Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 19980810

Dossier: 97-1234-IT-I

ENTRE :

IRENE G. DAVIS,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Brulé, C.C.I.

[1] L'appelante interjette appel au sujet de sommes que le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a ajoutées à son revenu, soit des pourboires reçus au restaurant où elle travaillait.

Faits

[2] Durant les années d'imposition en cause, l'appelante travaillait comme serveuse au restaurant « Mediterranean » de Saint John (Nouveau-Brunswick). L'appelante n'a pas déclaré de pourboires comme revenus d'emploi et, par des avis de nouvelle cotisation datés du 27 février 1997, le ministre a inclus dans le revenu de l'appelante 14 189 $ et 15 636 $ pour les années d'imposition 1994 et 1995 respectivement.

[3] Le ministre a analysé les ventes sur carte de crédit effectivement réalisées par l'appelante de mai à décembre 1994 et a conclu que l'appelante avait tiré de ces ventes 13 p. 100 de pourboires en moyenne. Apparemment, cette moyenne était conforme à la moyenne concernant d'autres employés du « Mediterranean » . Se fondant sur ces ventes, le ministre a estimé que les pourboires sur les ventes au comptant de l'appelante étaient de 10 p. 100. Un examen des ventes totales réalisées par l'appelante de juin à novembre 1994 révélait que, par heure travaillée, l'appelante avait réalisé en moyenne 75,64 $ de ventes. Les estimations relatives au total des pourboires pour les années en question ont ensuite été réduites de 750 $ pour chaque année, de manière à prendre en compte un montant de 5 $ par soir au titre des pourboires donnés aux aide-serveurs la fin de semaine.

Analyse

[4] L'appelante soutenait qu'elle se compterait « chanceuse » de gagner 30 $ de pourboires au cours d'une journée de 8 heures. Elle a dit qu’il est plus réaliste d'estimer les pourboires à un montant représentant en moyenne 5 à 6 p. 100 des ventes. Elle a également dit qu'elle croyait avoir gagné environ 14 000 $ de pourboires au cours des deux années précédant sa lettre du 15 juin 1996. Au procès, elle a en outre fait valoir qu'elle travaillait comme hôtesse pendant trois ou quatre mois de l'année et ne recevait aucun pourboire durant cette période et que, souvent, elle s'occupait de buffets et ne recevait alors pas beaucoup de pourboires, voire pas du tout.

[5] Dans l'affaire Cliche-Paquet v. M.N.R., 80 DTC 1282 (C.R.I.), l'appelante n'avait pas déclaré de pourboires pour l'année d'imposition 1975 et, d'après le ministre, elle avait sous-estimé le montant des pourboires reçus en 1976. Me Roland St-Onge, c.r. (titre qu'il portait alors), disait pour la Commission que le devoir du ministre en pareilles circonstances était d'utiliser « le meilleur moyen pour arriver à déterminer le revenu de l'appelante » . Dans l'affaire Tabatabai v. R., 1998 CanRepNat 654 (C.C.I.), le juge Margeson, de la C.C.I., avait statué en faveur du ministre pour le motif que ce dernier avait utilisé le meilleur moyen possible et que la partie appelante n'avait pas présenté d'éléments de preuve réfutant les hypothèses de la réponse à l’avis d’appel ou le fondement de la cotisation du ministre.

[6] Ces décisions sont conformes au principe général souvent appliqué en pareilles situations factuelles, à savoir qu'il incombe à la partie appelante de démontrer que les hypothèses de fait du ministre sont inexactes. Ce principe avait été examiné dans l'affaire Dezura v. M.N.R., (1948) 3 DTC 1101, aux pages 1103 et 1104, où le président Thorson disait :

[TRADUCTION]

« [...] Normalement, le contribuable connaît mieux que quiconque le montant de son revenu imposable et devrait pouvoir le prouver de manière à convaincre la Cour. S'il le fait et que le montant est inférieur au montant déterminé par le ministre, ce dernier montant doit être réduit conformément à la conclusion de la Cour. Si, par contre, le contribuable ne démontre pas que le montant déterminé par le ministre est erroné, il ne peut à bon droit se plaindre que ce montant soit confirmé. »

[7] Dans la présente espèce, l'appelante n'a pas produit de registres permettant de réfuter les hypothèses de fait du ministre. Le ministre a fait état d'un mode de calcul des pourboires valable, et l'appelante n'a pas réfuté ce mode de calcul, si ce n'est qu'elle mettait en doute l'exactitude du pourcentage de 10 p. 100 comme estimation des pourboires sur les ventes au comptant. Comme le ministre peut prouver que l'appelante a reçu en moyenne 13 p. 100 de pourboires sur les ventes effectuées sur carte de crédit au cours d'une période de six mois, il semblerait que l'estimation de 10 p. 100 soit raisonnable. L'appelante n'a pas démontré non plus que la période allant de mai à décembre 1994 et la période échantillonnée allant de juin à novembre 1994 étaient un peu anormales. Bien que l'appelante soutienne qu'il y a des facteurs que le ministre n'a pas pris en considération, par exemple le fait qu'elle avait travaillé comme hôtesse et que le restaurant servait parfois des buffets, comme les calculs du ministre se fondaient sur une analyse de ventes effectivement réalisées par l'appelante, ces périodes correspondant à des pourboires moindres sont prises en compte dans les calculs du ministre.

[8] En conséquence, l'appel est rejeté.

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique) ce 10e jour d'août 1998.

« J. A. Brulé »

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 2e jour de février 1999.

Mario Lagacé, réviseur

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