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Date: 20010803

Dossier: 1999-566-IT-I,

1999-568-IT-I

ENTRE :

EDWARD LEVERT,

JACQUELINE LEVERT,

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

Le juge Hamlyn, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'appels interjetés par Edward Levert (l' « appelant » ) pour les années d'imposition 1994, 1995 et 1996. Il s'agit également de l'appel interjeté par Jacqueline Levert, la conjointe de l'appelant, pour l'année d'imposition 1996. L'appel de cette dernière a été entendu sur preuve commune avec les appels d'Edward Levert. L'appel de Jacqueline Levert dépend de celui de l'appelant, Edward Levert, puisqu'il se rapporte à son droit, pendant l'année d'imposition 1996, à un crédit pour la taxe sur les produits et services conformément à l'article 122.5 de la Loi de l'impôt sur le revenu[1].

[2]            Dans le calcul de son revenu pour les années d'imposition 1994, 1995 et 1996, l'appelant n'a pas inclus les montants reçus du régime de pension des employés du United Steel Workers of America (le « régime de pension » ) à titre de prestations de retraite d'une caisse ou d'un régime de pension.

[3]            Dans la nouvelle cotisation qu'il a établie le 6 janvier 1998 à l'égard de l'appelant pour les années d'imposition 1994, 1995 et 1996, le ministre a notamment ajouté au revenu de l'appelant des montants de 19 526 $ pour 1994, de 19 623 $ pour 1995 et de 19 494 $ pour 1996, à titre de revenu de pension.

[4]            L'appelant a interjeté appel à l'encontre de cette nouvelle cotisation.

[5]            Le ministre s'est fondé sur les hypothèses de fait suivantes pour établir une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant :

                [TRADUCTION]

a)              l'appelant est un résident du Canada;

b)             la date de naissance de l'appelant est le 7 août 1927;

c)              en 1986 ou vers cette époque, l'appelant est devenu invalide;

d)             l'appelant a commencé à recevoir des prestations d'invalidité du régime de pension le 1er juin 1986 ou vers cette date;

e)              le régime de pension prévoit que les participants n'ont plus le droit de recevoir des prestations d'invalidité en vertu du régime de pension une fois qu'ils ont atteint l'âge de 60 ans;

f)              une fois qu'ils ont atteint l'âge de 60 ans, le régime de pension prévoit que les participants recevront une rente de retraite anticipée non réduite;

g)             après avoir atteint l'âge de 60 ans, l'appelant a commencé à recevoir des prestations de retraite du régime de pension;

h)             l'appelant a reçu du régime de pension des montants de 19 526 $ en 1994, de 19 623 $ en 1995 et de 19 494 $ en 1996;

i)               les montants provenant du régime de pension, mentionnés au sous-paragraphe 12h) ci-dessus, ont été versés à l'appelant à chacune de ces années à titre de prestations de retraite;

j)               les prestations de retraite que l'appelant a reçues du régime de pension pendant les années d'imposition 1994, 1995 et 1996 n'auraient pas été exclues de son revenu imposable en vertu des lois des États-Unis si l'appelant y avait été un résident.

QUESTION EN LITIGE

[6]            Il s'agit de savoir si le ministre a à bon escient inclus dans le revenu de l'appelant les montants de 19 526 $, de 19 623 $ et de 19 494 $ pour les années d'imposition 1994, 1995 et 1996 respectivement, à titre de revenu de pension.

THÈSE DE L'APPELANT

[7]            La thèse de l'appelant selon l'avis d'appel est la suivante :

                                [TRADUCTION]

L'appelant, M. Levert, reçoit, et a reçu à chaque année d'imposition, des paiements d'invalidité en vertu des modalités du régime de pension des employés du United Steel Workers of America (le « régime » ) daté du 1er janvier 1949, dans sa version modifiée du 1er août 1980. Les droits de l'appelant concernant cette pension d'invalidité étaient acquis au moment où cette dernière a commencé et ils n'ont pas été modifiés par des dispositions de ce régime de pension. Une nouvelle cotisation a été établie par Revenu Canada au motif que le montant total du revenu reçu des deux régimes était exonéré d'impôt en vertu de la Convention fiscale de 1980 entre le Canada et les États-Unis d'Amérique (la « Convention fiscale » ) et l'alinéa 105(c) de l'Internal Revenue Code des États-Unis (le « Code » ). En vertu des dispositions du régime de pension, l'appelant reçoit un paiement d'invalidité d'environ 18 000 $ par année. Le paiement provenait de la Union National Bank de Pittsburgh, qui agissait à titre de fiduciaire en vertu de l'entente. M. Levert a également reçu un paiement supplémentaire de prestation d'invalidité permanente totale ( « I.P.T. » ) en vertu du régime d'assurance-vie collective temporaire offert au USWA par la Continental Assurance Company. Cette dernière prestation a pris fin il y a quelque temps.

La Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis d'Amérique prévoit que le traitement fiscal au Canada d'un paiement qui provient des États-Unis ne doit pas excéder le montant que les États-Unis imposeraient.

...

                Dans les circonstances actuelles, M. Levert reçoit des paiements d'invalidité des États-Unis en vertu de son précédent emploi auprès du USWA. Si M. Levert était un résident des États-Unis, il aurait le droit de demander une exonération conformément à l'article pertinent du Code. Par conséquent, en vertu des dispositions de la Convention fiscale et des dispositions du Code américain, les paiements d'invalidité de M. Levert ne sont pas imposables.

                La documentation pertinente concernant un examen et une analyse commencés en 1990, y compris les notes que Revenu Canada aurait prises, n'existent plus parce que par Revenu Canada les a détruits. Malgré cela, Revenu Canada a imposé au contribuable le fardeau d'établir de nouveau l'applicabilité de l'exonération fiscale américaine. La destruction de cette preuve par Revenu Canada équivaut à l'altération de la preuve.

LA PREUVE

[8]            L'appelant, Edward Levert, est né en 1927. Depuis le début des années 1960, il a travaillé comme représentant syndical. Son dernier employeur a été le United Steelworkers of America. En 1986, il a commencé à recevoir une pension d'invalidité du régime de pension des employés du United Steelworkers of America. Le handicap reconnu de l'appelant était une vision limitée de son oeil gauche et une cécité totale de son oeil droit. Conformément au régime de pension, l'appelant a reçu des paiements (convertis en dollars canadiens) de 19 526 $, de 19 623 $ et de 19 494 $ pour les années d'imposition 1994, 1995 et 1996, respectivement. La pension d'invalidité que l'appelant recevait du United Steelworkers of America n'a jamais été imposée.

[9]            Le paiement d'invalidité se compose des deux parties suivantes :

(i)                    une prestation d'invalidité permanente totale en vertu du régime d'assurance-vie collective temporaire offert au United Steelworkers of America par la Continental Assurance Company (400 $US par mois) [2];

(ii)            une pension d'invalidité versée par le United Steelworkers of America par l'entremise d'un fiduciaire.

[10]          Le ministre du Revenu national a proposé à l'origine d'établir une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant relativement aux paiements d'invalidité versés à l'appelant pour l'année d'imposition 1987 [3]. Après des discussions, une nouvelle cotisation a été établie.

[11]          Pour cette nouvelle cotisation initiale, le fils des appelants, Daniel Levert, qui est également un avocat canadien, a représenté l'appelant et a négocié en son nom lors de l'étape de l'opposition.

[12]          Ces négociations ont donné lieu à une autre nouvelle cotisation [4] dans laquelle un montant de 21 143,06 $ a été remboursé à l'appelant et les deux pensions d'invalidité ont été considérées comme non imposables au Canada.

[13]          La preuve produite au cours de l'audience provient principalement des documents et des faits présentés et utilisés au soutien des arguments de l'appelant à l'étape de la première opposition. Deux personnes ont témoigné : l'appelant et le fils des appelants, Daniel Levert. Ces témoignages de vive voix intégraient des références tirées de la correspondance mentionnée ci-dessous.

[14]          Une lettre, en date du 11 mai 1990, adressée au fils des appelants, provenait du service du revenu (Internal Revenue Service) du département du Trésor des États-Unis (David Wind, département technique) [5] :

                                [TRADUCTION]

[...] les paiements de pension d'invalidité que votre père reçoit ne sont pas imposables aux États-Unis. J'ai joint les dispositions appropriées du code et du règlement à l'appui de cette position.

[15]          Une lettre, en date du 16 mai 1990, adressée au fils des appelants et provenant du United Steelworkers of America, a été signée par Paul K. Janus, administrateur adjoint du personnel [6] :

                                [TRADUCTION]

                Votre père, Edward Levert, reçoit une pension d'invalidité de la caisse fiduciaire de retraite des employés du United Steelworkers of America. Cette pension d'invalidité a été accordée à votre père par le comité de fiducie de retraite des employés du United Steelworkers of America en fonction de la preuve médicale présentée au moment de sa demande d'invalidité et de l'octroi de prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada.

