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Date : 20000414

Dossiers : 98-1752-IT-G; 98-1757-IT-G

ENTRE :

JUDITH RIGBY, EN QUALITÉ D'EXÉCUTRICE DE LA SUCCESSION

DE WILLIAM RIGBY, WALTER LUNN,

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Motifs du jugement

Le juge Beaubier, C.C.I.

[1] Ces appels, interjetés selon la procédure générale, ont été entendus ensemble sur preuve commune à Sydney (Nouvelle-Écosse) les 29, 30 et 31 mars 2000.

[2] Dès l’ouverture de l’audience, l’avocat a indiqué au tribunal que M. Rigby était décédé en 1999 et que, par conséquent, l’intitulé du présent appel avait été modifié et se lisait à présent “ Judith Rigby, en qualité d'exécutrice de la succession de William Rigby ”. Les parties ont également déposé un exposé conjoint partiel des faits, qui se lit comme suit :

[TRADUCTION]

98-1752(IT)G & 98-1757(IT)G

COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT

ENTRE :

WILLIAM RIGBY

- et -

WALTER LUNN

appelants

- et -

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée.

EXPOSÉ CONJOINT PARTIEL DES FAITS

Les appelants, MM. William Rigby et Walter Lunn, et l’intimée, Sa Majesté la Reine, par l’entremise de son avocat, s’entendent sur les faits suivants, à la condition :

1. que ces aveux ne servent qu’aux fins de la présente affaire;

2. que les parties aient le droit de présenter des éléments de preuve supplémentaires dans la mesure où ils ne contredisent pas les faits suivants :

a. M. et Mme Rigby ont reçu en cadeau, pour leur 25e anniversaire de mariage, environ 4 560,00 $.

b. Chacun des appelants acquittait des frais téléphoniques mensuels de 25 $.

c. Les trois filles de M. et Mme Rigby leur versaient chaque semaine la somme de 35 $ pour le gîte et le couvert pour les périodes de temps où elles résidaient chez leurs parents.

d. Mme Monique Rigby a reçu, à titre de règlement de la part d’une compagnie d’assurance, la somme de 9 635 $, qu’elle a intégralement remise à son père.

e. L’appelant, feu Daniel William Rigby, a gagné un prix de 6 908 $ dans une loterie de pièces de 1 $ au cours de l’exercice terminé le 31 juillet 1993.

f. Au cours de l’exercice terminé le 31 juillet 1993, l’appelant, Daniel William Rigby, maintenant décédé, a gagné la somme de 1 648,00 $ dans le cadre d’une loterie commanditée par la University College of Cape Breton.

g. Les appelants ont formé une société (Easy Three) avec M. Harold Head et, à cet égard, ils ont accepté de verser une contribution au comptant de 31 000 $ et d’assumer la responsabilité d’une dette de 29 000 $ pour un bateau dont M. Harold Head était le propriétaire. Les appelants ont par la suite effectué des paiements d’environ 6 000 $ pour le bateau.

h. Au printemps 1992 est né un conflit résultant de la dissolution de la société Easy Three formée par les appelants et M. Harold Head.

i. Ceux-ci sont arrivés à un règlement en mai 1992 quant à la dissolution de la société, aux termes duquel M. Harold Head devait verser aux appelants la somme de 49 700 $, dont 42 000 $ ont été versés au cours de l’année d’imposition 1992.

j. Des dépenses relatives aux études de 3 550 $ pour l’exercice terminé le 31 juillet 1991, de 6 400 $ pour l’exercice terminé le 31 juillet 1992 et de 2 850 $ pour l’exercice terminé le 31 juillet 1993, ont été déduites de l’impôt sur le revenu de Daniel William Rugby et incluses à titre dépenses dans le calcul de la valeur nette, alors que ces montants avaient en fait été acquittés par sa fille, qui avait engagé ces dépenses; M. Rigby avait déduit ces dépenses de son impôt sur le revenu.

k. Revenu Canada a inclus les honoraires d’avocats d’un montant de 2 047 $ dans une liste de dépenses personnelles de Daniel William Rigby pour l’exercice terminé le 31 juillet 1992;

l. Revenu Canada a inclus les honoraires d’avocats d’un montant de 2 047 $ dans une liste de dépenses personnelles de M. Walter Lunn pour l’exercice terminé le 31 juillet 1992.

m. Peu après la fin de la période de vérification de la valeur nette terminée le 31 juillet 1993, Daniel William Rigby a reçu des indemnités d’assurance-invalidité et une pension de retraite du Canada qui, cependant, ont couvert et payé les indemnités attribuables à l’exercice terminé le 31 juillet 1993.

n. Au cours de l’année terminée le 31 juillet 1993, l’appelant, M. Walter Lunn, a déduit de son impôt sur le revenu des frais d'études de 1 480 $ relativement aux frais universitaires de sa fille, Mme Janet Lunn, frais qui avaient en fait été acquittés par cette dernière.

o. Au cours de l’année terminée le 31 juillet 1993, Mme Janet Lunn a reçu un prêt étudiant de 350 $.

p. Au cours des années d’imposition visées, Walter et Anne Lunn ont engagé les dépenses personnelles suivantes :

Walter et

Anne Lunn

DÉPENSES PERSONNELLES

1991

1992

1993

RÉPARATIONS

Résidence

DÉPENSES DU MÉNAGE

Chauffage

1 000 $

1 000 $

1 000 $

Électricité

720 $

720 $

720 $

Câble

250 $

250 $

250 $

Assurance (immeuble)

150 $

150 $

150 $

Impôt foncier

500 $

500 $

500 $

VÉHICULES À MOTEUR

Assurance

930 $

930 $

930 $

FRAIS DIVERS

Dons

280 $

991 $

639 $

Livres, magazines

0 $

0 $

0 $

Assurance-vie

720 $

720 $

720 $

Nettoyage à sec

0 $

0 $

0 $

Barbier/coiffeur

60 $

60 $

60 $

Vêtements

240 $

240 $

240 $

Entretien ménager

0 $

0 $

0 $

Tapis

0 $

0 $

0 $

Électroménagers

0 $

0 $

0 $

Rideaux

Literie

Frais d'études

0 $

0 $

1 480 $

Honoraires d’avocats

2 047 $

INTÉRÊT SUR PRÊT PERSONNEL

Banque

Véhicules

0 $

0 $

0 $

Autres

0 $

0 $

0 $

o. Au cours des années d’imposition visées, William et Judith Rigby ont engagé les dépenses personnelles suivantes :

