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Date: 19991014

Dossier: 96-4680-IT-G

ENTRE :

NIKOLAI KHABIBULIN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bowie, C.C.I.

[1] L'appelant était un non-résident du Canada en 1994. Le présent appel met en cause l'application de l'Accord entre le Canada et l'U.R.S.S. en matière d'impôts sur le revenu (le Traité) à un montant versé à l'appelant par Jets Hockey Ventures, une société de personnes qui, à l'époque, exploitait le club de hockey des Jets de Winnipeg et en était propriétaire. Le montant en question est le premier de deux versements de ce qui est décrit dans le contrat conclu entre l'appelant et le club de hockey comme une “ prime de signature ”. L'appelant a déclaré son revenu pour l'année d'imposition 1994 en tenant compte du fait que le premier versement de sa prime de signature était exonéré de l'impôt conformément au Traité et au sous-alinéa 110(1)f)(i) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la Loi). Le ministre du Revenu national (le ministre) a établi une cotisation à l'égard de l'appelant en tenant compte du fait que les dispositions du Traité s'appliquaient à son salaire annuel, mais qu'elles ne s'appliquaient pas à la prime de signature, lequel faisait par conséquent partie de son revenu imposable au Canada.

[2] Les parties ont convenu des faits les plus pertinents dans les termes suivants :

[TRADUCTION]

Au cours de l'année d'imposition 1994, l'appelant était un résident de la République du Bélarus de la Communauté des États indépendants et il n'était pas un résident du Canada au sens de la Loi.

L'Accord entre le Canada et l'U.R.S.S. en matière d'impôts sur le revenu (le “ Traité Canada-U.R.S.S. ”) s'applique aux résidents du Bélarus.

Au cours de l'année civile 1994, l'appelant a séjourné au Canada moins de 183 jours.

Le 15 août 1994, l'appelant a signé un contrat (le “ contrat ”) avec Jets Hockey Ventures (une société en commandite) par l'intermédiaire de son commandité, 8 Hockey Ventures Inc. (les “ Jets de Winnipeg ”).

L'appelant a été repêché par les Jets de Winnipeg et il n'était pas un joueur libre le 15 août 1994, date à laquelle il a signé le contrat avec les Jets de Winnipeg.

Le contrat a été approuvé par le président de la Ligue nationale de hockey (la “ LNH ”) le 25 août 1994.

Au mois de septembre 1994, l'appelant s'est présenté au camp d'entraînement des Jets de Winnipeg à Winnipeg (Manitoba).

À la fin du camp d'entraînement, l'appelant a été informé que la saison de la LNH allait être perturbée par un lock-out et qu'il devait fournir ses services aux Falcons de Springfield, soit un club des ligues mineures de la Ligue américaine de hockey situé à Springfield, au Connecticut.

Le lock-out imposé par les propriétaires a commencé le 1er octobre 1994, date à laquelle la saison 1994-1995 devait commencer, et il a pris fin le 13 janvier 1995 ou vers cette date. Aucune partie de la LNH n'a été disputée pendant la période du lock-out.

Au cours de l'année civile 1994, l'appelant a fourni ses services aux Jets de Winnipeg et aux Falcons de Springfield pendant 119 jours au total. Sur ces 119 jours, l'appelant a fourni des services aux États-Unis pendant 87 jours.

Conformément aux modalités du contrat conclu avec les Jets de Winnipeg, l'appelant a reçu les montants suivants (en dollars canadiens) au cours de l'année d'imposition 1994 :

Salaire 26 833 $

Prime de signature 104 123 $

Salaire pendant le camp d'entraînement 400 $

Total 131 356 $

Le montant de la prime de signature était déductible dans le calcul du revenu d'un contribuable au Canada assujetti à l'impôt en application de la partie I de la Loi.

Dans le calcul de son revenu pour l'année d'imposition 1994, l'appelant a déduit 130 753,54 $ en vertu de l'alinéa 110(1)f) de la Loi. L'appelant a fait valoir également que la prime de signature et le salaire étaient exonérés de l'impôt du Canada conformément au paragraphe 4 de l'article 12 du Traité Canada-U.R.S.S.

