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Date: 20010312

Dossier: 2000-754-IT-I

ENTRE :

JOHN O'DONOVAN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

Le juge Beaubier, C.C.I.

[1]            Le présent appel, formé conformément à la procédure informelle, a été entendu à London (Ontario), le 8 mars 2001. L'appelant a été le seul témoin.

[2]            Les paragraphes 6 à 12 inclusivement de la réponse à l'avis d'appel sont ainsi rédigés :

                                [TRADUCTION]

6.              Dans le calcul de son revenu de l'année d'imposition 1998, l'appelant a déclaré un revenu autre de 15 465,48 $ provenant de la Compagnie d'assurance Standard Life.

7.              Le ministre du Revenu national (le " ministre ") a établi, au moyen d'un avis de cotisation daté du 25 mai 1999, une cotisation à l'égard de l'appelant pour l'année d'imposition 1998 en se fondant sur la déclaration de revenus telle qu'elle avait été produite par ce dernier.

8. Par la suite, le ministre a établi une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant pour l'année d'imposition 1998, dont l'avis est daté du 12 juillet 1999, accordant le montant de 3 030 $ à titre de frais juridiques (les " frais "). Plus tard, le ministre a établi à l'égard de l'appelant une nouvelle cotisation, dont l'avis est daté du 26 juillet 1999, rejetant le montant des frais.

9. Pour ainsi établir une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant, le ministre s'est fondé sur les hypothèses de fait suivantes :

a)              les faits admis ou énoncés précédemment;

b)             l'appelant a engagé les frais juridiques en vue d'obtenir des prestations prévues par un " régime d'assurance-salaire ", plus précisément en vue de faire valoir son droit de recevoir des prestations de l'assureur;

c)              les frais n'ont pas été engagés en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien, mais constituaient des frais personnels ou de subsistance de l'appelant.

B.           QUESTION EN LITIGE

10.            La question est celle de savoir si les frais que l'appelant a engagés en vue de toucher les prestations prévues par un régime d'assurance-salaire sont déductibles.

C.           DISPOSITIONS LÉGISLATIVES, MOTIFS INVOQUÉS ET REDRESSMENT DEMANDÉ

11.            Il se fonde sur les paragraphes 248(1) et 8(2) et les alinéas 8(1)b) et 6(1)f) de la Loi, telle qu'elle a été modifiée pour l'année d'imposition 1998.

12.            Il soutient que les frais rejetés n'ont pas été engagés pour recouvrer le traitement ou le salaire qui lui est dû par son employeur ou ancien employeur ou pour établir un droit à ceux-ci, ainsi que l'exigent l'alinéa 8(1)b) et le paragraphe 8(2) de la Loi.

[3]            M. O'Donovan a indiqué dans son témoignage que le payeur en question était la " Standard Life ", qui avait conclu un contrat avec l'employeur Carleton Cards Limited (" CCL ").

[4]            M. O'Donovan était un employé de CCL, qui avait conclu un contrat d'assurance avec la Standard Life. CCL a prélevé une cotisation sur le salaire de M. O'Donovan au titre de ce contrat. Ce dernier a subi une crise cardiaque et a été sans travail pendant six années. La Standard Life était, aux termes de son contrat avec CCL, tenue de verser à M. O'Donovan 75 p. 100 du salaire que lui payait CCL. Cette dernière a déclaré un salaire inférieur à la Standard Life. Après de nombreux échanges de lettres, M. O'Donovan a poursuivi CCL pour cette proportion de 75 p. 100. La Standard Life a versé 15 465,40 $ à M. O'Donovan au titre du règlement de la poursuite, après que CCL eut corrigé sa déclaration à la Standard Life. La déduction des frais juridiques de 3 030,35 $ ayant été refusée, M. O'Donovan a interjeté appel de cette décision.

[5]            La pièce R-1, la formule T4A envoyée par la Standard Life à M. O'Donovan concernant le montant de 15 465,48 $, décrit le paiement comme une [TRADUCTION] " prestation de revenu ". Ainsi, selon la preuve, M. O'Donovan a intenté une poursuite contre CCL pour que soit déterminé le montant exact du paiement, ce qui a entraîné le paiement de ce montant exact. Toutefois, c'est la Standard Life qui a effectué le paiement à M. O'Donovan.