William et

Judith Rigby

DÉPENSES PERSONNELLES

1991

1992

1993

RÉPARATIONS

Résidence

DÉPENSES DU MÉNAGE

Chauffage

1 000 $

1 000 $

1 000 $

Électricité

720 $

720 $

720 $

Câble

250 $

250 $

250 $

Assurance (immeuble)

150 $

150 $

150 $

Impôt foncier

500 $

500 $

500 $

VÉHICULES À MOTEUR

Assurance

632 $

632 $

632 $

CHARGES DIVERSES

Dons

10 $

10 $

10 $

Livres, magazines

00 $

00 $

00 $

Assurance-vie

720 $

720 $

720 $

Nettoyage à sec

Barbier/coiffeur

0 $

0 $

0 $

Vêtements

Entretien ménager

Tapis

Électroménagers

500 $

Rideaux

Literie

Frais d'études

3 550 $

6 400 $

2 850 $

Honoraires d’avocats

2 047 $

INTÉRÊT SUR PRÊT PERSONNEL

Banque Royale

Chalet

1 500 $

2 000 $

Autre

210 $

210 $

210 $

Fait à Sydney (Nouvelle-Écosse) le 28 mars 2000.

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Avocat de l’intimée

“ signature ”    Par : “ signature ”

RALPH W. RIPLEY    JOHN SMITHERS

Avocat des appelants    Avocat de l’intimée

[3] Les personnes suivantes ont témoigné pour le compte des appelants : M. Walter Lunn, Mme Judith Rigby, M. Harold Head, M. Stephen Daix, Mme Ann Gillis, Mme Alma Rigby York et M. John Anderson, C.A., le comptable agréé des appelants. Les témoins de l’intimée sont M. Aleen MacIsaac, C.G.A., et M. Reg Martin, C.A., étant tous deux des employés de Revenu Canada qui ont travaillé aux vérifications dont il est question ici. M. Rigby a parfois été appelé “ Billy ”, “ William ” ou “ Daniel ” au cours de l'audience.

[4] Les appelants ont interjeté appel à l’encontre des cotisations suivant la valeur nette pour 1991, 1992 et 1993. Les paragraphes 6, 7 et 8 de la réponse à l’avis d’appel de M. Walter Lunn était ainsi libellés :

[TRADUCTION]

6. Au moyen d’avis de nouvelle cotisation datés du 4 janvier 1996, le ministre a avisé l’appelant que l’impôt à payer pour les années d’imposition 1991, 1992 et 1993 avait fait l’objet de nouvelles cotisations après que le ministre avait rajouté au revenu total de l’appelant les montants suivants :

Année d’imposition

Augmentation du revenu total

1991

35 051 $

1992

29 934 $

1993

11 157 $

Il a également indiqué à l’appelant que des pénalités lui avaient été imposées.

L’appelant a déposé des avis d’opposition valides. En réponse à ceux-ci, le ministre a émis des avis de nouvelles cotisations datés du 22 avril 1998, dans lesquels il indiquait à l’appelant que son impôt à payer pour les années d’imposition 1991, 1992 et 1993 avait fait l’objet de nouvelles cotisations et que les montants ajoutés au revenu total de l’appelant étaient rajustés selon les montants suivants :

Année d’imposition

Augmentation du revenu total

1991

32 676 $

1992

19 987 $

1993

6 075 $

Il a également indiqué à l’appelant que des pénalités lui avaient été imposées.

7. Pour procéder à la nouvelle cotisation de l’appelant, le ministre s’est notamment appuyé sur les hypothèses suivantes :

a) en 1985, l’appelant et M. William Rigby, qui étaient alors associés (ci-après, les “ associés ”), ont commencé à exploiter un dépanneur et, en 1989, ils ont acheté un second magasin;

b) en 1992, ils ont fait construire un nouveau magasin à l’emplacement du second magasin, et ont fermé les deux premiers magasins;

c) au cours de chacune des années d’imposition faisant l’objet du présent appel, les associés ont exploité de 8 à 10 appareils de pari vidéos dans leur(s) magasin(s);

d) les associés ont omis de tenir des livres et registres appropriés pour les revenus tirés des appareils de pari vidéos;

e) dans ses déclarations de revenu pour les années d’imposition 1991, 1992 et 1993, l’appelant n’a pas inclus la totalité de son revenu pour ces années;

f) le revenu de l’appelant au cours des années d’imposition 1991, 1992 et 1993 a été sous-évalué respectivement de 32 676 $, de 19 987 $ et de 6 075 $;

g) les montants indiqués au paragraphe f) ont été déterminés selon la méthode de la valeur nette (une copie de la Déclaration de la valeur nette personnelle est jointe aux présentes à titre d’annexe A);

h) les écarts mentionnés ci-dessus sont attribuables à la part de revenu non déclaré de l’appelant provenant des appareils de pari vidéos et des ventes non déclarées effectuées au dépanneur;

i) l’appelant, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, dans l’exercice d’un devoir ou d’une obligation imposé par la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, chap. 1 (5e suppl.), avec ses modifications (la “ Loi ”), a fait un faux énoncé ou une omission dans ses déclarations d’impôt produites pour les années d’imposition 1991, 1992 et 1993 ou y participé, consenti ou acquiescé, ce qui a fait en sorte que l’impôt qui était payable selon les renseignements fournis par l’appelant dans ses déclarations d’impôt produites pour ces années était inférieur à l’impôt qu’il devait réellement, selon des différences respectives de 9 358 $, de 4 229 $ et de 1 064 $;

j) en conséquence de la sous-évaluation du revenu, le ministre a imposé des pénalités de 4 680 $, de 2 114 $ et de 532 $, à l’appelant en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi pour les années d’imposition 1991, 1992 et 1993, respectivement.