Dans un avis de nouvelle cotisation daté du 29 avril 1996 (la “ nouvelle cotisation ”), le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) a établi une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant pour l'année d'imposition 1994 en ramenant la déduction de 130 753,54 $ faite par l'appelant en vertu de l'alinéa 110(1)f) à 27 233 $, au motif que cette disposition ne permettait pas à l'appelant de déduire la prime de signature.

[3] Seul M. James Grossman, représentant sportif chevronné, a témoigné à l'audition. Il a négocié des contrats de recrues pour plus de 50 joueurs de hockey professionnels, y compris l'appelant. Il a témoigné que l'appelant avait été sélectionné lors du repêchage de la Ligne nationale de hockey (LNH) et que, aux termes de la convention collective de la LNH, il n'était par conséquent pas libre de négocier un contrat avec une équipe de la LNH, exception faite des Jets de Winnipeg. Il a indiqué que, lorsqu'il avait négocié pour l'appelant le premier contrat de ce dernier en Amérique du Nord, il s'était donné pour objectif d'obtenir un contrat de trois ans plus lucratif que celui que l'appelant pouvait obtenir en jouant au hockey en Russie. Il a évalué le montant à 305 000 $, et il obtenu un contrat pour ce montant, réparti de la façon suivante : un salaire garanti d'au moins 60 000 $ US par année plus une prime de signature de 125 000 $ US payable en deux versements, soit un versement de 75 000 $ US[1] le 15 juillet 1994, et un versement de 50 000 $ US le 15 juillet 1995. Le contrat prévoyait également certaines primes de rendement qui ne sont pas pertinentes en l'espèce. D'après M. Grossman, dont je retiens le témoignage, tous les contrats de recrues prévoient le paiement d'une prime de signature. Dans la présente affaire, a-t-il affirmé, il fallait obtenir le paiement d'un montant considérable au début du contrat pour que l'appelant, qui était un résident du Bélarus, puisse disposer d'une somme globale pour payer son transport jusqu'en Amérique du Nord et son installation par la suite. Il a déclaré que l'appelant avait été informé que les montants visés au contrat équivalaient à plus de 100 000 $ par année pendant trois ans.

[4] La convention collective conclue entre la LNH et les joueurs définit “ primes de signature, de présence et de sélection ” comme suit :

[TRADUCTION]

[...] s'entend de toute rémunération versée, peu importe la date du versement, au joueur qui signe un contrat de joueur, qui se présente au camp d'entraînement, qui est sélectionné pour faire partie de l'alignement de l'équipe ou qui participe à toute autre activité, sans qu'il soit tenu d'atteindre ou de dépasser un niveau donné de rendement. Tout élément non pécuniaire de valeur promis ou reçu à titre de rémunération est automatiquement réputé être une prime de signature, de présence ou de sélection. Toute rémunération payée ou promise au joueur pour des services non reliés à sa sélection pour faire partie de l'alignement de l'équipe est, sous réserve du système de recrues, réputée être une prime de signature.

Le paragraphe 14 de la convention collective stipule ceci :

[TRADUCTION]

Le club peut aussi résilier le contrat sur avis écrit donné au joueur (mais uniquement après l'obtention de renonciations de tous les autres clubs de la Ligue) si, à un moment ou à un autre, le joueur :

a) omet ou refuse de respecter les règles du club en matière d'entraînement et de comportement des joueurs, si l'omission ou le refus constitue un manquement important au contrat;

b) omet ou refuse de fournir ses services conformément aux présentes ou commet de toute autre manière un manquement important au contrat.

En cas de résiliation aux termes de l'alinéa a) ou b), le joueur a droit uniquement à la rémunération qui lui est due à la date à laquelle l'avis en question lui est donné ou à la date à laquelle l'avis est mis à la poste à son adresse, indiquée sous sa signature aux présentes, la première des dates à survenir étant retenue.

En cas de résiliation du contrat par le club pendant que le joueur est à l'extérieur avec le club pour disputer des rencontres, le versement qui est dû est payé le premier jour ouvrable suivant le retour du club chez lui.

M. Grossman a convenu que, conformément à ce paragraphe, si l'appelant avait signé son contrat et que, après avoir reçu le premier versement de la prime de signature de 75 000 $ US le 15 juillet 1994, il eût refusé de se présenter au camp d'entraînement ou de jouer au hockey comme on le lui demandait, il aurait eu le droit, en cas de résiliation par le club, de conserver le montant de 75 000 $ US.

