Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 19981113

Dossiers: 96-1196-GST-G; 96-1197-GST-G; 96-1198-GST-G

ENTRE :

2855-6330 QUÉBEC INC., FRANCO CIGANA, 137891 CANADA INC.,

requérants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs de l'ordonnance

Le juge Lamarre Proulx, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'une requête en rétractation de jugements, en vertu du paragraphe 172(2) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) (les "Règles"), qui se lit comme suit :

Une partie peut demander, par voie de requête dans l'instance, selon le cas :

a)             l'annulation ou la modification d'un jugement en raison d'une fraude ou de faits survenus ou découverts après qu'il a été rendu;

b)             un sursis d'exécution d'un jugement;

c)              une mesure de redressement différente de celle qui a déjà été accordée.

[2]            Les jugements dans les appels de Franco Cigana, 2855-6330 Québec Inc. et 137891 Canada Inc. ont été rendus à la suite d'une audience par conférence téléphonique, tenue le 12 février 1998. Ces appels devaient être entendus les 16, 17 et 18 février 1998. Le 10 février 1998, par télécopieur, cette Cour a reçu de l'avocat des appelants l'avis suivant : "Soyez avisée que, relativement aux dossiers mentionnés en rubrique, notre mandat est de ne faire aucune représentation lors des procès qui auront lieu les 16, 17 et 18 février 1998."

[3]            Cette lettre a été suivie par une lettre de l'avocate de l'intimée en date du même jour, envoyée aussi par télécopieur, qui se lit comme suit : "La présente fait suite à la lettre que vous a transmise ce jour Me Louis-Frédérick Côté, qu'aucune preuve ne sera faite par les appelants ni représentation lors de l'audition de ces dossiers, prévue à Montréal les 16, 17 et 18 février 1998. Par conséquent, l'intimée demandera à cette Honorable Cour le rejet des appels des appelants".

[4]            Vu cet état des faits, la Cour a décidé dans un but d'éviter des déplacements inutiles, de tenir l'audition desdits appels par voie de conférence téléphonique le 12 février 1998. Voici l'échange entre la Cour, l'avocat des appelants et l'avocate de l'intimée :

LA COUR :             Maître Côté, j'ai votre lettre du 10 février 1998 qui dit que votre mandat est de ne faire aucune représentation lors des procès qui auront lieu les 16, 17 et 18 février 1998.

Alors, ce que j'aimerais savoir de vous c'est est-ce que c'est toujours le cas?

Me CÔTÉ :              Oui.

Mes deux clientes et mon client m'ont clairement indiqué qu'elles voulaient et il voulait que je ne fasse aucune représentation, que je ne présente aucune preuve testimoniale ou documentaire. C'est toujours le cas.

LA COUR :             Bon, alors ils n'ont plus aucune plaidoirie, c'est bien ça?

Me CÔTÉ :              Aucune plaidoirie, aucun argument.

LA COUR :             Oui, est-ce que je peux comprendre pourquoi? Pouvez-vous m'expliquer pourquoi vous ne procédez pas à un désistement?

Me CÔTÉ :              Mon client, je lui ai suggéré et il a refusé. Je ne sais pas pourquoi. Il ne veut pas se désister, il préfère avoir un jugement contre lui.

LA COUR :             Bon! Alors, très bien. Et vous, Me Mailloux Martin, est-ce que vous avez ...

Me MAILLOUX MARTIN : Alors, dans les circonstances, madame le Juge, comme j'avais avisé la Cour par lettre également, suite à la lettre de Me Côté, je demande à cette Cour de rejeter les trois appels, les appels dans chacun des dossiers, le tout sans frais.

LA COUR :             Le tout sans frais?

Me MAILLOUX MARTIN :                Oui.

LA COUR :             Alors, Me Côté, est-ce que vous avez des commentaires supplémentaires à faire à ce sujet?

Me CÔTÉ :              Non, aucun, madame.

LA COUR :             Non, alors je vous remercie. Je remercie les deux procureurs.

Me MAILLOUX MARTIN : Merci, madame le Juge.

LA COUR :             Les appels sont rejetés, sans frais.

[5]            Une requête en rétractation de jugements a été faite en date du 11 mars 1998, aux fins de faire annuler ces jugements. La demande de rétractation de jugements est fondée sur l'allégation que l'avocat des appelants n'avait pas reçu de la part des appelants le mandat de ne faire aucune représentation.