B. QUESTIONS DEVANT ÊTRE TRANCHÉES

8. Il s’agit de décider :

a) si l’appelant a sous-estimé son revenu pour les années d’imposition 1991, 1992 et 1993 dans ses déclarations de revenus;

b) si les montants établis par le ministre étaient raisonnables dans les circonstances;

c) si le ministre a correctement imposé les pénalités selon le paragraphe 163(2) de la Loi pour ces années.

ANNEXE A

Walter et Anne Lunn

Glace Bay (N.-E.)

Tableau comparatif de l’actif, du passif et de la valeur nette

Pour la période du 1er août 1990 au 31 juillet 1993

1er juillet 1990

31 juillet 1991

31 juillet 1992

31 juillet 1993

ACTIF

Actif personnel

Encaisse

100 $

100 $

100 $

100 $

Compte d’épargne

326,18 $

581,43 $

1064,18 $

612,46 $

Résidence -Walsh Lane, Glace Bay

50 000 $

50 000 $

50 000 $

50 000 $

Terrain - Walsh Lane

5 000 $

5 000 $

5 000 $

5 000 $

Terrain - 141, rue Coldbrook, Syd. River

8 000 $

8 000 $

8 000 $

8 000 $

Chev. Cavalier 4 portes 1989

0 $

0 $

0 $

5 000 $

Chev. 4 portes 1980

0 $

0 $

350 $

350 $

Chev. 4 portes 1989

10 000 $

10 000 $

10 000 $

10 000 $

Investissement dans Easy Three Fish

0 $

30 000 $

0 $

0 $

Comptant avancé à B & W Enterprises

0 $

0 $

31 000 $

31 000 $

Solde versé par Easy Three Fish

0 $

0 $

3 850 $

2 850 $

Biens locatifs

Nil

0 $

0 $

0 $

0 $

Actif commercial

Compte de capital de la société

27 517 $

42 630 $

46 706 $

50 859 $

ACTIF TOTAL

100 943,18 $

146 311,43 $

156 070,18 $

163 771,46 $

1er juillet 1990

31 juillet 1991

31 juillet 1992

31 juillet 1993

PASSIF

Dettes personnelles

Nil

0 $

0 $

0 $

0 $

Dettes de l’entreprise

Voir compte de la société

0 $

0 $

0 $

0 $

PASSIF TOTAL

0 $

0 $

0 $

0 $

VALEUR NETTE

100 943,18 $

146 311,43 $

156 070,18 $

163 771,46 $

Valeur nette à la clôture de l’exercice précédent

100 943,18 $

146 311,43 $

156 070,18 $

Augmentation (réduction) de la valeur nette

45 368,25 $

9 758,75 $

7 701,28 $

31 juillet 1991

31 juillet 1992

31 juillet 1993

Augmentation (réduction) de la valeur nette

45 368,25 $

9 758,75 $

7 701,28 $

RAJUSTEMENTS

Ajouts

Dépenses personnelles

18 700 $

21 458 $

20 539 $

Impôt sur le revenu, RPC, A.-E., etc. pour lui-même

1 372 $

5 566 $

1 287 $

Impôt sur le revenu, RPC, A.-E., etc. pour son épouse

(899 $)

(962 $)

(1 202 $)

RAJUSTEMENTS TOTAUX À AJOUTER

19 173 $

26 062 $

20 624 $

Déductions

Revenu de son épouse

7 056 $

0 $

0 $

RAJUSTEMENTS TOTAUX À DÉDUIRE

7 056 $

0 $

0 $

Revenu total par valeur nette

57 485,25 $

35 820,75 $

28 325,28 $

Moins : revenu total déclaré

24 809 $

15 834 $

22 250 $

Différence de la valeur nette

32 676,25 $

19 986,75 $

6 075,28

58 738,28 $

[Selon la preuve présentée, les rubriques indiquant la date du 1er juillet 1990 dans la première colonne devraient se lire comme indiquant le 31 juillet 1990.]

Walter et

Anne Lunn

DÉPENSES PERSONNELLES

1991

1992

1993

NOURRITURE

7 000 $

7 000 $

7 000 $

RÉPARATIONS

Résidence

500 $

500 $

500 $

DÉPENSES DU MÉNAGE

Chauffage

1 000 $

1 000 $

1 000 $

Électricité

720 $

720 $

720 $

Câble

250 $

250 $

250 $

Téléphone

900 $

900 $

900 $

Assurance (Immeuble)

150 $

150 $

150 $

Impôt foncier

500 $

500 $

500 $

LOISIRS

Sports/divertissement

3 200 $

3 200 $

3 200 $

VÉHICULES À MOTEUR

Essence

1 200 $

1 200 $

1 200 $

Réparations et pneus

500 $

500 $

500 $

Assurance

930 $

930 $

930 $

FRAIS DIVERS

Dons

280 $

991 $

639 $

Livres, magazines

0 $

0 $

0 $

Assurance-vie

720 $

720 $

720 $

Nettoyage à sec

0 $

0 $

0 $

Barbier/coiffeur

60 $

60 $

60 $

Vêtements

240 $

240 $

240 $

Entretien ménager

0 $

0 $

0 $

Meubles

500 $

500 $

500 $

Tapis

0 $

0 $

0 $

Électroménagers

0 $

0 $

0 $

Rideaux

25 $

25 $

25 $

Literie

25 $

25 $

25 $

Frais d'études

0 $

0 $

1 480 $

Honoraires d’avocats

2 047 $

INTÉRÊT SUR PRÊT PERSONNEL

Banque

Véhicules

0 $

0 $

0 $

Autres

0 $

0 $

0 $

DÉPENSES TOTALES

18 700 $

21 458 $

20 539 $

[5] Les paragraphes 7, 8 et 9 de la réponse à l’avis d’appel de M. William Rigby contenaient des dispositions correspondant aux paragraphes 6, 7 et 8 de la réponse à l'avis d'appel de M. Lunn. Les seules différences se retrouvent au paragraphe 7 et à l’hypothèse exposée à l'alinéa 8g), libellés comme suit :

7. L’appelant a déposé des avis d’opposition valides. En réponse à ceux-ci, le ministre a établi des avis de nouvelle cotisation datés du 22 avril 1998 dans lesquels il indiquait à l’appelant que son impôt à payer pour les années d’imposition 1991, 1992 et 1993 avait fait l’objet de nouvelles cotisations et que les montants ajoutés au revenu total de l’appelant étaient rajustés selon les montants suivants :

Année d’imposition

Augmentation du revenu total

1991

37 878 $

1992

29 961 $

1993

27 129 $

Le ministre a également indiqué à l’appelant que des pénalités lui avaient été imposées.