                Le montant de la pension d'invalidité de votre père selon notre régime de retraite des employés est fondé sur son invalidité, son salaire moyen final et ses années de service, comme le prévoit le régime de retraite des employés. Il s'agit d'une pension d'invalidité payée à vie.

                Le montant de la pension d'invalidité de votre père n'est pas fondé sur la période pendant laquelle le participant atteint d'invalidité s'absente du travail ou devrait s'absenter du travail.

[...]

c.c. : Revenu Canada (Impôt)

[16]          Une lettre, en date du 24 mai 1990, adressée à l'appelant et provenant du United Steelworkers of America, a été signée par Paul K. Janus, administrateur adjoint du personnel [7] :

                                [TRADUCTION]

                Veuillez prendre note que vous recevez des prestations d'invalidité permanente totale ( « prestations I.P.T. » ) en vertu du régime d'assurance-vie collective temporaire offert au United Steelworkers of America par la Continental Assurance Company ( « CNA Insurance » ). Ces prestations I.P.T. ont été approuvées par CNA Insurance en fonction de la preuve médicale qui lui a été présentée au moment de votre demande de prestations I.P.T.

                Le montant de vos prestations I.P.T., 400 $ par mois, correspond aux prestations mensuelles maximales de notre police. Les prestations mensuelles se poursuivront jusqu'à ce que 60 p. 100 de votre assurance-vie soit versée.

[...]

[17]          Une lettre, en date du 22 juin 1990, qui provenait du service du revenu (Internal Revenue Service) du département du Trésor des États-Unis, a été signée par Dave Wind, département technique [8] :

                                [TRADUCTION]

J'ai reçu votre lettre du 31 mai 1990 et celle de Paul Janus du USWA. La prestation d'invalidité serait également exonérée de l'impôt américain si elle remplissait les conditions nécessaires (voir en annexe). J'ai fait parvenir ces renseignements à Debbie Ferguson de Revenu Canada (Impôt).

[...]

[18]          Une lettre, en date du 7 août 1990, signée par Dave Wind, département technique, a été envoyée à Revenu Canada par le service du revenu (Internal Revenue Service) du département du Trésor des États-Unis [9] :

                                [TRADUCTION]

J'ai récemment reçu une lettre du United Steelworkers of America concernant une prestation d'invalidité permanente totale versée à Edward Levert. Cette prestation serait également exonérée de l'impôt américain en vertu de l'article 105 du Code. [...]

[19]          Une partie des problèmes précédant la présente instance concernait une lettre, datée du 4 avril 1997, que Revenu Canada a envoyée au fils des appelants. Dans cette lettre, Tiina Wainman, C.A., une employée de Revenu Canada a déclaré ce qui suit [10] :

                                [TRADUCTION]

En tentant de régler cette question, nous avons eu des discussions avec l'IRS et le USWA. Selon ces discussions et notre interprétation de l'article, compte tenu de notre compréhension du régime du USWA, les paiements reçus ne représentent pas des montants reçus d'une assurance-accidents ou d'une assurance-maladie. Selon nous, à des fins d'impôt sur le revenu américain, un régime d'assurance-accidents ou d'assurance-maladie est très différent d'un régime de pension qui offre également des paiements de pension d'invalidité.

[20]          Dans une lettre, en date du 10 avril 1997, adressée au fils des appelants et provenant du United Steelworkers of America, Paul K. Janus, administrateur adjoint du personnel, a déclaré ce qui suit [11] :

                                [TRADUCTION]

                Votre père, Edward Levert, continue de recevoir une pension d'invalidité de la caisse fiduciaire de retraite des employés du United Steelworkers of America.

                Les circonstances entourant la pension de votre père n'ont pas changé depuis sa retraite, c'est-à-dire que sa pension d'invalidité du USWA a été accordée en fonction de la preuve médicale présentée lorsqu'il a pris sa retraite et de l'octroi des prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada.

[21]          Il convient de remarquer qu'après que l'appelant a présenté des éléments de preuve au soutien de sa position comme on vient de l'indiquer, le ministre a choisi de ne pas présenter de preuve. Pourtant le ministre a indiqué dans la pièce A-7 (l'opinion de Tiina Wainman) qu'il possédait apparemment des renseignements ou des éléments de preuve établissant un point de vue contraire.

