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Date: 20000110

Dossier: 97-1575-GST-G

ENTRE :

BÂTIMENT FAFARD INTERNATIONAL INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Lamarre Proulx, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'un appel à l'encontre d'une cotisation dont l'avis porte le numéro PQ-96-0356, en date du 17 juillet 1996, pour les périodes se terminant le 31 mai 1995 et le 31 août 1995.

[2]            Le litige concerne, pour la première période, l'affectation d'un paiement fait par l'appelante pour une période donnée et, pour la deuxième période, l'affectation d'un remboursement en vertu de la Loi sur la taxe de vente du Québec. Pour la première période, l'appelante aurait eu une entente verbale de non-recouvrement avec un fonctionnaire du ministère du Revenu du Québec concernant des montants de taxe nette dus pour des périodes antérieures à la période se terminant le 31 mai 1995 et que, selon l'appelante, il était entendu que les paiements ultérieurs se feraient pour des périodes subséquentes. Elle prétend donc que le montant d'argent, soit 14 468,41 $, qu'elle a versé en paiement de la cotisation, pour la période se terminant le 31 mai 1995, aurait dû être affecté à cette période et non aux périodes antérieures. Pour la deuxième période, l'appelante aurait demandé de compenser les sommes dues en vertu de la Loi sur la taxe d'accise (la "Loi") par des sommes prétendument payées en trop en vertu de la Loi sur la taxe de vente du Québec.

[3]            Au début de l'audience, il y a eu l'audition d'une requête présentée le jour de l'audition pour déposer une Réponse à l'avis d'appel amendée (la "Réponse"). L'avocat de l'appelante a laissé le dépôt de cette requête à la discrétion de la Cour. La Cour a accepté tel dépôt, puisque la Réponse n'ajoutait pas de faits ni de moyens nouveaux. Elle décrivait la législation provinciale pertinente à l'affectation des remboursements dus en vertu de la Loi sur la taxe de vente du Québec en se référant à l'article 31.1 de la Loi sur le ministère du Revenu (L.R.Q. ch. M-31). Elle ne modifiait pas toutefois le moyen principal de l'intimée pour rejeter l'appel, soit que cette Cour n'a compétence que pour adjuger sur la validité d'une cotisation et non sur les méthodes de paiement relatives à cette cotisation.

[4]            Une question s'est soulevée au tout début de l'audition : l'appelante, ayant fait faillite le 3 juin 1997, a-t-elle qualité pour poursuivre l'appel de cette cotisation?

[5]            L'avocat de l'appelante a produit un "Extrait du procès verbal d'une assemblée des inspecteurs", tenue le 19 juin 1997, comme pièce A-1. Cette pièce fait état que les inspecteurs sont d'accord que le syndic ne s'oppose pas au dépôt d'une requête en vertu de l'article 38 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité permettant à monsieur Jules Fafard de reprendre l'instance. L'avocat de l'appelante a présenté un jugement de la Cour supérieure du Québec, en date du 29 octobre 1998, permettant au requérant, Jules Fafard, de reprendre les instances et de continuer les procédures pendantes dans les dossiers de la Cour canadienne de l'impôt portant les numéros 96-2665(IT)G et 97-1575(GST)G, en se fondant sur les articles 37 et 38 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité.

[6]            Les avocats des deux parties ont aussi informé la Cour qu'une décision avait déjà été rendue par cette Cour permettant à monsieur Jules Fafard de continuer l'appel portant le numéro 96-2665(IT)G à l'égard de l'appelante faillie. Cette décision est rapportée comme Bâtiment Fafard International Inc. c. La Reine, 99 DTC 504. L'avocat du Ministre a tenté sans trop insister de faire valoir que cette décision est fondée sur des circonstances différentes. Il cite le jugement à la page 508 :

... En l'espèce, les procédures ont déjà été entamées devant cette Cour avant même la faillite de l'appelante. ...

[7]            Si je comprends bien, il soumet que le présent appel n'avait pas été interjeté avant la faillite de l'appelante. Or, l'avis d'appel a été déposé le 22 mai 1997 et le jour de la faillite est le 3 juin 1997. De toute façon, ce n'est pas là une circonstance qui a de l'importance. Si je lis les articles 37 et 38 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et me rapporte à l'ouvrage Bankruptcy and Insolvency Law of Canada by Houlden and Morawetz, je constate facilement que ces articles envisagent la continuation d'une action pendante aussi bien que l'institution d'une nouvelle action.

[8]            Les articles 37 et 38 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité se lisent ainsi :

37.            Lorsqu'un acte ou une décision du syndic lèse le failli ou l'un des créanciers ou toute autre personne, l'intéressé peut s'adresser au tribunal, et ce dernier peut confirmer, infirmer ou modifier l'acte ou la décision qui fait l'objet de la plainte et rendre à ce sujet l'ordonnance qu'il juge équitable.

38(1)        Procédures par un créancier lorsque le syndic refuse d'agir

                Lorsqu'un créancier demande au syndic d'intenter des procédures qui, à son avis, seraient à l'avantage de l'actif du failli, et que le syndic refuse ou néglige d'intenter ces procédures, le créancier peut obtenir du tribunal une ordonnance l'autorisant à intenter des procédures en son propre nom et à ses propres frais et risques, en donnant aux autres créanciers avis des procédures projetées, et selon les autres modalités que peut ordonner le tribunal.