[6]            Ainsi, le montant payé n'était pas un revenu tiré d'une charge ou d'un emploi comme le prévoit le paragraphe 8(2). Les frais juridiques n'ont pas non plus été engagés pour le recouvrement du traitement ou du salaire dû à M. O'Donovan par CCL, ainsi que l'exige l'alinéa 8(1)b).

[7]            Au contraire, M. O'Donovan a payé les frais juridiques en cause afin de recouvrer un revenu aux termes d'une réclamation de revenu fondée sur le programme d'assurance de son employeur, pour lequel M. O'Donovan avait payé au moins une partie de la prime.

[8]            Le même principe a été examiné par la Cour suprême dans l'affaire Gladys Evans v. Minister of National Revenue, 60 DTC 1047. Le juge Cartwright, s'exprimant au nom de la majorité, a déclaré ceci :

                                [TRADUCTION]

Origine du droit au revenu

En l'espèce, comme on l'a déjà fait remarquer, l'appelante a, le 20 septembre 1953, acquis le droit, et ce, pour le reste de sa vie, de se voir verser le revenu découlant de sa part d'un tiers. Le fiduciaire conserve en tout temps la propriété en common law de cette part, dont le capital sera payé au décès de l'appelante à ceux qui y ont droit en vertu du testament de Thomas Alexander Russell. L'appelante ne peut en aucune circonstance avoir droit à une part de ce capital, son seul droit étant d'exiger que le fiduciaire paye le revenu découlant de sa part. Il s'agit d'un droit exécutoire en equity, et tout ce que l'appelante recevra en vertu de ce droit sera imposable. Le paiement des frais juridiques en cause n'a pas donné naissance à ce droit ni à tout bien ou avantage. Son droit de recevoir le revenu provient non pas du jugement de la Cour, mais de l'effet combiné des testaments de Thomas Alexander Russell et de John Alexander Russell. Le fiduciaire a entretenu des doutes (à tort, comme il s'est avéré), sans doute engendrés par les demandes de Mme Andersen, pour ce qui est de savoir s'il devait payer à l'appelante le revenu auquel elle avait droit, mais il a décidé de ne rien payer jusqu'à ce que la Cour tranche la question.

Objet des frais judiciaires

À mon avis, la forme sous laquelle l'affaire a été soumise à la Cour n'a pas d'importance; l'appelante a engagé ces frais juridiques dans le but d'obtenir paiement d'un revenu; il s'agissait de dépenses faites en vue de toucher un revenu auquel elle avait droit, mais dont elle n'aurait pu obtenir paiement autrement. Dans cette perspective, on peut difficilement douter que les dépenses fussent déductibles du revenu imposable de l'appelante. Voilà, à mon avis, la conclusion à tirer, peu importe que Mme Andersen ait prétendu à tort que l'appelante n'avait droit à aucun revenu. [...]

À mon avis, dans les circonstances de la présente espèce, deux questions se posent, et, selon les faits admis, il convient de répondre à toutes deux par l'affirmative : (i) la réclamation à l'égard de laquelle l'appelante a engagé des dépenses était-elle une réclamation en vue de toucher un revenu auquel elle avait droit? (ii) les frais juridiques ont-ils été à juste titre engagés pour obtenir le paiement de ce revenu? [...]

[9]            On doit répondre par l'affirmative aux questions du juge Cartwright dans la cause de M. O'Donovan également.

[10]          Pour ces motifs, l'appel est admis.

[11]          L'appelant a dû se déplacer de Stratford à London afin de faire instruire son appel. Il se voit adjuger des dépens de 100 $ au titre du remboursement des dépenses qu'il a lui-même engagées (notamment des frais d'affranchissement et des frais de reproduction).

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de mars 2001.

" D. W. Beaubier "

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 6e jour de septembre 2001.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Philippe Ducharme, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2000-754(IT)I

ENTRE :

JOHN O'DONOVAN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 8 mars 2001 à London (Ontario) par

l'honorable juge D. W. Beaubier

Comparutions

Pour l'appelant :                         l'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :                 Me Carole Benoit

JUGEMENT

          L'appel de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1998 est admis, et la nouvelle cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les motifs du jugement ci-joints.

          Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de mars 2001.

" D. W. Beaubier "

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 6e jour de septembre 2001.

Philippe Ducharme, réviseur


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