[22]          Comme on l'a déjà mentionné, en ce qui concerne le fardeau de la preuve, l'appelant a choisi de réfuter les hypothèses de l'intimée et de se décharger du fardeau qui lui incombait en produisant la preuve documentaire qui avait été présentée avec succès à l'étape de l'opposition pour les années d'imposition antérieures.

[23]          Dans le cadre de la présente procédure informelle, l'approche de l'appelant, fondée sur la preuve, était raisonnable.

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[24]          Les actes de procédure dans la présente instance indiquent que la Convention fiscale de 1980 entre le Canada et les États-Unis d'Amérique [12] et le Internal Revenue Code des États-Unis [13] n'ont pas changé depuis 1990. Les extraits suivants sont les dispositions législatives pertinentes.

A. INTERNAL REVENUE CODE

                                [TRADUCTION]

Art. 105 - Montants reçus en vertu de régimes d'assurance-accidents et de soins de santé.

...

c)              Paiements non liés à l'absence du travail.

Le revenu brut n'inclut pas les montants mentionnés à l'alinéa a) dans la mesure où ces montants --

(1)    constituent le paiement d'une perte permanente ou d'une perte de l'usage d'un membre ou d'une fonction du corps, ou le préjudice esthétique, du contribuable, de son conjoint ou d'un enfant à charge (au sens de l'article 152);

(2)    sont calculés en fonction de la nature de la blessure sans égard à la période où l'employé est absent du travail.

B. CONVENTION FISCALE DE 1980 ENTRE LE CANADA ET LES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE

Article XVIII - Pensions et rentes.

1. Les pensions et les rentes provenant d'un État contractant et payées à un résident de l'autre Étant contractant sont imposables dans cet autre État, mais le montant d'une telle pension qui serait exclu du revenu imposable dans le premier État si le bénéficiaire y était un résident est exonéré d'impôt dans cet autre État.

[...]

3. Au sens de la présente Convention, le terme « pensions » comprend tout paiement en vertu d'un régime de pensions de retraite ou d'autres pensions, une solde à la retraite des Forces armées, les pensions et allocations d'ancien combattant et les montants payés en vertu d'un régime d'assurance contre la maladie, les accidents ou l'invalidité, mais ne comprend ni les paiements en vertu d'un contrat de rente à versements invariables ni les prestations visées au paragraphe 5.

C. LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

56.          (1) Sommes à inclure dans le revenu de l'année. — Sans préjudice de la portée générale de l'article 3, sont à inclure dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une année d'imposition :

a) Pensions, prestations d'assurance-chômage, etc. — toute somme reçue par le contribuable au cours de l'année au titre, ou en paiement intégral ou partiel :

(i) d'une prestation de retraite ou de pension, y compris, sans préjudice de la portée générale de ce qui précède [...]

110. (1) Déductions. — Pour le calcul du revenu imposable d'un contribuable pour une année d'imposition, il peut être déduit celles des sommes suivantes qui sont appropriées :

[...]

f) Déduction des paiements — toute prestation d'assistance sociale payée après examen des ressources, des besoins ou du revenu et incluse en application de la division 56(1)a)(i)(A) ou de l'alinéa 56(1)u) dans le calcul du revenu du contribuable pour l'année ou toute somme dans la mesure où elle a été incluse dans le calcul du revenu du contribuable pour l'année, représentant, selon le cas :

(i) une somme exonérée de l'impôt sur le revenu au Canada par l'effet d'une disposition de quelque convention ou accord fiscal avec un autre pays qui a force de loi au Canada,

[...]

248. (1) Définitions. — Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

[...]

« prestation de retraite ou de pension » Sont compris dans les prestations de retraite ou de pension les sommes reçues dans le cadre d'une caisse ou d'un régime de retraite ou de pension, et, notamment, tous versements faits à un bénéficiaire dans le cadre de la caisse ou du régime, ou à un employeur ou un ancien employeur du bénéficiaire :

a) conformément aux conditions de la caisse ou du régime;

b) par suite d'une modification apportée à la caisse ou au régime;

c) par suite de la liquidation de la caisse ou du régime.

D. CHARTE CANADIENNE DES DROITS ET LIBERTÉS [14]

Garantie des droits et libertés

Droits et libertés au Canada

1.              La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique.

Droits à l'égalité

Égalité devant la loi, égalité de bénéfice et protection égale de la loi

15. (1) La loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques.

