreprise d'achat et de vente de carrières. Lors du contre-interrogatoire, Eileen a produit l'opposition par laquelle Shell avait fait valoir son intérêt, et ce document a été produit en preuve par l'avocat de l'intimée.

[13] Stan Pacak (“ Pacak ”), un comptable agréé ayant représenté les intérêts des Hadiken, a déclaré que Lawrence ne lui avait jamais indiqué qu'il voulait vendre la carrière.

[14] William Hoydalo (“ Hoydalo ”), un travailleur de la construction qui a travaillé pour l'entreprise de Hadiken, a déclaré qu'il n'avait rien eu à voir avec l'opération conclue avec les Shabot et qu'il n'avait jamais entendu dire que Lawrence voulait vendre la carrière. Il a déclaré que Lawrence avait toujours [TRADUCTION] “ voulu exploiter la carrière ”.

OBSERVATIONS DES APPELANTS

[15] L'avocat des appelants s'est référé à l'article 9 de la Loi, qui dit que le revenu qu'un contribuable tire d'une entreprise ou d'un bien pour une année d'imposition est le bénéfice qu'il en tire pour cette année. L'avocat a dit qu'aux termes du paragraphe 9(3), le “ revenu tiré d'un bien ” exclut le gain en capital réalisé à la disposition de ce bien. Puis il s'est référé au Bulletin d'interprétation IT-492 intitulé “ Déduction pour amortissement - Mines de minéral industriel ”, dont le paragraphe 1 et une partie du paragraphe 2 et du paragraphe 3 sont libellés dans les termes suivants :

1. Le présent bulletin traite du genre de mine de minéral industriel pour laquelle une déduction pour amortissement peut être obtenue en vertu de la Partie XI du Règlement et de la méthode de calcul du montant de la déduction pour amortissement qui peut être demandé.

2. Un contribuable peut demander une déduction pour amortissement, en vertu de l'alinéa 20(1)a) de la Loi et de l'alinéa 1100(1)g) et de l'Annexe V du Règlement, à l'égard du coût en capital

a) d'une mine de minéral industriel ou

[...]

3. L'expression “ minéral industriel ” désigne un minéral non métallique qui peut être utilisé dans l'industrie. [...] Voici un certain nombre des minéraux industriels qui sont les plus connus :

[...]

Calcaire

[...]

L'avocat a fait valoir que le calcaire était intrinsèquement un bien en immobilisation et que la constatation de la valeur du calcaire dans une carrière ne pouvait pas automatiquement signifier que le prix de vente représentait un revenu. Il a dit qu'une carrière n'était pas un bien en immobilisation dans deux cas seulement. L'un d'eux est prévu à l'alinéa 12(1)g) de la Loi, qui impose toute somme reçue qui dépendait de l'usage d'un bien ou de la production en découlant, que cette somme ait été ou non versée en acompte sur le prix de vente du bien. Il a soutenu qu'il s'agissait là d'un motif justifiant la nouvelle cotisation établie par le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) parce que l'alinéa 6 e) de la réponse à l'avis d'appel, où se trouvent énoncés les “ hypothèses de fait ” du ministre, dit ceci :

[TRADUCTION]

Au 1er mai 1991, la juste valeur marchande de la partie nord-ouest tenait en majeure partie à la valeur des dépôts de calcaire contenus sous la surface de la propriété.

Parce que, au début de ses observations, l'avocat de l'intimée a déclaré que l'intimée ne se fondait pas sur l'alinéa 12(1)g), aucune analyse des observations des appelants à ce sujet n'est nécessaire.

[16] En ce qui concerne la deuxième hypothèse, à savoir que le prix de vente constituait un revenu d'entreprise, l'avocat des appelants s'est référé au Bulletin d'interprétation IT-423, dont les paragraphes 3, 4 et 5 disent que la question de savoir si le bénéfice tiré de la vente de matières terreuses est un revenu tiré d'une entreprise ou un gain en capital est une question de fait qui dépend des circonstances entourant un cas précis. On peut lire ensuite que l'intention et la ligne de conduite sont deux critères importants. L'avocat a fait valoir que les faits indiquaient clairement que l'intention de Lawrence n'a pas été d'exploiter une entreprise de vente d'une carrière et qu'il n'a pas adopté une telle ligne de conduite. L'avocat a dit que la mise en vente de la carrière n'avait pas été annoncée et qu'elle n'était pas à vendre au grand public, qu'elle n'avait été vendue que pour financer l'entreprise de Lawrence et tenter d'accroître son chiffre d'affaires, et que ni Lawrence ni Concrete n'avait jamais exercé d'activités semblables. L'avocat a dit qu'il y avait une preuve non contredite selon laquelle toutes les carrières étaient exploitées et Lawrence n'avait jamais exploité d'entreprise d'achat ou de vente de terrains ou de carrières ou, de fait, de quoi que ce soit d'autre que le produit de ses activités, dans le but d'en tirer un bénéfice. Il a soutenu qu'il n'y avait aucune preuve qui laissait même entendre l'existence d'une intention de tirer profit de la carrière autrement qu'en l'exploitant dans le cours normal des affaires. Faisant de toute évidence référence au contre-interrogatoire mené par l'avocat de l'intimée, l'avocat a dit que l'écart entre le prix de vente et le prix d'achat n'était pas pertinent. Il a mentionné la preuve non contredite, tant orale que documentaire, selon laquelle Lawrence avait un motif financier urgent de conclure le marché avec les Shabot. L'avocat a insisté sur le fait qu'il n'était mentionné nulle part dans les documents ou dans la preuve présentée que le prix avait été établi en fonction des réserves. L'avocat des appelants a également affirmé que personne ne contestait la déclaration de l'avocat de l'intimée selon laquelle la valeur de la carrière tenait au calcaire s'y trouvant.