8. Pour procéder à la nouvelle cotisation de l’appelant, le ministre s’est notamment reposé sur les hypothèses suivantes :

[...]

g) les montants sous-évalués ont été déterminés selon la méthode de la valeur nette (une copie de la Déclaration de la valeur nette personnelle est jointe à titre d’annexe A);

[...]

ANNEXE A

William et Judith Rigby

Lingan (N.-E.)

Tableau comparatif de l’actif, du passif et de la valeur nette

Pour la période du 1er août 1990 au 31 juillet 1993

1er juillet 1990

31 juillet 1991

31 juillet 1992

31 juillet 1993

ACTIF

Actif personnel

Encaisse

100 $

100 $

100 $

100 $

Encaisse provenant du tirage du lot de pièces de 1 $

0 $

0 $

0 $

6 908 $

Encaisse provenant de la loterie de la UCCB

0 $

0 $

0 $

1 648 $

Compte d’épargne – Banque Royale

11 883,94 $

13 202,83 $

44,95 $

13 782,47 $

Résidence – Lingan Road

35 000 $

35 000 $

35 000 $

35 000 $

Résidence – Shore Road

60 000 $

60 000 $

60 000 $

60 000 $

Résidence d’été - Mira

0 $

0 $

52 000 $

52 000 $

Ford 2 portes 1984

3 000 $

3 000 $

3 000 $

3 000 $

Mercury 4 portes 1979

1 000 $

1 000 $

1 000 $

1 000 $

GMC 1978

1 000 $

1 000 $

1 000 $

1 000 $

Comptes débiteurs Billy & Walter Enterprises Ltd.

0 $

0 $

0 $

11 544 $

Chrysler Daytona 1988

0 $

0 $

7 000 $

7 000 $

Investissement dans Easy Three Fish

0 $

30 000 $

0 $

0 $

Argent comptant avancé - B & W Enterprises

0 $

0 $

30 000 $

30 000 $

Rénovations - résidence d’été

0 $

0 $

1 000 $

1 000 $

Solde Easy Three Fish

0 $

0 $

3 850 $

2 850 $

Argent comptant provenant de M. Stephen Daix

0 $

0 $

30 000 $

30 000 $

Biens locatifs

3475, ave Ross, New Waterford

30 000 $

30 000 $

30 000 $

30 000 $

Actif commercial

Compte de capital de la société

27 517 $

42 630 $

46 706 $

54 467 $

ACTIF TOTAL

169 500,94 $

215 932,83 $

300 700,95 $

341 299,47 $

PASSIF

Dettes personnelles

Banque Royale - Propriété Mira

0 $

0 $

29 600 $

23 600 $

Prêt de M. Stephen Daix

0 $

0 $

30 000 $

30 000 $

Dettes de l’entreprise

PASSIF TOTAL

0 $

0 $

59 600 $

53 600 $

VALEUR NETTE

169 500,94 $

215 932,83 $

241 100,95 $

287 699,47 $

Valeur nette à la clôture de l’année précédente

169 500,94 $

215 932,83 $

241 100,95 $

Augmentation (diminution) de la valeur nette

46 431,89 $

25 168,12 $

46 598,52 $

31 juillet 1991

31 juillet 1992

31 juillet 1993

Augmentation (diminution) de la valeur nette

46 431,89 $

25 168,12 $

46 598,52 $

RAJUSTEMENTS

Ajouts

Dépenses personnelles

21 562 $

28 459 $

23 862 $

Impôt sur le revenu, R.P.C., A.-E., etc., pour lui-même

47 $

3 324 $

606 $

0 $

0 $

0 $

0 $

0 $

RAJUSTEMENTS TOTAUX À AJOUTER

21 609 $

31 783 $

24 468 $

Déductions

Revenu de son épouse

0 $

0 $

0 $

Gains de la loterie de la UCCB

0 $

0 $

1 648 $

Gains de la loterie de Youth Bound Limited

0 $

0 $

6 908 $

Contribution de Monique

9 653,50 $

Gîte et couvert payé par les enfants

5 460 $

3 920 $

3 640 $

Dépôt de Mme Alma Rigby

7 000 $

RAJUSTEMENTS TOTAUX À DÉDUIRE

5 460 $

10 920 $

21 849,50 $

Revenu total par valeur nette

62 580,89 $

46 031,12 $

49 217,02 $

Moins : revenu total déclaré

24 703 $

16 070 $

22 088 $

Différence de la valeur nette

37 877,89 $

29 961,12 $

27 129,02 $

94 968,03 $

[Selon la preuve présentée, les rubriques indiquant la date du 1er juillet 1990 dans la première colonne devraient se lire comme indiquant le 31 juillet 1990.]

William et

Judith Rigby

DÉPENSES PERSONNELLES

1991

1992

1993

NOURRITURE

7 000 $

7 000 $

7 000 $

RÉPARATIONS

Résidence

500 $

500 $

500 $

DÉPENSES DU MÉNAGE

Chauffage

1 000 $

1 000 $

1 000 $

Électricité

720 $

720 $

720 $

Câble

250 $

250 $

250 $

Téléphone

900 $

900 $

900 $

Assurance (immeuble)