38(2)        Droits du créancier

               

Lorsque cette ordonnance est rendue, le syndic cède et transporte au créancier tous ses droits, titres et intérêts dans les biens et droits qui font l'objet de ces procédures, y compris tout document à l'appui.

38(3)        Les profits appartiennent au créancier

Tout profit provenant de procédures exercées en vertu du paragraphe (1), jusqu'à concurrence de sa réclamation et des frais, appartient exclusivement au créancier intentant ces procédures, et l'excédent, s'il en est, appartient à l'actif.

38(4) Le syndic peut intenter des procédures

Lorsque, avant qu'une ordonnance soit rendue en vertu du paragraphe (1), le syndic, avec la permission des inspecteurs, déclare au tribunal qu'il est prêt à intenter les procédures au profit des créanciers, l'ordonnance doit prescrire le délai qui lui est imparti pour ce faire, et dans ce cas le profit résultant des procédures, si elles sont intentées dans le délai ainsi prescrit, appartient à l'actif.

[9]            L'article 37 prévoit que le failli ou l'un des créanciers ou tout autre personne qui puisse être lésée par une décision du syndic peut s'adresser au tribunal et ce dernier peut rendre à ce sujet l'ordonnance qu'il juge équitable. L'article 38 s'applique au créancier. Il est possible que monsieur Jules Fafard soit un créancier de la faillie, ou à tout le moins un créancier éventuel, puisqu'il peut avoir à répondre personnellement des obligations de l'appelante à l'égard du non-paiement de la taxe cotisée. Il n'y a toutefois pas à décider si c'est à titre de personne lésée sous l'article 37 ou à titre de créancier éventuel sous l'article 38 que monsieur Fafard continue l'appel de l'appelante, car la décision de la Cour supérieure du Québec se fonde sur les articles 37 et 38 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et elle permet au requérant Jules Fafard de reprendre la présente instance. Je ne vois donc pas de raison pour ne pas autoriser monsieur Fafard à continuer la procédure de l'appelante au lieu du syndic dans la présente affaire.

[10]          Un autre sujet a aussi été déterminé au début de l'audience. Pour la période se terminant le 31 mai 1995, la cotisation de taxe nette était de 17 653,12 $ et pour la période se terminant le 31 août 1995, la taxe nette était de 1 986,32 $. L'avocat de l'intimée a informé la Cour que le paiement de l'appelante au montant de 14 468,41 $ avait maintenant été affecté à la première période tel que demandé par l'appelante. Donc il n'y a plus de litige à l'égard de cette période, la validité de la cotisation n'étant pas, par ailleurs, en litige. Il ne reste de litige qu'à l'égard de la deuxième période en regard d'un remboursement réclamé au montant de 19 333,49 $ en vertu de la Loi sur la taxe de vente du Québec. Toutefois, il n'y a eu aucune preuve d'un quelconque reliquat d'un remboursement auquel l'appelante aurait eu droit en vertu de cette loi et qui aurait été susceptible d'être appliqué au paiement de la taxe nette.

Analyse

[11]          L'article 31.1 de la Loi sur le Ministère du Revenu du Québec se lit comme suit :

31.1          Le ministre peut, après avoir procédé à l'affectation prévue à l'article 31, le cas échéant, affecter le reliquat du remboursement auquel une personne a droit en vertu de la Loi sur la taxe de vente du Québec (chapitre T-0.1) au paiement d'une dette dont cette personne est redevable en vertu d'une loi du Parlement du Canada administrée et appliquée par le ministre conformément à un accord conclu aux termes de l'article 9.0.1.

[12]          Tel que mentionné précédemment, il n'y a pas eu de preuve de non-conformité à cet article.

[13]          Le motif principal de la Réponse était que cet appel, ne concernant pas la validité de la cotisation mais son mode de recouvrement, le litige n'était pas du ressort de cette Cour. Il est vrai qu'en application de l'article 313 de la Loi, c'est la Cour fédérale qui a compétence en matière de recouvrement des montants impayés de taxe nette. Toutefois, certains montants, notamment, ceux de paiement en trop ou de remboursement, décrits aux articles 296, 297 et 298 de la Loi, sont pris en compte dans la calcul de la taxe nette et dans l'établissement de la cotisation pertinente. Les articles de la Loi concernant le calcul de la taxe nette et l'établissement de la cotisation en application dans le présent litige n'ont pas été mentionnés ni dans la Réponse ni lors de la plaidoirie. Je crois que pour donner une bonne image de la nature du litige, l'intimée aurait dû se référer aux articles 296, 297, 298 et 225 de la Loi et expliquer la procédure suivie lors de l'établissement d'une cotisation concernant la taxe nette d'une personne et de celle du contribuable en particulier, dans les cas de paiement en trop, de remboursement et d'affectation de paiement.

[14]          Toutefois, comme il n'y a plus de litige concernant la première période, le Ministre ayant accepté d'affecter le paiement de l'appelante pour la période demandée et comme pour la seconde période, il n'y a aucune preuve d'un quelconque montant de TVQ à la disposition du ministre du Revenu du Québec pour affectation au calcul de la taxe nette, l'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de janvier, 2000.

"Louise Lamarre Proulx"

J.C.C.I.

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