OBSERVATIONS DE L'INTIMÉE

[17] L'avocat de l'intimée a soutenu que le bénéfice tiré de la vente de biens par les appelants devait normalement constituer un revenu compte tenu des articles 3, 9 et 248 de la Loi. Il a mentionné plusieurs affaires qui, à son avis, s'appliquent à la présente situation. Il a en outre dit que, en plus d'acheter la propriété pour vendre le calcaire et aménager une carrière de calcaire, Lawrence avait, au moment de l'achat, l'intention secondaire de revendre la propriété à profit.

ANALYSE ET CONCLUSION

[18] Les deux avocats se sont référés à plusieurs décisions portant sur la question du gain en capital et du revenu. Ces décisions ne sont guère utiles en l'espèce puisque l'issue de ces appels dépend des faits qui leur sont propres. Il est rare que, dans les affaires où il s'agit de déterminer s'il y a gain en capital ou revenu, les faits soient suffisamment semblables pour qu'elles constituent des précédents utiles.

[19] Je suis d'accord avec les observations de l'avocat des appelants. Lawrence a travaillé dans le domaine du gravier et du concassage de pierre pendant un bon nombre d'années avant d'acheter la carrière. J'accepte la totalité de son témoignage comme étant véridique. À mon avis, Lawrence est un homme intègre et travailleur. Je n'ai eu aucune difficulté à le croire.

[20] En peu de mots, Lawrence a acheté la carrière aux fins exposées plus haut. Il a aménagé la carrière tel qu'il est expliqué ci-dessus et il en a vendu le produit de la meilleure façon qu'il pouvait, selon son expérience des affaires. Il a contracté une dette qui, pour lui, était une raison prédominante et impérieuse de conclure une entente avec les Shabot de manière à ce que l'exploitation de la carrière soit continuée par Quarries et gérée par Concrete.

[21] L'intimée a abandonné un des motifs de sa nouvelle cotisation mentionné dans la réponse à l'avis d'appel, à savoir le fait que le prix de vente était fondé sur la production ou l'utilisation. La déclaration de l'avocat de l'intimée que le prix d'achat était déterminé en fonction de la valeur du calcaire n'a pas été contestée par l'avocat des appelants et cette déclaration n'influence aucunement la Cour. Compte tenu de la preuve produite, aucun autre point de vue n'était possible. Cependant, on ne peut conclure pour ce motif que la vente a donné lieu à un revenu. Pour conclure que le gain tiré de la vente était un revenu et non un gain en capital, il faudrait supposer qu'il est impossible dans le cas d'un bien immobilisé qui est productif pendant son exploitation d'en disposer d'une manière susceptible de donner lieu à un gain en capital. C'est là une conclusion que je ne peux tout simplement pas tirer.

[22] Ni l'un ni l'autre appelant n'a fait d'annonce en vue de la vente de la carrière. Ni l'un ni l'autre appelant n'a déclaré avoir l'intention, lors de l'achat de la terre agricole, de vendre une carrière. Lawrence avait manifestement l'intention d'aménager une carrière aux fins des activités de son entreprise. En raison des circonstances, il est devenu nécessaire de conclure une alliance financière avec quelqu'un pour que la dette de Lawrence puisse être effacée. L'argument de l'intention secondaire avancé par l'avocat de l'intimée ne trouve aucun appui dans la preuve. La conclusion à l'existence, au moment de l'achat d'un bien, d'une intention secondaire de revendre à profit ce bien ne peut être étayée que dans des circonstances où il est possible de faire une telle inférence sans trop de difficulté. Il faut aussi reconnaître que, sur le plan économique, il n'est pas dans l'ordre des choses que les gens achètent des biens de cette nature dans l'intention de perdre de l'argent.

[23] Je conclus que le gain tiré de la vente par les deux appelants était un gain en capital. Par conséquent, les appels sont admis. La taxation d'un seul mémoire de frais est accordée aux appelants, un montant égal étant accordé à chacun.

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de juin 1998.

“ R. D. Bell ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 18e jour de juin 1999.

Erich Klein, réviseur

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