[6]            Pour quelque raison que ce soit, un agent de notre greffe, sur la réception de la requête en rétractation de jugements, n'a pas accepté cette requête et a informé l'avocat des requérants qu'il devait procéder par voie d'appel à la Cour d'appel fédérale. Comme le délai de 30 jours était déjà expiré, l'avocat des requérants a fait une requête pour prolonger le délai, en vertu de l'article 27 de la Loi sur la Cour fédérale. J'ai déterminé qu'il n'appartenait pas à un agent du greffe de refuser une requête en rétractation de jugements mais à un juge de cette Cour. L'avocat des appelants a choisi de maintenir cette requête en rétractation de jugements et de retirer sa demande de prolongation de délai d'interjeter appel, qui devenait inutile.

[7]            Voici l'affidavit que le requérant a signé le 11 mars 1998 :

AFFIDAVIT

Je, soussigné, FRANCO CIGANA, résidant et domicilié au 7015, rue Métivier, Montréal (Québec) H4K 2M7, déclare solennellement ce qui suit :

1.-             J'ai porté en appel trois avis de cotisation datés du 10 février 1995, et ce dans les délais légaux par l'intermédiaire de mes procureurs Mendelshon, Rozentzveig, Shacter, dans les dossiers 96-1196(GST)G (2855-6330 Québec Inc.) 96-1198(GST)G, (137891 Canada Inc.) et 96-1197(GST)G (Franco Cigana);

2.-             Or, jugement a été rendu dans les trois dossiers précités à mon insu et l'audition s'est tenue à une autre date que celle prévue à mon insu et mes procureurs ont agi sans mon autorisation;

3.-             En effet, le procès avait été fixé dans les trois dossiers au lundi 16, mardi 17 et mercredi 18 février 1998;

4.-             Dans les jours précédant le procès, j'ai rencontré mes procureurs Gilles Brassard et Louis-Frédérick Côté, relativement à l'audition qui devait se tenir dans ces dossiers;

5.-             Suite à cette rencontre, je communiquais le 11 février 1998 avec Me Louis-Frédérick Côté, qui m'indiquait alors que l'audition n'aurait probablement pas lieu lundi le 16 février 1998, la Cour n'allant pas se déplacer pour ce seul dossier et qu'en conséquence l'audition serait probablement remise à une date ultérieure;

6.-             N'ayant aucune garantie que ledit procès pouvait être remis et suite à la rencontre que j'avais avec mes procureurs de chez Mendelsohn, Rosentzveig, Shacter, j'ai le 11 février 1998 pris rendez-vous avec Me Pierre Archambault de la firme Lapointe, Schachter, Champagne & Talbot, afin d'obtenir certains éclaircissements et informations;

7.-             Me Pierre Archambault a accepté de me rencontrer le lendemain, soit le 12 février 1998, et suite à cette rencontre il se disait disponible pour lundi le 16 février 1998 si j'en ressentais le besoin;

8.-             Vendredi, le 13 février 1998, je communiquais avec Me Louis-Frédérick Côté pour vérifier si la cause allait avoir lieu le 16 février 1998 ou si celle-ci était remise comme il me l'avais laissé entendre le 11 février 1998;

9.-             C'est avec la plus grande stupéfaction, incompréhension et grande inquiétude que j'apprenais de Me Côté que jugement avait été rendu le 12 février 1998;

10.-           Très inquiet, voire paniqué, j'ai alors immédiatement communiqué avec Me Pierre Archambault pour l'informer de cela mais celui-ci ne pouvait m'éclairer ne comprenant pas lui-même ce qui s'était passé;

11.-           Le 16 février 1998, date prévue pour l'audition, je me suis présenté à la Cour canadienne de l'impôt, et madame Lucie Allaire du greffe m'a alors informé que jugement avait été rendu dans les trois dossiers suite à un appel conférence ayant eu lieu le jeudi 12 février 1998;

12.-           Cette "audition" tenue lors de l'appel conférence du 12 février 1998 a eu lieu à mon insu et sans que mes procureurs ne m'en aient avisé au préalable, ni de sa tenue ni de son contenu;

13.-           Qui plus est, mes procureurs Mendelsohn, Rosentzveig, Shacter, et plus particulièrement, Me Louis Frédérick Côté, m'avaient laissé comprendre que l'audition allait être remise à une date ultérieure si elle n'avait pas lieu le 16 février 1998.