[5] Le sous-alinéa 110(1)f)(i) de la Loi, dans la mesure où il est pertinent, est libellé dans les termes suivants :

110(1) Pour le calcul du revenu imposable d'un contribuable pour une année d'imposition, il peut être déduit celles des sommes suivantes qui sont appropriées :

[...]

f) [...] selon le cas :

une somme exonérée de l'impôt sur le revenu au Canada par l'effet d'une disposition de quelque convention ou accord fiscal avec un autre pays qui a force de loi au Canada,

[...]

Les paragraphes 1, 2 et 4 de l'article 12 du Traité sont reproduits ci-après :

ACCORD ENTRE LE CANADA ET

L'UNION DES RÉPUBLIQUES SOCIALISTES SOVIÉTIQUES

EN MATIÈRE D'IMPÔTS SUR LE REVENU

1. Sous réserve des dispositions des articles 13 et 14, les salaires, traitements et autres rémunérations similaires qu'un résident d'un État contractant reçoit au titre d'un emploi salarié ne sont imposables que dans cet État, à moins que l'emploi ne soit exercé dans l'autre État contractant. Si l'emploi y est exercé, les rémunérations reçues à ce titre sont imposables dans cet autre État.

2. Nonobstant les dispositions du paragraphe 1, les rémunérations qu'un résident d'un État contractant reçoit au titre d'un emploi salarié exercé dans l'autre État contractant ne sont imposables que dans le premier État si :

le bénéficiaire séjourne dans l'autre État pendant une période ou des périodes n'excédant pas au total 183 jours au cours de l'année civile considérée;

les rémunérations sont payées par un employeur ou pour le compte d'un employeur qui n'est pas un résident de l'autre État; et

la charge des rémunérations n'est pas supportée par un établissement stable que l'employeur a dans l'autre État.

[...]

4. Nonobstant les dispositions des paragraphes 1 et 2, les revenus qu'un résident d'un État contractant tire de ses activités personnelles exercées dans l'autre État contractant en tant qu'artiste du spectacle, tel qu'un artiste de théâtre, de cinéma, de la radio ou de la télévision, ou qu'un musicien, ou en tant que sportif, ne sont imposables que dans le premier État si ces revenus :

proviennent d'une tournée ou autres représentations publiques; ou

représentent des prix, primes et rémunérations payés aux participants et aux gagnants de représentations sportives et autres représentations et de compétitions.

Les parties ont convenu que l'issue de la présente affaire dépend de la façon dont il faut qualifier le paiement de 104 123 $. Ce montant a-t-il été payé à l'appelant pour avoir signé un contrat ou pour jouer au hockey?

[6] L'avocat de l'intimée soutient que l'appelant a reçu le montant de 104 123 $ CAN à titre de prime de signature en contrepartie intégrale ou partielle de la conclusion d'un contrat ou d'une convention de prestation de services au Canada, de sorte que le montant doit être inclus dans le revenu de l'appelant conformément au sous-alinéa 115(1)a)(v) de la Loi. L'avocat développe cette thèse dans les termes suivants aux paragraphes 5 à 9 de son plaidoyer récapitulatif :

[TRADUCTION]

5. L'appelant était un non-résident du Canada au cours de l'année d'imposition 1994. À ce titre, il devait calculer son revenu imposable conformément à l'article 115 de la Loi. La partie liminaire de l'article 115 est libellée dans les termes suivants :

115(1) Pour l'application de la présente loi, le revenu imposable gagné au Canada pour une année d'imposition d'une personne qui ne réside au Canada à aucun moment de l'année est le revenu pour l'année qui serait déterminé en application de l'article 3 :

si elle n'avait pas de revenu autre :

[...]

6. L'article 115 est une disposition restrictive, c'est-à-dire qu'elle exclut du calcul du revenu d'un non-résident certains éléments entrant dans la catégorie du “ revenu de toute provenance ” à l'article 3. En d'autres termes, le revenu de l'appelant aux fins de l'impôt du Canada se limite aux montants visés à l'article 115.

