Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date: 20000731

Dossier: 1999-1453-IT-I

ENTRE :

TERRENCE M.A. BARTER,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge McArthur, C.C.I.

[1] L'appelant porte en appel la décision du ministre du Revenu national de rejeter des déductions de 643 $ et de 572 $, à titre de pertes locatives, pour les années d'imposition 1994 et 1995, respectivement. Dès le début de l'audience, l'appelant a abandonné toute prétention concernant des dépenses de 520 $, de 427 $ et de 1 736 $, décrites comme des frais relatifs à un emploi, pour les années d'imposition 1994, 1995 et 1996, respectivement. C'est après avoir examiné la décision rendue par mon collègue le juge Bell dans l'affaire Cuddie et al c. La Reine[1], que l'appelant a jugé qu'il ne pouvait déduire ces dépenses.

[2] L'appelant a présenté lui-même son appel et a été le seul témoin. Il est membre de la Gendarmerie royale du Canada, occupant les fonctions de maître-chien depuis environ 30 ans. Au fil des ans, son employeur lui a versé un loyer relativement à un chenil situé sur son terrain et servant à héberger un chien appartenant à la GRC. Son épouse et lui ont acquis leur résidence actuelle au cours des années 90. Son employeur a payé les frais d'installation d'un socle de béton d'une superficie de 20 pieds sur 40 pieds, de deux niches et d'une clôture à mailles losangées à l'intérieur du périmètre du terrain, lui-même clôturé. L'appelant déclarait un revenu locatif de 972 $ par année pour le chenil, et il a déduit des dépenses de 1 625 $ en 1994 — ce qui a donné une perte nette de 643 $ — et de 1 542 $ en 1995 — d'où une perte nette de 572 $. Les principales dépenses se rapportaient à l’intérêt hypothécaire, à l’impôt foncier et aux services publics. L'appelant affectait 10 p. 100 de ces frais — ce qui a représenté environ 1 400 $ en 1994 et 1 150 $ en 1995 — à la superficie occupée par le chenil.

[3] La question se résume à déterminer si l'appelant exploitait une entreprise de location d'espace à chenil au cours des années en question. L'appelant a confirmé l'exactitude de la déclaration suivante, faite dans le formulaire T776(E), “ État des loyers de biens immeubles ”[2], joint à sa déclaration de revenus de 1995 :

[TRADUCTION]

J'appartiens au Service des chiens policiers de la Gendarmerie royale du Canada et, à ce titre, je suis tenu de garder à ma résidence un chien policier. Le chien est la propriété de la GRC, organisme du gouvernement du Canada. La GRC a pour politique de rémunérer les membres du Service des chiens policiers qui entretiennent un chien à leur résidence, en leur versant un loyer pour l'espace où est installé le chenil lui appartenant. En outre, du matériel de travail lié à l'alimentation est entreposé à ma résidence. Le montant versé est de 81 $ par mois.

Ainsi que je l'ai mentionné à l'appelant à la conclusion de l'audition des présents appels, j'ai bien essayé de trouver une réponse affirmative à la question formulée précédemment, mais je n'y suis pas parvenu. L'appelant reconnaît que, si le paiement relatif au chenil devait être considéré comme versé pour l'accomplissement des fonctions de sa charge ou de son emploi, il ne pourrait déduire ces dépenses à titre de coût d'exploitation d'une entreprise.

[4] Je conclus que l'appelant n'exploitait pas une entreprise de location d'espace à chenil, en me fondant sur les motifs suivants :

a) l'affectation de 10 p. 100 des coûts rattachés à sa résidence à titre de dépenses d'entreprise excède déjà le revenu locatif, et rien ne semble indiquer que ces dépenses vont décroître;

b) il y a un élément personnel important, et le juge Linden indique dans l'affaire Tonn et al c. La Reine[3] que, dans de telles circonstances, la situation doit être examinée de façon approfondie. Il est évident que l'appelant souhaite garder un chien;

c) l'une des exigences rattachées à l'emploi de l'appelant est qu'il garde un chien policier[4];

d) les installations constituant le chenil appartiennent à la GRC, et l'appelant les utilise gratuitement;

e) le loyer de 81 $ par mois est fixé de façon arbitraire par la GRC;

f) l'appelant ne peut louer l'espace qu'à la GRC;

g) l'appelant ne fait pas de publicité pour attirer d'autres utilisateurs et ne peut pas le faire;

h) la plus grande partie des dépenses déduites n'étaient pas étayées et avaient un caractère arbitraire;

i) l'appelant a déclaré la totalité des paiements et des frais de location, alors qu'il n’est propriétaire que de la moitié de la superficie louée;

j) l'appelant continue de recevoir le loyer versé par la GRC mais n'a pas déclaré d'activités de location dans sa déclaration de revenus de 1996.

[5] Je conclus que l'appelant n'exploitait pas d'entreprise de location d'espace à chenil sur son terrain. Il avait conclu un accord privé aux termes duquel la GRC lui versait un montant déterminé en contrepartie de l'utilisation d'une partie de son arrière-cour. Il s'agissait d'une exigence rattachée à son emploi. Étant donné que j'ai conclu que l'appelant n'exploitait pas d'entreprise de location foncière, il doit, pour savoir s'il peut déduire des frais relatifs à son emploi, examiner l'article 8 de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui énonce les dépenses déductibles. Le sous-alinéa 8(1)i)(iii), le seul susceptible de s'appliquer en l'instance, se lit comme suit :

8(1) Lors du calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi, peuvent être déduits ceux des éléments suivants qui se rapportent entièrement à cette source de revenus, ou la partie des éléments suivants qui peut raisonnablement être considérée comme s'y rapportant :

[...]

i) les sommes payées par le contribuable dans l'année à titre de

[...]

(iii) coût de fournitures qui ont été consommées directement dans l'accomplissement des fonctions de la charge ou de l'emploi et que le contrat d'emploi du cadre ou de l'employé l'obligeait à fournir et payer,

[...]

dans la mesure où ce contribuable n'a pas été remboursé, et n'a pas le droit de l'être à cet égard;

[6] Pour analyser cette disposition, je me suis fondé sur la décision du juge Bell dans l'affaire Cuddie et al c. La Reine, précitée. Je suis d'accord avec le raisonnement qui y est exposé et je le reprends en l'instance. Pour que l'appelant puisse déduire des dépenses rattachées au chenil, celles-ci doivent représenter le coût de “ fournitures qui ont été consommées ” [Selon le libellé du sous-alinéa 8(1)i)(iii) de la Loi]. Pour les motifs énoncés dans l'affaire Cuddie, qu'il n'est pas nécessaire de reproduire ici, les dépenses engagées ne se rapportaient pas à des “ fournitures qui ont été consommées directement dans l'accomplissement des fonctions de la charge ou de l'emploi ”. Les appels sont rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour de juillet 2000.

“ C. H. McArthur ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 28e jour de février 2001.

Isabelle Chénard, réviseure



[1]                C.C.I., no 97-1898(IT)I, 3 avril 1998 (98 DTC 1822).

[2]               Pièce R-2.

[3]               [1996] 2 C.F. 73 (96 DTC 6001).

[4]               J'accorde le bénéfice du doute à l'appelant sur ce point; j'ai quelque peine à admettre cette prémisse, mais l'appelant soutient qu'elle est vraie.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.