14.-           Le mandat que j'avais confié à mes procureurs Mendelsohn, Rosentzveig, Shacter, était de procéder à l'audition le 16 février 1998 ou si la Cour n'était pas disponible selon ce qu'ils m'avaient laissé entendre de remettre la cause à une date ultérieure;

15.-           Je désire être entendu et faire valoir mes droits dans les trois dossiers concernés, ce que je n'ai pu faire pour les motifs ci-avant exposés;

16.-           Je demande à l'honorable Cour canadienne de l'impôt de bien vouloir rétracter les jugements rendus dans les trois dossiers et signés le 17 février 1998 par l'honorable juge Louise Lamarre Proulx suite à un appel conférence tenu le 12 février 1998;

17.-           J'ai attendu jusqu'à ce jour pour présenter la présente demande de rétractation le temps pour mes nouveaux procureurs Lapointe, Shachter, Champagne & Talbot de procéder à certaines vérifications quant aux événements qui se sont produits et ce à leur demande;

18.-           Je suis à l'entière disposition de la Cour canadienne de l'impôt si de plus amples renseignements et/ou informations sont nécessaires à l'égard de ma demande de rétractation;

19.-           Tous les faits allégués dans le présent affidavit sont vrais et à ma connaissance personnelle;

ET J'AI SIGNÉ :                                                                     (s) Franco Cigana

Franco Cigana

[8]            Monsieur Franco Cigana a témoigné à la demande de l'avocat des appelants. Me Jules Brossard et Me Louis-Frédérick Côté ont témoigné à la demande de l'avocate de l'intimée.

[9]            Monsieur Franco Cigana est en relations d'affaires avec les avocats Jules Brossard et Louis-Frédérick Côté depuis au moins 1994. Il dit qu'en décembre 1997, tout était prêt pour le procès, sauf qu'il n'avait pas encore présenté à ses avocats les deux témoins prévus pour l'audition de la cause, soit son comptable et le gérant de banque. Une offre de règlement aurait été faite en décembre au montant de 10 000 $. Cette offre a été refusée le 5 février 1998. Monsieur Cigana a rencontré ses avocats le 9 février 1998. Il dit que ses avocats lui font alors part qu'il vaudrait mieux faire faillite et abandonner l'action car il leur faut 10 000 $ pour préparer le dossier et le représenter à l'audition. Il prétend que lui voulait procéder à l'audition prévue pour les 16, 17 et 18 février 1998. C'est le mandat qu'il aurait donné à ses avocats. Par ailleurs, il dit également que ces derniers ne voulaient pas procéder à moins du paiement de leurs honoraires.

[10]          Maîtres Jules Brossard et Louis-Frédérick Côté ont rendu des témoignages semblables bien qu'ils n'aient pas témoigné en présence l'un de l'autre. En décembre 1997, ils ont rencontré le requérant pour la préparation du procès. Ils lui ont expliqué les différentes avenues possibles. Ils lui ont exposé les trois avenues possibles : faire le procès, faire une proposition en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, ou faire une cession de ses biens en vertu de la même loi. Il a été convenu de faire une offre à l'intimée, offre qui serait basse et fondée sur l'insolvabilité des appelants, et il a été convenu de ne pas procéder au procès. L'offre a été refusée le 5 février 1998. Monsieur Cigana a rencontré ses procureurs le 9 février 1998. Les avocats lui ont à nouveau fait état des trois avenues possibles. Me Côté lui avait fait savoir que les frais pour procéder dans les appels seraient de 10 000 $ à 12 000 $, mais il n'a pas demandé le paiement de ces frais avant l'audition. Me Côté affirme qu'il n'a pas fait du paiement de ses honoraires une condition pour procéder au procès. Monsieur Cigana ne voulait tout simplement pas procéder. Ainsi, il n'a jamais voulu que son avocat rencontre ni son banquier ni son comptable. Monsieur Cigana ne voulait pas faire de procès ni faire une proposition ou une cession. Il ne voulait pas non plus se désister. Si un jugement était obtenu contre lui, il croyait qu'il pourrait aller en appel et que cela retarderait le délai d'exécution.

Arguments des avocats

[11]          L'avocate de l'intimée fait valoir qu'elle doute que le paragraphe 172(2) des Règles donne ouverture à la requête en rétractation pour le motif invoqué, mais elle se fonde en premier lieu au motif qu'il ne peut y avoir une demande de rétractation de jugement sur la base d'inexécution ou d'exécution fautive du mandat des avocats, avant qu'une action en désaveu ait été entreprise et jugée. Elle se réfère aux décisions de la Cour suprême du Canada dans Boileau c. P. G. du Québec, [1957], R.C.S. 463 et Bélanger c. Bélanger [1958] R.C.S. 344, et à une décision de la Cour du Québec dans Gagnon c. Placement de Caillières Inc., C.Q.T. 700-02-001324-871. Ces décisions veulent que le recours approprié soit d'abord l'action en désaveu en vertu des articles 243 et suivants du Code de procédure civile.