150 $

150 $

150 $

Impôt foncier

500 $

500 $

500 $

LOISIRS

Sports/divertissement

3 200 $

3 200 $

3 200 $

VÉHICULES À MOTEUR

Essence et huile

1 200 $

1 200 $

1 200 $

Réparations et pneus

500 $

500 $

500 $

Assurance

632 $

632 $

632 $

FRAIS DIVERS

Dons

10 $

10 $

10 $

Livres, magazines

120 $

120 $

120 $

Assurance-vie

720 $

720 $

720 $

Nettoyage à sec

50 $

50 $

50 $

Barbier/coiffeur

60 $

60 $

60 $

Vêtements

240 $

240 $

240 $

Entretien ménager

Meubles

500 $

500 $

Tapis

Électroménagers

500 $

Rideaux

25 $

25 $

25 $

Literie

25 $

25 $

25 $

Frais d'études

3 550 $

6 400 $

2 850 $

Honoraires d’avocats

2 047 $

INTÉRÊT SUR PRÊT PERSONNEL

Banque Royale

Chalet

1 500 $

2 000 $

Autre

210 $

210 $

210 $

DÉPENSES TOTALES

21 562 $

28 459 $

23 862 $

[6] Les hypothèses a), b) et d) sont exactes. Le nombre maximum d’appareils de pari vidéos (les “ appareils de poker ”) dont les appelants étaient propriétaires en 1991, 1992 et 1993 était de 8. Les exercices de la société se terminaient le 31 juillet de chaque année. Les vérifications ont porté sur ces exercices. M. Lunn a témoigné qu’ils recevaient 50 % de l’argent des appareils de poker, lesquels étaient installés dans les magasins au cours de ces années de façon à ne pas être vus. Il a également témoigné qu’un représentant des propriétaires des appareils et lui-même ouvraient les appareils aux deux semaines, enregistraient les chiffres, retiraient l’argent, rajustaient les gains (qui étaient versés à partir de l’encaisse de la société) et répartissaient les produits à parts égales. Aucun registre de ces opérations n’a été mis à la disposition de Revenu Canada par la société ou les propriétaires des appareils. Un litige est en cours entre Revenu Canada et un des propriétaires (M. Xidos ou sa compagnie) afin d’obtenir les registres que le propriétaire détient quant à ces appareils et à d’autres appareils de poker du cap Breton.

[7] Les appareils de poker étaient illégaux. Divers crimes ont été commis relativement à ces appareils. Il est arrivé qu’un voleur quitte le magasin en emportant l’un des appareils, devant un employé en service. Un type de fraude s’est développé avec l’insertion d'une baguette flexible qui augmentait erronément le comptage pour obtenir des gains. De plus, les clés des appareils volés pouvaient être utilisées pour retirer les pièces de monnaie des appareils en fonction. Il était impossible de porter plainte quant à ces activités puisque les appareils étaient illégaux. Si la G.R.C. avait découvert les appareils, elle les aurait confisqués.

[8] MM. Lunn et Rigby sont des dépeceurs de métier. Ils ont fait connaissance alors qu’ils étaient des employés de Allen’s Grocery, à New Waterford, au cap Breton (Nouvelle-Écosse). M. Lunn est originaire de la partie continentale de la Nouvelle-Écosse mais M. Rigby est né au cap Breton. En 1974, ils étaient tous deux des dépeceurs qualifiés. M. Lunn a indiqué que, en 1978, ils ont commencé à préparer des oeufs au vinaigre et des saucisses polonaises; de plus, Mme Rigby préparait des sandwiches (sous-marins). M. Lunn a indiqué que M. Rigby et lui-même vendaient ces aliments aux bars et établissements similaires du cap Breton et gardaient l’argent de ces ventes faites au noir. Il a indiqué qu’ils avaient agi ainsi sur une période de 10 ans et que cela leur permettait de gagner environ 5 000 $ par an chacun, argent qu’ils gardaient à leur domicile. Il a indiqué qu’au cours des années visées par les présentes, ils avaient chacun environ 50 000 $ en liquide à leur domicile. Mme Rigby a indiqué ne rien savoir à propos de cet argent. En 1985, l’entreprise Allen’s a fermé ses portes et MM. Lunn et Rigby ont ouvert leur propre dépanneur, le “ B & W Meat Market ”, en tant qu’associés à parts égales, dans la ville de Scotstown, sur le côté de la rue Emerald qui appartient au comté. Ce comté était sous la surveillance de la G.R.C., qui appliquait la loi interdisant les appareils de poker. En 1989, ils ont fait l’objet d’une descente alors qu’ils détenaient des appareils de poker dans leur magasin. La G.R.C. a confisqué ces appareils (qui appartenaient alors à M. Firth). Ils ont alors acheté le “ Blue Store ” sur le côté de la rue Emerald qui appartient à la ville de New Waterford, celle-ci étant sous la surveillance de la police de New Waterford, qui n’appliquait pas la loi interdisant les appareils de poker. Ils exploitaient les deux magasins.

[9] Ils ont construit un nouveau magasin en 1992. Ils y ont déménagé le jour de la fête du Travail et ont fermé les deux autres magasins. Le nouveau magasin comprenait un local distinct conçu pour huit appareils de poker, qu’ils ont loués auprès du successeur de M. Firth, M. John Xidos, et installés dans le magasin.

[10] M. Martin, qui a agi à titre de vérificateur pour Revenu Canada dans ce dossier, a eu connaissance du prêt des appareils de poker des appelants dans un autre dossier, et a appris l’existence des appareils grâce à une entente de liaison avec la G.R.C. Il a visité les locaux en 1990 et a vu les chaises des appareils de poker, mais pas les appareils eux-mêmes. M. Martin a par la suite entrepris sa vérification dans le cadre du programme de Revenu Canada concernant les appareils de poker à titre d’activité criminelle sur l’île du Cap-Breton. Lorsqu’il a entamé la vérification, il était conscient de la possibilité que cela entraîne une vérification de la valeur nette. Une fois sa vérification entreprise, il a découvert :

(1) qu’il n’existait aucun dossier indiquant le nombre de parties jouées sur les appareils de poker des appelants. Lorsque le propriétaire et les appelants vérifiaient les appareils et retiraient l’argent, les compteurs des appareils étaient remis à zéro et le compte recommençait donc du début.

(2) les appelants ne disposaient d’aucun document faisant état de leur lecture des compteurs et pouvant justifier les gains bruts qu’ils retiraient prétendument aux deux semaines. M. Lunn a indiqué avoir noté la lecture des compteurs à un certain moment, mais il a détruit ces dossiers, de peur que la G.R.C. ne les saisisse.