Programmes de promotion sociale

(2) Le paragraphe (1) n'a pas pour effet d'interdire les lois, programmes ou activités destinés à améliorer la situation d'individus ou de groupes défavorisés, notamment du fait de leur race, de leur origine nationale ou ethnique, de leur couleur, de leur religion, de leur sexe, de leur âge ou de leurs déficiences mentales ou physiques.

ANALYSE

[25]          En vertu de l'alinéa 56(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu, le paiement de pension d'invalidité que l'appelant a reçu constitue une prestation de retraite imposable au Canada, le sous-alinéa 110(1)f)(i) prévoit toutefois une exception.

[26]          Le sous-alinéa 110(1)f)(i) prévoit la déduction du revenu canadien imposable des sommes exonérées de l'impôt sur le revenu au Canada par l'effet d'une disposition de quelque convention ou accord fiscal avec un autre pays qui a force de loi au Canada.

[27]          L'appelant est un résident du Canada qui reçoit une pension d'invalidité provenant des États-Unis d'Amérique. Ainsi, la Convention fiscale de 1980 entre le Canada et les États-Unis d'Amérique en vigueur depuis le 16 août 1984 s'applique au traitement fiscal de la pension d'invalidité versée à l'appelant, Edward Levert, par le United Steelworkers of America.

[28]          Le paragraphe 1 de l'article XVIII de la Convention prévoit que les paiements de pension provenant d'un État contractant et payés à un résident de l'autre État contractant sont imposables dans cet autre État, mais le montant d'une telle pension qui serait exclu du revenu imposable dans le premier État si le bénéficiaire y était un résident est exonéré d'impôt dans cet autre État. Le paragraphe 3 de l'article XVIII de la Convention précise que le terme « pensions » comprend les montants payés en vertu d'un régime d'assurance contre la maladie, les accidents ou l'invalidité.

[29]          La preuve fournie indique qu'aux termes du régime de pension[15], l'appelant a reçu une pension d'invalidité en application de l'article traitant de l'incapacité de ce régime de pension et que cette partie du régime de pension constituait un régime d'invalidité. Ainsi, l'article XVIII de la Convention s'applique au paiement de pension d'invalidité en litige.

[30]          La preuve montre également que les paiements reçus par l'appelant ne sont pas imposables au États-Unis en vertu de l'alinéa 105(c) du Internal Revenue Code. En conséquence, les paiements de pension d'invalidité que l'appelant a reçus sont également exonérés de l'impôt au Canada conformément à l'article XVIII de la Convention.

[31]          Compte tenu de cette conclusion, je vais maintenant examiner la question de l'âge énoncée dans les hypothèses soulevées par le ministre dans sa réponse ainsi que la question relative à la Charte qui en résulte, comme l'avis d'appel en fait mention.

[32]          Les hypothèses que le ministre a formulées et qui sont essentielles à la nouvelle cotisation figurent, comme suit, dans la réponse à l'avis d'appel :

                [TRADUCTION]

e)              le régime de pension prévoit que les participants n'ont plus le droit de recevoir des prestations d'invalidité en vertu du régime de pension une fois qu'ils ont atteint l'âge de 60 ans;

f)              une fois qu'ils ont atteint l'âge de 60 ans, le régime de pension prévoit que les participants recevront une rente de retraite anticipée non réduite;

g)             après avoir atteint l'âge de 60 ans, l'appelant a commencé à recevoir des prestations de retraite du régime de pension;

[33]          Durant la présentation de la preuve, il est devenu manifeste qu'il n'y avait pas d'éléments de preuve pour soutenir ces hypothèses. Aucune preuve ne démontrait que les participants, comme l'appelant, n'ont plus le droit de recevoir des prestations d'invalidité en vertu du régime de pension une fois qu'ils ont atteint l'âge de 60 ans.

[34]          La preuve a totalement démoli ces hypothèses. Après l'âge de 60 ans, l'appelant a continué de recevoir une pension d'invalidité vu son incapacité.

[35]          L'appelant a également cherché à obtenir une décision fondée sur la Charte canadienne des droits et libertés selon laquelle l'Agence des douanes et du revenu du Canada appliquait une disposition discriminatoire à l'égard de l'appelant, Edward Levert, puisque :

a)              Sa pension d'invalidité n'a pas été imposée et n'est pas imposable en vertu des dispositions de l'Internal Revenue Code et de la Convention fiscale; toutefois, uniquement en raison de l'âge, l'Agence des douanes et du revenu du Canada l'imposerait.

b)             Ce traitement différentiel est fondé uniquement sur l'âge qui constitue un motif énuméré à l'article 15 de la Charte.

c)              Ce traitement produit un effet qui est considérablement discriminatoire.