7. L'intimée fait valoir que l'appelant a gagné un revenu imposable au Canada par l'effet combiné du sous-alinéa 115(1)a)(v) et des alinéas 115(2)c.1) et 115(2)e). Le sous-alinéa 115(1)a)(v) est libellé dans les termes suivants :

115(1) Pour l'application de la présente loi, le revenu imposable gagné au Canada pour une année d'imposition d'une personne qui ne réside au Canada à aucun moment de l'année est le revenu pour l'année qui serait déterminé en application de l'article 3 :

a) si elle n'avait pas de revenu autre :

[...]

(v) dans le cas d'une personne non-résidente visée au paragraphe (2), que le total déterminé en vertu de l'alinéa (2)e) pour cette personne,

[...]

8. Lorsque la personne est une personne visée au paragraphe 115(2), le revenu de la personne non-résidente est le montant calculé conformément aux alinéas 115(2)e) et 115(2)c.1), cette dernière disposition étant reproduite ci-après :

Lorsque, au cours d'une année d'imposition, une personne non-résidente était :

[...]

c.1) une personne qui, au cours de l'année, a reçu, en vertu d'un contrat, une somme qui était déductible ou le sera dans le calcul du revenu d'un contribuable assujetti à l'impôt en vertu de la présente partie et que, indépendamment de la date de signature du contrat ainsi que sa forme et son effet, il est raisonnable de considérer comme ayant été reçue, en tout ou en partie :

soit en contrepartie intégrale ou partielle de la conclusion d'un contrat ou d'une convention de prestation de services, lorsque de tels services doivent être rendus au Canada ou de l'engagement de ne pas conclure un tel contrat ou une telle convention avec une autre partie,

(ii) soit à titre de rémunération intégrale ou partielle pour les fonctions afférentes à une charge ou à un emploi ou d'indemnisation intégrale ou partielle pour les services rendus au Canada,

les règles suivantes s'appliquent : [...]

9. Les parties pertinentes de l'alinéa 115(2)e) sont reproduites ci-après :

e) pour l'application du sous-alinéa (1)a)(v), le total déterminé en vertu du présent alinéa, au sujet de la personne non-résidente, est le total des montants suivants :

[...]

(v) les sommes visées à l'alinéa c.1) et reçues par elle au cours de l'année, sauf dans la mesure où elles doivent par ailleurs être incluses dans le calcul de son revenu imposable gagné au Canada pour l'année;

[...]

[7] L'appelant soutient que le montant en question n'a pas été payé pour la signature d'un contrat, mais qu'il faisait partie de la contrepartie totale de 305 000 $ US qui lui a été versée pour jouer au hockey pendant trois ans.

[8] Le principe qui régit l'application de traités en matière d'impôt a été formulé par le juge Addy dans l'affaire Gladden Estate v. The Queen[2], et approuvé récemment par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Crown Forest Industries c. Canada [3]:

Contrairement à une loi fiscale ordinaire un traité ou une convention en matière d'impôt doit être interprété de façon libérale, de manière à appliquer les véritables intentions des parties. Il faut éviter une interprétation littérale ou légaliste lorsque l'objet fondamental du traité pourrait être rejeté ou contrecarré dans la mesure où le point particulier à l'étude est visé. [Souligné par la Cour suprême]

[9] L'avocat de la Couronne fait valoir que les termes “ prime de signature ” figurant au contrat sont clairs et qu'il y a lieu de qualifier le paiement en se fondant sur ces termes. Pour cette raison, soutient-il, le montant payé à ce titre doit être imposé en application du sous-alinéa 115(2)c.1)(i), qui prévoit précisément l'inclusion de telles primes dans le calcul du revenu. Cela, dit-on, les différencie des montants payés à l'appelant à titre de rémunération pour jouer au hockey.

[10] À mon avis, c'est là le genre d'approche légaliste et littérale contre laquelle le juge Addy nous a mis en garde dans l'affaire Gladden Estate. L'approche qu'il convient d'adopter pour qualifier le paiement effectué en juillet 1994 se trouve dans l'arrêt Curran v. M.N.R.[4], de la Cour suprême du Canada. Dans cette affaire, l'appelant était un cadre supérieur d'une importante compagnie pétrolière, qu'une compagnie concurrente voulait recruter et à qui elle avait payé le montant global de 250 000 $ pour qu'il quitte son emploi à la compagnie pétrolière et vienne travailler pour elle. Une convention écrite prévoyait que le paiement prenait valeur d'indemnité pour perte des droits de l'appelant à une pension chez son ancien employeur, pour perte de perspectives d'avancement et pour perte de possibilité de réemploi dans l'industrie pétrolière. L'appelant, dans cette affaire, a fait valoir que le montant de 250 000 $ était un paiement de capital et qu'il n'était pas assujetti à l'impôt sur le revenu. La Cour suprême du Canada a statué que, en dépit du libellé de la convention, le paiement avait été fait en contrepartie de services personnels seulement et qu'il était imposable en application de l'article 3 de la Loi en tant que revenu tiré d'une charge ou d'un emploi. Dans ses motifs, le juge en chef Kerwin écrivait ceci à la page 856 :