(3) M. Xidos, le propriétaire des appareils de poker au moment de la vérification, a refusé de remettre ses dossiers à Revenu Canada, ce qui fait toujours l’objet d’un litige au moment de la présente audition. Puisque la vérification a été effectuée, à l’origine, à cause des appareils de poker et qu’il est impossible de vérifier les chiffres des appelants, il a fallu procéder à une estimation de la valeur nette. L’hypothèse d), quant à chacun des appelants, vise l’omission de déclarer un revenu tiré des appareils. L’hypothèse h) se réfère donc à l’omission de déclarer des ventes de biens dans leurs dépanneurs.

Pour ces raisons, la Cour arrive à la conclusion que les vérifications de la valeur nette constituaient la marche à suivre appropriée en l'espèce.

[11] M. Lunn était le teneur de livres pour toutes les entreprises et M. Rigby était à tout événement l’intermédiaire. Ils ont néanmoins travaillé dans les magasins en alternance selon des quarts de travail et, à divers moments, leurs filles ont travaillé dans les magasins. Ceux-ci étaient situés dans des quartiers défavorisés et les effractions et les vols étaient monnaie courante.

[12] Selon M. Lunn, le financement de la construction d’un nouveau magasin en 1992 provenait des sources suivantes :

Un prêt de M. Daix, le “ beau-père ” de M. Rigby, à ce dernier

30 000,00 $

(M. Daix a confirmé avoir prêté la somme de 30 000 $ à M. Rigby.)

Argent recouvré par MM. Lunn et Rigby lors d’une poursuite à l’encontre de M. Head, selon ce qui est indiqué dans l’exposé conjoint des faits

31 000,00 $

Prêt de M. John Xidos en contrepartie de la création d’un local privé pour les appareils de poker dans le nouveau magasin

25 000,00 $

(La pièce R-2, onglet 14, établit que M. Xidos a consenti ce prêt sans intérêt le 13 juin 1992 à Billy and Walter Enterprises Limited; il était garanti par les appelants. Ces derniers ont été dispensés du remboursement du prêt le 21 juin 1993.)

M. Martin a témoigné que les associés avaient également obtenu un prêt de la banque de

33 000,00 $

TOTAL

119 000,00 $

[13] M. Lunn a témoigné que M. Rigby et lui-même avaient à l’origine investi 31 000 $ dans l’entreprise de pêche avec M. Head (“ Easy Three ”), soit 15 500 $ chacun qu’ils gardaient en argent liquide à leur résidence; cet argent provenait de leur entreprise d’oeufs au vinaigre, de saucisses et de sandwiches. Cela s’est déroulé le 15 octobre 1990 (pièce R-1, onglet 59). La première pêche (de homards) a débuté le 15 mai 1991 et, le 15 juin, les associés s’étaient séparés; une poursuite a suivi. Celle-ci s’est réglée le 21 mai 1992 : les appelants ont reçu 42 000 $ et le solde du règlement de 49 700 $ a été payé au cours des quatre années suivantes.

[14] Néanmoins, M. Lunn avait indiqué à M. Martin, à l’origine, que les 30 000 $ provenaient d’un prêt que lui avait consenti son beau-frère, M. Findlay McKillop. En contre-interrogatoire, M. Lunn a admis que cette histoire constituait un mensonge.

[15] M. Daix et Mme Rigby ont soutenu que les 30 000 $ avaient été empruntés par M. Rigby auprès de M. Daix et ont fait référence à une décharge d’un montant de 80 000 $ visant la succession de M. Daix, que M. Rigby avait signée en juillet 1994 (pièce A-1, onglet 23). Pourtant, cette décharge ne porte aucune mention particulière visant la somme de 30 000 $. Selon l’intimée, cette somme fait également partie de la valeur nette qui provient des appareils de poker.

[16] Il existe plusieurs divergences quant à la preuve se rapportant au prêt de 30 000 $ fait par M. Daix à M. Rigby :

(1) Mme Rigby n’a pu témoigner que par ouï-dire quant à ce qu’a dit son mari sur les questions d’argent. Même ces renseignements étaient limités puisque son mari ne lui donnait aucun détail sur le sujet. M. Daix a précisé que le prêt de 30 000 $ était constitué d’environ 6 billets de 50 $ et de billets de 20 $. Tout l’argent avait été remisé pendant des années et sentait horriblement mauvais. Il a été remis à M. Rigby en avril ou mai 1992. M. Martin n’a pu trouver aucune preuve du dépôt de tous ces billets de 20 $, qui devrait être facile à se rappeler en raison de leur mauvaise odeur. Des employés d’une caisse populaire qui servaient M. Daix se sont souvenus d’autres sommes de la même source (des paquets cachés dans une cheminée) en raison de leur état et de leur mauvaise odeur. Par conséquent, la Cour croit que M. Daix a donné cet argent à M. Rigby mais ne croit pas qu’il ait servi à la construction du magasin.

(2) Le prêt de M. Daix a été consenti à M. Rigby uniquement, et non à la société.

(3) Personne n’a allégué que M. Dunn aurait déposé une avance équivalente de 30 000 $ dans le compte de construction de la société.

(4) M. Lunn a raconté deux versions des faits à M. Martin quant à la provenance de la somme de 30 000 $. Selon la première version, M. McKillop lui aurait prêté l’argent. M. Lunn a avoué que cela était un mensonge. M. Lunn et M. Rigby ont également raconté que cet argent provenait de M. Daix.

Pour les raisons qui précèdent, la Cour ne croit pas que la somme de 30 000 $, que l’on a soutenu être un prêt consenti par M. Daix, était réellement l’argent de M. Daix. Il s’agissait plutôt d’argent provenant des appareils de poker.

[17] M. John Anderson, C.A., le comptable de la société, a témoigné que les coûts du nouvel immeuble, de l’équipement de réfrigération et du revêtement du stationnement étaient les suivants, après avoir été arrondis :

Construction

77 000 $

Équipement

20 000

Revêtement

12 000

Total

109 000 $

[18] M. Anderson a cru comprendre des associés que l’argent provenait des sources suivantes :

Banque Royale

33 000 $

M. Xidos

25 000

M. McKillop

30 000

M. Daix

30 000

Total

118 000 $

M. Anderson a néanmoins avoué ce qui suit :

(1) Les associés ne lui avaient jamais parlé de l’affaire des saucisses polonaises, des oeufs au vinaigre et des sandwiches avant que la vérification ne débute.