[12]          L'avocat des requérants fait valoir qu'il n'est pas certain qu'une action préalable en désaveu soit nécessaire pour l'application du paragraphe 172(2) des Règles, qu'une telle action prend du temps et qu'il vaudrait mieux au sens de la justice accorder la requête en rétractation sans l'exiger. Il se fonde pour l'application du paragraphe 172(2) des Règles sur le fait que les avocats de monsieur Cigana n'ont pas voulu agir parce que leurs honoraires n'avaient pas été payés et aussi sur une compréhension erronée de leur mandat. Il soutient que les appelants ont toujours voulu procéder et que si la Cour n'avait pas devancé l'audition de l'appel des appelants, monsieur Cigana aurait expliqué à la Cour ses intentions véritables. Il ne prétend pas qu'il y a eu fraude mais qu'il y a eu des faits survenus ou découverts après que le jugement a été rendu.

Conclusion

[13]          Si la Cour peut, dans les cas de silence de ses propres règles, se référer aux règles de la procédure de la province où la cause d'action a pris naissance ou où elle est entendue, ce n'est pas le cas ici vu l'existence du paragraphe 172(2) des Règles. Ce paragraphe, ainsi que l'article 1733 des Règles de la Cour fédérale, disposition correspondante, n'ont pas été interprétés de manière à requérir en premier lieu une action en désaveu du procureur ad litem (Sarafimoski v. Canada (Min. of Employment & Immigration)) (1990), 12 Imm. L.R. (2d) 5 (C.A.F.).

[14]          Il ressort de cette demande de rétractation de jugements qu'elle est faite pour un motif extrêmement grave, c'est-à-dire que l'avocat des requérants aurait induit la Cour en erreur quand il l'a informée qu'il avait reçu le mandat de ne faire aucune représentation à la Cour, aux jours prévus pour l'audition de ces appels. En fait, ce qui est demandé à la Cour est de rejeter la véracité du mandat invoqué par les avocats des appelants et d'accepter la teneur du mandat allégué par monsieur Cigana.

[15]          Le rôle de l'avocat est un rôle essentiel dans la bonne administration de la justice. À cet égard, je cite Lord Upjohn dans l'arrêt Rondel v. Worsley, 1 [1969] A.C. 191 (H.L.), à la page 282 :

[TRADUCTION]

[...] l'avocat [...] joue un rôle essentiel dans la bonne administration de la justice. Je doute que quiconque n'a pas acquis d'expérience dans le domaine judiciaire puisse apprécier jusqu'à quel point les tribunaux s'en remettent à l'intégrité et à l'honnêteté des avocats dans la présentation d'un litige.

[16]          Mon analyse de la preuve m'amène à conclure que le requérant n'a pas donné à ses avocats, en temps opportun, le mandat de procéder à l'audition des 16, 17 et 18 février 1998, tel qu'affirmé au paragraphe 14 de son affidavit et à l'audience. En fait, il ressort de la narration des événements que la décision de ne pas procéder avait déjà été prise lors de la rencontre de décembre 1997 ou de janvier 1998, quand l'offre de règlement a été faite à l'intimée. La preuve révèle que monsieur Cigana ne voulait pas procéder ou qu'il n'a pas pris les moyens pour procéder. Ainsi il ne voulait pas que ses avocats rencontrent les témoins utiles à la compréhension de sa cause et à la présentation de la preuve lors de l'audience. Une cause qui demande trois jours d'audition se prépare à plus qu'à quelques jours d'intervalle. Il savait que sa cause devait procéder le 16 février et que trois jours du temps de la Cour avaient été réservés pour cette audition. Il devait donc s'assurer auprès de ses avocats ou d'autres avocats qu'ils procéderaient à cette audition. Monsieur Cigana n'est pas dépourvu d'intelligence ni de moyens. Ainsi, il a bien su mandater un avocat pour l'institution de la présente requête. Il n'y a rien dans la preuve qui indique que monsieur Cigana ait été empêché d'agir en temps approprié.

[17]          De plus, selon son affidavit, monsieur Cigana a rencontré son avocat actuel le 12 février 1998. Celui-ci n'a pas communiqué avec l'avocat Côté pour l'informer qu'il prenait la relève et qu'il avait reçu le mandat de procéder le 16 février. Toujours selon son affidavit, monsieur Cigana aurait informé son avocat actuel le 13 février de la situation dont il se plaint et lui aurait demandé d'agir. Or, l'avocat actuel n'a d'aucune façon communiqué avec la Cour pour immédiatement l'informer que les avocats n'avaient pas exprimé l'intention des appelants et que l'intention était de procéder le 16 février.

[18]          L'avocat des requérants n'invoque pas la fraude mais une mauvaise compréhension du mandat. Je suis convaincue d'une part que les avocats ont exprimé correctement leur mandat à la Cour et que d'autre part, monsieur Cigana n'a pas agi avec la diligence requise dans l'exercice de ses droits.

[19]          La requête est rejetée avec frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de novembre, 1998.

"Louise Lamarre Proulx"

J.C.C.I.

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