[TRADUCTION]

[...] Cependant, le paiement de 250 000 $ a été effectué en contrepartie de services personnels seulement, et cette conclusion tranche l'affaire puisqu'il est impossible de diviser la contrepartie. Le simple fait que la première convention du 15 août 1951 prévoit que Brown a convenu de payer à l'appelant le montant de 250 000 $ en contrepartie de la perte des droits à une pension, de la perte de perspectives d'avancement et de la perte de possibilités de réemploi dans l'industrie pétrolière ne peut changer la véritable nature du paiement. Il faut, pour déterminer la véritable nature de celui-ci, se reporter aux modalités des deux conventions et aux circonstances de l'affaire, y compris au fait que le montant de 250 000 $ ne provenait pas d'Imperial Oil Limited.

[11] Dans la présente affaire, je dois prendre en considération les circonstances suivantes. D'une part, le montant décrit comme étant une prime de signature dans le contrat devait être payé en deux versements, le premier au mois de juillet 1994 et le deuxième, au mois de juillet 1995. Il est vrai que, s'il avait accepté le paiement du mois de juillet 1994 puis refusé de fournir ses services, hypothèse peu probable, l'appelant aurait eu le droit de conserver le montant qui lui avait été payé. Il n'aurait pas eu le droit cependant de recevoir le paiement du mois de juillet 1995, et ce seul fait démontre que le montant n'est pas simplement une prime de signature. D'autre part, la preuve n'indique pas que l'appelant avait une réputation telle en tant que joueur de hockey que les Jets de Winnipeg auraient été incités à lui verser un montant d'argent si substantiel simplement pour l'empêcher de jouer pour une équipe adverse. Selon la preuve, l'appelant a été repêché en huitième ronde et il n'avait jamais joué en Amérique du Nord. Son propre agent considérait qu'il était peu probable que son client joue dans la LNH. Enfin, M. Grossman a témoigné clairement que, lorsqu'il avait négocié le contrat de l'appelant pour le compte de celui-ci, il avait considéré le montant total de 305 000 $ US, qui comprenait trois années de salaire et la prime de signature payable en deux versements, comme la rémunération qu'il devait obtenir pour son client pour jouer au hockey pendant trois ans. Une fois négocié, le contrat a été expliqué à l'appelant en ces termes mêmes. Je n'ai aucun doute qu'il estimait que tout cet argent lui était versé pour qu'il joue au hockey, et non pas qu'une partie lui était versée simplement pour apposer son nom au contrat. L'appelant avait des motifs raisonnables d'exiger le paiement d'une somme globale avant le début du camp d'entraînement de 1994 : il lui fallait trouver un endroit où vivre en Amérique du Nord, et régler les différentes facettes de sa nouvelle vie. C'était à mon avis un paiement fait en contrepartie de l'engagement de jouer pour les Jets de Winnipeg, ou une équipe désignée par eux, dans les trois années suivantes. Pour cette raison, la “ prime de signature ” est visée par la disposition d'exonération du paragraphe 4 de l'article 12 du Traité, et l'appelant a donc le droit de la déduire dans le calcul de son revenu imposable en vertu de l'alinéa 110(1)f) de la Loi.

[12] L'appel est admis, avec frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour d'octobre 1999.

“ E. A. Bowie ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 20e jour de juin 2000.

Philippe Ducharme, réviseur



[1]               Ce montant équivalait à 104 123 $ CAN, soit le montant en litige.

[2]               [1985] 1 CTC 163 (C.F. 1re inst.), aux pages 166 et 167.

[3]               [1995] 2 R.C.S. 802, à la page 822.

[4]               [1959] R.C.S. 850.

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