(2) Ils ne lui avaient jamais parlé, avant que la vérification ne débute, de la société de pêche “ Easy Three ” qu'ils avaient formée avec M. Head.

(3) Ils l'ont induit en erreur lorsqu'ils ont soutenu que M. McKillop leur avait fourni du financement.

(4) Ils ne lui ont jamais parlé du bien locatif de M. Rigby situé au 3475, rue Ross.

[19] De plus, M. Anderson a traité le prêt de 25 000 $ de M. Xidos comme étant un prêt consenti à la société. En fait, il a été consenti à Billy and Walter Enterprises Limited (la “ compagnie ”), garanti par une sûreté grevant le terrain de celle-ci et cautionné par MM. Lunn et Rigby (pièce R-2, onglet 14) le 13 juin 1992. Les appelants ont déposé l’argent de M. Xidos dans leur compte de construction personnel le 15 juin 1992 (pièce R-1, onglet 19, page 8) en argent comptant, soit en billets de 20 $ et de 50 $. Une année plus tard (au cours de l’exercice 1993 de la société), M. Xidos a dispensé les appelants du remboursement de ce prêt et M. Anderson a traité le prêt en conséquence dans les états financiers de la société. Une déclaration sous serment de M. Rigby jointe à la convention de prêt atteste que les seuls actionnaires et administrateurs de la compagnie sont les deux appelants. Par conséquent, la Cour arrive à la conclusion que la compagnie a accordé à la société une remise du prêt de 25 000 $ que la compagnie avait consenti à cette dernière et que les appelants ont chacun reçu un avantage de la part de la compagnie en vertu de l’article 15 de la Loi de l’impôt sur le revenu au cours de l’exercice de la société terminé le 31 juillet 1993. La compagnie n’a jamais produit de déclaration d’impôt. L’avantage qu’a reçu chaque associé le 21 juin 1993 était de 12 500 $, soit la moitié de la somme de 25 000 $ chacun.

[20] En préparant la valeur nette, M. Martin ne s’est pas enquis du montant de l’encaisse des appelants au 1er août 1990, soit le premier jour du premier exercice de la société faisant l’objet de la vérification. On ne lui a pas parlé de l’entreprise de saucisses polonaises, d’oeufs au vinaigre et de sandwiches ni de la somme de 50 000 $ alléguée par les appelants. Cela lui a été rapporté par les appelants beaucoup plus tard et l’avocat de l'intimée soutient qu’il s’agit d’une histoire fabriquée de toutes pièces.

[21] Il ne fait aucun doute que si M. Martin n’a pas été mis au courant plus tôt de l’existence de l’encaisse, c’est en partie parce que l’avocat des appelants n’a pas répondu à certaines des questions posées dans le cadre de la vérification et, dans une lettre datée du 7 juillet 1995, la possibilité de procéder à une “ enquête ” en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (pièce R-2, onglet 42) a été soulevée. C’est à ce moment que la vérification a pris fin et que les présentes cotisations ont été établies.

[22] Néanmoins, les faits dont disposait M. Martin étaient suffisants pour qu’il puisse poser l’hypothèse que chacun des appelants disposait d’une encaisse de 100 $ au début de chaque exercice. Ces faits étaient notamment les suivants :

Chacun des appelants a fait état, en guise de revenu, d’un retrait de 200 $ par mois, en plus de la nourriture et des fournitures pour le ménage en provenance de leur magasin.

Au cours des périodes faisant l’objet des cotisations, M. Rigby avait une épouse et trois filles à la maison, bien qu’une de ses filles ait quitté le domicile pour quelques mois en raison de ses études. M. Lunn avait une épouse et deux enfants à la maison. La seule preuve indiquant que d’autres membres de la famille travaillaient hors du domicile sont les divers témoignages concernant leur travail dans le dépanneur.

Leurs maisons et leurs véhicules étaient payés, à l’exception du chalet, acheté par M. Rigby en 1993 et hypothéqué, pour lequel les versements ont débuté en juin ou juillet 1993, au cours de son dernier exercice.

À ce moment, les appelants avaient avoué lui avoir menti sur la source de la somme de 30 000 $ qu’ils avaient soutenu avoir emprunté à M. McKillop.

M. Martin savait que les appelants avaient avoué bénéficier d’un revenu de 3 200 $ par mois (un peu plus de 40 000 $ par an) provenant de ce qu’il a calculé être huit appareils de poker, selon les prises de courant qui avaient été installées pour eux.

[23] Selon les calculs de M. Martin, si l’on fait abstraction des gains tirés des appareils de poker, les gains nets tirés du dépanneur semblent être d’environ 11 % par année. Selon M. Martin, cela est trop peu. M. Anderson a confirmé que, pour un dépanneur, 16 % représentait un minimum et que, en deçà de cette limite, il fallait commencer à s’inquiéter. M. Anderson a calculé une marge de 20 % et a utilisé ce chiffre pour réduire le coût d’achat de marchandises par les appelants dans leur magasin. Cette façon de faire de M. Anderson confirme que, lorsqu’il a discuté des marges, il faisait référence à la marge visant les marchandises et non aux gains bruts tirés des appareils de poker.

[24] Les responsabilités financières qui incombaient aux appelants pour faire vivre leur famille, entretenir et utiliser leurs véhicules et leurs propriétés et payer le coût des investissements relatifs à tout cela nécessitait plus que la “ nourriture ” prise du magasin, les retraits de 200 $ par mois et les 5 000 $ par an tirés de la vente illicite de saucisses, d’oeufs et de sandwiches. La maison de M. Rigby est sur la rive d’un plan d’eau et la maison de M. Lunn est confortable et entourée d’une très haute clôture. Ces deux hommes avaient besoin de beaucoup plus d’argent pour garder ne serait-ce que le modeste train de vie qu’ils ont bien voulu admettre.

[25] Compte tenu de ces facteurs, la Cour accepte l’hypothèse de M. Martin quant à l’encaisse au début de chaque année. La preuve qu’ont présentée les appelants pour réfuter cela n’a pas consisté à fournir des relevés de comptes bancaires personnels ou des renseignements similaires. Ils ont préféré raconter l’“ histoire ” des 50 000 $ en liquide provenant de la vente d’oeufs au vinaigre, de saucisses polonaises et de sandwiches.