[36]          Comme on l'a indiqué, les hypothèses que le ministre a fait valoir relativement à l'âge dans sa réponse (alinéas 12e), f) et g)) ont été démolies par l'appelant parce qu'elles étaient incorrectes sur le plan des faits. Par conséquent, la question relative à la Charte n'est plus en litige.

CONCLUSION

[37]          La preuve indique que les États-Unis d'Amérique n'ont jamais imposé la pension d'invalidité que l'appelant recevait du United Steelworkers of America. En outre, le service du revenu (Internal Revenue Service) a examiné les pensions payables à l'appelant et a informé ce dernier ainsi que Revenu Canada que la pension d'invalidité que l'appelant recevait n'est pas imposable aux États-Unis d'Amérique en raison de l'alinéa 105(c) du Internal Revenue Code [16].

[38]          La preuve fait également état du fait qu'à partir de 1990, rien n'a changé en ce qui concerne la pension d'invalidité que l'appelant recevait et que rien n'a changé en ce qui concerne l'imposition de la pension d'invalidité dans la Convention fiscale, particulièrement à l'article XVIII.

[39]          L'appelant s'est déchargé de son fardeau et a prouvé que la cotisation du ministre était incorrecte. Il a démontré que la pension d'invalidité en litige n'est pas imposable sous le régime de l'article XVIII de la Convention fiscale de 1980 entre le Canada et les États-Unis d'Amérique et du sous-alinéa 110(1)f)(i) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

DÉCISION

[40]          L'appel est admis et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation au motif que les prestations d'invalidité reçues du régime de pension des employés du United Steelworkers of America ne sont pas imposables en vertu des dispositions de la Convention fiscale de 1980 entre le Canada et les États-Unis et de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[41]          L'appel de l'appelant Edward Levert est admis, il s'ensuit donc que celui de Jacqueline Levert est admis au motif qu'elle a droit au crédit pour taxe sur les produits et services pour l'année d'imposition 1996 conformément à l'article 122.5 de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[42]          Les appelants ont droit à un seul mémoire de frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour d'août 2001.

« D. Hamlyn »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 16e jour de mai 2002.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Martine Brunet, réviseure

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-566(IT)I

ENTRE :

EDWARD LEVERT,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus sur preuve commune avec l'appel de Jacqueline Levert (1999-568(IT)I) le 16 juillet 2001 à Moncton (Nouveau-Brunswick), par

l'honorable juge D. Hamlyn

Comparutions

Avocate de l'appelant :               Me Priscilla Kennedy

Avocats de l'intimée :                 Me John Bodurtha et Me Cecil Woon

JUGEMENT

          Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1994, 1995 et 1996 sont admis et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour d'août 2001.

« D. Hamlyn »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 16e jour de mai 2002.

Martine Brunet, réviseure


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-568(IT)I

ENTRE :

JACQUELINE LEVERT,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus sur preuve commune avec l'appel d'Edward Levert (1999-566(IT)I) le 16 juillet 2001 à Moncton (Nouveau-Brunswick), par

l'honorable juge D. Hamlyn

Comparutions

Avocate de l'appelante :              Me Priscilla Kennedy

Avocats de l'intimée :                 Me John Bodurtha et Me Cecil Woon

JUGEMENT

          L'appel des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1994, 1995 et 1996 est admis et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour d'août 2001.

« D. Hamlyn »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 16e jour de mai 2002.

Martine Brunet, réviseure



[1] L.R.C. 1985, ch.1 (5e suppl.), dans sa version modifiée.

[2] Pièce A-6, une lettre du United Steelworkers of America envoyée à l'appelant le 24 mai 1990.

[3] Pièce A-4.

[4] Pièce A-5.

[5] La pièce A-6 est un regroupement de lettres se rapportant à la procédure au stade de l'opposition pour la première nouvelle cotisation.

[6] Pièce A-6.

[7] Pièce A-6.

[8] Pièce A-6.

[9] Pièce A-6.

[10] Pièce A-7.

[11] Pièce A-7.

[12] Édictée au Canada par L.C. 1984, ch. 20 [la « Convention » ].

[13] 26 U.S.C.A. (1986).

[14] Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, soit l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, (R.-U.) 1982, c. 11.

[15] Pièce A-1.

[16] Pièce A-6.

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