[26] L’“ histoire ” visant l’encaisse des appelants est rejetée. Il se peut qu’ils aient vendu des oeufs au vinaigre, des saucisses polonaises et des sandwiches, même si aucun présumé client n’a témoigné en ce sens. Mais la Cour ne croit pas que leur encaisse provienne de ces activités. Je ne le crois pas en raison des faits 1), 2) et 3) décrits au paragraphe [22] ci-dessus. De plus, ils ont avoué le mensonge ayant trait à M. McKillop, et l’entreprise d’oeufs, de saucisses et de sandwiches, si elle a réellement existé, constituait de leur propre aveu du travail au noir et n’a pas été dévoilée aux autorités fiscales lorsqu'elle existait selon les dires des appelants. Compte tenu de l’ensemble de ces facteurs, que devait croire le vérificateur ?

[27] Selon l’ensemble des faits susmentionnés, la Cour conclut que les 31 000 $ investis à l’origine dans Easy Three par les appelants provenaient des appareils de poker, tout comme le prêt de 30 000 $ soi-disant consenti par M. Daix. De plus, le prêt de 25 000 $ que M. Xidos a remis aux appelants en 1993 est devenu leur propriété en vertu de l’article 15 de la Loi de l’impôt sur le revenu. Finalement, les paiements en sus du montant de 31 000 $ effectués par M. Head représentaient le remboursement d’autres fonds provenant d’appareils de poker que les appelants avaient investi dans la société Easy Three puisque, une fois encore, il s’agit de la seule source crédible d’où pouvaient provenir ces fonds.

[28] Ces réflexions mènent à la conclusion finale que le témoignage de M. Lunn n’est pas crédible. Les preuves écrites et orales relatives à ses allégations ne confirment pas ses dires et son mensonge avoué quant à M. McKillop et aux activités illicites avouées de MM. Rigby et de lui-même, combinés à leur omission d’en informer leur comptable agréé, anéantissent tout vestige de crédibilité dont il aurait bu bénéficier relativement à ces opérations. Le témoignage de Mme Rigby quant à l’argent dépensé n’est pas accepté. Elle a également soutenu ne rien savoir à propos des questions d’argent, et que M. Rigby s’occupait des finances de la famille. Cela est confirmé par le fait que ses filles remettaient leur argent à ce dernier.

[29] Par conséquent, là où les modifications aux dépenses personnelles supposées de chacun des appelants ne sont pas indiquées dans l’exposé conjoint partiel des faits, les hypothèses de l’intimé sont acceptées, sous réserve des modifications suivantes :

(1) Je conclus que l’“ investissement dans Easy Three Fish ” fait au cours de l’exercice 1991, pour la somme de 31 000 $, était un revenu provenant des appareils de poker en 1991, à raison de 15 500 $ pour chaque appelant, ce qui doit remplacer dans l’annexe A de chacun des appelants les 30 000 $ indiqués sous la rubrique “ actif ”.

(2) Je conclus que l’“ argent comptant avancé à B & W Enterprises ” (qui est le compte de construction de la société), soit un montant de 31 000 $ pour M. Lunn en 1992 et 1993, et de 30 000 $ pour M. Rigby en 1992 et 1993, et indiqué sous la rubrique “ actif ” de l’annexe A de chacun des appelants, était :

a) pour 1992, un revenu de 15 000 $ pour chacun des appelants, tiré des appareils de poker;

b) pour 1993, un montant de 12 500 $ pour chacun des appelants, représentant le prêt remis à la compagnie par M. Xidos, puis remis à chacun des appelants par la compagnie, et traité en conséquence par leur comptable, M. Anderson, et par eux-mêmes, entraînant pour eux un revenu pour 1993 en vertu de l’article 15 de la Loi de l’impôt sur le revenu.

(3) Je conclus que les autres encaissements de fonds provenant de M. Head (“ Easy Three ”) au cours des exercices sont des revenus pour les appelants, à raison de la moitié de ce montant pour chacun d’eux, de la façon décrite au paragraphe [27].

[30] La preuve montre clairement que les deux appelants ont sciemment fait de fausses déclarations à répétition quant aux exercices visés et dans leurs déclarations d’impôt pour ces exercices. Les appelants étaient des hommes d’affaires compétents et chevronnés qui, de leur propre aveu, ont monté un subterfuge, ont exercé des activités illégales et ont menti quant à leurs diverses entreprises et à la source de leurs capitaux. La Cour conclut qu’ils ont continué à ce faire dans leurs déclarations d’impôt produites pour les exercices visés. Chaque appelant a admis conserver des sommes importantes dans un coffre-fort à son domicile. Au cours de chaque exercice visé, cet argent provenait d'appareils de poker et n’était pas déclaré, et aucun dossier à son sujet n’a été déposé en preuve, mais il a été gagné au cours de cet exercice. Les sommes qui, selon l’analyse du tribunal, n’ont pas été déclarées, sont importantes comparativement aux montants que chaque appelant a déclaré aux fins de l’impôt sur le revenu. De plus, l’omission des appelants de déclarer ces montants était clairement délibérée. Pour ces motifs, les appels interjetés à l’encontre des pénalités qui ont été imposées sont admis dans la mesure de toute modification des montants pour lesquels les appelants sont imposés à la suite des conclusions déjà exposées dans les présents motifs; ces pénalités sont confirmées à tous autres égards.

[31] Les cotisations établies pour l’impôt, l’intérêt et les pénalités sont par conséquent déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations, conformément aux présents motifs.

[32] J’accorde les dépens entre parties à l’intimée quant à chacun des appels, mais un seul mémoire de frais doit être taxé pour l'audience elle-même puisqu’elle s’est déroulée sur preuve commune; les dépens relatifs à l'audience doivent être supportés conjointement par les appelants.

Signé à Edmonton (Alberta) ce 14e jour d’avril 2000.

“ D.W. Beaubier ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 31e jour d'octobre 2000.

Benoît Charron, réviseur

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